jeudi 29 décembre 2011

Le 7 janvier : tous à Orléans avec Jeanne

L'association Avec Jeanne, qui vous propose de vivre 2012, l'année de tous les dangers, en compagnie de Jeanne d'Arc, la sainte de tous les courages, se devait de commémorer le sixième centenaire de sa naissance : officiellement, c'est le 6 janvier.

Pour permettre à un maximum de personnes de faire cette démarche spirituelle, l'association organise une messe à la cathédrale d'Orléans, le lendemain, samedi à 11 H. C'est l'abbé Ribeton, membre du Comité Jeanne d'Arc et supérieur de la FSSP en France, qui célébrera cet extraordinaire rite qui nous fait vivre. J'assurerai quant à moi la prédication. Le choeur Fra Angelico fera résonner les voûtes : sonnez fanfares triomphales comme dit le vieux cantique à Jeanne. Liturgie flamboyante en vue mais prévoir que la cathédrale n'est pas chauffée.

Nous nous retrouverons ensuite avec ceux qui le souhaitent pour suivre la visite de la cathédrale que son recteur a accepté très gentiment d'organiser lui-même pour nous : vitraux contant avec éloquence la geste de la sainte, autel de Mgr Touchet postulateur de sa cause sous saint Pie X etc. Nous nous répartirons ensuite dans plusieurs restaurants de la ville autour de la cathédrale, où nous aurons une évocation sur Jeanne d'Arc, Péguy et leur espérance (si vous voulez vous inscrire au repas, appelez Isabelle au 0618005521). Nous terminerons vers 16 H 30 par la visite de la salle Jeanne d'Arc au Musée archéologique.

Pour se rendre à Orléans, le plus simple, de Paris tout au moins, est de prendre le train : la gare est à un quart d'heure de la cathédrale et les navettes sont fréquentes.

Pour certains l'anniversaire de Jeanne est avant tout politique. Pour nous, cette circonstance doit être un grand temps fort spirituel, un beau moment d'amitié pour le courage. Il s'agit de garder en tête toute cette année une des grandes devises de Jeanne : Aides-toi, Dieu t'aidera. Un peu austère pour des voeux ? Non, réaliste.

lundi 26 décembre 2011

Lendemain de fête : maintenant fêter Jeanne d'Arc

Merci à tous ceux qui auront contribué à faire de cette fête de Noël au Centre Saint Paul une fête du coeur et de l'âme. Petits moyens cette année : pas d'instruments, pas de solistes. Mais le chant de tous, feuilles à l'appui, une chapelle bondée, un recueillement qui nous a portés et une véritable amitié spirituelle, qui s'est d'ailleurs concrétisée durant le réveillon. Au passage, merci à Eric pour ses Gambas marinées : ça restera un vrai souvenir culinaire pour moi. - Oui, je sais, ce n'est pas important. - En fait, je crois que si ! Quand on veut se réjouir ensemble à Saint Paul, c'est VRAIMENT la fête. N'oublions pas que ce mot de fête à une origine religieuse : dies festus, le jour faste. La vraie fête ne consiste pas à sortir en boîte ou à s'éclater, mais à se retrouver soi-même en accord avec le monde et en accord avec Dieu. Quel plus beau lieu que l'église (ou la chapelle en l'occurrence) pour exprimer cet Accord, en une sorte de point d'orgue vital ? Lorsque nous nous souvenons que notre Dieu est là, que son nom est Emmanuel, Dieu avec nous, nous ne pouvons pas être tristes, ainsi, d'ailleurs que l'a dit le Sauveur lui-même à plusieurs reprises.

A peine remis sur pieds, il nous faut envisager la prochaine occasion de nous retrouver. Ce ne sera pas dans l'espace trop étroit pour la circonstance du Centre Saint Paul, mais dans la cathédrale d'Orléans, à l'occasion du 6ème centenaire de la naissance de Jeanne d'Arc. Elle est née le 6 janvier 1412 (il fallait bien la Fête des rois pour Jeanne d'Arc). Nous nous retrouverons le 7 janvier, samedi à 11 Heures pour une messe d'actions de grâce, à la cathédrale d'Orléans. J'ai la joie de vous annoncer qu'en dehors de tout esprit de chapelle, elle sera célébrée par l'abbé Ribeton membre du Comité Jeanne d'Arc et supérieur en France de la Fraternité Saint Pierre. J'en assurerai quant à moi la prédication. Réservez dès maintenant cette date, prévoyez des billets de train et inscrivez vous, si vous le souhaitez, pour le repas qui suivra (prévoir 25 euros par personne) en téléphonant à Isabelle au 0618005521.

A travers cette messe et à travers le noble personnage de Jeanne d'Arc nous reconnaîtrons l'assistance divine dans l'histoire de la France, en confiant à notre chère Jeanne toutes les crises suspendues sur nos têtes comme l'épée sur la tête de Damoclès : il y a la crise économique, la crise de la société et de la sociabilité, la crise politique, la crise morale et forcément d'abord, comme la clé de voûte qui, manquante déclenche toutes les autres, la crise spirituelle.

On s'est longtemps dit : la guerre c'est pour les autres, au Viêt-Nam, en Afghanistan, en Afrique... On s'est longtemps cru au dessus des problèmes, nous autres Européens. Et pour la première fois depuis 60 ans, l'ombre de la crise s'étend sur l'Europe. Cette fois - est-ce pour 2012, je ne suis pas fakir - nous allons y avoir droit. Rien n'est fait pour sortir des engrenages macroéconomiques qui nous mènent immanquablement dans le mur. Mais nous savons que quelles que soient les difficultés, Dieu est et demeure le Maître de l'histoire. Il ne s'agit pas de cultiver l'inquiétude ou de jouer à se faire peur, mais au contraire de faire des provisions de force.

Jeanne d'Arc est un prodigieux exemple. Du point de vue humain, du point de vue de la situation de la France, en ce temps-là, on doit bien constater des parallèles : la France du gentil Dauphin Charles est marquée avant tout par la crise des élites, chaque féodalité jouant pour elle-même, sans aucune préoccupation d'un bien qui serait commun aux "bons et loyaux Français" comme dit Jeanne dans sa lettre aux Rémois. De cette crise des élites, dont Azincourt (défaite sanglante) en 1415 et le "honteux traité de Troyes" en 1420 ont constitué deux symptômes gravissimes, tout s'est enchaîné. Le Pays était livré aux grandes Compagnies et aux écorcheur, contre lesquels, durant toute la deuxième année de son aventure, Jeanne a voulu lutter, avec les 300 Piémontais qu'elle avaient engagés comme mercenaires. Evidemment, quand les Grands ne savent plus où ils habitent et dans quel camp ils sont, ce sont les petits qui trinquent. Imaginons à qui pourrait nuire une crise banquaire dans la France d'aujourd'hui ? En tout cas, il y aura certainement des écorcheurs pour profiter - financièrement - de la faiblesse des faibles. Cette crise mondiale du libéralisme - crise simplement entrevue pour l'instant - pourra-t-elle fournir à la France une occasion de se retrouver elle-même et de redécouvrir les solidarités fondamentales sur lesquelles se fonde toute vie sociale ?

Trêve de futuribles ! L'avenir n'est jamais ce que l'on croit qu'il sera. le réel est toujours plus riche que toutes les fictions. Mais je crois qu'il faut parfois s'arrêter et réfléchir : sedens computavit, dit l'Evangile à propos de celui qui construit une Tour. Cet anniversaire de la naissance de Jeanne n'est pas une commémoration comme les autres, mais l'occasion d'une anticipation spirituelle. S'il est vrai que gouverner, c'est prévoir, voilà une bonne occasion d'apprendre à se gouverner soi-même!

samedi 24 décembre 2011

Nous habituer à Noël

Lu sur la carte de voeux internautique d'un filleul cette formule de saint Irénée : "Dieu a voulu s'habituer à habiter parmi nous pour que nous aussi nous ayons l'habitude d'habiter avec lui"... Rien de très original direz-vous ! Cherchez bien ! Ce qui est original, c'est l'habitude. Ce qui est original c'est de demander une véritable habitude de Noël.

Pourquoi la demander ? Nous avons l'habitude de Noël, l'habitude des courses (Ah ! Faire chauffer la carte bleue), l'habitude des cadeaux (en donner, en recevoir aussi parce que je le vaux bien), l'habitude des guirlandes, l'habitude des chants de Noël (quoi qu'on les entende de moins en moins, il faut bien le dire)... Mais avons nous vraiment l'habitude de Noël ? mesurons-nous ce que cela représente ?
 
Nous avons l'habitude de la représentation de Noël, la crèche, les santons : au Centre Saint Paul, elle est magnifique, merci à ceux qui l'ont faite, avec amour. Il ne faudrait pas que nous prenions ces habitudes là. Noël devrait pouvoir nous surprendre, nous devrions y donner une âme neuve, disponible, et nous nous y mettons, l'âme déjà blasée.

En revanche, il est une chose à quoi il faut que nous nous habituiions : habiter avec Dieu, vivre dans la perspective de l'éternité, accomplir nos actes en pensant qu'ils recèlent quelque chose d'infini. Faire toutes les petites choses que nous faisons chaque jour comme si c'était des grandes, parce que ce sont  des actes qui, même modestes, ont un poids d'éternité.

C'est en prenant exemple sur cet enfant dans la crèche que nous pouvons comprendre ce mélange de fini et d'infini que nous sommes devenus. Cet enfant, c'est lui d'abiord, lui le premier qui représente à la fois l'Infini et le fini. En lui est toute la puissance de Dieu qui l'a fait naître d'une mère vierge. En lui est toute l'impuissance de l'homme et jamais l'homme ne peut se considérer comme moins puissant qu'en cet état de petite enfance. Je m'amuse souvent à imaginer les monstres (Staline Hitler) ou les Grands conquérants (Alexandre, Napoléon) quand ils étaient petit enfants. Mais Dieu enfant ?  Il faut nous habituer à ce spectacle de l'Enfant-Dieu, ou plus exactement essayer d'en prendre l'habitude.

Nous vivons dans un monde de peur, où l'homme est seul, sans Dieu, à la merci de toutes ses propres bêtises. On nous fabrique des accroche peur pour servir de dérivatifs, mais nous savons, depuis Nietzsche, que la peur la plus fondamentale est celle qui saisit ceux qui cru pouvoir tuer Dieu. Nous vivons dans un monde désenchanté, un monde sans Dieu, où l'Infini spatio-temporel est la seule explication tolérée. Il faut que ce soit Noël sur notre monde. Il faut que cet enfant nous guérisse des peurs irrationnelles qui nous saisissent. Il faut nous réhabituer au fait qu'il habite ce monde, qu'il est vraiment "Dieu avec nous" Emmanuel.

Même dans nos messes, nous ne savons plus reconnaître la présence de Dieu et les prêtres nous disent juste comme un souhait "Le Seigneur soit avec vous". Depuis Noël, il faut savoir que le Seigneur est avec nous. Ce n'est pas un souhait. peut-être parfois cela nous fait peur et nous avons envie de dire comme saint Pierre : "retire toi de moi Seigneur car je ne suis qu'un pécheur". Mais il faut nous habituer à Lui comme il s'est habitué à nous. Il EST avec nous. Réaliser la force de cette présence, la joie qu'elle procure, quelles que soient les crises, la certitude qu'elle nous apporte, avec l'élan qui va avec la certitude, voilà notre travail de Noël. Nous sommes trop habitués au folklore de Noël et pas assez habitués, pas habitués du tout à sentir le Seigneur avec nous : Emmanuel.

Réaliser cette présence, c'est comprendre que nous sommes tout proches de lui, que nos coeurs lui servent de crèche, même si ils ont été remplis d'ordures, même si dans cette mangeoire trop souvent nous nous sommes salement goinfrés. Réaliser cette présence, c'est comprendre que Dieu devenu enfant est tout proche de nous, mais qu'il est toujours très loin, et que sans le don de la foi, les Bergers eux-mêmes n'auraient pas pu l'adorer. Sans le don de la foi, les mages ne seraient pas venus de si loin. Il est tout près mais toujours à bonne distance. Nous ne pourrons pas le saisir, l'embrasser. Le spectacle nous est donné, l'Enfant n'est pas pour nous, c'est nous qui sommes pour lui. Il faut nous habituer à Noël, c'est-à-dire à cette toute proximité qui reste une distance incompressible. On ne rejoint cet enfant que par nos actes, par nos offrandes et par nos coeurs surtout.

