vendredi 29 juillet 2011

Pôles eucharistiques

Quelques excuses tout d'abord pour mon peu d'assiduité ces derniers temps. vacances obligent. Disons que j'essaie de finir quelques travaux en cours et que je leur sacrifie metablog...

Mais ces semi-retraites vacancières ont du bon. Elles permettent aux poissons rouges que nous sommes de changer de temps en temps de bocal. Maman me met sous les yeux un article de L'Hebdomadaire d'Armor au titre évocateur : "Créer des pôles eucharistiques"

La Vox populi a parfois des naïvetés de saint Jean Bouche d'or... Le terme "pôle eucharistique" vous a un côté années 70 très caractérisé, genre technocratie ecclésastique ; mais en soi l'idée que l'eucharistie, centre et sommet de la vie chrétienne comme dit Vatican II quelque part, puisse constituer un pôle de notre vie... Je ne suis pas contre. Ce qui m'inquiète dans cette image du pôle, c'est que les pôles vont toujours par deux (au moins) : quel est l'autre ?

Il faut toujours revenir à cette idée qui a converti Pascal : Dieu est le centre. Et de centre, il n'y a qu'un seul. Est-ce totalitaire ? Non puisque Dieu est infini. Infiniment large, comme la Tradition chrétienne qui le représente à nos esprits. Cela commencerait à devenir totalitaire si, à la place de Dieu, on met au centre une appartenance à tel troupeau ou à telle fraction de tel troupeau...

Mais peu importe l'expression "pôle". Que signifie-t-elle dans l'article de l'Hebdomadaire d'Armor dont je vous entretiens ?

Je cite : "Il est important que les chrétiens du diocèse soient reliés entre eux et ne soient pas isolés dans leur communautés chrétiennes locales. A cet effet, le diocèse avance vers les "pôles eucharistiques", afin que les chrétiens, au delà des limites de leurs communes se rassemblent. De là ils vont vers des personnes dans leur commune en accomplissant un service d'église".

Qu'est-ce que cela signifie ? Que les paroisses sont désormais une unité de mesure trop restreintes, même les paroisses relookés et comportant déjà chacune plusieurs clochers. "Le diocèse va vers des pôles eucharistiques". Cela veut dire qu'il faut créer des structures plus larges, demandant toujours moins de prêtres et mettant en valeur les laïcs qui, eux, "vont vers des personnes dans leur paroisse en accomplissant un service d'église". Ces propos tenus en présence de l'évêque du diocèse semblent bien engager une politique d'ensemble...

C'est Bernanos qui voulait écrire un livre sous le titre La paroisse morte (devenu ensuite Monsieur Ouine, c'est-à-dire Monsieur Oui-non)... Il avait raison : les paroisses osnt mortes. On ne raisonne plus en termes de paroisses aujourd'hui dans les diocèses mais en termes de pôles eucharistiques...

Cela permet à l'Institution de reculer le moment où il faudra avouer la crise du personnel sacerdotal et faire appel non plus seulement à ces prêtres africains que l'on embauche en CDD de trois ans renouvelables ("ce qui est bien me disait un évêque, c'est qu'ils partent"), mais à ces communautés, traditionalistes ou simplement traditionnelles qui représentent pour trop de prêtre de la génération 70 des ennemis...

Un curé breton me disait, il y a une paire d'année avec un rien d'agressivité dans la voix : "- Notre nouvel évêque, il est comme toi... - Ah bon ? - Oui, il vient d'une communauté". Il s'agissait de la Communauté Notre Dame de Vie, qui n'est pas traditionaliste. Mais le seul fait que son évêque ne provienne pas des structures diocésaines étaient déjà, pour ce prêtre, le signal de la suspicion et qui sait ? le signe honni du... traditionalisme !

On peut transposer cette petite histoire à notre sujet. Mieux vaut multiplier les pôles eucharistique plutôt que de faire appel, pour des paroisses vivantes, à des prêtres, qui, faute suprême, viennent des communautés.

La fraternité chrétienne a encore des progrès à faire !

jeudi 28 juillet 2011

L'abbé Alexandre Berche serait très heureux de recevoir des visites

L'abbé Alexandre Berche est toujours en rééducation à l'Hôpital de Garches, et serait très heureux de recevoir des visites (du lundi au vendredi : de 16h30 à 20h00 ; le samedi (jusqu'au 25 août) et le dimanche : de 14h à 20h (mais à partir du 27 août, les visites du samedi reprendront de 17h à 20h). Voici ses coordonnées :

Hôpital Raymond Poincaré, 104 boulevard Raymond Poincaré, 92380 Garches (Pavillon Netter, porte 416, 1er étage, chambre 111). L'abbé suit un régime, il n'est donc pas adéquat de lui apporter diverses douceurs, mais il appréciera quelques paquets de cigarettes (Malborough Light). -- On peut appeler l'abbé au 06.12.61.12.73 (avant 11h ou après 16h30).

Métro + bus : Prendre la ligne n° 10 jusqu'au Pont de Saint-Cloud. Puis, le bus n° 460 jusqu'à l'arrêt "Hôpital de Garches" (face à l'hôpital).

