mercredi 29 février 2012

Mercredi de la Première semaine

"Un fait demeure, inexplicable rationnellement, outrepassant les frontières de l'improbable. Tout aurait dû s'arrêter à la pierre roulée du tombeau de Joseph d'Arimathie, creusé près d'un jardin, aux portes de Jérusalem. Abattus après l'arrestation de leur maître et la tragédie du Golgotha, les disciples étaient anéantis par sa mort ignominieuse sur une poutre. Or, étrangement, tout a commencé là. Ce troupeau de fuyards apeurés s'est métamorphosé soudainement en un groupe non de fanatiques hypnotisés, mais d'hommes libres, brûlants de conviction, prêts à donner leur vie pour annoncer partout la bonne nouvelle. Saisis par un événement inouï - l'éblouissement pascal -, fous de joie et d'émerveillement, emplis d'une certitude absolue, celle d'avoir retrouvé leur Maître vivant, de l'avoir vu après sa mort, de l'avoir touché, d'avoir mangé en sa compagnie, ils sont devenus les témoins rayonnants d'une vérité libératrice, persuadés que la croix n,'était pas la fin, mais,au contraire, le commencement de l'espérance"
Jean-Christian Petitfils, Jésus, éd. Fayard 2011 p. 478
Dans cette semaine que nous consacrerons toute au Christ, je voulais vous lire un extrait de la conclusion du Jésus de Jean-Christian Petitfils, qui indique bien jusqu'où peut aller l'historien. Le rôle de l'historien est de chercher les causes des événements qu'il décrits. Qui n'a pas planché sur les causes de la Première Guerre mondiale dans sa scolarité ? C'est une boucherie sanglante, absurde, un événement surréel où des millions de jeunes hommes trouvent la mort. Mais ce n'est pas un événement inexplicable. L'historien Petitfils est obligé lui de dire, au nom même de la science qu'il illustre avec tant de talent en d'autres registres, que cette fois il n'y a pas de raisons à donner. La naissance de l'Eglise est humainement inexplicable sans la Résurrection.

Objectivité rare et qui, paraît-il, rencontre des ennemis jusque chez les catholiques se voulant les plus orthodoxes. Etrange !

Si vous voulez vous laisser prendre par le Christ, le Jésus de Jean-Christian Petitfils est une synthèse parfaitement écrite (ça compte !) et très bien informée sur tout ce que nous pouvons dire de l'homme Jésus aujourd'hui. Une lecture de Carême ?

mardi 28 février 2012

Mardi de la Première semaine

"C’est ainsi que nous voulons parvenir à cette stabilité qui est la nôtre, où ce qui est est vraiment, parce que, seul, il est toujours tel qu’il est ; mais nous en sépare la mer de ce siècle, au milieu de laquelle nous allons et pourtant nous voyons déjà où nous allons, car beaucoup ne voient même pas où ils doivent aller. Afin donc qu’il y ait aussi un chemin par lequel nous puissions aller, celui à nqui nous voulions aller est venu de là bas jusqu’à nous. Et qu’a-t-il fait ? Il a disposé un bois qui nous permettrait de passer la mer. Car personne ne peut traverser la mer de ce siècle s’il n'est porté par la croix du Christ. A cette croix s’attache même parfois quelqu’un qui a les yeux malades. Que celui qui n’aperçoit pas au loin où il faut aller ne se détache pas de la croix ; elle-même le conduira jusqu’au terme"
Saint Augustin, Commentaire de l’Evangile de saint Jean 2, 2
Parvenir à la stabilité ! Programme apparemment impossible. Les petits bourgeois que nous sommes se contentent le plus souvent d'une stabilité parfaitement illusoire car elle est l'autre nom de la décrépitude. Etre stable ? Humainement, c'est accepter de vieillir. Comment découvrir cette autre stabilité "où ce qui est est vraiment" ?
 
A l'époque d'Augustin, c'est l'aventure métaphysique qui devait permettre d'atteindre au "réellement réel" dont parlait Platon. Augustin connaît cette métaphysique mieux qu'un autre. Il n'y croit plus. L'homme tout seul, l'homme par lui-même ne peut pas s'élever vers le réellement réel. Platon a eu quelques intuitions sublimes sur le juste persécuté par exemple dans la République. Selon ses propres termes "il s'est agrippé à toutes les traditions humaines comme à autant de radeaux pour parvenir à la connaissance de la vérité". Hélas ! A côté de somptueuses anticipations et de splendides nostalgies, il y a les échecs patents, ce curieux culte de la mort par exemple qui se manifeste dans la formule du Phédon : "Philosopher c'est mourir et être mort". Le désespoir n'est pas loin, avec ce que Freud appelle "la pulsion de mort".
 
C'est dans ce contexte que l'annonce du Christ, "voie, vérité et vie" prend tout son sens. Le Christ, pour Augustin, est le véritable maître (magister). Il est celui qui permettra de concrétiser les promesses hallucinées de la philosophie. Son enseignement nous fait sortir de l'ignorance ; sa grâce nous délivre de nos paralysies ; sa croix nous mérite la vie éternelle.
 
La Croix, c'est ce bois disposé pour traverser "la mer de ce monde" avec ses tourbillons accaparants et inutiles. C'est le remède universel, qui délivre même les malvoyants spirituels.
 
La Croix ce n'est pas seulement il y a 2000 ans. Accepte la croix, accepte de te sacrifier toi-même à ce que tu aimes ou à ce que tu veux aimer, et tu seras porté par ton sacrifice. Même si tu n'y comprends rien, ton sacrifice plaidera pour toi et le sacrifice du Seigneur sur la croix, qui complète tous les sacrifices individuels et leur donne sens, permettra à ton offrande muette d'atteindre son but : le coeur de Dieu.

lundi 27 février 2012

Lundi de la Première semaine

"Règle générale : ne pas identifier l’inconnu à l’étranger. Dieu est pour nous l’être le moins étranger (interior intimo meo) et le plus inconnu (personne n’a vu Dieu). Inversement, nous connaissons très clairement des choses qui nous sont profondément étrangères : les lois de la matière, le monde des chiffres etc. Aussi faut-il traiter Dieu comme un inconnu et non comme un étranger. On ne peut participer à son mystère qu’en renonçant à le dissiper. Les dieux fabriqués par l’homme sont les plus étrangers à l’homme"
Gustave Thibon , L’ignorance étoilée p. 3
Saurons-nous nous habituer à cette Présence silencieuse qui est en nous, "plus intérieure que mon intime" comme disait saint Augustin, cité par Gustave Thibon ? Il nous suffit de fermer les yeux aux sollicitations du quotidien pour la ressentir cette Présence que nous ne pouvons désigner mais qui fait que même seul nous ne nous sentons jamais seuls. Ceux qui ont la foi l'appellent Dieu, ceux qui ne l'ont pas ressentent comme une nostalgie, un manque, quelque chose qui a été, et qui n'est pas loin, qui doit revenir : nostalgie, en grec la douleur du retour.

Présence qui n'est jamais étrangère mais toujours inconnue : la distinction de Gustave Thibon fait mouche. Mais ne suis-je pas moi-même un inconnu pour moi ? Est-il seulement possible de se connaître soi-même ? Si cette présence me reste inconnue, en me permettant seulement de mettre un nom sur le sentiment de proximité qu'elle m'inspire - Dieu, le Tout proche, l'Immédiat, l'être de mon être - il faut bien reconnaître que je suis pour moi-même la première inconnue de la Grande équation de l'existence.

La société nous plaque à la surface de nous-mêmes à force d'attractions, de sollicitations, de théâtre. N'ayons pas peur de ce que nous sommes ! Ne nous inquiétons pas d'avoir à affronter un monstre, le Minotaure de notre inconscient par exemple. Ce que nous trouvons au fond de nous-mêmes, si abimés que nous soyons parfois par la vie,c'est un élan, une jeunesse, un désir du Bien qui est en nous la trace de cette Présence que nous cherchons.