Heureux les coeurs purs, car ils verront Dieu dans cet Enfant. Heureux les coeurs purs car ils sauront le dévorer des yeux, sans jamais prendre sa divine fragilité dans leurs bras, sans croire qu'ils pourraient jamais prendre Dieu pour eux, sans imaginer que cet Enfant puisse jamais leur appartenir.

jeudi 22 décembre 2011

Horaires de Noël

Samedi 24 décembre :
8h00 : Messe de la Vigile
9h30 à 13h00 & 15h00 à 16h30 : Confessions
17h00 : Matines de Noël
19h00 : Messe "pour les enfants"
23h00 : Veillée de Noël
24h00 : Messe de Minuit
Dimanche 25 Décembre :
9h00 : Messe de L'Aurore
10h00, 11h00 (Grand'Messe)
12h30 : Messe du jour
18h00 : Vêpres et Salut du T.S. Sacrement
19h00 : Messe du jour

Que l’Enfant Dieu nous bénisse tous!

Chers amis, cela fait quelques mois que vous n’avez pas eu de nouvelles de notre Centre Saint-Paul : réorganisation, interventions diverses à droite et à gauche, lancement de l’association Avec Jeanne, les impératifs d’action se succèdent et j’en viens à oublier l’essentiel : vous, c’est-à-dire tous ceux qui soutiennent notre action depuis longtemps, et sans lesquels rien n’est possible! Je ne voudrais pas laisser passer les fêtes de Noël sans vous donner signe de vie et sans vous tenir au courant de ce qui sera décisif cette année dans l’organisation de notre apostolat.

Plus que jamais, nous souhaitons recentrer l’action du Centre Saint-Paul autour de la culture chrétienne. Premier objectif : faire des «Mardis du Centre Saint Paul» qui existent, chaque semaine, depuis plus de sept ans maintenant, un rendez-vous incontournable de la dissidence culturelle chrétienne à Paris. Pour cela, l’objectif est non seulement de ne jamais laisser aucun fait de l’actualité religieuse et civilisationnelle sans commentaire, mais aussi de multiplier les débats d’idées, avec une liberté que l’on ne trouve pas ailleurs. Le temps n’est pas aux crépages de chignons autour de micro-différences. Nous savons où nous allons et ce qui nous guide. Nous n’avons pas peur de discuter et d’exercer autour de nous ce que le Poète de Martigues appelait «la bienveillance du seuil». Nous pouvons parler de tout, puisque nous savons quelle est notre espérance.

Ainsi, mardi 13 décembre dernier, nous sommes nous retrouvés autour de la laïcité, avec d’un côté, deux membres de Riposte laïque, les principaux animateurs de ce mouvement, Pierre Cassen et Christine Tasin, et de l’autre votre serviteur, accompagné de Gérard Leclerc, figure tutélaire du journalisme catholique et monarchiste. D’autres confrontations sont prévues… Un spécialiste de Luther viendra discuter avec le spécialiste de Cajétan que j’essaie d’être : de quoi refaire le match qui eut lieu au début du XVIème siècle. Et d’autres visites sont attendues, celle de Jean-Christian Petitfils pour son extraordinaire biographie du Christ, par exemple, celle de Jean de Viguerie pour son nouveau livre sur et contre les Pédagogues. Nous avons déjà reçu ce trimestre Reynald Secher sur le génocide vendéen ou Philippe d’Hugues sur Jeanne d’Arc au cinéma.

J’ai pu constater que dans les affaires de christianophobie, comme dans la polémique qui a entouré, dans les milieux traditionalistes, la tenue d’un sommet interreligieux à Assise (le projet Assise III, présidé par le pape Benoît XVI), les élucidations proposées au Centre Saint-Paul font référence et entretiennent la discussion, dans les revues ou organisations voisines. C’est que notre intérêt pour la culture n’est pas théorique. Nous ne nous situons jamais du point de vue de Sirius, pour étudier la musique allemande au début du XIXème siècle ou la peinture italienne au Quattrocento. Notre méthode, sainement empirique, consiste à partir de l’événement, à rendre compte de l’actualité.

Dans cette perspective, je voudrais vous dire aussi combien je suis fier de la place que prend notre Métablog – et son jumeau Tradinews - (tapez ces huit lettres sur n’importe quel moteur de recherche) : nous sommes à plus ou moins 1000 liseurs par jour. Nous cherchons à développer notre accès Internet, en proposant des podcasts de conférences du Centre Saint-Paul pour une somme symbolique.

Enfin, nous comptons soutenir l’association Avec Jeanne, dirigée par Eric Letty, pour que cette année 2012, qui risque d’être politiquement, économiquement et socialement morose, soit placée sous le signe de l’espérance. Je célèbrerai la messe du sixième centenaire de la naissance de Jeanne d’Arc dans la cathédrale d’Orléans. Et nous comptons organiser un Colloque Jeanne d’Arc chaque mois. Le premier colloque, qui s’est tenu le 3 décembre, est déjà à la disposition de tous ceux qui n’ont pas pu venir à cette journée de foi et d’amitié, pour 20 euros franco. Vous pouvez vous rendre sur www.avecjeanne.fr pour vous tenir au courant des diverses manifestations que nous prévoyons.

Mais tout de suite, c’est Noël qui vient : n’hésitez pas à nous rejoindre, au Centre Saint-Paul, pour le chant du Minuit chrétien, la messe de Minuit (à Minuit), suivie d’un réveillon « aux huîtres » et au foie-gras dans les Caves du Centre (métros Grands Boulevards ou Sentier : ils fonctionnent toute la nuit du 24 décembre). Jamais la naissance du Seigneur, jamais son avènement parmi nous ne nous trouvera blasés ou indifférents.

Que l’Enfant Dieu nous bénisse tous, et qu’Il bénisse votre générosité pour notre petite barque

Abbé G. de Tanoüarn
Pour ceux qui paient l’impôt sur le revenu, tout versement ouvre droit à la déduction de 66 % de la somme donnée du montant de vos impôts. Vous pouvez au choix adresser un chèque (à l'ordre d'ADCC ou d'ACIBP) au Centre St Paul (12 rue St Joseph - 75002 Paris), soit utiliser le carde jaune en haut à droite de ce blog.

[Vu Sur le Net] "Des gens bien"

L’abbé Henry Wuillod (fsspx) a passé le mois de juillet au Maroc. Il raconte :
"Oui, les Marocains sont des gens bien! Ma soutane n'a pas effrayé, au contraire, elle a plutôt soulevé une certaine estime pour l'homme de Dieu qui se manifeste. N'ayez crainte, cela ne fait pas de moi un inconditionnel de l'islam. Lorsque vous faites dans les Alpes une rencontre avec un bon paysan, c'est plutôt rare qu'il s'arrête pour vous parler, vous aurez plutôt droit à un rauque salut. Dans l'Atlas, le berger vous invite spontanément à boire le thé avec lui et il parlera volontiers avec ses mots, avec ses gestes… et son sourire très édenté vous touchera plus sûrement que la mine renfrognée du paysan cité ci-dessus. C'est donc comme toujours, il ne faut pas tomber dans la simplification, ni dans un sens ni dans un autre. Qu'il y ait un problème politique dans notre pays, ne veut pas dire que tout musulman est un bandit de la pire espèce. Une Europe vraiment chrétienne pourrait aujourd'hui encore faire un bien considérable, notamment envers ces pays du Maghreb, mais ce sont les Européens qui ont trahi et manqué à leur mission. Alors l'islam, fidèle à la sienne, nous envahit petit à petit."
Vous vous demanderez pourquoi je cite l'abbé Wuillod? En gros parce que l'islam inquiète les traditionalistes - or dans ce texte tout est dit, et bien dit, et avec bienveillance.

mercredi 21 décembre 2011

Le mauvais diagnostic pastoral

Dans l'optimisme merveilleux des années Soixante, on riait encore, avec Emmanuel Mounier, de ce qu'il avait diagnostiqué dès 1949, juste avant de mourir, comme "la petite peur du XXème siècle" : il s'agissait "juste" d'Hiroshima et d'Auschwitz : excusez du peu : petite peur ?... En réalité, 50 ans après, ces deux événements monstrueux font encore peur.

Mais c'est dans cette atmosphère de dérision pour le passé - même proche - et d'admiration optimiste pour le présent, pour l'immédiat, que Vatican II a été rédigé. C'est dans cette atmosphère que la Vieille dame de presque deux mille ans a été rapidement auscultée par des experts souvent autoproclamés, c'est dans cet esprit que le diagnostic pastoral a été posé. Cet esprit... c'est l'esprit du Concile que stigmatise Benoît XVI dans son célèbre discours du 22 décembre 2005 aux Membres de la Curie.

Le diagnostic ? On le trouve surtout dans Gaudium et spes. A ce moment nous sommes à la fin du Concile et les langues se délient. Mais dès la première Constitution Sacrosanctum concilium, qui valorisait, à plusieurs reprises ne l'oublions pas, la notion d'"expérience liturgique", on peut dire que "l'esprit" était là. Cet esprit ? Tout vaut mieux que l'ancien. L'époque a toujours raison.

Voici ce que cela donne dans Gaudium et spes : " Tirées des trésors de la doctrine de l'Eglise, les propositions que le saint Concile vient de formuler ont pour but d'aider les hommes de notre temps, qu'ils croient en Dieu ou qu'ils n'y croient pas explicitement, à percevoir avec une grande clarté la plénitude de leur vocation, à rendre le monde plus conforme à l'éminente dignité de l'homme, à rechercher une fraternité universelle, appuyée sur les fondements plus profonds, et, sous l'impulsion de l'amour (amoris et non caritatis dans le texte latin) à répondre généreusement aux appels les plus pressants de notre époque" (n°91, §1 In extenso, sous l'intertitre "Conclusion" ; j'aurais aussi bien pu citer une bonne partie de l'introduction, sur "les transformations religieuses" de l'époque qui est "un âge nouveau"). On s'étonne de l'Après-concile ? Mais c'est une application rigoureuse de ce"programme" !

Ce ralliement pur et simple "aux appels les plus pressants de notre époque" nous a fait oublier qu'à tous les moments de l'histoire, les chrétiens, par leur radicalisme et leur fidélité, sont le poil à gratter de leurs contemporains et non les zelanti de toutes les obsessions de leur temps. Comme nous le rappelle Benoît XVI à Malte, la culture chrétienne est d'abord "une contre-culture". Le Monothéisme hébreu jouait d'ailleurs déjà ce rôle critique au coeur du Croissant fertile, face aux sacrifices humains sur les Hauts lieux et aux prostituées sacrées qui hantaient les Temples de Baal.

Voilà la première partie du mauvais diagnostic : le ralliement à l'esprit d'un temps (qui n'est d'ailleurs plus le nôtre, qui en est même déjà très loin).

La deuxième partie du mauvais diagnostic tient à l'idée que s'il est vrai que "tout est pour l'homme", comme l'avaient expliqué Maritain et les "personnalistes", alors on doit pouvoir dire que "tout est dans l'homme" et que le salut est la conscience de cette autosuffisance. "En proclamant la très noble vocation de l'homme et en affirmant qu'un germe divin est déposé en lui, ce saint Concile offre au genre humain (?) la collaboration sincère de l'Eglise pour l'instauration d'une fraternité universelle qui réponde à cette vocation". On retrouve l'idée de fraternité universelle, que le futur Benoît XVI critiquera vivement (pour lui donner sa valeur véritablement chrétienne) dans une de ses première études, rééditée au Cerf.

Mais l'originalité de ce passage est double : d'abord cette fraternité universelle est "une réponse" à "la très noble vocation de l'homme" qui réalise "sa dignité". La mondialisation (dans sa version mondialisation heureuse) doit donc combler donc le coeur de l'homme si je comprends bien le raisonnement conciliaire... Relisez le texte : c'est frappat.

Ensuite, deuxième point, cette fraternité universelle est rendue possible, non pas par une foi commune ou un appel commun de Dieu, mais par "un germe divin déposé dans l'homme". Il suffit d'en prendre conscience, de ce germe et déjà tous les hommes pourront s'unir dans le bonheur. C'est une magnifique théorie de la laïcité comme religion minimale de toute l'humanité heureuse. Ah ! Si Ferdinand Buisson avait connu ce lyrisme, je suis sûr qu'il serait revenu de ses préventions viscéralement anticléricales, parce que, au fond, ce prix Nobel de la Paix 1927, son discours n'a jamais été très différent. Seulement voilà : il était mort bien avant la IIème Guerre mondiale. Dès qu'il est paru, ce discours conciliaire sentait la naphtaline.

