dimanche 21 août 2016

Sainte Rita : que fait la police ?

Après le coup de poing prémédité à une personne de couleur qui soi disant troublait leur "prière", voilà que tout est bon pour associer Sainte-Rita à une catégorie extrême de "radicalisés". Ce sont toujours les mêmes éléments de quelques groupuscules bien connus des forces de police qui, aujourd'hui posent en "défenseurs de Sainte Rita" devant un bidon de zyklon B et font circuler leur photo sur twitter. Il n'ont évidemment rien à voir avec la communauté de Sainte Rita mais comme je l'écrivais dans ma communication précédente, ce sont des "catholiques" radicalisés. Celui qui a frappé pendant la prière sort de prison. On voit bien d'ailleurs qu'il n'en est pas à son coup d'essai. Ces gens ne sont catholiques que de nom. Il faut qu'ils se convertissent. Ils ont pour l'instant à peu près la même théologie que les djihadistes : pour eux c'est la violence qui manifeste le sacré. Leurs "pulsions religieuses" sont archaïques et inquiétantes.

Ce qui est troublant c'est l'impunité dont ils jouissent, ils ne se cachent pas, ils ne cachent pas leur apologie du zyklon B et donc de l'antisémitisme le plus rabique. C'est étrange. Il y a des lois en France qui interdisent ce genre de gesticulation. Mais eux font cela sans se cacher, sans un masque ou une écharpe. Comme si ces provocateurs servaient à quelque chose. Comme si on leur donnait carte blanche. A quoi servent de telles photos associées à Sainte-Rita ? Elles servent le promoteur et son dessein de destruction bien sûr. Pourquoi circulent-elles librement ? Parce que la provocation qu'elles représentent permet d'en finir définitivement avec les défenseurs de Sainte-Rita.

Seulement voilà, le golem échappe toujours à son créateur. L'intervention hasardée de la police en pleines vacances d'été, malgré les engagements contraires des responsables politiques, qui se trouvaient eux-mêmes en vacances, a été sentie comme une violence, une violence légale certes, mais une violence quand même. On a mal mesuré le trouble de l'ordre public (et le trouble de faibles cervelles) que causait une telle irruption policière dans un lieu sacré. Et maintenant on fait feu de tous bois pour faire croire que la violence a changé de camp. Aujourd'hui on déterre des promoteurs du zyklon B : demain où ira-t-on ?

Nous avons toujours prié à Sainte Rita dans le plus grand calme jusqu'à l'intervention policière. Mais le sujet était trop passionnel. L'intervention mal préparée. Les risques de troubles mal évalués. Encore une fois, ces gens sont peu nombreux et bien connus, ils ne se cachent pas. Qu'attend-on pour les empêcher de continuer ? Un drame ? Un mort ?

J'annonce ici que malgré les deux cérémonies en plein air qui se sont parfaitement bien passées, devant 300 puis 500 personnes en plein mois d'août, je ne récidiverai pas dans l'état actuel de désordre créé par des gens qui, policiers ou justiciables, sont étrangers à Sainte Rita. Je ne veux pas faire prendre de risque aux gens de la communauté, dont je suis responsable de la sécurité et de la dignité. La messe annoncée le 4 septembre ne pourra avoir lieu que si la Préfecture de police ramène le calme et empêche ces éléments étrangers à notre communauté de créer le scandale aujourd'hui et peut-être plus demain. Pour l'instant la précipitation du promoteur Lamotte crée un trouble que je n'alimenterai en aucune manière, par exemple - et ce serait le pire des scénarios - en en fournissant les victimes.

J'attends donc de pouvoir vous donner toutes les garanties nécessaires quant au bon ordre de manifestations ultérieures, qui devront être protégées par l'état de droit et non à la merci d'agitateurs, utilisés contre nous.