Ou depuis la Gare Saint-Lazare : Prendre la direction Saint-Nom-la-Bretêche (toujours à gauche quand on est face aux quais) et descendre à Garches-Marne-la-Coquette (20 min. de train environ). En face de la gare, arrêt des bus 360 ou 460 qui mènent à l'hôpital en 5 min.

Ou encore, le bus 360 depuis l'Arche de La Défense jusqu'à l'Hôpital de Garches (env. 40 min).

Horaires d'Eté du bus 460 du Pont de Saint-Cloud à "Hôpital de Garches" (env. 15 min) :
  • du Lundi au Vendredi : 16H31, 17H01, 17H30, 18H01, 18H31 ; 19H01...
  • le Samedi : 13H45, 14H10, 14H55 ; 15H35, 16H19 ; 17H00, 17H39, 18H20, 18H59.
  • le Dimanche et jours fériés : 14H10 ; 17H20 ; 20H30.
Horaires du bus 460 de l'"Hôpital de Garches" au Pont de Saint-Cloud :
  • du Lundi au Vendredi : 17H00,
    17H31 ; 18H01, 18H31 ; 19H01, 19H31, 20H01.
    le Samedi : 14H23, 15H08, 15H47, 16H30, 17H07, 17H48, 18H33, 19H08, 19H47.
    le Dimanche : 13H42, 16H52, 20H02.

mardi 19 juillet 2011

Du curé à bouffer? un vieux plat rechauffé!

Le problème avec le blasphème: pour le dénoncer il faut l’énoncer, le plus souvent. Prenez l’oeuvre d’art récemment exposée à Avignon: la montrer, c’était tout dire. Mais la montrer, c’était aussi reproduire cette dégueulasserie – Pas question. D’où le dilemme, face aux attaques qui se multiplient. Si l’on ne dit rien, on est complice? et si l’on dit, on fait exister. Protester, s’énerver? c’est rentrer dans le jeu du provocateur – et y occuper très exactement la place qu’il nous réserve. Non merci.

Aussi n’est-ce pas ma réaction que je vous livre aujourd’hui, mais celles des lecteurs du quotidien «Libération». C’est que nous sommes dans ce que nos voisins allemands nomment le Sommerloch – ce trou estival marqué par une actualité pauvre, des rédactions désertées, et des lecteurs qui de toute manière s’en fichent. Cependant: il faut bien continuer à produire un contenu, ne serait-ce que pour mettre du liant entre deux pages de pub. Alors deux journalistes de Libération ont écrit un petit texte (« Tous en Cène »), sorte de divagation sur Jésus, sur un ton qui emprunte au Petit Nicolas plus sûrement qu’aux Monty Python.

Pierre Desproges disait que l’on peut rire de tout mais pas avec tout le monde. Pour ma part je crois surtout qu’on ne peut rire que de ce qui est drôle – et que ce n’est pas ici le cas. Par contre les réactions des lecteurs sont intéressantes – je vous les livre. Il y en a trente-cinq à cette heure. Je ne prends pas en compte ceux des «libénautes» qui n'ont qu’un ou deux commentaires à leur actif – ils se sont trop évidemment inscrits pour l’occasion et ne sont pas représentatifs. Je ne garde que les habitués, certains en sont à leur 193e, 255e, voire 2946e commentaire – voici ce qu’ils écrivent :

(ils écrivent, en gros, que c’est être rebelle à bon compte que de s’en prendre à l’Eglise catholique en 2011)
  • «c'est trop facile donc quel manque de courage»
  • «beaucoup de méchanceté gratuite contre des gens qui ne vous menaceront pas, ne vous feront rien si ce n'est quelques courriers de protestation»
  • «Chacun ses idoles et les plus récentes auront toujours leurs défenseurs qui se croiront rebelles en crachant sur la tombe des idoles presque déjà mortes»
  • «les hypocrites et les lâches qui se donnent des airs d'insolence me donnent franchement envie de gerber»
  • «ça y est, [les auteurs] vont pouvoir aller bruncher tranquille, ils ont fait leur petit exercice de résistance citoyenne et d'insoumis en tirant sur l'ambulance catho?»
  • «Evidemment ça sent un peu le recuit mais bon, pour se faire la main et séduire les bobos en mal de sensations fortes pourquoi pas.»
  • «La lecture de certains articles de Libé est salutaire, mais celle-là est un exemple de fausse "rebel attitude" qui n'est même pas drôle.»
  • «deux pauvres tâches qui se sentent pousser des couilles, qui veulent se donner des airs de rebelles affranchis de la morale chrétienne»
  • «Ca m'énerve de plus en plus ces simili subversifs qui tapent encore sur l'Eglise, sur l'armée et sur la Nation, alors que ça fait 50 ans que toutes ces institutions ont perdus tout pouvoir...»
(…et aussi que le vrai courage serait de taper ailleurs)
  • «Le ton est beaucoup moins moqueur quand il s'agissait de faire un cahier de cinq pages célébrant le début du ramadan l'année dernière. Il doit y avoir des religions au dessus des autres.»
  • «Mais là où le spectacle gagnerait en grandeur et en vrai courage ce serait en faisant la même chose avec Mahomet.»
  • «Ne critiquer que le catholicisme parce que l'on sait très bien ce qui arrive dans le cas du judaïsme (procès ou cassage de gueule par la LDJ) ou de l'islam (menaces de mort parfois exécutée), souligne le manque de courage des auteurs.»
  • «Oseriez vous le même spectacle sur la religion juive et sur l’islam, chiche!»
  • «Nul doute que si Gérard Lefort et Mathieu Lindon ne se seraient pas risqués à une telle prose avec pour sujet les religions juive (ils seraient déjà en procès) ou musulmane (ils seraient probablement en mesure de vérifier l'existence de Dieu).»
(… ils écrivent, enfin, que le pamphlet est un genre qui nécessite du talent)
  • «Si le potache peut se permettre la vulgarité, il ne peut pas se permettre la médiocrité...»
  • «et en plus c’est mal écrit...»
  • «un ramassis de vulgarités qu'aurait renié Hara-Kiri»
  • «N'est pas Cavanna qui veut...»