Je ne parle pas même pas d'aujourd'hui où la mondialisation, après avoir été le prétexte à l'américanisation du monde, est devenue simplement le cache sexe d'une élite libérale supra-nationale, toujours prête à produire moins cher pour vendre plus cher.

Mais trêve de politique ! Certes les divagaions du Gros animal disait déjà Platon nous permettent de lire "en grosses lettres" ce qui se passe dans l'homme. Mais on ne peut pas faire l'économie d'une anthropologie.

Il nous faut donc préciser, d'un point de vue plus métaphysique, ce que recouvre ce semen divinum, ce germe divin qu'évoque le texte de Vatican II. Il y a, me semble-t-il, une référence implicite à saint Justin et à ce que ce Docteur apostolique appelait les "semences du Verbes", présentes dans la philosophie antique. Mais il me semble qu'en parlant de semen divinum, on passe subrepticement de l'idée apologétique traditionnelle d'une praeparatio evangelica (une préparation à l'évangile dans les cultures évangélisées postérieurement) à l'idée métaphysique nouvelle de l'immanence de Dieu dans l'homme. la fraternité universelle que l'on peut construire à partir de cela dit seulement l'efficacité réelle de ce semen divinum, qui, en quelque sorte, pousse tout seul dans l'histoire et éclôt en fraternité (quelle bonheur !), mais alors sans qu'il soit nécessaire de passer par la case "foi catholique" par exemple !

C'est autour de ce "semen" naturel de Dieu en nous que l'on découvre l'idée d'un désir naturel de Dieu, lequel suppose, pour être vraiment naturel quelque chose comme "la divinité de l'âme humaine" (la formule n'est pas de moi, mais d'un spécialiste éclairé du Père de Lubac).

Le seul problème avec ce désir naturel de Dieu - comme je le soulignais dans le post précédent - c'est qu'il n'existe pas [ou alors, dirait Alain Contat -cf. le débat qui a suivi le post précédent - existe comme l'actuation inconsciente et transcendante à nos natures individuées]. Résultat ? Les cathos écarquillent les yeux pour voir autour d'eux ou en eux quelque chose... qui n'existe pas [ou qui est inconscient-transcendant, ce qui...]. Et l'empirie élémentaire leur semble contre leur foi (alors que cette empirie va seulement contre une théologie particulière qui ne mérite pas de survivre au XXème siècle).

Que font ces cathos face au démenti posé par le réel ? Que font les charismatiques après la fête, quand ils n'ont plus envie de la faire ? Que font les prêtres, lorsque, pendant les derniers baptêmes qu'ils réussissent à négocier avec leurs paroissiens, au lieu de constater ce désir naturel de voir Dieu, présent dans l'assistance, ils sont obligé de constater que tout le monde parle et se fiche royalement de ce qu'ils essaient de faire ?

Les uns et les autres peuvent finir par se lasser d'en appeler avec constance à la nature divine de l'âme humaine... C'est pour eux que j'écris ce post, pour tel d'entre eux, afin qu'au lieu d'envoyer promener avec la fièvre naturelle de Dieu, la foi surnaturelle, il puisse se dire : refaisons le diagnostic. Renouvelons une anthropologie chrétienne respectueuse de la fragilité animale qui ne nous quitte jamais, ne nous prenons pas pour ce que nous ne sommes pas. Adressons nous aux hommes, non pas en les félicitant de "l'ivresse démocratique" (Alain Minc) qui les a saisis et du germe divin qui est en eux, mais en sachant attendre, avec eux, la fin de la cuite et les lucidité salutaire de la gueule de bois qui ne manquent pas de s'ensuivre.

Historiquement, comme le démontra naguère Tomas Molnar, c'est la pensée allemande qui a repris, avec une sorte de constance, les pensées de l'immanence de Dieu. Au Concile, c'est Karl Rahner, justement, avec son concept d'autocommunication de Dieu, qui rend la révélation historique quasiment facultative ( le"dernier Rahner" finit son "service du Verbe" au voisinage de l'agnosticisme). Pourquoi faut-il qu'une vulgarisation théologique néoconciliaire reprenne ces thèmes si étrangers à la foi de l'Ancien comme du Nouveau Testament ?

La superstition grecque du Dieu immanent à la nature a-t-elle quelque chose à voir avec ce que le cher Claude Tresmontant appelait "la sainte Bibliothèque hébraïque" ? Quelque chose à voir avec le grec si lumineux des Evangiles ? Pastoralement, en tout cas - expérience faite : Crécy, Poitiers et bientôt Azincourt - cette superstition grecque ne marche pas. C'est vrai aujourd'hui comme c'était vrai au temps du Discours paulinien sur l'Aréopage : normal. Cette idée selon laquelle "nous sommes de la race des dieux" est un héritage subrepticement introduit dans cette parole en action qu'est notre évangile. Dans l'Evangile, nous apprenons que nous sommes des pécheurs. Tous. Que, seuls, nous sommes incapables de faire le bien. "Sans moi, dit Jésus, vous ne pouvez rien faire" : sommes-nous encore capables de prendre cette phrase au pied de la lettre ? Si non, quelle est notre foi ?

La dialectique de l'image et de la ressemblance de Dieu que nous propose le Premier chapitre de la Genèse se comprend au regard de ces catastrophes que sont les péchés des hommes. En revanche, l'analytique de l'autocommunication de Dieu et du germe divin dans l'homme oublie simplement ce "détail" de l'histoire : le péché.

Mais cette dernière remarque nous emmènerait trop loin.

mardi 20 décembre 2011

Désir de Dieu, désir de l'homme

Mgr Fisichella, ancien recteur magnifique de l'université du Latran actuellement président du Conseil pontifical pour la Nouvelle évangélisation, répond à Eric Martin, notre confrère de Nouvelles de France, à propos des chances de la Nouvelle évangélisation : "En Occident, il y a une situation paradoxale : d’un côté on veut que Dieu soit mis de côté, on ne veut pas que les croyants aient une présence sociale mais d’un autre côté, le désir de l’homme est de connaître Dieu. Vous savez, Dieu est présent au plus profond de chaque personne. On ne peut pas éteindre le désir de Dieu et c’est pour cela que la situation est paradoxale". L'année 2012 va être déclarée Année de la nouvelle évangélisation... Nous sommes donc dans le mouvement en réfléchissant à cette question délicate : comment évangéliser l'Europe aujourd'hui ?

A l'intérieur de cette grande interrogation, il importe de réfléchir sur la manière dont les hommes désirent Dieu. Y a-t-il encore un désir de Dieu ? Cette question dans la question est vraiment fondamentale : on ne donne pas à boire à un âne qui n'a pas soif. Si l'homme occidental s'éloigne de la religion et s'éloigne de la foi, c'est qu'il y a des raisons qu'il importe d'élucider, à la fois à travers une expérience pastorale et à travers une anthropologie qui sonne juste. Je vous disais récemment pourquoi je ne crois pas en l'homme... Je pense que, trop souvent, dans certaines approches cléricales, marquées par l'optimisme des années 70 (Ah les 30 glorieuses !), on considère que le désir de Dieu est un fait universel, universellement ressenti et qu'en faire une question relève de l'outrecuidance. C'est déjà presque un doute sur la validité du Concile.

Eh bien ! Doutons, alors, doutons !

Ce qui m'a toujours frappé, dans mon ministère sacerdotal, ce sont les échecs. Je me revois, par exemple, auprès d'une personne qui sait qu'elle va mourir. Bon contact. On parle d'elle, de sa famille, de son métier... - Voulez-vous vous confesser ? - Non ! Je parle de cet échec-là... Dans la même situation, je pourrais aussi dire des revirements, des conversions profondes, parce qu'il y en a aussi, et quelles ! Je suis parfois ébloui par les âmes qui, aux portes de la mort, sont dans la vérité pure... Elles m'intimident et font mon admiration, lorsqu'elles se tournent vers Dieu. Je me souviens d'un cadre, encore jeune, qui, après s'être confessé, m'avait demandé de lui trouver une image qui l'avait toujours frappé et poursuivi : la résurrection du Christ, avec simplement Marie Madeleine qui scrute le tombeau vide. Il est mort, cette image devant les yeux.

Mais c'est des échecs que je veux parler. Pas la peine de sonner la trompette de la nouvelle évangélisation, si l'on n'a pas réfléchi sur les échecs.

Ainsi les chevaliers français pendant la guerre de 100 ans. Ils se prennent Crécy et Poitiers dans les gencives (à Poitiers, 1356, le roi Jean II le bon est fait prisonnier). Il faut la sagesse et la curiosité universelle de Charles V pour remarquer que l'on devait faire la guerre autrement. Il fait connétable de France un chef de bandes breton Bertrand du Guesclin, qui avait compris que les Anglais étaient vainqueurs de la guerre chevaleresque par la guérilla des archers et des égorgeurs avec leur couteau de boucher... Du Guesclin s'est bien gardé de toutes batailles rangées. Il a reconquis la France à son roi en opposant la ruse à la guérilla et la guérilla à la ruse. Et puis en 1415, la chevalerie française n'avait rien compris, rien appris, rien oublié. Et le scénario catastrophe de Crécy s'est reproduit 80 ans après, à Azincourt, parce que sans réfléchir, les braves français s'étaient retrouvés face aux pieux aiguisé des Anglais, à leurs flèches et à leurs couteaux de bouchers, non pris en défaut dans leur courage, mais dans leur stratégie.

Vatican II, pastoralement, c'est Crécy et Poitiers pour l'Eglise. Les chiffres de la pratique en France, collationnés par un Jean de Viguerie, suffisent à le montrer. Le grand lâcher-prise religieux se situe au début des années 70, face aux applications aventurées du Concile. Cette pastorale n'est pas bien sûr la seule cause de la déchristianisation. Mais le moins que l'on puisse dire, c'est que la stratégie conciliaire n'a rien changé à la Bérézina ecclésiale. Il ne faudrait pas que la nouvelle évangélisation ressemble à Azincourt : le même courage, le même élan juste et pieux des Ducs et chevaliers et l'horrible échec à l'arrivée, parce que l'on n'a pas assez réfléchi sur les causes du premier échec.

Il est urgent de réfléchir sur Vatican II. Avec beaucoup d'amour. Non pas dans un esprit de critique systématique ou d'autojustification tout aussi systématique de part et d'autre, mais parce qu'à Vatican II, l'Eglise a voulu affronter la modernité idéologique, et au dernier moment, au lieu d'affronter... elle a... vénéré, elle a cultivé, elle a voulu servir. Comme le déclarait Paul VI dans le justement célèbre Discours de clôture, le 8 décembre 1965 : "Au Concile, le culte du Dieu qui s'est fait homme est allé à la rencontre du culte de l'homme qui se fait Dieu. Qu'est-il arrivé ? Un affrontement ? Une incompréhension ? Non : un immense mouvement de sympathie a débordé du Concile sur le monde". Notez que lorsqu'il parle du "monde", dans ce texte, c'est l'idéologie mondaine que Paul VI a en vue, c'est "le culte de l'homme qui se fait Dieu" comme il le dit lui-même.

"Un immense mouvement de sympathie" ? Quel optimisme ! Et combien il sera cruellement démenti par les faits.

Il est vrai que plus personne aujourd'hui, à l'heure de la christianophobie, n'oserait faire montre de l'optimisme de Paul VI à l'issue du Concile. Mais la théologie fondamentale qui a fait Vatican II reste en vigueur, et c'est cela que nous montre l'entretien de Mgr Fisichella.

L'idée principale de cet entretien et de ce que j'appellerais ici la théologie fondamentale néo-con (non : pas néo-conservateur, néo-conciliaire), c'est qu'il existe en tout homme un désir de Dieu et que ce désir, présent consciemment ou inconsciemment, ne demande pour s'exprimer que deux choses : que l'Eglise sorte de ses bastions et qu'elle se rende aimable. On peut dire que cette idée est au coeur de la réflexion de ce professeur d'apologétique surdoué et multiintervenant qu'était le Père Henri de Lubac, fait cardinal par Jean Paul II en 1994.