L'évidence sur cet Autre inconnu mais jamais étranger se fait quand nous vivons de son Esprit. Heureux ceux qui parviennent à rester curieux dans notre société qui sait tout et qui ne veut pas savoir qu'elle ne sait rien, heureux ceux qui ont faim et soif, car ils seront rassasiés. La Justice leur est promise, cette harmonie qui naîtra d'une familiarité retrouvée avecd Dieu cet Inconnu qui ne nous est pas étranger.

dimanche 26 février 2012

Premier dimanche de Carême

« Notre existence, même bonne, n’a qu’un rendement médiocre, parce que notre attention se disperse trop. Nous sommes à la merci de chaque action, et, entre deux de nos actions, nous nous réservons à peine la minute de silence et de lumière qui nous mettrait face à l’esprit vivificateur, présent en nous, mais paralysé par nous, oublié par nous, laissé à son obscurité dans notre fond d’âme et attendant vainement un regard, un cri du cœur, un mouvement d’amour »
Père Raoul Plus (1882-1958), Dans le Christ Jésus
Le Père Plus nous parle immédiatement "rendement". C'est un moderne. C'est un jésuite. Mais le rendement auquel il veut nous rendre sensible est celui dont il,est question dans la parabole du Semeur à propos du grain qui tombe dans la bonne terre et qui donne "cent pour un". A quelles conditions pourrions-nous donner "cent pour un" ? Je mets cette question au conditionnel. Il faut la grâce pour cela et nous ne pouvons pas en disposer. Qu'est-ce que Dieu veut pour nous ? Cette donnée nous manque.

Nous pouvons au moins essayer de réunir les conditions d'un épanouissement spirituel, en luttant contre la dispersion (ce que l'on nomme aujourd'hui le zapping) et en prenant conscience de notre porosité à l'environnement : "Nous sommes à la merci de chaque action..." de chacune des nôtre ; mais aussi de chaque action des autres. Ce double effort, menons-le d'abord... oui... à la messe aujourd'hui. La liturgie traditionnelle possède cette force de contraindre chacun à un retour à soi, en offrant le silence de l'action sacrée. La liturgie ordinaire est certainement moins contemplative, mais qu'importe ! Que chacun, durant la messe, puisse se retrouver et offrir son propre sacrifice intérieur.

Cessons d'être à la merci du monde extérieur ! Cessons d'être à la merci de nos propres fragilités, qui peuvent parfois déclencher en nous ou en nos proches de véritables séismes ! Souvenons-nous que nous avons un coeur et que nous devons y résider. Tranquillement. Paisiblement. Maîtres de nous-mêmes. Nous devons y résider, puisque Dieu y réside et que c'est là qu'il se laisse trouver, si nous ne l'oublions pas, si nous le cherchons, si nous l'appelons, si nous l'aimons.

Un battement de paupières suffit parfois pour trouver Dieu en nous, pour être saisi par sa présence, pour nous apercevoir qu'il était déjà là et que... humblement... lui Dieu, il nous attendait. Ne le faisons plus attendre. Soyons présent à sa présence, présent à nous-mêmes...

samedi 25 février 2012

Samedi après les Cendres

«La parole de Jésus est vive et efficace, elle est subtile et pénétrante, elle atteint jusqu'au fond   et au plus intime des cœurs, elle fait division entre l’âme et l’esprit, c’est-à-dire qu’elle divise même ce qui est un et indivisible, séparant l’homme de soi-même» 
Père Guillaume Gibieuf, Vie et grandeur de la Vierge Marie II, 8 in Max Huot de Longchamp Avent 2011.
La Parole de Jésus, cette parole vive, subtile et pénétrante, elle est très facile à trouver : c'est l'Evangile. Peut-être avons nous trop l'habitude de certains textes et des ronrons dominicaux qui les accompagnent de manière si impeccablement cléricale. Sommes-nous capable de recevoir dans la figure une page d'Evangile ? Sommes-nous capables de nous laisser faire par cette lecture divine ? Sommes nous capables de nous convertir ? Le Carême, ça sert à ça.

C'est un champ d'expérimentation spirituelle. Il nous faut recevoir la vérité de l'Evangile comme une parole qui se transforme en action. C'est la raison pour laquelle Gibieuf, avec tant d'autres au XVIIème siècle, invoque le coeur. Hors de question de lire l'Evangile avec les seules lunettes de la raison raisonnante, comme un cours ou un exposé. Faites l'expérience : prenez l'Evangile à coeur.

Comment peut-on comprendre que l'Evangile sépare l'homme de lui-même ? Par la conversion.
 
Il y a deux hommes en moi disait saint Paul, le vieil homme et l'homme nouveau. La Parole de Dieu dit précisément Gibieuf, reprenant une autre distinction de saint Paul, fait la division entre l'âme et l'esprit, en termes modernes on dirait : entre le psychique et le spirituel, entre les problèmes liés aux limites de notre psychologie et les questions nouvelles, les élans nouveaux nés de la lecture divine de l'Evangile. C'est cette division entre l'âme et l'esprit qui permet le véritable dépassement de soi-même, bref tout ce qui fait que l'esprit chrétien est l'inverse de l'esprit bourgeois.
 
Collaborateur du grand cardinal de Bérulle, créateur au début du XVIIème siècle de l'Oratoire de France, le Père Gibieuf était thomiste, cartésien et augustinien : un peu trop à la fois pour ses confrères. Son oeuvre garde pour le lecteur d'aujourd'hui une étrange profondeur.

vendredi 24 février 2012

Redécouvrir la démocratie ?

Reprise d'un article paru dans l'Action Française 2000

« Je suis autant de fois républicain qu’il y a de communes en France ». On reconnaît la formule maurrassienne, bien frappée, comme une médaille qu’il faudrait regarder discrètement quand tout va mal autour de soi. Alors que la campagne électorale est lancée, que notre président choisit le Figaro Magazine pour affirmer à la France ses valeurs de manière très conservatrice, ...
...on a l’impression que notre démocratie se transforme petit à petit, jusqu’à ressembler à l’Illustre théâtre au temps de sa splendeur moliéresque. Théâtrocratie ? L’expression est de Platon, ça ne nous rajeunit pas, mais c’est un peu ce qui se passe, au fil des petits scandales qui émaillent, pour le fun, notre vie politique. Nous allons voter. Nous nous y préparons. Nous sommes courtisés par les grands et les petits candidats. Mais que devient notre démocratie ?
 
Que devient, non pas l’idéologie démocratique qui ne s’est jamais mieux portée, mais la démocratie réelle ? C’est la question que posent très solennellement et très efficacement Christophe Deloire et Christophe Dubois, les coauteurs de Circus politicus, une vaste enquête sur le monde politique publié chez Albin Michel : ils finissent sur un cri d’alarme. Il n’y a plus de choix politique. C’est l’Europe ou l’Europe, l’euro ou l’euro, le libéralisme ou le libéralisme, la délocalisation ou la délocalisation. Quelles sont les différences entre les deux grands candidats censés polariser l’électorat ? Elles sont d’ordre symbolique. L’un refuse le mariage homo, l’autre l’accepte. Mais la politique ? C’est la même. Elle est essentiellement technocratique. Elle est fondée non sur le choix du peuple, non sur le bien du peuple, mais sur l’unanimité technocratique, gardienne du temple de la Finance internationale.
 
La question : que devient notre démocratie doit-elle être posée dans une perspective maurrassienne? Pourquoi défendre la démocratie si nous sommes monarchistes ? Autant il est clair que nous nous opposons à l’idéologie démocratique, à ce que Maurras appelait déjà en son temps « la démocratie religieuse », c’est à dire la démocratie comme religion ou l’individualisme démocratique comme mode de vie, autant, si nous sommes monarchistes, c’est bien évidemment par le peuple et pour le peuple. La politique est l’art d’animer les peuples et de les intéresser à leur destin. Le Pacte de Reims est à l’origine de la Monarchie française, c’est lui qu’il faut refaire. Et il faut partir de ce qu’il en reste, c’est-à-dire de cette conscience commune d’être français, de cette solidarité élémentaire qui réunit les hommes et les femmes de ce pays.
 