Je reprends : de manière unanime, les libénautes écrivent que c’est être rebelle à trop bon compte que de s’en prendre aux cathos aujourd’hui, que le courage serait de viser plus sensible. Plusieurs rappellent leur scepticisme, leur athéisme. Tout de même, encore bouffer du curé? nous sommes en 2011, ils n’apprécient pas qu’on leur ressorte de vieux plats réchauffés, nappés d’une vieille haine recuite.

vendredi 15 juillet 2011

JMJ : les jeunes du monde consacrés au Sacré coeur

D'après les échos, les bruits que l'on peut recueillir en ce moment sur l'organisation des JMJ madrilènes, le pape souhaite consacrer la jeunesse du monde au Sacré-Coeur de Jésus et chaque jeune qui le souhaite pourra prendre cette consécration pour lui-même et la faire, en union avec le pape.

Pas de quoi casser trois pattes à un canard direz-vous. J'ai recensé deux types d'arguments hostiles. Le premier sur ce que signifie la dévotion au Sacré Coeur : "Je ne voudrais pas que de près ou de loin on évoque un muscle", le muscle cardiaque, me glisse une lectrice de ce Blog. Le second sur la notion de consécration : "Peut-on consacrer des gens contre leur gré ?", avec l'exemple de la consécration de la Russie au Coeiur Immaculé de Marie. Et cette question : "On est obligé de croire à Fatima ?", car c'est à Fatima que la Vierge a fait cette demande.

Comment répondre à la première ? Il est vrai que l'iconographie du Sacré Coeur est catastrophique, même lorsque, subissant une abstration vertigineuse, elle devient un coeur, comme le coeur amoureux que l'on représente en graffiti (Je pense, ce disant à une "oeuvre" sponsorisée par Mgr Rouet, l'évêque sortant de Poitiers dont on connaît le goût affirmé pour l'art contemporain). J'avoue que les Christs au coeur sanguinolents ne me font d'ailleurs pas meilleur effet ! Mais cette laideur graphique risque de nous faire oublier la beauté du culte du Sacré-Coeur. De quoi s'agit-il ?

Il s'agit du coeur humain de Notre Seigneur Jésus Christ. Non pas le coeur de chair, non pas le muscle, qui n'est ici qu'un symbole, mais le coeur au sens de Rodrigue et de Corneille : le coeur à l'ouvrage, l'élan le plus intime, qui n'est pas un décret de notre raison mais une attitude de notre intelligence se saisissant elle-même comme volonté et comme volonté de l'Absolu, c'est-à-dire aussi comme "volonté absolue". Henri Suso et Jean Tauler, au XVème siècle, sur les bords du Rhin, parlait à ce sujet de "vouloir foncier".

Vénérant le sacré Coeur, nous adorons la décision irrévocable de Jésus qui a voulu mourrir pour nous "endurcissant sa face (Luc) pour monter à Jérusalem.

Et face au coeur de Jésus, nous réfléchissons à notre propre coeur. Qu'est-il ? Un bourbier ? un bâton de guimauve ? Un coeur d’artichaut ? Ou bien avons nous à la place du coeur un Code civil (ou un Code de droit canon) ? Ou encore une calculatrice performante ? "C'est le coeur qui sent Dieu, non la raison". Et s'il ne sent pas Dieu, s'il ne se porte pas immédiatement à l'Infini dans un élan radical, que devient-il ? L'amour humain peut parfois être une image de cet infini dont notre coeur a besoin. Ainsi l'amour est-il comme un commencement de salut pour les âmes bien nées. Mais s'il n'est pas là, ou bien s'il est là de manière caricaturale, que reste-t-il de nous-même ? Un consommateur qui "profite" de toutes les bonnes fortunes de l'existence et ne sait pas faire face à la mauvaise.

Le coeur... Ce sans quoi on ne peut pas vivre, au physique et au moral. Notre coeur c'est notre jeunesse intérieure, c'est le gage d'un constant renouvellement, d'un élan sans cesse réalimenté. Il faut donner aux jeunes du monde l'image de la jeunesse du coeur de Jésus et il faut leur dire que c'est Dieu qui "réjouit" qui suscite toujours de nouveau notre jeunesse : renovabitur ut aquilae juventus tua.