Quiconque a fait un peu d'évangélisation de rue sait que ce double postulat (sur lequel repose Gaudium et spes, je peux le prouver) est totalement théorique. Non, il ne suffit pas de montrer l'Eglise en gloire, ayant fait repentance, pour attirer les foules. C'est un fait que le glorieux pontificat ecclésial de Jean Paul II suffirait à prouver si l'on en faisait un bilan optimiste : des millions et des dizaines de millions de personnes dans le monde ont vu le pape. Le plus grand rassemblement de l'histoire de l'humanité a eu lieu à Manille aux Philippines, à l'occasion des JMJ. Mais le déclin de l'Eglise continue. Et personnellement ce constat me suffit pour remettre en cause cette doxa théologique du désir naturel de voir Dieu : contra factum non fit argumentum.

Le déclin de l'Eglise n'est donc pas lié à une Institution insuffisamment populaire, à des manifestations trop étroites, trop fermées...

Il me semble que l'on peut lui donner deux raisons : la destruction de l'homo religiosus en Occident et l'Occidentalisation morale et mentale du monde non islamiste premièrement. Le mauvais diagnostic pastoral deuxièmement.

On ne peut pas faire grand chose contre le premier constat. Mais on peut s'appliquer à soi-même ce jugement. L'homo religiosus est mort. Le sacré dans nos société n'est plus religieux mais purement médiatique et c'est quand un pape devient médiatique (Jean Paul II mais aussi Benoît XVI à sa manière) qu'il redevient sacré. Comme le montrait Chantal Delsol dans un article récent, le sacré a changé de lieu. le sacré n'est plus lié au religieux et au transcendant. Il est médiatique, pour la plus grande gloire des footballeurs et des apprentis dictateurs. L'homme a tout à perdre à cet oubli de Dieu, comme le montre Benoît XVI de son côté.

Il nous faut simplement nous souvenir de cette migration du sacré pour notre propre vie intérieure et faire notre examen de conscience sur notre capacité à pratiquer la vertu de religion.

Le mauvais diagnostic pastoral, j'y reviendrai. il me semble que c'est une réflexion sur le désir de Dieu et sur le désir de l'homme qu'il nous faut engager. De façon à ne pas être dupes des désirs qui nous agitent. Ah les vitrines de Noël ! L'argent nécessaire aux cadeaux ! L'argent indispensable pour les cadeaux que nous voulons nous faire à nous-mêmes. EN VÉRITÉ, peu importe tous ces désirs qui n'ont pour but qu'eux-mêmes et qui nous empêchent de voir et d'aimer les autres, qui nous empêchent de désirer Dieu...

S'il y a un moment où le désir de Dieu peut nous étreindre pour peu que nous y mettions toute l'attention dont nous sommes capables, c'est ce moment de Noël, ce sont les chants de Noël qui souvent nous transportent dans leur simplicité, parce que dans la musique il y a la méditation devant la crèche, la crèche invisible que nous gardons sans cesse devant les yeux.

lundi 19 décembre 2011

Les deux Testaments

Jean-Marie Elie vient mercredi 21 décembre à 20 H 15 au Centre Saint-Paul nous parler des rapports entre l'Ancien et le Nouveau Testament. Il vient ainsi chaque mois de manière aléatoire (la dernière fois le... 9 novembre). Il me semble que son enseignement recèle une richesse particulière.

Ancien rabbin, il a longtemps exercé dans le quartier de Mea Sharim à Jérusalem ; il est aujourd'hui converti au christianisme. Et c'est dans la perspective du Christ qu'il travaille les textes... comme un rabbin. Vous croyiez connaître les grands personnages de l'Ancien Testament, Abraham, Isaac, Jacob, Moïse etc. Vous les découvrez dans une lumière nouvelle qui est celle du Christ. Et vous vous demandez comment vous ne vous êtes pas aperçu plus tôt des étonnantes harmonies du texte biblique, ancien et nouveau Testament. La révélation est une. C'est le même esprit qui souffle, non seulement dans les paroles mais à travers les actions des uns et des autres. Ainsi la Vierge Marie, nourrie de l'Ecriture, comme le montre le Cantique du Magnificat, est en même temps "une chrétienne d'avant le Christ". "Elle a enfanté Jésus dans son coeur avant de le porter dans son corps" explique saint Augustin.

D'une manière très belle d'ailleurs, le conférencier commence chacune de ses conférences en invoquant la Vierge Marie. n'est-elle pas la fille de Sion par excellence, celle qui a "intégré", avant même d'avoir reçu l'enseignement du Christ, le meilleur de la mise en demeure des prophètes.

Qui s'élève sera abaissé, nous dit le Christ et qui s'abaisse sera élevé"(Lc 14, 11). Ne trouve-t-on pas cette idée, déjà, dans Isaïe : "L'orgueil humain sera humilié, l'arrogance des hommes sera abaissée Yahvé sera exalté, lui seul" (Is. 2, 17). Différence ? "L'élévation" qui était réservé à Dieu, par l'incarnation, se trouve communiquée aux hommes : Qui s'abaisse sera élevé.

dimanche 18 décembre 2011

[conf'] Noël à la lumière des évangiles de l’enfance - par l'Abbé Vincent Baumann

Conférence le mardi 20 décembre 2011 à 20H15 au Centre St Paul - L'auteur dédicacera son ouvrage. - PAF: 5 euros. Étudiants, chômeurs : 2 euros. - La conférence est suivie du verre de l'amitié.

On a beaucoup glosé au sujet des récits que Matthieu et Luc offrent de la conception et de la naissance du Sauveur. Une certaine critique rationaliste, déroutée par leur caractère à la fois lapidaire et empreint de merveilleux, a cru devoir en nier l’historicité, pour n’y déceler qu’un propos de type mythique, peu soucieux de véracité, artificiellement formaté pour servir les thèses théologiques de l’Eglise primitive.

Puisque de telles thèses conduisent au divorce navrant du « Jésus de l’histoire » (tel que nous le livrent les historiens agnostiques : un homme comme les autres) d’avec le « Christ de la foi » (celui, totalement sublimé, que nous révèleraient les évangiles),  il convient de rétablir la vérité historique et théologique de ces récits. Loin d’être des mythes ou des fictions, ils relatent admirablement le début de la vie de Jésus de Nazareth, qui est le Christ. Retrouver le caractère historique, la cohérence et la profondeur de ces évangiles, c’est, au-delà de tout préjugé, s’approcher au plus près de Celui qui n’a pas dédaigné d’entrer dans l’histoire des hommes pour y être connu et aimé à la fois comme Dieu et comme homme.

samedi 17 décembre 2011

A votre bon cœur!

Le Centre Saint Paul vit de votre générosité – il fonctionne pour vous, mais aussi par vous. Tous les dons sont les bienvenus: les plus modestes comme les plus conséquents, bien évidemment. Si vous payez l’impôt sur le revenu, sachez que les donateurs reçoivent un reçu fiscal, qui permet de récupérer en 2012 les deux tiers de la somme versée avant le 31 décembre. Grace à ce dispositif, si vous décidez un effort financier personnel de «30€» pour le Centre Saint Paul, vous pouvez envoyer le triple : «90€». Je répète : ces «90€» ne vous couteront, in fine, que «30€» - votre impôt baissant de «60€».

Pour aider le Centre St Paul, vous pouvez envoyer un chèque (à l'ordre de "ADCC" / Centre Saint Paul / 12 rue Saint-Joseph / 75002 Paris). Vous pouvez aussi payer en ligne en toute sécurité - il suffit de cliquer sur le bouton "Faire un don", dans la colonne de droite de ce blog. D'ores et déjà: MERCI.

MàJ - un anonyme me fait remarquer que les «90€», il faut encore les avoir. Certes, et tout l'intérêt du dispositif est qu'il s'applique aussi pour des montants inférieurs: Vous pouvez envoyer «9€» par exemple, qui ne vous coûteront que «3€» in fine.

Notre nouveau nom : ultra

Jusque là nous étions des «traditionalistes» ou des «intégristes». Nous-mêmes (nous, les catholiques attachés au rite ancien de la messe), nous nous nommions «traditionalistes» quelle que soit notre chapelle ou notre paroisse, et les grands médias reprenaient ce terme. Quand ils voulaient nous stigmatiser ils utilisaient «intégristes».

Les catholiques conservateurs entretenaient un distinguo plus subtil: ils réservaient «traditionalistes» pour les intégristes en union juridique avec Rome. Les autres traditionalistes (de la FSSPX par exemple) étaient des «intégristes». Voyez Isabelle de Gaulmyn, qui dans La Croix nommait intégristes... «les catholiques se proclamant hors Église, schismatiques». Je ne suis pas certain que nos coreligionnaires de la Fraternité Saint Pie X se soient jamais proclamés hors de l’Eglise, ni schismatiques. Mais ne boudons pas notre bon plaisir: dans cet article d’il y a déjà près de deux ans, Isabelle de Gaulmyn reconnaissait déjà que «c’est beaucoup plus compliqué».

Il fallait trouver autre chose, et justement est apparu «ultra-catholique». C’est encore Isabelle de Gaulmyn qui nous en parle, et son nouvel article est comme la suite de l’ancien. Elle note que «l’expression fait fureur depuis quelques semaines»: de fait, voyez Jean-Marie Guénois (Le Figaro – «Les ultras-catholiques ont-il pris le dessus?»), voyez Stéphane Thépot (Le Monde - «Ultra-catholiques et médias»), voyez Le Nouvel Observateur, L’Express ou Le Point. C’est certes au sujet des pièces blasphématoires, mais je parie que le terme restera et se généralisera dans la langue médiatique, parce qu’il est facile, qu’il emprunte à la sociologie (c’est leur domaine) plus qu’à la foi, et qu’étant neutre (intégriste ne l’était pas) il n’enferme pas le journaliste dans une acrimonie qui relève d’un combat qui n’est pas forcément le sien.

vendredi 16 décembre 2011

Pourquoi je ne crois pas en l'homme

"Son pays est rempli d'argent et d'or et il n'y a pas de limite à ses trésors ; son pays est rempli de chevaux et il n'y a pas de limite à ses chars. Son pays est rempli d'idoles : ils se prosterneront devant l'oeuvre de leurs mains. Les humains seront humiliés, l'homme sera abaissé" (Isaïe 2, 7-9). Pourquoi cet abaissement de l'homme ? Est-ce la haine de l'humain qui dirige le prophète ?

Ces textes sont-ils audibles, sont-ils lisibles aujourd'hui ? il est clair en tout cas que les prophètes ne sont pas des humanistes. Ils ne croient pas aux réalisations historiques des grandes puissances qui parviendraient à un statut enviable et indépassable, avec leur argent, leurs armes et leurs fausses croyances ou leurs idéologies. Les prophètes ne croient pas en l'homme tout simplement.

Lors du débat avec Riposte laïque au Centre Saint Paul, bientôt disponible ici, Christine Tasin a eu ce mot admirable de naïveté : Je crois... en l'homme. Elle n'a d'ailleurs aucune hostilité envers le christianisme, mais elle ne partage pas la foi en Dieu des chrétiens. Elle croit en l'homme. Cela m'a fait penser au Discours de Paul VI à l'Unesco : "Nous aussi, nous plus que quiconque, nous avons le culte de l'homme".

Je ne veux surtout pas refaire le match ici, mais j'ai été à la fois touché et navré de cette affirmation que personne ne lui demandait. Touché parce que cette foi en l'homme marque bien l'universalité de la vertu de foi (je parle de foi au sens le plus large, au sens naturel du terme, au sens où il me semble que l'on peut aussi bien parler d'une foi athée). Navré, parce que la foi en l'homme, cela vous a un petit air "années 60", un peu passé de mode. Paul VI avait des excuses, étant donné le progressisme ambiant. Nous n'en aurions plus aujourd'hui, nous chrétiens, à parler de foi en l'homme. Les Trente glorieuses sont bien finies ! Et de telles propositions sont datées.

En même temps, dans la bouche de Christine Tasin, ce culte de l'homme ne remonte pas à Emmanuel Mounier, au Père Teilhard de Chardin et aux progressiste de ce temps-là... Pour comprendre une telle assertion il faut, je crois, remonter à Rousseau (Jean-Jacques), car la formule, initialement est de lui, dans L'Emile. Ce sont d'abord les pédagogues et les pédagocrates qui croient en l'homme, comme nous le rappelle Jean de Viguerie dans un petit ouvrage paru tout récemment aux éditions du Cerf. C'est qu'au siècle des Lumières, on ne lisait pas les Prophètes. A la Bible, on préférait les philosophes (ceux qui s'autoproclamaient tels). Plus tard, le romantisme (le romantisme à travers les âges comme dit Philippe Muray) abonde lui aussi dans la religion du Bien. "Tout est bien", voilà la foi du XIXème siècle en trois mots.