Partir non d’un fait ethnique mais du fait national, c’est notre manière d’être démocrates. Oh ! Il ne s’agit pas de donner au peuple la responsabilité de décisions qui le dépassent (c’est la part de vérité de la technocratie, dominante aujourd’hui : certaines décisions clés sont trop sérieuses pour être confiées aux peuples), mais il faut défendre diffuser et promouvoir une identité réelle et des richesses culturelles et spirituelles communes.
 
Nous ne défendons pas l’idéologie démocratique, qui détruit, qui nivelle qui arase, en pratiquant le principe « un homme une voix ». En effet, le Suffrage universel est une démarche abstraite. On mélange tous les intérêt particulier et l’on devrait réaliser par ce mélange l’intérêt général : c’est impossible. Cette magie politique… n’a jamais existé.
 
Alors que faut-il défendre ? La démocratie réelle, dans la mesure où elle demeure l’expression irremplaçable du génie d’un peuple. Comment la promouvoir ? Par le roi, cette personne qui est au dessus du jeu politique, comme le garant de la participation du peuple à son propre destin.
 
Comment distinguer concrètement l’idéologie démocratique avec son rite – le suffrage universel – de cette vitale expression du peuple dans toutes ses composantes que nous avons appelée la démocratie réelle ? C’est le vrai problème qui se pose aujourd’hui, où les peuples se voient marquer leur destin sans qu’ils aient voix au chapitre. La situation en Grèce est emblématique à cet égard. La Super-classe dirigeante là-bas a d’ailleurs dû reculer ; elle vient de promettre des élections, tant la situation est tendue. Serons-nous un jour une sorte de Grande Grèce ?
 
Dans l’enseignement des papes – largement repris par le Maurras de Mes idées politiques – il est question du principe de subsidiarité. On peut penser que la démocratie réelle se réalise entièrement à travers ce principe : qu’à chaque niveau de décision correspondent, contribuent et collaborent ceux pour lesquels cette décision est prise, autant qu’ils en sont capables. Dans cette perspective, la première décision vraiment démocratique – Maurras l’avait compris – c’est la décentralisation. Elle est à peu près absente du débat politique actuel.

Vendredi après les Cendres

«Plus encore qu’une religion du péché pardonné, le christianisme est la religion de la grâce et de l’amour, c’est donc la religion de la liberté, car la grâce est la liberté de Dieu et l’homme lui-même ne peut aimer que librement»
Père RL Bruckberger, Histoire de Jésus-Christ éd. Grasset p. 453
Extraordinaire Père Bruck, auquel on peut reprocher bien des choses... Oui le christianisme est la religion du péché pardonné. Oui, il est capital de nous faire concevoir que Dieu ne nous abandonne pas à nous-mêmes, mais qu'il est capable, après nous avoir créé, de nous transformer, de nous rendre participants de sa vie, autant que nous en sommes capables. "Mon Dieu, prenez-moi à moi et donnez moi à vous" disait saint Nicolas de Flue. Qui a expérimenté ce nouveau commencement ?

Rien ne résiste à l'amour de Dieu. Notre péché, si grand, si lourd soit-il, n'y résiste pas.

Ce qui résiste, c'est notre apathie, notre absence de vie véritable, notre désir de ne pas prendre de risque. Piètre désir ! Ce qui résiste, c'est notre mauvaise volonté, notre volonté de dire non. Face à ces résistances ou plutôt à ces lourdeurs, il faut nous en souvenir, la grâce de Dieu EST notre liberté. On a longtemps voulu opposer l'une à l'autre, la grâce et la liberté, en oubliant cette grande leçon de saint Augustin. Pendant le Carême, alors que nous essayons de nous déprendre de telle ou telle habitude, il faut nous souvenir que la grâce est notre liberté, notre mérite, notre élan.

Mais qu'est-ce que la liberté ? Le pouvoir de remonter nos pentes. Le pouvoir de ne pas nous laisser séduire par une existence ordinaire. Le pouvoir de demander plus à la vie : de faire de notre vie un destin, happé par la beauté de Dieu.

jeudi 23 février 2012

Jeudi après les Cendres

"Quand Jésus voulut fonder son Eglise sur Pierre, il lui posa trois fois une seule question : "Pierre, m'aimes-tu ?". Il aurait pu dire : "Pierre, seras-tu l'homme de caractère capable d'entraîner tes frères à ta suite ? Seras-tu le savant, capable de les instruire, de les éclairer ? Le modèle des vertus pour leur servir d'exemple ?" Il ne pose aucune de ces questions, mais seulement : "Pierre, est-ce que tu m'aimes ?". C'est tout. Pierre aimant Jésus, l'Esprit saint sera en lui et rien ne lui manquera pour paître les agneaux et les brebis. "La plénitude de la loi, c'est l'amour" dit saint Paul ; et saint Augustin : "Aime et fais ce que tu voudras"
Père d'Elbée, Croire à l'amour, éd. Téqui p. 31
Le Carême ? C'est d'abord "croire à l'amour", selon la formule que le Père d'Elbée emprunte à la Première épître de Jean. Que signifie "croire à l'amour" ? Non pas croire au sentiment amoureux ; non pas croire aux intuitions et aux impulsions de son palpitant. Non. Croire ici signifie avoir foi en l'amour, c'est-à-dire être capable de faire de l'Amour un absolu non-négociable dans sa vie. C'est ce que Jésus demande à Pierre : non pas quelles sont tes compétences d'entraîneur d'hommes, de sage, d'intellectuel, non pas même : quelle est ta vertu ? Pierre, durant la Passion du Seigneur, venait de trahir Jésus et de le lâcher sous le regard inquisiteur d'une servante qui était là pour se chauffer au brasero : il aurait été bien en peine de revendiquer une vertu quelconque.
 
Jésus ne demande pas quelles sont tes compétences ou quelles sont tes vertus, mais quelle est ton appétence la plus profonde ? quel est ton amour ? C'est que l'amour se substitue à tout, c'est l'amour qui nous fait être vertueux et non la vertu qui  nous fait être aimants.
 
Ainsi en est-il de notre Carême ; il ne faut pas faire pour faire, il ne faut pas faire pour s'aimer vertueux. Il faut faire pour aimer et pour laisser entrer en soi l'Esprit de Dieu, ce Saint-Esprit, qui est juste l'Esprit du Christ.

mercredi 22 février 2012

Mercredi des Cendres

"Tard je t'ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle, tard je t'ai aimée ! Mais quoi ! Tu étais au-dedans de moi, et j'étais, moi, en dehors de moi-même ! Et c'est au-dehors que je te cherchais..."
Saint Augustin, Confessions, Livre 10 chapitre 3
Le Carême est une invitation à nous éloigner des distractions qui nous tiennent "au-dehors de nous-mêmes". Non pas parce que ces distractions seraient mauvaises, mais parce qu'elles nous plongent dans l'extériorité et la superficialité. Elles parviennent à nous faire oublier que nous avons un coeur et que c'est dans ce coeur que Dieu se manifeste.
 
Tard je t'ai aimée, ô beauté ancienne et toujours nouvelle : saint Augustin s'est converti au Christ alors qu'il avait 33 ans et qu'il exerçait la fonction de Président de l'Académie impériale à Milan. Mais pour lui, nous sommes tous des convertis, nous sommes en retard par rapport à Dieu, qui nous attend avec patience, sans jamais forcer notre coeur. Où nous attend-il ? En nous. Dieu ne force pas notre coeur, il y est, chez lui.
 
Le jeûne d'aujourd'hui (un vrai repas dans la journée, abstinence de viande et collation possible matin et soir) est le signe de notre motivation : nous voulons nous mettre en frais pour le Seigneur, "beauté ancienne et toujours nouvelle", nostalgie et présence. Nous voulons profiter du temps pour l'étendre jusqu'à l'éternité.