Deuxième objection : peut-on consacrer des jeunes sans leur adhésion ? Je ne dis pas que cette consécration suffit. le salut est toujours un acte personnel. Mais je crois que ce faisant l'Eglise fait simplement son bouleau ; elle offre à Dieu la jeunesse du monde, dans un gigantesque offertoire. Qu'est-ce qui lui permet une telle audace ? Elle est catholique, comme le constatait déjà fièrement saint Ignace d'Antioche au tout début du IIème siècle. En français cela veut dire qu'elle est "universelle". Elle est l'Eglise universelle. Elle doit donc s'occuper non pas seulement de sa jeunesse à elle, de la jeunesse chrétienne ou de la jeunesse qui est de confession catholique, mais de la jeunesse du monde. En ces temps de mondialisation, il serait opportun de se souvenir que la catholicité de l'Eglise est la seule mondialisation qui vaille : mondialisation du salut... Mondialisation du coeur.

Suivre les programmes sans enseigner le "gender": fastoche!

Tugdual Derville n’est pas un extrémiste et ses articles de France Catholique ne sont pas des brûlots. Mais on sent sa colère quand il écrit qu’à nous parents «l’Etat ne nous facilite pas la tâche», que «l’Etat nous met des bâtons dans les roues». C’est que «l’Etat», par le biais des programmes de biologie de Première (séries L et ES), imposerait le «Gender à l’Ecole». En conséquence de quoi : «Pour décrocher leur bac, [nos] enfants devront… vanter la masturbation générale». Bigre!

Tugdual a raison de s’indigner et de tirer à vue. Encore faut-il viser la bonne cible. Or les manuels sont une chose, les programmes en sont une autre. Je m’explique: les livres sont produits par des éditeurs (commerciaux) qui rémunèrent des auteurs pour les écrire – ils ne sont pas officiels, ni même estampillés par le Ministère. Je l’explique à un ami qui m’avoue sa surprise: puisque le livre est fourni par l’établissement, il le pensait officiel. Eh bien non! Les manuels ne sont pas officiels, pas plus que la craie du tableau ou que les crayons distribués aux enfants. Il n'y a pas d'imprimatur ni de nihil obstat républicains.

Ce qui est officiel, ce qui relève de l’Etat, ce sont les programmes. Niveau par niveau, ils indiquent les notions et les contenus, avec quelles limites, et les compétences exigibles. Dans le cas qui nous (pré)occupe, inutile de reproduire ici les manuels – ce n’est pas mon sujet. Voyons les programmes – je cite la notion générale: «La mise en place des structures et de la fonctionnalité des appareils sexuels se réalise sur une longue période qui va de la fécondation à la puberté, en passant par le développement embryonnaire et foetal.» Voici la notion, citée in extenso, avec comme ‘limites’ que ni la «protéine TDF» ni le «gène SRY» ne sont à connaître (ouf!). Jusque là, rien qui fâche.

Voyons les «compétences exigibles» qui accompagnent la notion: «Expliquer … les étapes de différenciation de l’appareil sexuel au cours du développement embryonnaire». Et aussi : «Différencier, à partir de la confrontation de données biologiques et de représentations sociales ce qui relève : de l’identité sexuelle [d’une part, et] de l’orientation sexuelle [d’autre part] qui relève de l’intimité des personnes.» C’est cela que l’on attend d’un lycéen, et pas de ressortir telle page de tel manuel.

On m’objectera que sans être officiels, les éditeurs sont très proches du Ministère de l’Education Nationale. Certes – mais seuls les programmes ont force de loi. Et les enseignants sont libres de leurs supports. Rédiger un cours complet est un travail considérable mais on peut procéder par patchs: Achetez un manuel de SVT (Sciences et Vie de la Terre), utilisez les pages qui ne vous posent pas de problème (rayonnement solaire et photosynthèse, reproduction du cerisier, etc). Écartez celles qui vous chagrinent (‘Devenir homme ou femme’ par exemple) et rédigez à la place un support qui vous convienne. Idéalement, mutualisez votre travail.

Ayez les programmes sous les yeux. Justement, ils vous demandent de privilégier les «données biologiques» (hormones, appareils reproductifs, etc) dont relève l’«identité sexuelle» (être un homme - ou être une femme). Pour ce qui est de l’«orientation sexuelle», les programmes viennent à votre secours en spécifiant qu’elle relève de l’«intimité des personnes». Vous n’avez pas à vous appesantir, vous êtes prof de bio et pas psy. Et puis c’est tout.

(il y a aussi d’autres solutions que j’ai lues sur www : quitter le système scolaire français, invoquer une objection de conscience, considérer une bonne fois pour toutes que tout est foutu,... – faites votre choix)

Mise à jour du 16 juillet: je réponds ci-dessous (voir les commentaires) à quelques objections et remarques.

jeudi 14 juillet 2011

Nous allons vers de joyeux mic-macs.

une passoire translucide sur la tête:
guère plus idiot que les autres gris-gris
Niko Alm est pastafarian. N'en cherchez pas d'autres: Il est le seul à se revendiquer de cette ‘religion', dont le nom valise emprunte aux ‘rastafarians’ et à l’italien ‘pasta’. Dogme unique: le refus de tout dogme. Obligation unique: porter une passoire sur la tête... Niko est dans le grotesque, ce qu’il assume sans complexe. C’est que dans son pays, l’Autriche, la loi demande pour les permis de conduire une photo tête nue – mais autorise les couvre-chefs religieux. Alors Niko (athée mais facétieux) a demandé à bénéficier de l’exception pour son «Eglise du Spaghetti Volant». Après trois ans de procédure (dont une expertise psychiatrique), les autorités autrichiennes ont été contraintes d’accepter pour son permis une photo avec passoire (translucide).