Abbé de Tanoüarn


vendredi 19 août 2016

Geste stupide, publicité stupide : Sainte-Rita outragée

Une vidéo court sur les réseaux, envoyée par les héros de cette sinistre affaire. J'en prend connaissance à l'instant. Une bande d'excités, qui n'ont rien de catholique et qui se prennent pour des soldats du Christ selon l'intitulé de leur propre film, exaltent leur "haut-fait" : au milieu d'une dizaine de chapelet, un coup de poing part sur un homme de couleur, qui passe derrière eux. On me dit qu'il aurait dérangé la prière ? Cela n'apparaît pas sur la vidéo. Et de toute façon, quel sens cela a-t-il ? De quelle prière cela relève-t-il ?

A part l'un d'entre eux, avec qui j'ai déjà eu fort à faire, je ne reconnais aucun des jeunes avec lesquels nous avons défendu Sainte-Rita par la non-violence. Ils font apparemment partie d'un groupe qui est étranger à Sainte-Rita mais profite de l'intervention scandaleuse des forces de l'ordre cet été, pour donner le spectacle de "catholiques radicalisés", comme l'indique leur propre vidéo. Une fois de plus la violence légale, ordonnée de façon intempérante, a engendré une violence illégitime et outrageante pour le combat de Sainte-Rita. J'en suis sincèrement désolé et je revois les images de l'abbé Billot traîné par terre en aube par les CRS...

Sainte-Rita est en train de devenir un symbole national et international de la primauté du spirituel. Mais ce soir Sainte-Rita est outragée par quelques marginaux qui s'intitulent ses défenseurs et qui sont ses fossoyeurs.

Abbé de Tanoüarn

mardi 16 août 2016

Merci à tous pour Sainte Rita

On ne va pas se livrer à la guerre des chiffres, mais nous étions environ 500 après la Procession pour assister à la messe, bien plus nombreux que dimanche dernier, à prier la Vierge Marie, celle par qui, dans toutes les églises du monde, le Seigneur est avec nous. Nous l'avons prié pour l'église Sainte-Rita et devant l'église, il y avait tant de gens différents, sous le cagnard, des gens d'âges différents, de milieux différents, de... foi qui se formulerait sans doute différemment, que j'ai pensé à cette pub de Macdo, qui devrait être le slogan de l'Eglise catholique depuis le Tsunami François : "Venez comme vous êtes".

Une paroissienne que je ne connais pas (Sainte Rita est une communauté en pleine expansion) m'a envoyé ce message que je trouve beau et que je voudrais vous partager : 
"Je me suis rendue à l'église Sainte Rita quelques jours après son évacuation car pour moi une église c'est sacré, surtout celle de la Patronne des causes désespérées. J'ai vu sur les palissades l'annonce pour la procession et la messe d'aujourd'hui et je n'ai pas hésité une seconde à venir. Une église murée gardée par un vigile qui en empêche l'entrée, c'est tout bonnement inacceptable quelles que soient les opinions politiques et religieuses que l'on puisse avoir, une église c'est un endroit ouvert à tous (et il n'y en a plus beaucoup à l'heure actuelle!). 
Ce qui fait du tort à ceux qui veulent sauver l'église c'est la récupération politique et c'est vraiment dommage ! Il faut ratisser large car j'ai été très sensible à ce tract sur la palissade émanant de personnes athées qui soutenaient l'église. Nous sommes plus de 60 millions de personnes en France, s'il faut 3 millions d'euros pour sauver l'église on devrait pouvoir y arriver... Et vous avez raison dans votre interview à BFM TV, il n'y a pas eu de concertation et peut-être que beaucoup de gens qui vivent en province ou même à Paris n'ont aucune idée du triste sort réservé à cette église et réagiraient s'ils en avaient connaissance. 
La procession et la messe que vous avez célébrée aujourd'hui étaient vraiment très émouvantes, continuez car j'ai vu en vous une force extraordinaire (ça doit être cela la foi qui déplace les montagnes) et vous arriverez à sauver l'église avec une bonne communication qui pourra peut-être aussi réunir beaucoup de personnes quelles que soient leurs idées politiques et religieuses, car après tout, ce que le pouvoir nous impose en ce moment n'est pas digne d'une démocratie".
Merci Martine de cette belle lettre, merci de souligner "ces personnes athées qui soutiennent l'église". merci de dire que l'église murée "ce n'est pas digne de notre démocratie", merci de percevoir "la force" et "la foi à déplacer les montagnes" que l'on ressentait dans l'assistance. Merci pour avoir remarqué l'émotion qui se dégageait de cette procession et de cette messe, car l'émotion est le grand véhicule du voyage spirituel, celui qui nous mène au-delà de nous-mêmes.
 