Aujourd'hui, bien forcés, on a pris un peu de recul avec la production du siècle des Lumières et on ne croit plus aux foucades romantiques. la littérature contemporaine est marquée par la rémanence du problème du Mal. En 1948, Emmanuel Mounier, du haut de son progressisme dogmatique, traitait Auschwitz de "petite peur du XXème siècle" (qui n'entraverait pas le progrès inéluctable de l'humanité). Aujourd'hui, on revient à Auschwitz comme à une sorte d'apothéose d'un Mal qui existe toujours. C'est le sens des Bienveillantes de Jonathan Littell, prix Goncourt il y a trois ans. Mais Les âmes grises de Philippe Claudel (qui ont pour cadre non la Deuxième mais la première Guerre mondiale) ne constitue pas un roman moins pessimiste, sur l'homme et sa faculté de faire le bien. Tout le monde s'accorde à reconnaître "l'insoutenable légèreté de l'être" détectée par Milan Kundera, entre autres dans le roman qui porte ce titre. Encore l'écrivain franco-tchèque avait-il le courage de reconnaître que l'amour était le seul remède à cette insoutenable légèreté. l'idylle entre tomas et teresa qui clôt le livre, indique l'échappée belle encore possible. Ni Littell, ni même vraiment Philippe Claudel, malgré quelques bluettes cinématographiques, ne croient au remède.

Si je parle de littérature, c'est parce que je crois que ces oeuvres représentent un symptôme de l'air du temps. L'air du temps n'est pas à l'optimisme, sur fond de crise structurelle et de tsunamis radioactifs. Non, nous ne croyons plus en l'homme. Certains trouveront cela dommage et s'essaieront à réactiver le vieil optimisme progressiste (ou conciliaire). Mais la saison des cerises est bien finie. Faut-il s'en affliger ?

Revenons aux prophètes ! Ils n'ont pas cessé d'annoncer le malheur et de stigmatiser les péchés d'Israël. Je viens de vous citer Isaïe, dénonçant l'orgueil humain, le péché biblique par excellence. Mais Jérémie n'est pas plus optimiste : "Le péché de Judas est écrit avec un stylet de fer, gravé avec une pointe de diamant sur la tablette de leurs coeur et sur les cornes de leurs autels. Ainsi parle Yahvé : Malheur à l'homme qui se confie dans l'homme, qui met sa force dans la chair et qui s'écarte de Yahvé. Le coeur est compliqué plus que tout, il est incurable, qui peut le connaître" (Jer. 17, 1, 5 et 9).

La doctrine augustinienne (pascalienne) du péché originel est exposée ici plusieurs siècles avant le Christ de façon saisissante. Elle est toujours d'actualité ! On ne peut pas dire que c'est Isaïe qui serait pessimiste : Jérémie paraît encore plus précis : il envisage le mal comme quelque chose d'universel : "les mauvais penchants de leur coeur" (3, 17) ; "l'obstination de leur coeur mauvais les fait aller en arrière non en avant" (7, 24) ; "ils sont bêtes et insensés" (11, 8) ; "coeurs obstinés pour ne pas m'écouter" [dit Dieu] (16, 12). "Nous agirons chacun selon l'obstination de notre coeur mauvais" (18, 12). "Si le mal est invétéré, c'est que le centre des facultés spirituelles est perverti" commente le Père Ligier, après avoir donné cette liste impressionnante de textes (Péché d'Adam et péché du monde p. 107).

Mais reconnaître la prégnance du péché sur le coeur de l'homme, c'est déjà chercher d'où peut venir son salut. Si l'homme ne se sauve pas lui-même, qu'est-ce qui peut le sauver ? Pour conclure sa charge antihumaniste, Isaïe écrit : "Séparez-vous des hommes qui n'ont qu'un souffle dans les narines. Car combien peut-on les estimer ?" (2, 22). Le salut viendra à l'homme, non pas de l'homme mais de Dieu. C'est l'abc de la foi chrétienne et l'on n'ose plus le dire ou l'écrire de cette façon. Ce que j'aime entre autres dans les prophètes, c'est qu'ils n'avaient pas peur des mots !

mercredi 14 décembre 2011

Isaïe et notre histoire

"Ils forgeront leurs épées en socs de charrue et leur lances en faucilles. Les peuples n'élèveront pas l'épée l'un contre l'autre et ils n'apprendront plus la guerre. Maison de Jacob, venez, marchons à la lumière de Yahvé". Ce texte d'Isaïe, je l'ai longtemps pris pour le texte caractéristique de l'hyperbole prophétique, me disant qu'il ne signifiait rien qu'un avenir utopique de l'humanité, sans lien avec l'histoire réelle.

C'est René Girard qui m'a fait changer d'avis. Selon l'auteur de La violence et le sacré, le christianisme est établi dans le monde pour remettre en cause le règne de la violence. En sublimant les victimes, le christianisme donne un autre sens à la spirale mimétique, en exerçant concrètement dans l'histoire une sorte de magistère de la Miséricorde et de l'Amour, qui va finir par éteindre, si cela est possible, cette génération spontanée de la violence à laquelle on a toujours, jusqu'au Christ, obscurément reconnu le dernier mot. Face à ce mécanisme triomphant de la violence, il y a la Révolution chrétienne, qui passe par une révélation, par la connaissance nouvelle d'un recours contre la violence, qui est l'amour. "Le texte biblique qui va le plus loin dans cette Révélation est celui d'Isaïe 2" écrit Girard (Les origines de la culture p. 120, avec un problème - évoqué pudiquement en note - pour identifier ce à quoi Girard se réfère). L'un des objectifs d'Isaïe, prophète, est d'évoquer et d'annoncer ce nouvel âge d'or qui est... la chrétienté. Non pas la chrétienté comme communautarisme opposé à d'autres communautarisme, mais ce que j'appellerai la chrétienté comme espérance. Je pense aux tableaux de Lucas Cranach sur l'Age d'or. De cet âge d'or, on trouve trace dans Platon (Le Politique) mais il est d'abord annoncé, trois siècles plus tôt, par Isaïe. On peut d'ailleurs évoquer aussi la vision idyllique du chapitre 11, qui sort du monde des hommes, mais nous dit substantiellement la même espérance d'une Paix triomphante : "Le loup habitera avec l'agneau, la panthère se couchera avec le chevreau etc." (Is. 11, 6)....

Cette paix triomphante, elle commence à Noël son règne sur le monde. Il ne s'agit pas pour elle d'éliminer la guerre : trop facile. La paix qui commence à Noël semble immédiatement démentie par le sang des Innocents tués à Bethléem par ordre d'Hérode. Le chant des anges : Paix sur la terre aux hommes qu'Il a choisi, est interrompu par un terrible ululement : "C'est Rachel qui pleure ses enfants, car ils ne sont plus" écrit saint Matthieu, en se référant à l'Ancien Testament.

Quelle est donc cette déclaration de paix, interrompue par le chant des pleureuses ? Il ne s'agit pas de dire que le mal et la mort ont disparu, que la guerre est désormais "hors la loi" selon une formule prétentieuse. mais il faut reconnaître que plus on avance dans l'ère chrétienne, plus on reconnaît que la violence n'est pas "l'ultima ratio". il y a une raison plus forte que la violence, il y a une Puissance plus grande que celle que l'on découvre dans les habituels rapports de force. Quel est son nom ? Isaïe parle de "justice" : ce n'est évidemment pas celle qui provient d'arbitrages humains... C'est celle qui vient de "la lumière de Yahvé" à laquelle, désormais, nous sommes invités à marcher. Qui ne marche pas "à la lumière de Yahvé" retrouvera tôt ou tard le terrible pouvoir de la violence.

Mais face à la violence et à son règne, Pascal l'a vu et l'a magnifiquement dit, il y a la vérité : "C'est une étrange et longue guerre que celle où la violence essaie d'opprimer la vérité. Tous les efforts de la violence ne peuvent affaiblir la vérité et ne servent qu'à la relever d'avantage. (...) La vérité subsiste éternellement et triomphe enfin de ses ennemis, parce qu'elle est éternelle et puissante comme Dieu même" (12ème provinciale). Allez voir le texte intégral ! Pascal ici vaut bien Isaïe !

mardi 13 décembre 2011

Dernière minute sur la laïcité

Gérard Leclerc, journaliste catholique emblématique, sera avec nous tout à l'heure au Centre Saint Paul dans le débat sur la laïcité, avec Pierre Cassen et Christine Tasin de Riposte laïque sur Laïcité des cathos et laïcité des laïques. Toutes vos questions seront les bienvenues.

Isaïe face à la philosophie : le clash des raisons

"Existe-t-il une communion sans transcendance ?" demandait André Malraux dans la préface qu'il a donnée à l'enfant du rire de Pierre Bockel. C'est la question que pose une humanité orpheline de Dieu et qui continue à rêver de solidarité et à fantasmer son unité "spirituelle", alors que le sort des peuples se cristallise dans la mondialisation heureuse de manière toujours plus dissemblable, toujours plus loin de cette unité purement rhétorique : peuples dits développés consommateurs et jouisseurs d'un côté ; peuples en voie de développement, qui travaillent et produisent pour tout le monde ; peuples dont on ne sait pas quoi faire dans le Nouvel Ordre et qui sont trop pauvres pour faire des dettes.

La question que se sont posé les juifs, la question que pose Isaïe est exactement à l'inverse : existe-t-il une transcendance qui ne réalise pas un jour la communion ? Le peuple juif se concevait lui-même comme un peuple séparé par le choix de Dieu. Mais Dieu peut-il être là pour quelques uns ? N'est-il pas forcément le Dieu de tous ? Saint Paul l'explique clairement aux destinataires de l'Epître aux Romains, qui sont souvent des juifs (vg Rom. 15, 10-13), il l'explique en citant l'Ancien Testament. Il l'explique en citant Isaïe : "En lui, les nations mettront leur espérance" (Is. 11, 10). Ou plus sobrement, d'après le TM, "les nations le chercheront".

C'est l'unicité du Messie, "germe de Jessé", qui fait son universalité. Toute universalité qui n'est pas fondée sur une unité réelle, allez disons-le, toute universalité qui n'est pas monarchique est promise à l'échec. Parce qu'elle naît de l'unicité du Salut promis par Dieu à un seul peuple, l'espérance des nations est vraiment une. Il ne s'agit pas de recomposer son unité, en cherchant à établir abstraitement, par une opération purement mentale, un dénominateur commun. Platon a essayé, et cela a donné l'Idée du Bien... L'idée, faites de tous les biens, abstraits dans une abstraction que le Père Festugière nommait naguère "synoptique"... L'expression est jolie, mais le résultat est pauvre. On se demande encore aujourd'hui interminablement si l'idée du Bien de Platon existe vraiment et si ce n'est pas l'ultime éclat de l'esprit en quête d'absolu et se découvrant... lui-même. Platon est un moderne, fasciné par le pouvoir de l'esprit.

Isaïe n'a pas ce problème. Il accepte d'emblée l'humilité, qui est attachée à la condition humaine. Le grand péché, pour lui, c'est la rébellion ou la révolte contre Dieu, comme cela a été écrit au Commencement du Livre (Genèse 3). "Les rebelles et les pécheurs seront brisés ensemble". Rébellion, péché, c'est la même chose.

Isaïe s'élève à l'universalité comme Platon, mais évidemment, pas de la même manière : son universalité n'est pas celle que procure l'esprit humain dans la fameuse abstraction synoptique. C'est celle qui vient de Dieu, de son unité ("Ecoute Israël...") et de l'unité du Salut qu'il procure : "Des peuples innombrables viendront et diront : Venez, montons à la montagne de Yahvé, au temple du Dieu de Jacob [il n'y a jamais eu qu'un seul Temple], qu'Il nous instruise de ses voies et que nous marchions dans ses sentiers. Car de Sion sort la Loi et la parole de Yahvé" (2, 3, repris dans Michée 4, 2). Ainsi l'unité de Sion n'est pas seulement l'unité de son Temple, mais l'unité de Yahvé lui-même. Et c'est cette unité qui fait que les nations nombreuses s'approchent.