Cette histoire nous parle de notre avenir. A partir du moment où il n’y a plus de religion d’Etat, et où l’on voudrait les traiter toutes de la même manière… à partir du moment où l’on refuse au catholicisme la primauté d’honneur que justifierait notre histoire… et où s’installent ici les croyances les plus étranges (sikhs, musulmans, évangélistes, hindous, animistes, etc)… à partir du moment où les pouvoirs publics doivent bien prendre en compte les manifestations sociales de ces cultes: Nous allons vers de joyeux mic-macs.

A y bien regarder, le ‘pastafarianisme’ de Niko Alm n’est pas plus loufoque que ces histoires de dieu-éléphant à quatre bras, d’esprit des eaux, de djinns des sables ou d’interdits alimentaires. Au nom de quoi refuser telle pratique et autoriser telle autre? C’est qu’il n’y a plus non plus d’ordre moral immanent, mais une éthique qui suit les variations de la société. La ‘dignité de la femme’ sert par exemple à combattre les tenues légères dans les années 1960 (Le gendarme de St Tropez), puis la burqa et autres voiles dans les années 2010. Comprenne qui pourra : On autorise la circoncision, c’est à dire la mutilation chaque année de dizaines de milliers de garçons parfaitement sains. Mais on condamne la polygamie, alors qu’entre adultes consentants, tout est réputé licite – Au nom de quoi ?

Bricolages hasardeux et montages improbables: Il faudra bien un jour que la France se redonne (ou pas?) une base morale.

samedi 9 juillet 2011

La route des oiseaux

Pour moi c'est la fin d'une petite semaine au bord de la Mer. Il pleut ? Qu'importe ! Vive la Bretagne, toujours vivifiante, c'est-à-dire tonique. En Bretagne il fait beau plusieurs fois par jour. Je plains de tout mon coeur ceux d'entre vous qui souffrent de la chaleur sur les "plages" méditerranéennes, alors qu'ils pourraient se refaire une santé au vent de l'Atlantique. Je ne suis pas objectif ? Peut-être. Nos récréations n'ont rien de scientifique ni d'objectif ; elles doivent être essentiellement subjectives, personnelles. Surtout foin du mimétisme moutonnier, qui caractérise trop souvent les Français en vacances. Chacun les siennes ! Je vous donne donc mes recettes, quitte à ce que vous me laissiez les vôtres, dans le dialogue qui suit.

Je ne voulais pas quitter la Presqu'île de Guérande, sans avoir fait une fois "la route des oiseaux" qui est aussi, entre La Turballe, Saillé, le Bourg de Batz (aujourd'hui Batz sur Mer) et Guérande, la route des Marais salants. On y constate d'abord l'éclatante santé dont jouissent ces Marais, où travaillent, avec les vieux paludiers, quantité de jeunes, heureux de vivre au rythme de la nature, entre l'eau et le ciel. La mode des produits bio a sauvé la production artisanale du sel de Guérande. Mais il n'y a pas que le bio ! La fleur de sel (mince couche de sel fin qui se forme à la surface de l'eau par temps chaud) est une merveille culinaire : un simple steak à la fleur de sel devient un must. Une tomate se met à craquer sous la dent. Vous ne connaissez pas ? Essayez ! Rien à voir ni avec les soi-disant sels de mer sous emballage, ni même avec le gros sel. C'est juste spécial. Simple et sublime.

Mais ce qui m'attire par dessus tout sur cette route, ce sont les oiseaux en tout genre qui utilisent le biotope extraordinaire qu'est le Marais, ses animalcules, son plancton, ses micro-éléments en tout genre pour se nourrir. Quelle hymne à la création ! On a l'impression que le bon Dieu a un modèle, prenons l'échassier par exemple, du héron cendré au chevalier gambette, de l'aigrette à la grèbe, huppée ou pas : l'échassier ne se salit pas les plumes mais il est sans cesse dans la vase, plus ou moins près de l'eau. On a l'impression, comme le pensait déjà Platon, que Dieu a une idée et qu'il la décline indéfiniment en utilisant toutes sortes de variantes, dans toutes les gammes possibles. C'est quelque chose d'extraordinaire ! Moi qui ne connaît rien aux oiseaux (mais rien !), je suis sensible à cette ingéniosité jamais prise en défaut, et je ne vois pas comment on pourrait ne pas l'être. Il suffit de regarder !

Les preuves de Dieu, ce n'est pas un raisonnement, sauf lorsque l'austère Thomas d'Aquin utilise les concepts aristotéliciens ou néo-platoniciens. Au commencement de la preuve, il y a le regard. Savoir regarder et ne pas se contenter de voir. Reconnaître que tout ressemble à tout et que rien ne ressemble à rien.