Aujourd'hui, on voudrait un monde aseptisé, sans émotion, un monde fait uniquement de sexe et de fric, de sensualité et de calculs rationnels. Mais Dieu s'ouvre à ceux qui se laissent toucher. Il est au-delà de toutes nos raisons, mais le coeur a des raisons que la raison ne connaît pas : Dieu se laisse aimer. C'est avec nos coeurs d'abord que nous défendons Sainte Rita.

Merci aussi d'évoquer la possible récupération politique par certains, je pense au Mouvement du 14 juillet bien sûr, dont plusieurs des membres ont dormi dans l'église pendant des semaines ; mais attention ! Distinguons bien d'un côté le mouvement avec ses mots d'ordre et d'autre part les personnes, qui ont aussi leur foi, leur absence de foi, leur démarche. J'étais tellement heureux de revoir Pourpre, qui doit se dire athée à ses heures, mais qui était là : il m'avait bien aidé à préparer Noël. Ou Karen venue spécialement de Bordeaux. 

Je voudrais d'ores et déjà donner rendez-vous à tous, le 4 septembre prochain, dimanche à 11 Heures, autour de Sainte Rita : venez comme vous êtes, venez pour le Christ qui ne propose ni parkings ni logements sociaux, mais qui offre à qui, seulement la lui demande avec foi, la vie éternelle.

samedi 13 août 2016

Le 15 août... à Sainte Rita

L'affaire Sainte-Rita a défrayé la chronique et ce n'est pas pour rien. Cela fait partie du processus du sauvetage de cette église, devenue un symbole du sort de toutes les églises menacées, de ruines d'abord (par l'incurie des municipalités) de destruction ensuite (quand les réparations couteront trop cher pour être entreprises). Pour ce qui est de Sainte-Rita, je crois qu'il faut avant tout montrer que le peuple de Paris tient à cette église. C'est dans cette perspective que le 15 août, lundi prochain, nous organisons une grande procession dans le quartier en l'honneur de la Vierge Marie, reine de France, dont c'est la fête, ce jour. Rendez-vous à 16 H. La messe aura lieu devant l'église vers 17 heures.

Vous me direz peut-être : mais à quel titre Marie peut-elle être priée comme reine de France ? Certes, il y a eu la naissance merveilleuse de Louis Dieu donné, le futur Louis XIV, en 1638 après la prière que le roi Louis XIII avait fait réciter dans tout le Royaume, comme un véritable voeu. Avec tous ses défauts, le roi Louis XIV sera toute sa vie pénétré de cette idée qu'il est né, contre toute attente, pour la France, et pour la France chrétienne. Il ne se passe pas de jour, sous son règne, où le roi n'assiste à la messe. Les courtisans y sont nombreux (sauf, raconte Saint-Simon, le jour où le roi, malicieusement, fait circuler le bruit que, malade, il ne s'y rendra pas, ce qui lui permit d'y assister quand même, mais alors presque seul). La France, gouvernée par un roi qui se nomme lui-même le très chrétien, se trouve chrétienne tout naturellement. A l'époque on peut dire que Marie, vénérée dans des milliers d'églises construites sous son vocable et qui a son autel dans tous les édifices catholiques, est la reine de ce Pays et la reine de la chrétienté. Les Français l'appellent tous "Notre Dame", ce nom qui vient du fin fond du Moyen-âge, et qui dit, avec une confiance naïve ou native, la seigneurie de la Vierge sur le Pays de France et dans le coeur des Français.