Je proposerai, chaque jour de ce Carême une formule empruntée à tel ou tel saint ou grand spirituel. J'y ajouterai un très court commentaire explicatif.

mardi 21 février 2012

Le mal dans le Nouveau Testament - Conférences de Carême 2012 au Centre Saint Paul

J'ai donné l'an dernier une série de conférences sur le mal dans l'Ancien Testament. Cette année, il faut passer au Nouveau. Il y a du pain sur la planche. Dès dimanche prochain. Je vous donne aussi rendez-vous sur ce Blog tous les jours, dès demain matin, mercredi des Cendres, avec une citation pieuse et un très rapide commentaire, pour nous orienter en ce Carême.
  • Dimanche 26 février à 18H00 - Le problème est dans l’homme : essai pour un état des lieux - Entre désordre et liberté - (Jean 8. Romains 7 et 8)

  • Dimanche 4 mars à 18H00 - La chair, le corps, où est le mal ? - Contre le réductionisme gnostique - (I Corinthien, Galates passim)
     
  • Dimanche 11 mars à 18H00 - Le mal est dans le monde : contre l’illusion progressiste - Mondanité et mondialisation - (Jean 15-17 et Apocalypse 13 et 14)
     
  • Dimanche 18 mars à 18H00 - Le Christ, sa justice, sa rédemption, sa croix - Seule réponse à la hauteur du problème - (Jean 10 et Jean 18)

  • Dimanche 25 mars à 18H00 - Les Béatitudes, notre charte contre le Mal - Les ruses de l’amour comme intelligence du mal - (Matthieu 5 et Luc 6)

  • Dimanche 1er avril à 18H00 - Les conditions de la Révolution chrétienne - L’Eglise et le péché, l’Eglise a-t-elle péché ? - (I Jean et Matthieu 13)

Une réponse sur l'athéisme

L'un d'entre vous a répondu longuement à mon dernier post L'athéisme est mort. Voici ce qu'il écrit : "Je suis d'accord avec vous et Philippe Nemo pour admettre que la forme traditionnelle de l'athéisme est morte. Mais je ne vous suis pas pour déclarer la mort de l'athéisme en tant que concept ou pensée philosophique".

Ce dont parle Philippe Némo, ce n'est pas du concept de l'athéisme, qui est un concept possible dans le champ des possibles (même si cela ne signifie pas que c'est une représentation réelle ou réaliste). Ce dont nous instruit Nemo, c'est de l'athéisme moderne, celui qui se déclare responsable du bonheur de l'homme et qui estime que ce bonheur consiste justement dans la négation de Dieu, dans une sorte de négationnisme métaphysique. C'est ce négationnisme-là qui est mort, de sa belle mort, à court de ses propres arguments.

Il se trouve que je relisais rapidement L'avenir d'une illusion de Sigmund Freud, pour préparer notre belle session de samedi dernier. On trouve déjà chez Freud deux ingrédients étranges qui expliquent le dépérissement de l'athéisme philosophique. Premier ingrédient : pour Freud, l'athéisme n'est pas  objet de démonstration, c'est sa base de départ. Elle est non négociable en quelque sorte : "Ces idées [religieuses] qui professent être des dogmes sont des illusions, la réalisation des désirs les plus anciens de l'humanité". Deuxième point : il se demande tout de même quel bénéfice il y a pour la civilisation à supprimer de telles idées. Et il accepte de se dire qu'en fait il n'y en a aucun. L'athéisme ne sert à rien.

Son athéisme est un pur rationalisme [pas d'expérience sensible de Dieu donc pas de Dieu], qui reconnaît qu'il n'apporte rien au monde. Freud est le premier athée, à ma connaissance à douter de la mission de l'athéisme. Et en même temps, parce qu'il ne veut pas dépasser les représentations de la raison que Pascal appelle géométrique, il refuse à Dieu la possibilité d'entrer dans son univers mental. Pour lui, Dieu serait juste une invention de la civilisation.

Il est tellement clair que la question de Dieu s'infiltre en chacun de nous aujourd'hui malgré la civilisation qui nous entoure que la critique freudienne se trouve complètement périmée. Et à cause de son indigence originaire. Et parce que son point de vue même est faux : Dieu n'est pas un produit de la civilisation mais plutôt quelque chose comme une idée innée, ainsi que l'avait noté Descartes.


Pourquoi les hommes ont-ils tellement de mal à se poser la question religieuse, qui est, objectivement la question la plus importante de leur vie ? Pascal a son idée là-dessus.

"Ce même homme qui passe tant de jours et de nuits dans la rage et le désespoir pour la perte d'une charge ou pour quelque offense imaginaire à son honneur, c'est celui là même qui sait qu'il va tout perdre par la mort, sans inquiétude et sans émotion. C'est une chose monstrueuse de voir dans un même coeur et en même temps cette sensibilité pour la moindre chose et cette étrange insensibilité pour les plus grandes"

Et voici pour Pascal l'explication : "C'est un enchantement incompréhensible et un assoupissement surnaturel, qui marque une force toute puissance qui le cause". Bref : c'est le diable. L'avenir de l'athéisme comme construction raisonnée du destin humain ? C'est Satan... Vous êtes choqué ? Refaites le raisonnement avec Pascal : il cherche toujours ce qu'il appelle "la raison des effets". Relisez le paragraphe précédent : ce sont les effets, tels qu'il les voit dans nos vies...  Une disproportion entre l'anecdotique (qui prend tout le champ visuel dans notre vie) et l'essentiel (qui est volontairement "oublié", comme par suite d'actes manqués à répétition). Pourquoi cette disproportion, qui est tout sauf raisonnable ? Pourquoi ? Ou par qui ?

lundi 20 février 2012

L'athéisme est mort

Après avoir crié "Dieu est mort", les cultureux de tous pelages commencent à réaliser que l'athéisme ne tient pas la route. C'est ce que souligne Philippe Nemo, dans un petit livre tout à fait passionnant, intitulé La belle mort de l'athéisme moderne. Belle mort ? Il faut remonter à l'expression "mourir de sa belle mort". L'athéisme moderne est mort, mais personne ne l'a tué, il est mort de sa belle mort. Il est mort parce que les hommes ont compris qu'il n'apportait rien, que l'athéisme ne rendait pas plus heureux, que ce n'était pas la peine de refouler Dieu en soi, puisque l'absence de Dieu ne nous donnait rien de plus et nous mettait souvent dans des situations inextricables.

On ne comprendra pas l'importance du livre de Philippe Nemo, si l'on oublie de quels sentiments est faits l'athéisme moderne. Comme l'a expliqué naguère Claude Tresmontant dans Le problème de l'athéisme, l'athéisme moderne est avant tout un antithéisme : "Si Dieu existait, écrit Sartre dans sa célèbre petite conférence L'existentialisme est un humanisme, ce serait une raison supplémentaire pour nous de le combattre". Philippe Nemo fait un récapitulatif des diverses formes de cet athéisme moderne, et il souligne à chaque fois qu'aujourd'hui telle forme est morte : le positivisme est mort, la libre pensée se fait croire à elle-même qu'elle existe encore, c'est uniquement un effet de la censure "correcte" si elle a encore quelque chose à dire, mais les obédiences maçonniques découvrent qu'elles sont fondées sur un modèle théologico-politique dépassé. La critique biblique a dû en rabattre depuis Spinoza (1670) ; aujourd'hui l'exégèse reste massivement en faveur du fait biblique : plus personne ne nie l'historicité du Christ ou l'originalité de sa parole. Quant à la recherche d'un absolu philosophique, à travers le hégélianisme ou les méditations plus ou moins échevelées de Heidegger, il faut bien reconnaître que  toutes ces sectes intellectuelles (si belles dans leur prétention) sont dans l'échec. Après tout un Maxence Caron a raison d'essayer de théologiser tout ça : que peut-on faire d'autre de la pensée allemande que la reconduire au christianisme qui a été sa matrice... haïe...Autre forme d'athéisme : l'Absolu artistique. Il relève aujourd'hui de la galéjade : l'art contemporain nous en a débarrassé. Le cinéma de Bayreuth et des wagnériens en transe en constitue l'exacte limite. Nietzsche lui-même doit se résigner à le reconnaître dans Le cas Wagner.