Cela marche même sur une seule vue, sur un seul regard, sur un seul oiseau. Un même oiseau est indéfiniment différent de lui-même. Autre sa beauté (son élégance) lorsqu'il vole, autre lorsqu'il se pose, autre lorsqu'il pêche etc. C'est magique ? Non, c'est divin. Qu'est-ce que Dieu ? L'autre. Non pas d'une altérité méprisante, mais au contraire d'une altérité qui ressemble à tout, d'une altérité indéfiniment accessible, à portée de main. Ou même comme l'a dit une fois Bernanos, "à la merci des passants". Dieu est la semblance de toutes les ressemblances. Selon la formule aristotélicienne de l’analogie, il est "autre dans les choses autres" et toujours identique à lui-même. Infiniment simple et toujours un autre.

Quel spectacle au Ciel, lorsque l'on accepte de regarder celui qui nous est offert sur la terre ! Oui, quel spectacle sur la route des oiseaux ! On vous klaxonne ? Soyez patient pour deux, cela en vaut la peine.

mercredi 6 juillet 2011

La vérité n'était pas derrière la ligne Maginot

Qu'est-ce que la vérité ? C'est sans doute la seule question au monde et c'est Pilate qui la pose, avant de condamner le Christ à être flagellé, alors qu'il sait qu'il est innocent. Pilate aura une postérité spirituelle nombreuse de gens qui savent parfaitement ce qu'il en est de la vérité, autant qu'elle leur est accessible, autant qu'elle se manifeste dans leur vie, mais qui font semblant de se réfugier derrière le scepticisme pour s'autoriser les pires saloperies.

D'après saint Thomas (III CG 50) la vérité engendre le seul désir qui rende la vie digne d'être vécue.

Il y a les mille désirs qui nous agitent : désir sexuel, désir mimétique, désir de sécurité... Ces désirs excitent et disparaissent, une fois satisfaits, pour renaître autrement, plus exigeants et plus ingrats encore. Spirale du désir !

Le seul désir qui nous remplisse vraiment, le vrai désir, c'est le désir de vérité. celui là ne s'éteint pas : il augmente au fur et à mesure qu'on le satisfait. Il nous sort de ce que saint Paul appelle "la vanité" (Rom. 8), c'est-à-dire la spirale... l'addiction.

Ce qui m'émeut chez Pascal, c'est ce désir de vérité, qui flambe dans toute son existence. Pour lui, il y a une vérité de la grâce efficace : c'est le salut apporté aux hommes par Jésus Christ. Il y a une vérité de la "délectation victorieuse", qui nous fait préférer la grâce aux désirs charnels. Cette vérité n'a rien à voir avec une école de théologie (ou une autre). Elle est celle de la Vie et de la Vie éternelle.

En 1660, après avoir flingué du jésuite (pauvre Père Annat !) dans les Provinciales (1657), après avoir appris la mort de sa soeur à Port Royal, Pascal est à un tournant de sa vie. Il y a justement une réunion grave des principaux Port-royalistes ; elle a lieu chez Pascal car ce dernier ne se déplace plus qu'à grand peine. D'un côté Arnauld et Nicole, avec une nième distinction pour pouvoir signer le formulaire en toute bonne conscience ; de l'autre Domat, Roannez et Pascal. Ce dernier est très faible (il mourra en 1662), mais il souhaite que l'on défende saint Augustin et non que l’on se réfugie dans des arguties, qui lui rappellent sans doute cette casuistique qu'il a condamnée. A un moment, sans crier gare, alors que la conversation s'est échauffée, il s'évanouit. On fait sortir les Messieurs. Demeurent les amis. Pascal revient à lui et il a cette phrase admirable : "Ils ont préféré Port-Royal à la vérité". Le prêtre qui l'accompagnera dans ses derniers moments ne sera ni Singlin ni Arnauld ni personne de Port-Royal, mais le curé de sa paroisse d'alors, l'abbé Berryer de Saint-Etienne du Mont. Pascal rompt avec Port-Royal, parce que Port Royal est devenu la vérité d'Arnauld et de Nicole de préférence au Christ et à sa grâce.

Arnauld, Nicole, ces deux là, la suite le montrera à satiété, si compétents soient-ils, si sincères, s'immobilisent sur les arguments humains, derrière lesquels ils se sentent inexpugnables. Ils mourront derrière leur ligne Maginot. Leur virtuosité leur a fait oublier l'essentiel : l'enjeu de leur combat.

A ce moment là, Pascal, que Nicole, après sa mort prématurée, appellera assez dédaigneusement "un ramasseur de coquilles", dépasse son Parti et... il accède à la sainteté que la nuit de feu de 1654 lui avait fait entrevoir comme une promesse.

mardi 5 juillet 2011

Aux Guérandais, Turballais, Quimiacais, Piriacais...

...qui se trouveraient lire ce Blog... j'en passe d'ailleurs et des meilleurs... je tiens à signaler que, de mardi à vendredi, je célèbrerai les saints Mystères à 18 H, selon la forme non rénovée du rite romain dans la chapelle Saint-Sébastien.

C'est une petite merveille, cette chapelle, mais trop simple pour se trouver répertoriée. Au XIXème siècle, la bâtisse, vieille comme le lieu-dit, a su imposer à la Départementale un coude soudain, pour faire respecter son existence. J'ajoute que durant tout l'office deux anges vous regardent avec un regard presque humain, et en même temps si léger que l'on sent bien qu'ils sont remplis de Ciel. Cela nous permet de nous souvenir, s'il en était besoin, que malgré le poids de la routine et notre écrasant manque de foi, la sainte Messe, mysterium fidei, est plus du Ciel que de la terre.