Il n'y a d'universalité réelle que celle au principe de laquelle on doit poser une unité. Cette remarque, Isaïe l'avait comprise. Elle est essentielle à l'économie du salut : "Un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême [confiteor unum batisma], un seul Dieu et Père" insiste saint Paul en écho. Cette unicité du Christ - Dominus Jesus - n'est pas là pour rétrécir le don de Dieu, comme si Dieu ne se donnait qu'une fois : il se donne à chacun, des milliards de fois. Mais parce qu'il se donne de la même façon à tous, parce qu'il se donne de manière vraiment universelle, il faut qu'il se soit donné une fois pour toutes. Que cette fois pour toutes soit... la même fois pour tous.

L'unité du Seigneur Jésus est la condition de l'universalité du don de Dieu. Le choix du peuple élu ne recèle aucun mépris pour les autres peuples, mais un appel à l'unité de tous les peuples dans un unique Message. Ce n'est pas tout de suite, ce n'est pas immédiat, mais... cela arrivera, l'histoire est le lent déploiement de cette unité primordiale : "Il arrivera, à la suite des jours, que la Montagne du Temple de Yahvé sera établie au sommet des montagnes et sera plus élevée que les collines. Toutes les nations afflueront vers elle".

Dans le grand projet de la Mondialisation heureuse, nous avons cherché à faire l'économie de l'unité primordiale. Nous avons singé le projet divin, comme l'annonce Apocalypse 13. Nous avons singé l'universalité divine. Mais notre universalité, sans unité primordiale, notre universalité platonicienne, conceptuelle, utopique, ne fonctionne pas. Des craquements sinistres se font entendre déjà en divers coins de l'Empire du monde, et d'abord dans notr Europe.

Il faut le temps de l'histoire pour que se réalise la véritable unité de l'humanité, celle qui vient de Sion, celle qui procède de "la Parole de Yahvé". Ce n'est pas en cherchant partout des échos oecuméniques à cette parole que nous l'universaliserons, mais en préservant jalousement son unicité. Et en acceptant que seul le temps puisse, "en nom Dieu", exécuter l'oeuvre de l'unité.

lundi 12 décembre 2011

La joie en sa pureté (IIIème dimanche de l'Avent)

« Soyez toujours joyeux dans le Seigneur, je vous le répète : soyez joyeux. Votre mesure doit frapper tous les regards. Le Seigneur est proche ! Ne vous inquiétez de rien, mais, dans toutes vos prières, exposez à Dieu vos besoins ». Tel est le programme de saint Paul, dans son Epître aux Philippiens. On l’a d’abord entendu dans l’introït, qui donne son nom à ce dimanche, que l’on appelle le dimanche de « Gaudété » : en français, on traduirait dimanche de « Réjouissez-vous ».

Mais d’où vient cette joie ? Cajétan répond dans son commentaire de ce passage : « de la grâce qui vous est concédée de persévérer dans la pureté de l’Evangile ». Ca ne vous émeut pas plus que cela ? cette persévérance chrétienne ne vous réjouit pas ? Elle ne suffit pas à faire votre joie ? C’est que vous n’en percevez pas la profondeur. « reconnais, chrétien, ta dignité » nous demande le pape Léon. Cette persévérance dans la grâce reçue, c’est pourtant la plus belle chose dont nous puissions rêver. Nous attendons des cadeaux ? Un réveillon ? Un peu d’ « ailleurs » ? Pourquoi mettre notre ambition et notre désir dans des perspectives si ordinaires ? Réjouissons nous de la « pureté de l’Evangile » que nous avons reçu.

Dans la société dans laquelle nous sommes, la pureté est dangereuse, selon l’immortelle expression de BHL. Au lieu d’être fier de cette pureté du message, que nous allons chercher à la source, nous en aurions presque honte.

Nous oublions qu’il y a deux formes de pureté : la pureté fabriquée par les hommes et la pureté qui signifie une réceptivité maximale du don divin ou du don de la nature.

La pureté fabriquée par les hommes, la pureté artificielle, est dangereuse, parce qu’elle s’obtient toujours par soustraction ou par abstraction. La pureté qui signifie la quête de l’authenticité du don divin est capitale : qu’y a-t-il de meilleur que le vin pur, non coupé ? La pureté en ce sens n’est pas obtenue par des limitations humaines, mais par le respect du don divin. Elle renvoie à cette richesse spirituelle qui fait notre joie.

C’est en ce sens qu’il faut comprendre l’ascèse et l’effort : comme des chemins vers la plénitude. C’est en ce sens qu’il faut comprendre la pureté de l’esprit et du corps que l’Eglise nous demande : non comme un pensum, non comme une diminution, mais au contraire, comme une quête de liberté et d’intégrité. Le chemin est ardu parfois, la pureté difficile. Mais cette intégrité de l’être est toujours plus riche (plus riche en amour, plus riche en connaissance ou en intelligence de l’autre). Bossuet disait naguère aux moines qu’il allait visiter dans son diocèse de Meaux : « La liberté des libertins les mène à l’esclavage. L’esclavage des religieux les mène à la liberté ».

Nous ne sommes pas des religieux. Mais nous faisons des choix forts et nous nous y tenons. Puissions nous goûter cette joie attachée à la pureté de l’Evangile. Puissions nous distinguer ces désirs qui ne vont qu’à leur propre satisfaction, c’est-à-dire à leur extinction (désir des consommateurs, qui asservissent ceux qui s’y livrent) et les désirs nobles, qui vont vers la connaissance des êtres et des choses supérieures et qui se projettent « naturellement » dans la destinée éternelle qui y est attachée.

Alors, continue saint Paul, alors seulement, « la paix du Seigneur qui surpasse toute connaissance remplira vos esprits et vos cœurs ». Cette paix nous l’avons ressentie déjà, à tel ou tel moment solennel de notre vie, ou simplement dans le silence de notre coeur. Elle nous fait pleurer de joie et elle nous rend non pas orgueilleux, car nous savons que tout cela vient de Dieu, mais fiers de cet accomplissement fugace et prêts à tracer notre route sans faiblir.

samedi 10 décembre 2011

Isaïe m'embarrasse...

Je vous avais promis une méditation chaque jour, mais, c'est vrai, Isaïe m'embarrasse... Que peut-on tirer de ces longues malédictions... et de ces rares bénédictions ?

"Vous serez comme un térébinthe dont les feuilles sont flétries et comme un jardin qui n'a pas d'eau. L'homme robuste deviendra l'étoupe et son oeuvre l'étincelle. Ils brûleront tous deux ensemble et il n'y aura personne pour l'éteindre" (Isaïe 1, 30-31).

Que signifient ces menaces ? Nous prend-on pour des enfants ? Veut-on nous ramener à un âge archaïque de l'histoire de l'humanité, alors que nous sommes des adultes et que, non, on ne nous parle pas comme ça...

C'est qu'on suppute un Dieu à notre image, sans cesse en train de tenir une comptabilité de nos faits et méfaits... Comme s'il en était à "ça" près. Voyez le Bon larron. On l'appelle bon ; il était larron : "pour nous c'est justice", cette crucifixion, dit-il à son collègue. Et de s'adresser au Christ : "Souviens toi de moi quand tu seras en ton Royaume" C'était un grand pécheur. sa foi, son audace, sa charité ont couvert une multitude de ses péchés. "Ce soir tu seras avec moi". Dieu ne tient pas de comptes d'apothicaire, nous rappelant sans cesse la menue faute que nous n'avons pas accusée en confession. Il sonde les reins et les coeurs. Il juge chacun en fonction de ce qu'il est... c'est-à-dire en fonction de ce que ses actes ont fait de lui.

Pourquoi Isaïe nous parle-t-il de flétrissure, de ruines, de châtiments ? Non pas parce que Dieu punirait pour le plaisir, mais parce que ces phénomènes sont les conséquences objectives de nos péchés, de l'état de péché dans lequel nous nous débattons. "Que le péché qui nous dévore laisse en nos coeurs peu de substance" gémissait l'abbé Donissan dans le Soleil de Satan (Bernanos). Le péché nous détruit ; la grâce et l'obéissance à Dieu nous construisent.

La vie spirituelle ne consiste pas à s'enfermer en soi même, mais à se connaître pour se fuir de façon plus vraie. Cette connaissance de soi n'a rien à voir avec je ne sais quel repli frileux sur soi. Elle passe par une conscience des événements qui traversent notre vie et par une aptitude à prendre, en fonction d'eux, les décisions qui s'imposent. "Les événements, dit Dieu, c'est moi, c'est moi qui vous aime"

Nous avons conscience assez vite de faire fausse route. Pour ne pas nous flétrir ou nous réduire à l'état d'étoupe qu'une simple étincelle, un menu méfait peut allumer, il faut que nous soyons capables - conscience prise de notre méfait - de changer de route. Souplesse, c'est la vertu des bons, qui reçoivent les leçons de l'événement. Entêtement, aveuglement, endurcissement, addiction, ce sont les effets du péché. Dieu nous punit? Non. Nous nous punissons nous-mêmes et Dieu nous avertit : acceptons nous d'entendre cet avertissement?

Isaïe m'embarrasse moins vu comme ça. Ce qu'il nous enseigne, c'est que la vie spirituelle ne consiste pas à vivre emmuré, claquemuré en soi-même, sans jamais oser sortir la tête. Au contraire. Nos grands instituteurs sont les événements, attentivement observés et convenablement analysés. "L'instant est l'ambassadeur de la grâce divine" disait le Père de Caussade. Sommes nous capables de sortir la tête et de recevoir cette ambassade là, avec tout le respect qu'elle mérite ? Sommes nous pétrifiés dans nos positions de toujours ou sommes nous capables de recevoir "le signe venu du figuier". Dans la vie spirituelle en définitive, tout est affaire de temps. "Il y a un temps pour rire et un temps pour pleurer" écrivait l'Ecclésiaste. Il ne croyait pas si bien dire...

La vie spirituelle n'est pas un gloubi boulga d'idées plus ou moins claires et sans cesse remâchées. Elle consiste, on nous le répète depuis plusieurs dimanche, à observer les événements pour reconnaître les signes de Dieu. Les malheurs ? ce sont des signes. Et les bonheurs ? Aussi. Comme disait la petite Thérèse, 24 ans, docteur de l'Eglise, "Tout est grâce" ; chaque événement porte une grâce qu'il nous faut apprendre à découvrir avec amour. Dieu veut notre salut plus que nous ne le voulons nous-mêmes. Tout ce qu'il nous envoie va, d'une manière ou d'une autre, dans le bon sens.

Jeanne d'Arc avait fait de cette conviction que la vie spirituelle consiste dans l'observation attentive des événements et des signes de Dieu l'une de ses grandes devises spirituelles : "Prends tout en gré". Si Dieu est derrière chaque événement, comment ne pas... prendre tout en gré ? C'est ce que l'on peut appeler prendre la vie du bon côté : du côté éternel, du côté par où l'éternité divine l'a scellée.

Je m'appelle Bernadette | Miracles à Lourdes

Je me permets de mettre, en avant première sur Métablog cette chronique parue dans le dernier numéro de Monde et vie : il faut aller voir ce film sur grand écran et ne pas perdre de temps !

Mes amis « cathos spécialistes » font la fine bouche : « Ce n’est pas un grand film ». Je ne sais pas ce que c’est qu’un grand film, mais une chose est sûre : dans Je m’appelle Bernadette, Jean Sagols nous a offert des images émouvantes et une vision positive du surnaturel…

Quant à moi, lorsque l’on m’a parlé de ce film, Je m’appelle Bernadette, j’ai pensé à un canular, tant l’époque est loin de tout ce que représente cette petite paysanne illettrée, qui a déclaré avoir vu la sainte Vierge. Jean Sagols, le réalisateur, est connu pour un certain nombre de téléfilms. Il accède au Grand écran et c’est pour mettre en scène une extraordinaire Bernadette, avec une touchante volonté de fidélité à la sainte telle qu’elle fut. La distribution est réussie, avec Francis Huster dans le rôle du préfet, et surtout Michel Aumont tout en rondeur et en humanité dans le rôle bourru du curé Peyramale et Rufus dans celui, plus protocolaire mais pas moins humain, de l’évêque Mgr Laurence. Quant à Katia Miran, jeune Toulousaine de 20 ans dont c’est le premier rôle au cinéma, elle crève l’écran.