Que reste-t-il ? Les diverses formes de syncrétisme... Cela a été l'enthousiasme de Mai 68, la vie entre Bouddha et Jésus super-star (le nouveau bouddhisme forme ultime du nihilisme européen disait déjà Nietzsche). Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce syncrétisme scout a du plomb dans l'aile. Quant au néo-bouddhisme... Qui y croit vraiment ? Tout cela fait partie de ce que Gérard Leclerc a appelé avec raison le bricolage religieux. Je ne parle pas des millénarismes laïcisés que sont les différentes idéologies : qui croit au Paradis sur la terre aujourd'hui ? Même la mondialisation, cette idéologie ultime, engendre déjà... la Grèce d'aujourd'hui, ses manifestations, ses incendies, ses élections anticipées, ses diminutions de salaire ! C'est dire.

Il est vrai qu'il n'existe plus aucune forme de l'Absolu qui tienne la route, hormis le christianisme, le plus tôt contesté, et qui demeure encore debout malgré toutes les critiques, qui demeure non seulement comme une religion populaire mais comme une perspective vitale qui, aujourd'hui séduit aussi les intellectuels. Le christianisme a affronté toutes les questions de la modernité depuis l'origine. Il a passé "deux siècles chez Lucifer" comme disait Maurice Clavel, désignant la crise de la conscience européenne et ses suites. Il s'en est sorti, sous la houlette de Benoît XVI, intellectuel chrétien décomplexé !

Je laisse à Philippe Nemo la conclusion de ce panorama qu'il dresse avec tant de force dans son livre La belle mort de l'athéisme (éd. PUF 15 euros) : "Les deux siècles chez Lucifer ont fait passer le christianisme par la plus terrible épreuve du feu qu'il ait subi dans son histoire. Mille vieilleries - superstitions, croyances naïves, adhérences politiques, anthropologiques et sociologiques... - ont été brûlées et ne reprendront plus jamais consistance. Mais ce qui a résisté au feu est l'or incorruptible de l’Évangile et de l’Église. La tâche du jour est donc de dégager intellectuellement cet or des scories auxquelles il est encore mêlé".

Je voudrais ajouter que ce feu auquel Philippe Nemo fait allusion, feu à travers lequel doit passer tout ce qui se déclare oeuvre de Dieu (I Cor. 3, 11-15), ce feu touchera d'abord - et il a déjà commencé à le faire - les adaptations les plus récentes, les "expériences" les plus contemporaines. Ne demeurera que la sainte Tradition, non pas comme une forme passéiste, mais la Tradition apostolique dans sa permanente actualité, dans sa persistante efficacité, dans son irritante affirmation d'elle-même.

dimanche 19 février 2012

Amertume de Guy Gilbert?

Le Père Guy Gilbert est un prêtre réellement atypique. Cheveux longs, costume de loubard des années 60, et parler argotique. S'engage pour le mariage des prêtres, vote communiste, et célèbre les sacrements selon un rite… très personnel. Jusque là, hélas, rien de bien rare! Ce qui fait de Guy Gilbert un prêtre réellement atypique, c’est que son anticonformisme n’est pas devenu un conformisme. S’il peut être choquant (pour nous) sur certains points, il n’hésite pas à l’être (pour d’autres) avec ses positions parfaitement catholiques sur le mariage ou l’avortement – et sa pratique du rosaire.

Du reste, son ouverture n’est pas à angle réduit, comme en témoigne sa visite au séminaire de la FSSPX, racontée dans La Croix du 2 juillet 1999:
«En face du petit sommet, la nouvelle basilique d'Ecône s'illumine. Cette lumière, de loin, m'appelle. Mes frères intégristes sont là. […] Le supérieur du séminaire, Benoît, grand et hiératique, m'accueille, avec quelques séminaristes. Soutanes strictes, évidemment. Elles me rappellent celle que j'ai porté sept ans. J'y étais fort attaché. Je l'ai toujours gardée. Même si mon blouson noir est, depuis trente ans, ma tenue de combat. […] Nous avons parlé du prêtre et de la beauté du sacerdoce. Pas de phrases plates pour le dire. Seulement des mots qui cachaient nos divergences pour vivre le Christ au coeur d'un monde dont l'Eglise est si loin. Une photo demandée par le supérieur nous a réunis. ‘Priez pour moi’, ai-je lancé à mes frères chrétiens. Benoît m'a demandé la réciproque.»
De fait, pendant quelques temps la photo de Guy [Gilbert] et de Benoit [de Jorna] a figuré en bonne place sur la site du Séminaire d’Ecône. Autant dire que quand Guy Gilbert parle de ‘nous’, on peut lire avec intérêt. Ses propos d’aujourd’hui dans La Nouvelle République sont hélas d’un autre tonneau. Le journaliste le questionne à propos d’«un projet d'école intégriste» près de Chateauroux, Guy Gilbert répond :
«Je suis hostile à ça. Le problème des intégristes, c'est qu'en refusant Vatican II, ils se coupent du monde. 2.500 évêques ont essayé de donner un feu nouveau au catholicisme pour s'adapter aux temps nouveaux. Or, les intégristes refusent ces temps nouveaux et l'œcuménisme.»
Bigre, me suis-je dit, d’où lui vient cette colère! Et puis j’ai compris que c’était peut-être de l’amertume? et qu’elle s’expliquait sans doute par la suite du propos - qu’il faut lire plusieurs fois :
«J'admire les vieilles taupes qu'on prend pour des grenouilles de bénitiers, d'avoir su passer à une liturgie beaucoup plus adaptée au monde d'aujourd'hui ! Mais les intégristes n'ont pas passé ce chemin-là. Si la liturgie s'adaptait à son temps, les gosses s'emmerderaient moins à l'église.»
Ce que nous dit Guy Gilbert, au fond, c’est que cette liturgie «adaptée au monde d'aujourd'hui», dont nous nous méfions nous traditionalistes, est le fait de «vieilles taupes», de «grenouilles de bénitiers». Pis encore: «les gosses s'emmerderaient» dans les églises, après 40 ans et plus de cette adaptation au monde. Alors si en face les intégristes en sont (eux) à élargir leurs écoles… il y a de quoi, au soir d’une vie, être un peu amer.

mercredi 15 février 2012

[Vu Sur le Net] Après la réintégration, quel accueil?

Depuis 30 ans et plus, l’abbé Franz Schmidberger est dans les instances dirigeantes de la FSSPX. Supérieur Général de 1982 à 1994, premier assistant de Mgr Fellay de 1994 à 2006, et actuellement supérieur du district allemand. Sa voix, au sein de la Fraternité, est l’une des plus autorisées. Dans un entretien à Die Welt, il déclare :
«Si, pour reconnaître canoniquement la Fraternité, les autorités romaines n'exigent rien qui contredise l'enseignement ni la pratique traditionnelle de l'Eglise, il n'y aura pas de trop grands problèmes pour une régularisation. Par contre je ne vois pas qu’une solution soit possible, si Rome devait exiger que nous acceptions sans réserves l’ensemble de Vatican II. […] Le pape régnant fait preuve d’une certaine bienveillance envers nous, et j’espère que nous trouverons une solution sous son pontificat.»
La FSSPX est entrée il y a des années dans un processus qui vise à se réconcilier avec Rome, et que certains craignent (ou souhaitent?) voir dérailler. Pour La Croix par exemple «tout se passe comme si aucune des deux parties ne voulait prendre la responsabilité d’être le premier à ‘claquer la porte’». Cependant, des déclarations comme celles de l’abbé Schmidberger donnent à penser que la réintégration de la FSSPX interviendra – dans les prochains mois.