Saint-Sébastien ? Pour les non-initiés, cela se situe justement sur "la route de la terre" entre Piriac et La Turballe... Si vos vacances vous conduisent à proximité, je serai heureux de vous connaître, "en vrai" et non pas simplement comme des liseurs purement virtuels.

dimanche 3 juillet 2011

Liés? (TradiLien#2)

Dans ‘Les mots et les choses’, Michel Foucault cite un texte de Borges, qui cite lui-même une très improbable «encyclopédie chinoise», laquelle répartirait les animaux selon les catégories suivantes:
«appartenant à l'Empereur; embaumés; apprivoisés; cochons de lait; sirènes; fabuleux; chinchards; chiens en liberté; inclus dans la présente classification; qui s'agitent comme des fous; innombrables; dessinés avec un pinceau très fin en poils de chameau; qui viennent de casser la cruche; qui de loin semblent des mouches; autres...».
Cette classification ne manque pas de nous surprendre: des catégories qui ne sont pas homogènes, qui se chevauchent, et qui ne peuvent à elles seules décrire tout l’espace. Nous voici à l’opposé de notre schéma habituel, par embranchements («Vertébré / Mammifères / Rongeurs / etc…»), qui offre l’avantage d’être systématique dans tous les sens du terme.

Hélas! être systématique ne suffit pas à faire sens. Qu’on en juge de par cette classification des rois de France trouvée au hasard du web: «Cranes d'œufs (Charles II le Chauve); avec perruque (Louis XIII, Louis XIV, Louis XV, Louis XVI); sans perruque mais avec des cheveux (tous les autres)».

... au quotidien, on classera plutôt en animaux
nuisibles, comestibles, domestiques, etc...
Je me suis posé la question pour faire TradiLien, l’annuaire de sites dont je vous ai déjà parlé. La méthode par embranchements avait déjà été utilisée par liens.leforumcatholique.org (plusieurs centaines de sites distribués selon une cinquantaine de rubriques et de sous-rubriques) - il fallait faire autre chose. Surtout cette hiérarchie ne me semblait pas rendre compte de la multitude de critères possibles. Va donc pour un classement selon la méthode «chinoise» exposée plus haut: trouver un nombre limité de mots-clés – caractériser chaque site par un ou plusieurs de ces mots-clés (dont l’attribution peut être très subjective) – et présenter ces sites selon quatre manières:
  • La page d’accueil propose la liste exhaustive de tous les sites référencés, classés par ordre alphabétique.
  • On trouve juste au dessus cinq sites choisis au hasard, ce choix étant renouvelé à chaque heure – ou dès que quelqu’un clique ici.
  • On trouve dans la colonne de droite une liste des mots-clés principaux, présentés selon un ordre aléatoire pour ne pas favoriser les uns au détriment des autres.
  • Le formulaire [recherche] renvoie aux occurrences dans les mots-clés comme dans les sites (leur nom, leur adresse, et à terme: dans leur description).
  • Enfin, pour chaque site sont indiqués les mots-clés qui le caractérisent – en les cliquant on trouve les autres sites de chaque catégorie.
C’est ainsi que le site du Barroux apparaît:
  • Dans le haut de la liste alphabétique;
  • De manière aléatoire, dans l’échantillon des sites pris au hasard;
  • Dans les sites attachés à quelques mots-clés comme ‘mouvance Ecclesia Dei’, ‘moines et moniales’, ‘Bénédictins’;
  • Quand on recherche ‘barroux’, ‘arr’ (ou même ‘ux.or’ qui figure dans son adresse).
  • Quand on suit les mots-clés d'autres monastères
Tout cela est très intuitif, forcément incomplet, et jamais fini – je parle de la forme. Quant au fond, c’est pire: quel site mettre? les sites tradis et très intéressants, bien entendu. Maintenant, que faire de ceux qui sont l’un sans tout à fait être l’autre – et réciproquement? j’ai mis Golias, qui n’est pas tradi mais qui parle de nous, j’ai mis le Vatican et quelques diocèses parce que: tout de même! c’est dire si mon pifomètre est l’outil que j’utilise le plus.

Ce qui me reste à faire? compléter la qualification des sites, ajouter ceux qui manquent (vos propositions sont bienvenues), présenter chacun en quelques mots, envisager une interface plus graphique, attribuer un ‘poids’ à chaque site ("1/2/3") pour qu’apparaissent les sites majeurs avant ceux qui figurent par souci d’exhaustivité, et surtout: contacter chacun des sites référencés pour leur suggérer la réciproque. Pour l’avenir, je ne sais pas ce que deviendra TradiLien – peut-être sera-t-il adopté comme page de liens par quelques petits sites, auquel cas il restera neutre. Sinon peut-être comportera-t-il des liens privilégiés vers quelques sites majeurs? Nous verrons bien.

vendredi 1 juillet 2011

N'ayons pas peur du style !