Elle est, disons-le, pour beaucoup dans le succès du film, tant il est difficile de mettre le surnaturel en images. C’est avec un grand naturel justement, qu’elle incarne Bernadette asthmatique et sans cesse toussotante, et puis Bernadette habitée par la présence de la Vierge, et encore Bernadette esprit libre, jamais rebelle comme on prétend l’être si facilement aujourd’hui, mais toujours à distance par rapport au monde et trouvant dans cette distance même une joie paradoxale. Celle à qui la Vierge avait déclaré : « Je ne vous promets pas d’être heureuse en ce monde, mais dans l’autre » a trouvé dans cette promesse une joie que rien ne peut démentir, ni les humiliations des autres sœurs qui ne la ménagent pas, ni les heures de ménage, balais et serpillère en main. Dans la conviction qu’elle n’était rien, qu’elle n’avait rien à « prouver », qu’elle serait toujours la dernière partout, qu’elle n’occuperait aucune fonction prestigieuse, que ses apparitions ne lui rapporteraient rien à elle personnellement sinon l’ennui des interrogatoires et le poids de la suspicion, Bernadette a tracé son chemin avec audace, l’audace d’une vraie fille de Dieu.

Le personnage est parfaitement crédible. Il n’y a pas de bémol, pas de raté, pas d’image qui vienne gâcher notre plaisir. Un peu trop de maquillage parfois. Mais comme le dit une bonne femme de Lourdes : « C’est la vraie Bernadette, que l’on attendait depuis si longtemps ». Le film me semble, à travers Katia Miran, très supérieur au Bernadette de Jean Delannoy ou bien à Il suffit d’aimer, le film culte des patronages d’il y a 40 ans. Jean Sagols n’a pas cherché à faire une oeuvre sociologiquement authentique, avec l’ennui des films en costume. Il est parti en quête d’un personnage autour duquel tout gravite et dont l’indiscutable sainteté est à la fois proche de nous et aimable.

Vous aurez du mal à voir ce film, qui, à Paris par exemple, ne passe que dans deux salles. J’allais dire : c’est bon signe ! Si vous ne le trouvez pas, il vous reste à attendre le DVD.

Miracles à Lourdes
Le 7 décembre, deux nouvelles guérisons scientifiquement inexplicables ont été définitivement reconnues comme telles par le Bureau médical de Lourdes, en attendant que l’évêque et les théologiens décident de proclamer ou non ces deux guérisons comme des miracles. L’Eglise prend son temps : les faits ont eu lieu pour l’un en 1965 et pour l’autre en 1989. Dans le premier cas il s’agissait d’une religieuse condamnée à vivre en position fœtale ; dans le second, d’une femme qui souffrait de graves crises d’hypertension liées à un fibrome. Le premier cas a produit un vote à l’unanimité du Bureau médical, le second une majorité des deux tiers. Rappelons que, malgré de très nombreux faits miraculeux observés à Lourdes, seuls 68 miracles ont été reconnus pour leur caractère incontestables, en 150 ans. C’est peu et c’est beaucoup, car cela signifie que pas moins de 68 cas, avec chacun un dossier établi par des médecins, défient toute explication ou toute interprétation naturelle.

Notre culture s’est construite sur le refus a priori du miracle : « je ne crois pas aux miracles pour la même raison que je ne crois pas aux hippocentaures, cette raison c’est qu’on n’en a jamais vu » écrivait Ernest Renan. C’était en 1863. Les apparitions avaient eu lieu à Lourdes en 1858. Il lui aurait suffi de prendre le train… comme le feront plus tard, avec des fortunes diverses Emile Zola et Alexis Carrel.

Dieu avait choisi une petite paysanne illettrée pour répondre au rationalisme des scientistes de l’époque.

[conf'] Laïcité des laïcs, laïcité des cathos, quelle laïcité pour demain ?

Conférence le mardi 13 décembre 2011 à 20H15 au Centre St Paul - L'auteur dédicacera son ouvrage. - PAF: 5 euros. Étudiants, chômeurs : 2 euros. - La conférence est suivie du verre de l'amitié.

Laïcité des laïcs, laïcité des cathos, quelle laïcité pour demain? Débat conférence avec Pierre Cassen, Rédacteur en chef du journal électronique Riposte laïque - Christine Tasin, présidente de Riposte républicaine - et l'abbé Guillaume de Tanoüarn, responsable du Centre Saint-Paul.

Jacques Chirac a naguère comparé la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat aux colonnes du Temple, auxquels il ne faut pas toucher pour ne pas provoquer un écroulement général de l'édifice civique. Et pourtant aujourd'hui, cette loi se trouve largement dépassée par les événements et, pour ne prendre qu'un exemple, la construction des Mosquées se trouve, sous une forme ou une autre, subventionné par l'Argent public. Quelle laïcité proposer ? Les laïcs et les catholiques sont-ils toujours en guerre ? Des liens doivent-ils exister entre politique et religion en 2011 ? Autant de questions qui contribuent à tracer l'avenir de notre village gaulois après 2012.

mercredi 7 décembre 2011

Senèze réintégriste

A sa manière un peu rude, Nicolas Senèze vient de rendre un triple hommage à ceux qu’il nomme «les intégristes» dans le journal Métro. [Ami lecteur, je te sens venir! tu n’aimes pas que l’on t’appelle ainsi, et déjà tu te raidis? Tu as tort, Senèze s’est assez expliqué sur le sujet: c’est faute de mieux qu’il utilise ce terme, sans condamnation ni animosité.] Dont acte.

«Les intégristes ont bien réussi leur coup», c’est le titre de l’article et le premier hommage. Par la constance de leur mobilisation contre les blasphèmes spectaculaires, «ils ont attiré à eux toute une frange de catholiques ‘modérés’». De fait: des évêques eux-mêmes ont protesté contre le fangeux picnic.

Les intégristes «se sont éloignés du Front National avec l'arrivée de Marine Le Pen». C’était là le premier de leurs péchés, dénoncé à l’envi pendant 25 ans. Car les questions d’ecclésiologie et de liturgie sont une chose, mais les lecteurs de Métro sont à l’image de 90% des Français: ils s’en f… - ce qui posait problème, c’est cette hypothèque politique que lève Senèze, en un second hommage.

Mais alors, ces intégristes restent-ils dangereux? «Oui» dit Senèze, qui relativise aussitôt la nature du danger: «ils polluent le débat et peuvent être assimilés par le public à l'Eglise catholique». Autrement dit: ‘leur’ dangerosité se réduit au débat… qu’‘ils’ contribuent largement à lancer. Et c’est là le plus beau des trois hommages rendus.
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Bon – je pense vraiment qu’il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt, ni se dissimuler la difficulté. Nicolas Senèze représente un catholicisme conservateur propre, longtemps opposé au nôtre qui est traditionaliste. En restent quelques séquelles et des expressions un peu bourrues. Mais le temps des grands anathèmes est passé. A mon sens: un signe avant-coureur de la réintégration à venir?

"Tes péchés seraient-ils rouges comme l'écarlate..." Isaïe 1, 18

Veuillez chers lecteurs me pardonner mon peu d'assiduité : un petit coup de fatigue suite au succès... foudroyant de notre Journée Jeanne d'Arc à l'Espace Bernanos. Mais nous repartons de plus belle dans la lecture méditée de ce beau chapitre 1 d'Isaïe.

Nous avons vu comment il n'y a de science de la vie, qu'il n'y a de morale véritable qu'à condition que nous acceptions d'introduire Dieu en tiers dans notre permanente discussion intérieure (cf. "Venez discutons"). L'homme peut vouloir le bien, il est pourvu de cette "bonne volonté" qui est quelque chose de l'image de Dieu en lui. Mais il ne peut pas, il ne sait pas l'accomplir s'il n'a pas été capable de se mettre en face de Dieu, "vérité première" et principe universel.

Seul Dieu nous justifie.

A force de cultiver un antijansénisme obsessionnel et fourre tout, on a oublié cette vérité première, qui court dans toute la Bible, en particulier chez les Prophètes, dont c'est un des thèmes majeurs et récurrents : notre justice n'en est pas une, ce que nous appelons ainsi ne mérite pas vraiment ce nom. Si nous ne nous humilions pas devant Dieu, à quelle justice (j'allais dire : à quelle justesse, à quelle vérité) pouvons nous prétendre ? Puissions nous réaliser cette vérité-là à genoux : notre Avent s'en trouvera éclairé tout entier.

Et au contraire, si nous savons reconnaître l'autorité de Dieu - eh oui ! ce n'est pas un gros mot - son emprise sur sa créature, si nous savons admettre que nous ne sommes que des créatures, alors beaucoup de nos péchés se trouveront effacés et nous nous trouverons réintégrés dans la vérité de notre condition. J'ai dit : beaucoup de nos péchés... Je dirai même : tous. il n'y a pas un péché, si grave soit-il, qui résiste à un véritable acte d'humilité. C'est ce que nous dit Isaïe : "Si vos péchés sont comme l'écarlate, comme la neige ils blanchiront ; s'ils sont rouges comme la pourpre, comme la laine ils seront" (Isaïe 1, 18).

Dans les retraites de saint Ignace, cette formule du Prophète est invoquée pour nous montrer la puissance de la Miséricorde de Dieu, qui peut nous changer et annuler le passif que nous traînons comme un boulet. Puissance chrétienne de la Métanoia, de la conversion.

Mais dans le texte du Prophète, on perçoit un autre sens possible, en ajoutant le verset 19 : "Si vous acceptez d'obéir, vous mangerez les biens du Pays" [Le Pays ? Il s'agit de la Terre "promise", qui est la terre de Yahvé, non la terre des juifs : les fruits de cette terre sont donnés selon le mérite du peuple qui l'habite : terrible loi !]. Le verset suivant va renforcer notre première impression : "Mais si vous refusez, si vous vous révoltez, l'épée vous dévorera". En substance, selon que vous serez obéissants ou révoltés, vous serez mangeants ou mangés...

C'est par l'orgueil et la révolte d'un "Vous serez comme des dieux" qu'Adam et Eve ont perdu le paradis terrestre, ce sublime lieu d'expérimentation de leur liberté. C'est dans l'humilité et l'amour que nous retrouverons "au centuple" ce qu'ils ont perdu. Bref, ce texte sur la neige et l'écarlate, sur la pourpre et la laine, dit avant tout la puissance de l'obéissance à Dieu : "Servir Dieu c'est régner". L'obéissance, en tout temps, produit la blancheur. L'écarlate est la couleur de la révolte.

Obéissance, autorité, ce sont des notions que l'on n'ose plus guère utiliser, car depuis Kant, il est moral de considérer que "la personne doit partout et toujours être considérée comme une fin et jamais comme un moyen" et l'inverse (que la personne est faite pour se mettre au service de ce qui est plus grand qu'elle), Kant nous l'a fait considérer, monstrueusement, comme immoral. Saint Paul ne s'embarrassait pas de ce personnalisme là. Pour lui il faut que "nous soyons au service les uns des autres". C'est ce service qui nous sauve. Paul pense comme Isaïe. Et Kant nous écarte de la tradition biblique d'une manière décisive.

Quant au Christ ? Le Christ est encore plus radical : "Celui qui veut gagner sa vie la perdra" (Lc 9, 24).