Que se passera-t-il alors? Comment seront accueillis les traditionalistes de la FSSPX? Ce n’est pas être normand que de penser que cet accueil sera… divers, à l’image de ce qui se pratique déjà, et dont nous avons cette semaine deux exemples :

Mgr Nicolas Brouwet est le nouvel évêque de Tarbes-et-Lourdes. L’hebdomadaire Famille Chrétienne l'interroge sur sa proximité d'avec la sensibilité traditionnelle, par rapport à son rôle d’évêque. Il répond :
«Mes goûts personnels sont tout à fait secondaires. Par exemple, mon prédécesseur ouvrait chaque année le sanctuaire à la Fraternité Saint-Pie-X pour son pèlerinage, je continuerai. De même pour tous les catholiques : j’aimerais que chaque catholique, d’où qu’il vienne et quelle que soit sa sensibilité, se sente chez soi dans le sanctuaire, et je m’y emploierai.»
Cliquer sur l'image pour lire l'article.
Tel n’est pas le ton dans le diocèse de Nevers. Interrogé par le Journal du Centre au sujet d’une école hors-contrat, Mgr Brac de La Perrière aurait pu se contenter d’indiquer que l’établissement étant lié à la Fraternité Saint Pie X, il ne dépendait pas de lui. Mais l’évêque va plus loin : il ne sait pas «ce qui va se faire dans cette école», qui est «une source de division», il dit explicitement que ce n’est pas ce qu’il veut – c’est même très exactement ce dont il ne veut pas. Bref : le mur. Mais comme chaque mur a deux côtés, qu’il me soit permis de penser que certains parents traditionalistes seront rassurés d’avoir la confirmation, par Mgr Brac de La Perrière himself, de ce que l’école de leurs enfants «n’a aucun lien avec l’enseignement catholique du diocèse».

mardi 14 février 2012

Plus Angela que Nicolas ?

On n’a plus besoin d’être d’Extrême droite pour en parler... Circus politicus, c’est le dernier pavé dans la marre que viennent de jeter deux auteurs, Christophe Deloire et Christophe Dubois, qui ont beaucoup fait parler d’eux en publiant, en 2006, Sexus politicus. Attention : le « cirque » est moins drôle que le « sexe », mais politiquement ce deuxième ouvrage est capital. Ce que pointent les deux Christophe, c’est rien moins que la crise mortelle dans laquelle se débat notre démocratie, en particulier depuis l’avènement de l’euro. 
 
La première partie de cet ouvrage nous laisse apprécier l’ampleur du déficit démocratique dont souffre l’Union européenne pour pouvoir être belle. On lui fait perdre les kilos démocratique en trop, en remettant sa gestion à des grands commis discrets, qui imposent des plans ourdis dans le silence de leur cabinet, aujourd’hui à la Grèce, demain à l’Espagne ou à l’Irlande. A la France déjà. C’est ainsi que nos deux auteurs citent un article de l’ineffable Michel Barnier, paru dans Libération en 2002, qui posait gravement la question de Frédéric de Prusse à Condorcet : « Est-il utile de tromper le peuple ? ». Pour les eurocrates, incontestablement, la réponse est positive : « A l’heure où candidates et candidats à la présidence de la République préparent calicots, arguments et ripostes, il est une sorte de secret dans le débat politique français ». Eh bien ! Ce livre rompt la loi du silence. Il redit solennellement ce que Michel Barnier avait laissé échapper comme négligemment dans Libération : « Le secret, c’est que la plupart des décisions que les candidats vont s’engager à prendre ne relèvent plus d’eux seuls ». Et nos deux auteurs aggravent la mise : « Plus d’eux du tout devrait-on dire aujourd’hui ». Voilà pourquoi la politique est devenue un grand cirque : elle ne sert plus à rien. Les technocrates veillent dans l’ombre. On ne prend plus de décisions. On fait appliquer leurs règles. Les Français du reste ne sont pas dupes. N’est-ce pas ce que signifie ce sondage Louis Harris de l’été 2011 selon lequel les Français compteraient plus sur Angela que sur Nicolas pour les sortir de la crise financière ? Le discrédit des politiques est de plus en plus total.
 
Mais alors qui gouverne ? C’est la deuxième question-clé de ce livre. Certain livre récent met en cause l’énarchie… C’est vieux, c’est ringard, c’est désespérément hexagonal. Le problème est mondial. Ce sont des instances mondiales qu’il faut découvrir. Nos deux auteurs n’ont décidément pas froid aux yeux. Eux vont jusqu’au Siècle (pour la France), jusqu’à la Commission trilatérale, jusqu’au Bilderberg, trois instances qui fabriquent l’unanimité technocratique dont les nouvelles Institutions internationales ont besoin pour continuer de tisser notre destin sans nous. Ces sont les grandes officines du consensus, non pas des sociétés secrètes, mais en tout cas des organisations dont il ne faut pas parler, comme Yves Calvi a pu le constater un jour durant son émission C dans l’air. Le mot facile, pour disqualifier toute volonté de savoir, est le mot « complotisme ». Il en faut plus pour impressionner nos deux auteurs, dont l’enquête plonge au cœur des centres de pouvoir réels. Pour comprendre le Circus politicus, il faut saisir que l’essentiel n’est pas notre démocratie, que la vie est ailleurs, que c’est ailleurs que se dessine notre destin et qu'ici... tout est riens. La politique est une comédie. Platon parlait déjà de théâtrocratie à propos de la démocratie athénienne. 
 
La théâtrocratie de Platon ? C’est justement le Circus politicus de Christophe Dubois et de Christophe Deloire. Rien de nouveau sous le soleil !

Christophe Deloire et Christophe Dubois, Circus politicus, éd. Albin Michel 464 pp. 2012 21, 50 euros

lundi 13 février 2012

Trois conférences et une session

On me reproche de ne pas annoncer suffisamment à l'avance les conférences du Centre Saint Paul. En voilà trois, voici celles du mois de février, très différentes, l'une qui touche au témoignage, celle de mardi prochain, l'autre qui nous emporte dans la politique chrétienne celle de Mardi gras et enfin la dernière qui nous promène dans la forêt des symboles que constituent les rites catholiques. Je crois vraiment qu'une telle diversité mérite toute votre attention et que chacun peut trouver là... chaussure à son pied !

N'oubliez pas non plus la session Freud mode d'emploi samedi prochain de 14 H à 18 H, ni le dîner débat de jeudi aux Noces de Jeannette avec Jean Sévillia, rédacteur en chef culture du Fig Mag, sur le thème : Jeanne d'Arc est-elle historiquement incorrecte ?

Mais voici les trois conférences :
Mardi 14 février: J’ai épousé un musulman - Candide au Pays d’Allah
Clotilde nous offre, sous le titre Candide au Pays d’Allah, un livre qui constitue un magnifique témoignage, d’autant plus important qu’elle part en Tunisie, après plusieurs années de mariage en France, sans aucune idée préconçue, amoureuse et sûre de son couple. Ceux qui cherchent à banaliser le monde islamique, ceux qui croient que les sentiments peuvent tout et sont au dessus des lois et des coutumes, qu’ils viennent écouter Clotilde : elle leur ressemblait avant de partir.
Mardi 21 février: Existe-t-il un modèle politique chrétien, réflexions autour de Carl Schmitt - Père Bernard Bourdin OP
Le Père Bernard Bourdin vient de publier pour la première fois en français l’ensemble des textes catholiques du juriste et philosophe allemand Carl Schmitt (1888-1985). Cela lui permet de poser d’une façon nouvelle la grande question des rapports entre religion et politique, quand cette religion est la religion chrétienne et quand l’Etat doit se définir par rapport à l’Eglise catholique. Comme toujours, la pensée de Carl Schmitt est à la fois puissante et nuancée. Elle nous permet de découvrir de nouveaux horizons.
En raison du Mardi gras, la conférence est suivie d’une petite soirée crêpes.
Mardi 28 février: Messe traditionnelle : histoire et mode d’emploi - Abbé Claude Barthe
L’abbé Barthe a plus d’une corde à son arc. Tantôt, en vaticaniste averti, il nous informe en avant-première de tel ou tel mouvement au sein de la Curie romaine, tantôt, délaissant l’actualité, il nous emmène au cœur du Sacré, à la découverte de ce qu’il appelle « le sens spirituel ». Mais qu’est-ce que ce sens spirituel ? Le sens que l’esprit donne aux textes bibliques ou aux rites liturgiques, par association et libre ressemblance. A suivre l’abbé Barthe dans son dernier livre Une forêt de symboles, à scruter cette première synthèse personnelle de plusieurs travaux antérieurs d’édition et de traduction, on découvre la puissance de l’esprit humain, quand, à travers le libre jeu des ressemblances, il médite et il contemple. Surprise : on retrouve ainsi, beaucoup plus facilement qu’on ne l’imagine au départ, tout ce que le scientisme a voulu nous faire oublier…