Mère Angélique Arnauld
par Philippe de Champaigne
Je lisais pour me détendre une biographie d'Angélique Arnauld, toute en syntonie avec son terrible et désarmant modèle. C'est celle que l'on doit, chez Fayard, à Fabian Gastellier (et que je dois moi au bon goût de mon bouquiniste préféré, boulevard de Vaugirard, parce qu'elle est épuisée depuis longtemps, étant parue en 1998).

J'aime la plume d'Angélique, son sens de l'essentiel, sa manière de ne jamais tourner autour du pot, et puis aussi ce mélange détonnant que constitue une absence totale d'illusion sur soi-même et une ambition spirituelle à nulle autre pareille. Saint François de Sales, le modèle des directeurs spirituels au Grand siècle, a approché cette femme peu commune, qu'il tenait à appeler sa fille : "il n'y aura plus en moi de "Monsieur" pour vous [à l'époque on dit Monsieur de Genève], ni en vous de "Madame" pour moi. Les anciens, cordiaux et charitables noms de père et de fille sont plus chréties, plus doux et de plus grande force pour témoigner la dilection sacrée que Notre Seigneur a voulue entre nous"...

Simple attachement spirituel ? Sans doute, mais qui s'étend à toute la famille en cette année 1620 : "Je suis inséparable d'affection d'avec vous et votre famille bénite de Dieu" écrit François de Sales à Mère Angélique. A l'époque, notre héroïne, quatrième enfant d'une fratrie qui en comptera 20, est une jeune fille de 30 ans à peine (elle est née en 1591), qui, après avoir rétabli la Règle de saint Bernard dans son propre monastère de Port-Royal, s'attaque à Maubuisson à la gouvernance... libertine de son homonyme Angélique d'Estrées, en venant au nom du Roi prendre la direction de ce Monastère problématique. 32 religieuses de Maubuisson viendront gonfler les rangs de Port Royal après le départ d'Angélique Arnauld. C'est dire le "charisme" de cette religieuse si simple, mais si terriblement entière.

En lisant Fabian Gastellier, je tombe en arrêt devant cette sentence de saint François de Sales (p. 131). L'évêque de Genève écrit à Angélique : "Accoutumez vous à parler de tout bellement, et à aller, je veux dire marcher, tout bellement. A faire tout ce que vous ferez doucement et tout bellement... et vous verrez que dans trois ou quatre ans, vous aurez rangé tout à fait cette si subite soudaineté".

Vous aimez la "si subite soudaineté" qui fait le fond du caractère d'Angélique, née Jacqueline Arnauld ? François de Sales a du style... et de la psychologie. Il a bien compris à qui il avait affaire : "Je vous connais, à mon avis fort entièrement" lui écrit-il aussi. "Animez continuellement votre courage d'humilité et votre humilité, c'est-à-dire votre misère et le désir d'être humble, animez les de confiance en Dieu, de sorte que votre courage soit humble et votre humilité courageuse".

A l'époque on n'oubliait jamais le courage. Et en tout cas cette "vaillance" comme spontanée est comme la marque de fabrique de Port Royal. Mais il fallait rappeler l'humilité, c'est vrai ! Aujourd'hui, on se perd volontiers dans ce que l'on croit être l'humilité et qui n'est que l'autre nom de l'irresponsabilité. Et l'on oublie volontiers qu'il n'y a pas d'humilité vraie qui ne soit courageuse... qui ne sache faire front. De préférence (c'est là tout le paradoxe) au premier rang.

Il faut aller "bellement" dit et répète de diverses manière Monsieur de Sales. Aller bellement ? Au siècle des Mousquetaires, n'est-ce pas comme un premier esthétisme ? Non ! Cette esthétique n'est pas une fin en soi, c'est la fine fleur du christianisme. Il m'arrive de penser que le Père Theobald a raison de s'intéresser au "christianisme comme style", selon le titre de sa monumentale synthèse. "Vivre en beauté" répétait le Père Spicq après saint Paul.

Au fond le christianisme ne nous apprend pas ce qu'il faut faire et ce que l'on doit éviter : notre conscience suffit à cette tâche. La loi naturelle est en nous. Quant à la Loi nouvelle, quant à la Loi chrétienne, elle nous apprend avant tout comment faire le bien : avec élégance, c'est-à-dire avec humilité. Avec efficacité, c'est-à-dire avec charité. Bene bona facere dit saint Augustin à Julien d'Eclane : bien faire le bien. Voilà le style. Point superflu ! Le style c'est l'homme ! Le Christ nous donne d'avoir un style, dit Theobald. Il se serait bien entendu avec Mère Angélique !

Seigneur donnez du style à ceux qui n'en ont pas et vos disciples seront terriblement attirants, ils porteront en eux ou avec eux le parfum de vos enseignements. Ce parfum là n'est pas un cosmétique, un arrangement, une manière de tricher avec la nature ou de ruser avec la sueur, non ! Le parfum de Jésus Christ ! Un signe ostensible, sans doute, mais inaliénable. In odorem ungnentorum tuorum currimus ne craignent pas de dire les jeunes filles du Cantique. Ce parfum là, c'est le comble du raffinement : la fleur de notre être. Voilà le style selon Theobald.

Qu'est-ce que vivre en chrétien ? Vivre bonnement ? Pas seulement.Plutôt comme dit Monsieur de Sales, vivre "bellement". N'ayons pas peur du style !