[Vu Sur le Net] Vieillissements

Le tissu social catholique disparaît en France par mutation démographique. Concrètement: les catholiques deviennent vieux, puis les vieux catholiques meurent. Illustrations:
  • La Compagnie des Filles de la Charité publie les statistiques pour sa province sud. En gros, les presque 400 sœurs se répartissent en trois groupes : les septuagénaires (un quart), les octogénaires (deux cinquièmes), les nonagénaires (un cinquième). Comme le constate Rothomagus sur le FC: «le nombre de soeurs centenaires dépasse celui des moins de 50 ans». Dans sa récente interview, Mgr Fellay parlait d’«un couvent conçu pour trois cents religieuses, alors qu’elles ne sont plus que trois» - il en parlait comme d’une image dela crise de l'Eglise. C’est ici (presque) la réalité. Alors on regroupe: les Filles de la Charité viennent de quitter Lunel (Hérault). Elles y étaient présentes depuis 1657.
  • La Croix se penche sur les prêtres qui ont quittés le sacerdoce. Ils seraient… 10.000 en France. Or il n’y a plus que «10 à 15 prêtres» à quitter le sacerdoce chaque année. C’est assez dire que les ’10.000’ viennent des cohortes de prêtres ordonnés dans les années 50 à 70. De manière symptomatique, l’Association pour une Retraite Convenable veille à leurs intérêts. Ces ’10.000’ nous disent ce qu’était l’Eglise – et ce qu’elle n’est plus.
  • C’est alors qu’il faut s’adapter. L’Aisne Nouvelle a rencontré Frédéric Da Silva, un jeune prêtre de 35 ans. Il déclare : «Je dessers quatre-vingt-dix clochers. On essaie de faire en sorte qu'il y ait une messe au moins une fois par an dans chaque village. Mais à quoi bon faire la messe là où il n'y a plus de chrétiens.»
  • Pour finir: les difficultés de Témoignage Chrétien. Il y a la crise de la presse, mais aussi la disparition d’une sociologie que nous explique Paolo Rodari: «La descente a en fait commencé dans les années soixante [quand] les catholiques progressistes commencent à prendre leurs distances avec l'institution. […] Donc, ils n'ont pas transmis à leurs enfants et petits-enfants leurs pratiques religieuses, leur foi. ‘Et ils ne leur ont pas transmis non plus l'abonnement’.»

dimanche 4 décembre 2011

Jeanne d’Arc, sainte du compromis

Texte repris de l'Action Française n°2829

Avec quelques amis et un patron, Eric Letty, dont la plume naguère fit rage et fit mouche dans ces colonnes, sentant le vent mauvais se lever sur 2012, nous avons lancé l’association "Avec Jeanne", pensant que Jeanne était, plus justement que sainte Rita, la patronne des causes désespérées, la sainte de toutes nos crises.

La France était une cause perdue, neuf ans après le honteux Traité de Troyes (1420). Le Petit Roi de Bourges se terrait à Chinon. Les Anglais avaient mis le siège devant Orléans. C’était une question de quelques semaines et on n’entendrait plus parler des Valois. La France pourrait devenir anglaise ; son prince Henri VI serait l’enfant à la double couronne. Quant à Charles, fils de Charles et petit fils de Charles, il pensait fuir en Aragon ou en Ecosse. Et Jeanne, 17 ans, Pucelle et Chef de guerre, en quelques semaines d’une campagne éclair, délivrant Orléans et anéantissant l’armée anglaise à Patay, rétablit la situation de son Prince.

En France, on a l’habitude des causes désespérées et les Français ne sont jamais si performants que quand tout a l’air fini pour eux. On peut dire de Jeanne d’Arc qu’elle est l’emblème, qu’elle est le symbole de cette espérance politique. Elle a pu renverser le match qui opposait la France à l’Angleterre, en utilisant le temps additionnel : les arrêts de jeu. En trois semaines, elle a changé le visage d’une guerre de 100 ans. Avant la Pucelle dit un Chroniqueur du temps, 500 Anglais pouvaient l’emporter sur toute l’armée française. Après la Pucelle, trois Français mettaient en danger 500 Anglais. Mystère de ce que l’on appellera plus tard la Furia Francese !

Il y a en Jeanne, sur le champ de bataille, quelque chose d’une Passionaria. Mais elle sait s’arrêter et réfléchir. Elle a plus de sens politique que tous les Capitaines qui l’entourent. Elle comprend que le sacre de Charles VII à Reims est plus important que quelques places fortes regagnées sur la Loire. Elle devine les Français : ce dont ils ont besoin, c’est de se reconnaître dans quelqu’un. Et ce quelqu’un, ce n’est pas elle, bien sûr, c’est le Roi. Symbole de l’espérance politique, Jeanne est aussi celle qui a su réfléchir aux conditions concrètes, à la stratégie à mettre en œuvre.

Mais aujourd’hui direz-vous ? Maurice Barrès avait bien vu la modernité de Jeanne. Sainte de la patrie, elle est avant tout la sainte d’un compromis nationaliste à la française, qui regroupe toutes les familles spirituelles du pays dans un même élan. Il écrit dans ses Cahiers : « Il n’y a pas un Français dont Jeanne ne satisfasse les vénérations profondes ». Et d’énumérer le royaliste, le césarien, le républicain, le révolutionnaire : « Aucun Parti n’est étranger à Jeanne d’Arc et tous les Partis ont besoin d’elle. Pourquoi ? Parce qu’elle est cette force mystérieuse, cette force divine d’où à jailli l’espérance ».

Reste aujourd’hui à réinventer « les vénérations profondes » qui nous ont fait ce que nous sommes. Reste à ressaisir l’héritage que chaque Français trouve dans son berceau en se donnant seulement la peine de naître. Nous sommes fiers – trop fiers ? – de notre liberté revendiquée. Mais quelle liberté est possible si nous n’apprenons pas à respecter ensemble ce qui est respectable. Dans la grande décérébration de l’Aujourd’hui, n’oublions pas ce respect, sans lequel aucune vie sociale n’est seulement possible. Les seuls compromis qui vaillent, c’est sur le respect qu’il faut les édifier.

Très belle journée Jeanne d'Arc

Je voudrais remercier tous ceux qui sont venus pour notre premier colloque Jeanne d'Arc. Le Centre Bernanos, avec son magnifique auditorium et la salle Péguy était trop petit pour accueillir le public qui s'y pressait cet après midi.

Sur Jeanne, les interventions se sont succédées : magnifiques et si différentes les unes des autres ! Anne-Cécile avait tout prévu, alliant dans un même élan le faire savoir et le savoir faire : vous avez été nombreux à répondre Présent. Nos intervenants (certains d'entre eux en tout cas qui me l'ont dit) n'en revenait pas ; sur place, l'organisation était très sécurisante et... nous avons terminé dans les temps : pas de conférences trop longues. Une demi-heure chacune ; et chacun a donné son jus, tout son jus, avant de... passer le micro, au suivant. Les intervenants avaient chacun un accent unique pour évoquer la Pucelle. Des actes seront très vite à votre disposition, si Dieu veut.

Je vous parle de cette belle réussite, ce n'est pas pour un satisfecit. C'est pour vous annoncer que, cette année, chaque mois nous reviendrons sur un aspect de la geste de Jeanne au cours d'un colloque.

Deux dates sont d'ores et déjà à retenir : le 7 janvier, pour l'anniversaire de Jeanne, nous célèbrerons la messe dans la cathédrale d'Orléans. Et le 14 janvier, nous reviendrons à l'Espace Bernanos pour parler de Jeanne d'Arc, et cette fois c'est le féminisme chrétien que nous aborderons. On nous rebat les oreilles avec la théorie du genre. Il faut essayer de comprendre ce que nous avons à proposer - avec Jeanne - sur un sujet si fondamental.

samedi 3 décembre 2011

[Vu Sur le Net] Le point de vue de Mgr Williamson – celui de Mgr Ocariz

L’actualité du tradiland tourne décidément autour du document remis à Mgr Fellay, et à la décision qu’il prendra. Voici deux points de vue : celui de Mgr Williamson et celui de Mgr Ocariz. Mgr Williamson procède à son habitude, par un second degré transparent dans son ‘Commentaire Eleison’ de la semaine. Il écrit aujourd’hui :
[Paul VI] fut incapable de comprendre qu'il y avait une Autorité beaucoup plus haute que la sienne, sur laquelle l'Archevêque se fondait en parfaite tranquillité. Qui a besoin de s'inquiéter lorsqu'il s'appuie sur Dieu ? Cœur Sacré de Jésus, donnez-nous de mériter les bons chefs qui ne viennent que de Vous.
En clair, l’évêque anglais nous prévient qu’il n'hésitera pas à passer outre la volonté de son supérieur suisse, de même que l’archevêque français avait passé outre celle d’un pape «ayant perdu tout sens de la moindre Tradition limitant son autorité». Bigre!

Mgr Fernando Ocáriz est plus direct. Il est l’un des quatre experts nommés par Rome lors des discussions doctrinales avec la Fraternité Saint-Pie-X. A sa manière, et sans nommer ses interlocuteurs, il répond à Mgr Fellay dans l’Osservatore Romano :
L’unité de l’Église et l’unité dans la foi sont inséparables, ce qui implique également l’unité du Magistère de l’Église en tout temps, en tant qu’interprète authentique de la Révélation divine transmise par la Sainte Écriture et par la Tradition. Cela signifie, entre autres, qu’une caractéristique essentielle du Magistère est sa continuité et son homogénéité dans le temps.
… mais cependant
Face aux difficultés qui peuvent apparaître pour comprendre la continuité de certains enseignements conciliaires avec la Tradition, l’attitude catholique, compte tenu de l’unité du Magistère, consiste à chercher une interprétation unitaire, dans laquelle les textes du Concile Vatican II et les documents magistériels précédents s’éclairent mutuellement.
Autrement dit : Pour être dans l’Eglise vous devez accepter le Concile, en revanche, nous vous assurons qu’il est en ligne avec la Tradition – mieux : nous vous invitons à documenter cette continuité par une critique constructive dont nous vous reconnaissons le droit.

vendredi 2 décembre 2011

[Vu Sur le Net] Dans La Croix : un scoop. Et dans La Vie...

Nicolas Senèze a publié dans La Croix un article surprenant. Jugez vous-mêmes:
[Mgr Fellay] explique notamment que ce Préambule, «dont l’acceptation ou le refus conditionnera l’obtention ou non d’un statut canonique», «ne peut pas recevoir notre aval, bien qu’une marge soit prévue pour une “légitime discussion” sur certains points du Concile». «Quelle est l’étendue de cette marge?», s’interroge-t-il.
Ou encore :
«La Fraternité Saint-Pie-X n’est plus seule à voir les problèmes doctrinaux que pose Vatican II, affirme [Mgr Fellay] par ailleurs. Ce mouvement s’étend et il ne s’arrêtera plus.» Comme appui aux positions de la FSSPX, il cite ainsi Mgr Brunero Gherardini, chanoine de la basilique Saint-Pierre, et son ouvrage Vatican II, le débat qui n’a pas eu lieu , ou Mgr Athanasius Schneider, évêque auxiliaire d’Astana (Kazakhstan)
Mais peut-être vous demandez-vous où est le scoop? Au fond, Nicolas Senèze ne fait que rendre compte des récents propos de Mgr Fellay, et c’est justement ce nouveau style qui surprend: pas de «schismatique» ni d’«intégristes» dans cet article, pas même un petit «d’extrême droite». Les verbes (il «prévient», il «estime», il «explique») sont neutres, voir positifs. Bref, tout ce passe comme si Senèze avait enterré la hache de guerre – en prévision d’une nouvelle donne ? Quoiqu’il en soit : tant mieux. On a connu le bonhomme plus pugnace, et Daniel Hamiche s’en souvient sur son blog. Il publie quelques photos du Cardinal Burke en capa magna et annonce :
je transmets à mon ami Nicolas Senèze, journaliste au quotidien La Croix, de jolies cartes postales que j’ai reçues pour lui en provenance de Lisieux où le cardinal américain Raymond Burke se trouvait le 15 octobre dernier à l’occasion et à l’invitation de l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre qui y faisait un pèlerinage
C’est un clin d’œil malicieux aux commentaires que Senèze avait tenus il n'y a même pas encore un an sur faceBook, qu’il avait confirmés ensuite sur le Forum Catholique :
on peut quand même se demander si ce retour aux « dentelles et froufrous » n’est pas, chez certains prêtres, l’expression d’une homosexualité refoulée
Mais laissons le passé – l’heure est à la gentillesse. Prenez La Vie par exemple : dans un article d’octobre l’hebdomadaire catholique rend compte d’une action du MJCF
Une vingtaine de jeunes intégristes catholiques, chapelet au poing, ont fait irruption dimanche dans l'église Saint Denys de la Chapelle, à Paris (XVIIIe), lors d'une célébration interreligieuse organisée par la Famille franciscaine
Que pensez-vous qu’il se soit passé? Intervention des forces de l’ordre, dépôt de plainte? Pas du tout. Les jeunes ont pu continuer leur prière «sous le regard bienveillant d'un prêtre franciscain et d'un moine bouddhiste». Plus fort encore: un frère capucin déclare que
"En tant qu'artisans du dialogue, il fallait que nous prenions le temps de leur parler et de les écouter. Nous ne les avons certainement pas convaincus, eux non plus d'ailleurs, mais une rencontre a tout de même pu avoir lieu. Et cela leur a permis de partir la tête haute."
Les gars du MJCF, tels que j’en connais quelques-uns… qu’on les traite gentiment, ça doit leur faire tout drôle.