jeudi 9 février 2012

Une discussion avec Jean Madiran

Mercredi (hier donc) Jean Madiran recevait le Prix Renaissance, aux salons de l'Aéroclub. Un très beau moment d'amitié et j'allais dire pour employer un terme qui est familier à Jean Madiran, de piété, car nous qui étions là nous avons tous beaucoup reçu de lui. Le vieux lutteur a gardé toute sa vie ses valeurs, mais aussi sa jeunesse, son sens du jeu, avec des yeux bleus qu'un rien fait pétiller, son intelligence des moments. J'ai aimé l'échange avec la salle, ses réponses brèves, jamais emm.. au cours desquelles il donnait toujours l'impression ou de s'amuser avec les idées ou de les admirer, non pas comme venant de lui, mais comme s'imposant à son esprit. Il est né en 1920, mais il n'a pas fini de jouir des mille tours du réel...

Un moment, à table, nous parlions théologie. J'évoquais - il le connaissait bien sûr - le récent sermon de Mgr Fellay à Winona, si apparemment maladroit et en cela si peu fédérateur... Il en a profité pour insister sur la complexité des choses (sur la complexité de la situation de la FSSPX d'abord mais sur la complexité de toutes situations humaines). J'évoque la possibilité d'un syllabus des erreurs qui peuvent sortir d'une lecture de Vatican II. Il reprend la balle au bond, en soulignant que le syllabus, c'est négatif. Il est tellement difficile de savoir si nous affirmons ensemble les mêmes choses, si nous savons ce que nous disons quand nous disons quelque chose ensemble. L'acte de foi commun est possible parce que la foi est surnaturelle. Est-elle toujours pleinement consciente ou transparente à elle-même ? La vérité est tellement inaccessible... Mais il est plus facile de reconnaître ensemble des erreurs. Là-dessus on ne se trompe pas !. Je réfléchissais qu'au fond Popper avait raison et que l'esprit connaît souvent plus facilement le faux que le vrai. Mais finalement ce n'est pas plus mal : si l'esprit pouvait s'identifier à la vérité, ne risquerait-t-il pas de devenir pour lui-même une idole ?

J'ai été particulièrement heureux lorsque Michel de Rostolan, toujours impeccable à la manoeuvre dans la figure imposée de la remise du Prix, m'a demandé de dire quelques mots sur Jean Madiran. J'ai pu lui rendre hommage, en reconnaissant publiquement ma dette à son égard, les instants jubilatoires que sa dialectique m'avait fait passer, en particulier à 16 ou 17 ans, à une époque où je cherchais encore à comprendre quel rapport il pouvait bien y avoir entre l'éducation que j'avais reçue de mes parents et celle que me donnait le collège prestigieux de frères des écoles chrétiennes où je devais passer mon bac. Madiran, Louis Salleron m'ont donné des clés.

Et j'ai pu dire : Madiran, quoi qu'en pensent ceux qui ne l'ont jamais lu, c'est essentiellement un style, une manière d'exprimer l'évidence, de la chercher, intemporelle, dans les mille accidents du quotidien. Il faut saisir dans l'instant qui passe l'invariant, l'essentiel, ce que nous pouvons toucher du doigt, sans craindre d'être démenti par personne.

Je sais que, comme Jacques Maritain qu'il a beaucoup lu, Madiran n'aime pas Descartes, mais enfin qu'il me permette de souligner que ce culte de l'évidence, ce sens aigu de la lumière intellectuelle, si fugace, si ponctuelle soit-elle, ce souci de toujours revenir à l'élémentaire à l'indestructible, que l'on constate si souvent chez lui, cela vous a... oui... un petit air cartésien et français. Dans la crise de l'Eglise, Madiran a été ce cavalier français qui partit d'un si bon pas... et que nous rattrapons juste 40 ans plus tard lorsque, par exemple, nous nous accordons pour "lire le Concile à la lumière de la Tradition" (1965 dans Itinéraires, qui dit mieux ?).

Quel est son secret ? C'est un truc - Descartes ou pas -  qu'on ne trouve qu'en France : saisir le point où la clarté de l'évidence se conjugue avec l'élan d'une liberté assumée. Voilà, ce me semble, la méthode Madiran.

Vous voulez en savoir plus sur cet homme qui intrigue et qui irrite ? Procurez-vous le Monde et Vie à paraître vendredi, avec le très bel entretien donné par Madiran.

mercredi 8 février 2012

Freud mode d'emploi

Magnifique conférence ce soir de François Brunatto au Centre Saint Paul sur le Padre Pio, dont on peut dire qu'il a incarné le surnaturel au XXème siècle, avec des miracles extraordinaires et... irréfutables. François Brunatto insiste sur le témoignage de son père Emmanuele, qui fut le servant de messe mais aussi le défenseur actif de Padre Pio. Contre la méchanceté des clercs, il écrira quatre livre, dont le dernier est un appel à l'ONU pour la liberté du Padre Pio... C'est vraiment une histoire qui confirme le fond d'anticléricalisme qui sommeille en moi !

Quel rapport avec Freud direz-vous ? Aucun... et c'est bien là le pb de Freud et surtout du freudisme : croire que l'on peut tout résoudre avec le psychisme... Croire qu'il n'y a pas d'autre dimension dans l'homme que le psychisme. Croire que le démontage est suffisant. Croire que la recherche (et l'éventuelle découverte) des causes du Mal suffiront à le faire disparaître. Tant que l'homme n'a pas en tête un chemin de vie, des objectifs, des valeurs, des perspectives existentielles... on pourra toujours démonter la mécanique psychique, ça ne servira à rien... qu'à faire des erreurs au remontage, comme les meubles d'Ikéa, pour lesquels, au montage, il manque toujours une rondelle ou une planche... L'analyse c'est bien comme démontage, mais gare à la remointre. Gare à l'analyse interminable (quand on a perdu les pièces). Il y en a qui restent... tordus à vie (pas tous, non ! je dis simplement : e pericoloso)

Il me semble qu'il est important de s'intéresser à Freud. Non pas pour y aller au caterpillar, non. Mais pour se demander en quoi ça peut servir et en quoi c'est dangereux. Freud mode d'emploi donc.

Samedi 18 février, de 14 H à 18 H nous organisons une session au Centre Saint Paul sur cette question avec un médecin psychiatre le docteur de Labriolle et un spécialiste de Roland Dalbiez et de sa lecture chrétienne de Freud, Antoine de La Garanderie. N'hésitez pas à venir nombreux.

La connaissance de soi est quelque chose de fondamental : que je me connaisse pour que je vous connaisse, c'était déjà toute la pratique spirituelle de saint Augustin. Celui qui ne cherche pas à se connaître lui-même (ou simplement qui a peur de descendre dans son gouffre intérieur), celui-là a d'emblée renoncé à tout progrès.

lundi 6 février 2012

Niaiseries#1

Le diocèse de Saint Etienne fait dans l’humour. Pour leur campagne du denier 2011, l’évêque et son économe prenaient des mines de Deschiens pour détailler en nature leurs ‘besoins concrets’. Cela donnait : «200.000 litres de fioul» ou encore «le diocèse recherche également 191 familles pour loger, nourrir, blanchir les 191 prêtres du diocèse». Le clip concluait «Sinon, il y a le denier de l’Eglise». C’était somme toute assez bien vu, un peu horizontal mais bon enfant.