Cette seigneurie s'exerce autrement aujourd'hui que sous Louis le Treizième; Autrement qu'au Moyen-âge. Mais elle s'exerce toujours, à travers la Providence de Dieu. Marie, dans le gouvernement divin, apparaît par une Volonté insondable du Très Haut, comme le ministre (ou plutôt la ministre) de sa miséricorde. Marie aujourd'hui a un rôle à jouer face à l'islam et aux tentative d'islamisation de telle ou telle région française. En témoignent le nom des lieux où elle voulut apparaître : Fatima, au Portugal, qui porte le nom d'une fatma musulmane et notre Lourdes dont le Salon Beige vient de nous expliquer l'implication historique avec l'islam, la ville ayant été fondée par un musulman converti :

"Tous les ans, le 15 août, en effet, Lourdes célèbre la conversion au catholicisme de l’émir Mirat-Mourad qui, en l’an 778, accepta de se rendre non à Charlemagne mais à la Vierge Marie en donnant à la ville le nom arabe de Warda qui deviendra Louarda puis Lourdes".

Sur le site des Kabyles convertis intitulé Notre-Dame de Kabylie (association pilotée par le cher Mohammed Christophe) on trouve un article plus explicite encore sur le sens du mot Lourdes, ce nom que prit l'émir après sa conversion, que l'on peut rapprocher en arabe et de la rose et de la source sacrée :
"LORDA est bien-sûr le mot le plus intéressant. 
En effet sa construction peut valablement être rapproché de la racine [WRD], le ‘L’ du début étant là pour indiquer un article, un singulier pluriel, (LWERD, les roses ou le rosier). Pour désigner la fleur elle-même, on dit [TAWERDET] au singulier, [TIWERDETIN] au pluriel, néanmoins leur emploi est plus rare. 
LWERD indique, qui plus est, non seulement « les roses », mais plus généralement toutes les fleurs, et même le feuillage. De sorte que, par métaphore sans doute, il signifie également la « vie » ; exemple : « ses roses sont tombées (fanées) », pour dire que sa vie est finie. 
Il existe bien un prénom [WERDIYYA, ou WARDA], mais c’est au féminin, il est inexistant au masculin, aujourd’hui en tout cas. C’est une des difficultés de ce texte. Cela expliquerait le rajout du « L » initial au nom, car cette lettre, préfixée à un mot, introduit toujours le masculin. 
Par ailleurs [LWERD] a beaucoup de sens incluant l’eau : amener, ou présenter un animal à « l’abreuvoir » ; la « route » qui y mène ; la « fontaine » et même « le bassin dans lequel on se lave pour guérir ». 
C’est encore par ce mot qu’on indique un acte d’affiliation à une confrérie religieuse. Et ceci en islam, puisque l’on sait qu’en Occident diverses sociétés secrètes ont pris la rose pour emblème, et l’ont parfois intégrée dans leurs rites. 
Mais voilà le plus curieux : dans cette racine [WRD] est classé par le dictionnaire kabyle-français un mot qui normalement n’y a pas sa place, [LEMBWARDA], dont la signification est « sources sacrées ». Si on creusait dans cette direction, on trouverait d’autres signifiants… 
Arrêtons-nous là : que ce prince sarrasin ait existé ou non – il est étrange qu’en prenant un nom de baptême, son choix se soit porté sur celui dont le sens est méconnu des chrétiens -, l’origine sémitique de Lorda ne fait pas doute. 
Nous avons donc là de quoi méditer : outre le rôle futur que jouera ce lieu, préfiguré par les évocations de l’eau et de la source, les nombreuses allusions à Marie, ne laissent pas d’étonner. Mais est-ce si étonnant que ça : la tradition ne lui a-t-elle pas décerné les noms de « rose des martyrs », « rose jamais flétrie », « rose mystique » ?"
Ce petit cours d'étymologie arabo-kabyle est très étonnant. Marie a un rôle à jouer face à l'islam violent. Loin d'être considérée comme une prostituée (comme c'est le cas dans le Talmud et déjà, de manière voilée au chapitre 8 de l'Evangile de saint Jean), Marie, pour les musulmans, est la Vierge, mère de Jésus, dont le nom est cité 34 fois dans le Coran (16 fois dans le Nouveau Testament). Va-t-elle amener les musulmans à Jésus ? Cela n'est pas impossible. La sourate 19 est étonnante sur ce sujet. N'oublions pas que le Coran, synthèse de texte souvent paléo-chrétiens modifiés, porte une étonnante christologie. Je me souviens avoir échangé sur ce sujet avec le recteur de la Grande Mosquée de Bordeau Tarek Obrou, nous sommes allés loin dans le sens de la divinité du Christ qui est "l'esprit d'Allah".

Notre prière à Marie reine de France prend un sens particulier aujourd'hui. Au lieu de s'endormir dans leur religion, devenue une identité culturelle sans vie, les chrétiens doivent se ressaisir des richesses de leur foi, certains qu'après l'échec de la laïcité (qui lorsqu'elle est agressive produit la radicalisation islamique), il ne reste que la royauté de Marie sur la France et ce voeu de Louis XIII, dont les nobles accents continuent de nous émouvoir :

"À ces causes, nous avons déclaré et déclarons que prenant la très sainte et très glorieuse Vierge pour protectrice spéciale de notre royaume, nous lui consacrons particulièrement notre personne, notre État, notre couronne et nos sujets, la suppliant de nous vouloir inspirer une sainte conduite et de défendre avec tant de soin ce royaume contre l’effort de tous ses ennemis, que, soit qu’il souffre du fléau de la guerre ou jouisse de la douceur de la paix que nous demandons à Dieu de tout notre cœur, il ne sorte point des voies de la grâce qui conduisent à celles de la gloire".

La gloire que demande Louis XIII n'est pas la gloire humaine, mais celle à laquelle mène la grâce : une gloire céleste, éternelle. On remarquera que dans cette consécration de la France à Marie, le Roi, qui, en 1636-1637 est encore un roi sans enfant et donc sans héritier, ne prie pas pour sa dynastie, mais pour son pays. - notre personne, notre Etat, notre couronne et nos sujets. Ce texte, arraché aux circonstances qui l'on fait naître, est donc d'une permanente actualité, alors que la France est plus que jamais, quoiqu'à son corps défendant, au coeur du cyclone politique qui déferle sur la Planète sous le nom de Daesh. Le Roi priait pour ses sujets ? Il faut que plus que jamais les Français redécouvre quelle est leur foi, combien elle est humaine et civilisatrice, combien elle est divine et salvatrice et combien, au fond, tout en dépend : Charlemagne lui-même n'a pas demandé à l'Emir de Lourdes, Mourad, qu'il lui fasse reddition, mais simplement qu'il se convertisse à la Rose mystique, qui, à Lourdes, plus tard, se fera source sacrée pour tous les hommes de bonne volonté.

jeudi 11 août 2016

Jérôme Ducros: "L'atonalisme. Et après?"

Voici la torpeur de l’été. Nous vous proposons donc, à titre de rafraîchissement, cette conférence de Jérôme Ducros au Collège de France. Leçon brillante, amusante, mais aussi convaincante. Réfutation, par-delà de la seule musique, d'un pan entier de la jobardise de notre époque («Si être moderne c’est refuser la norme, que dois-je faire quand le moderne est devenu la norme?»).  Amis tradis et autre visiteurs, attention! Si vous faites l’effort d’écouter les premières 10 à 15 minutes, vous êtes fichus : vous irez probablement jusqu’au but de l’heure que dure cette vidéo.  J’en devine quelques-uns qui s’étonneront: «Une heure? à celle du tweet?» Je réponds que parfaitement, une heure,  et qu’à l’aulne de ce que vous pourrez en retirer, c’est un sérieuse économie de temps. Enjoy!

 

jeudi 4 août 2016

Pourquoi tant de haine ?