Hélas, la campagne 2012 prend ce mode bon enfant au pied de la lettre! le nouveau clip est une démarque du précédent, avec des gamins dans le rôle de Monseigneur, de son économe, et de toutes les autres personnes. Enfant-animateur de messe, enfant-prêtre qui baptise une poupée, enfant-évêque qui retire une sucette de sa bouche et récite: «pour que toutes ces personnes continuent à faire ce travail très chouette nous avons besoin de sous». Voyez plutôt:


Honnêtement, c’est très niais. Sans doute y a-t-il un public pour cela, c’est celui qui s’amuse des bêtises sages, qui rit de soi-disant mots d'enfants que l’on se refile d’une mamie l’autre, qui s'émeut de son propre attendrissement face aux «têtes blondes». C'est, à gros traits, la sociologie des «Le Quesnoy», cette famille aisée de «La vie est un long fleuve tranquille», le film d’Etienne Chatiliez. Et pourquoi pas, au fond? Les «Le Quesnoy» sont des gens honorables, il y aurait mauvaise grâce à leur reprocher leur gentillesse ou leur aisance – d’autant que c’est eux, typiquement, qui remplissent la caisse.

Le problème c’est qu’en France, en 2012, le catholicisme se réduit souvent à un trait identitaire de la bourgeoisie (petite moyenne et grande). Dans ce contexte, faut-il communiquer sur l’aspect ‘gentillet’? ce qui convient pour placer des lessives ou du poisson pané (éventuellement: pour promouvoir une association de bienfaisance) ne permet pas de faire passer l'Esprit. Tout de même! c’est d’Eglise que l’on parle, et ces saynètes enfantines (on y 'joue à...') me semblent particulièrement mal venues.

PS1 – Et que l’on ne convoque pas les «petits enfants» de l’Evangile – le Christ parlait de petits êtres fragiles et innocents, qui à l'époque n’étaient pas les personnes les plus importantes de leur famille. Quel rapport avec ceux du clip, qui sont des gamins contemporains, assurés dans leur jeu de la bienveillance (voire de la connivence) de leurs parents, grands- et arrières-grands-parents?!

PS2 – Il y a une certaine ringardise à faire en 2012 ce qu’on voyait dans les pubs télés d’il y a 20 ans, à savoir inverser les rôles d’enfants et d’adultes. Et bien... figurez-vous que La Croix y voit «une campagne choc».

vendredi 3 février 2012

Jeanne d'Arc ? C'est l'histoire d'une blonde

J'ai passé une merveilleuse journée à Domrémy, le village de Jeanne d'Arc, étymologiquement la maison de (saint) Rémy, ce petit village qui relevait directement du roi de France, au milieu de terres appartenant aux Comtes de Bar. Je vous parlerai très vite de l'occasion de ce voyage. Mais sachez dès maintenant que j'ai pu visiter le petit ermitage de Notre Dame de Bermont où Jeannette venait se recueillir plusieurs fois par semaines quand elle était enfant. On y a découvert, il y a dix ans maintenant, sous une fresque du XVIème siècle, les seules images de Jeanne qui soit quasiment contemporaine de la sainte, entre autres une petite Jeanne au bûcher. Eh bien ! C'est clair, pour ces gens qui ont connu Jeanne enfant, l'Héroïne qui a sauvé la France est une blonde.

Avec ce génie spirituel et ce génie politique et militaire qui étaient les siens, Jeanne était blonde. Comme pour mieux braver les préjugés !

L'église et la maison natale de Jeanne sont édifiées bien après sa mort, même si les emplacements n'ont pas changé (l'église, nous explique notre guide, le très compétent et très passionnant M. Ollivier, responsable du sanctuaire Notre Dame de Bermont, a été retournée à l'occasion de cette reconstruction au XVIème siècle). A Bermont, il y a vraiment une authenticité johannique, authenticité que je trouve aussi, de manière assez inattendue à la vaste Basilique du Bois Chenu, aux limites du village de Domrémy. Cet édifice inauguré en 1938 ressemble extérieurement à une église néogothique comme il y en a tant sur notre territoire. A l'intérieur, le modèle est celui des Basiliques romaines, avec mosaïque sur la voûte de l'abside : Jeanne éclatante au milieu des donateurs et sponsors (parmi lesquels le pape Pie XI). Mention spéciale pour les admirables fresques sur la vie de Jeanne peintes en 1913 par Lionel Royer : une douzaine, dans la nef, ça a de la gueule. Je n'oublie pas Pierre-Dié Mallet, oblat bénédictin, auteur du très bel autel du Christ roi, je vois encore les anges de pierre qui regardent ce Christ hiératique avec des yeux inoubliables et un mouvement de tout leur corps de lumière.

En vous écrivant ces quelques mots ce soir, je suis toujours sous le charme. Domrémy est un lieu où souffle l'esprit... et Bermont la (vraie) colline inspirée... Jeanne est toujours là, avec la discrétion des vraies jeunes filles à Bermont, avec la grandeur qui sied à sa Mission, au Bois Chenu.

mercredi 1 février 2012

[Vu Sur le Net] Un archimandrite prélat de Sa Sainteté

Un ami surfant sur des sites internationaux me signale la réjouissante nouvelle d'un archimandrite reçu dans l’Église catholique par Mgr Fellay. Et de la non moins réjouissante nouvelle de ce que Rome reconnait cette abjuration... et nomme l'archimandrite prélat de Sa Sainteté. Petit à petit, l'oiseau fait son nid, disent les Africains, et le plus long des voyages n'est qu'une succession de petits pas.
Mise à jour de 18H20 - La Croix a apporté un démenti à cette nouvelle - Selon Nicolas Senèze, qui cite le Père Lombardi à Rome: «Il n’existe aucune lettre signée par le cardinal Levada à propos l’archimandrite Bogoridi-Liven [...] Il y a seulement une lettre signée par le secrétaire de la Congrégation, Mgr Ladaria, qui répond – en termes généraux – à la demande de l’archimandrite sur la procédure à suivre pour entrer dans la communion de l’Église catholique, sans aucune référence à la Fraternité Saint-Pie-X».

(Traduction depuis le site polonais de la FSSPX)

"Le Cardinal William Levada, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a reconnu dans une lettre du 25 novembre 2011 que l’archimandrite Athenagoras Bogoridi-Liven a répudié (abiuratio) le schisme. Le dignitaire orthodoxe a accompli cet acte lors du 1er dimanche de l’Avent, devant Mgr Fellay, le supérieur général de la Fraternité Saint Pie X. l’événement a eu lieu au monastère bénédictin de Bellaigue (Auvergne). Le Cardinal Préfet a également reconnu la dignité ecclésiale du Père Bogoridi-Liven, en le nommant praelatus domesticus – c’est-à-dire Prélat de Sa Sainteté.
Mgr Bogoridi-Liven a 38 ans. il est né en Bulgarie mais sa famille est d’origine grecque et russe (son grand-père paternel vient de l’aristocratie grecque, sa grand mère de l’aristocratie russe). A sa majorité il est entré dans un monastère du Mont Athos, mais a ensuite été ordoné dans l’Eglise Orthodoxe Grecque, où il a rapidement été nommé archimandrite. Il se spécialise en liturgie, il connaît parfaitement, en plus des rites orientaux, le rite romain -  il y a consacré son doctorat à l’Université Théologique de Moscou  aux réformes de ce rite. Il maitrise plusieurs langues.

Mgr Bogoridi-Liven réside actuellement au monastère bénédictin Notre-Dame de Bellaigue, qui est lié à la Fraternité Saint Pie X. Il y est arrivé en aout dernier, en demandant à son prieur, Dom Placide, d’être reçu dans l’Eglise universelle."