Le Père Pierre Vivarès, curé de la paroisse Saint Paul Saint Louis est mon ami sur Facebook. Nous avons d'ailleurs un certain nombre d'amis communs, en particulier dans les milieux d'Action Française ou dans les milieux ecclésiastiques. J'imagine que nous sommes donc ecclésialement assez proches... Il vient de commettre un article sur Sainte-Rita : je ne peux pas le lui reprocher, tout le monde en parle. Après une mise au point factuelle (en même temps qu'assez peu charitable) sur les gallicans qui ont longtemps desservi l'édifice, il en vient aux événement d'hier 3 août, mais d'abord à votre serviteur. Il avait tous les moyens FB de me contacter pour préciser les données de sa mise au point. Il a apparemment préféré une mise aux poings.

C'est ainsi qu'il prétend : "Sans aucun mandat de l'archevêque de Paris, ni pour lui ni pour son soi-disant vicaire, il a commencé à célébrer régulièrement la messe à Sainte Rita pour une centaine de fidèles bien que tous les recours aient été perdus". Il y a quatre contre-vérités en trois lignes, qu'un simple message FB de la part de Pierre Vivarès aurait pu dissiper.
  1. J'ai commencé à célébrer la messe pour quarante personnes en novembre dernier. Il y en a au moins 150 ou 200 aujourd'hui et l'embryon d'une vraie communauté catholique.
                    
  2. Pierre Vivarès souligne que je n'avais pas de mandat. Il est sur ce coup-là plus royaliste que le roi : l'archevêché m'a donné non un mandat (inutile en l'espèce) mais un accord écrit pour célébrer la messe à Sainte-Rita, accord que je peux produire.
                      
  3. Mon soi-disant vicaire ne se dit pas vicaire lui-même (le pauvre !) mais il me remplace au Centre Saint-Paul, il est vicem gerens tenant la fonction depuis deux mois. Je l'ai donc appelé mon vicaire au détour d'une phrase, conformément à la langue française, mais, contre ce qui est insinué ici, je ne l'ai jamais "nommé" vicaire, grand Dieu !
                     
  4. Enfin "tous les recours n'ont pas été perdus" contrairement à ce que prétend Pierre Vivarès. Nous avons gagné en appel devant le TA et si l'affaire a été récemment portée devant le Conseil d'Etat, c'est qu'il y avait une vraie difficulté juridique. Le Conseil d'Etat nous a donné tort sur la forme mais le rendu du jugement indique aussi comment notre demande aurait pu (aurait dû) être faite par la Préfecture de Police. On peut donc considérer que l'affaire n'a pas été jugée sur le fond.
Je suis très attristé de ces quatre contre-vérités en trois lignes par ce qu'elles dénotent du scripteur : un homme à la superficie des choses, prompt à l'attaque mais ne daignant pas vérifier les faits ou simplement (s'il écrit sur mon compte) me rencontrer comme l'ont fait tant de journalistes (en accord ou en désaccord avec mon action) depuis quelques heures.

Je m'aperçois en le relisant que le paragraphe suivant n'est pas meilleur :  "L'arrêté d'expulsion ayant été plusieurs fois confirmé, l'abbé Billot a trouvé malin de commencer à célébrer la messe pendant que les CRS libéraient légalement les lieux afin que les images soient plus fortes pour BFMTV et pour faire un buzz politico-médiatique une semaine après la mort du Père Jacques".

Ce n'est pas l'abbé Billot qui célébrait la messe au moment de l'entrée des policiers, c'est moi : nous nous sommes enfermés dans la chapelle où nous avons prié depuis 6 H du matin pour l'avenir de Sainte-Rita. J'ai célébré une première messe. L'abbé Billot une seconde. Et moi une troisième, toutes trois religieusement suivies par les assistants, qui, pour ceux qui s'étaient groupé autour de l'autel, tout à l'effet du Sacrifice eucharistique, n'ont montré aucune violence lorsque les CRS ont fait irruption en utilisant, eux, la violence légale. Nous sommes d'ailleurs sortis en bon ordre et il n'y a eu aucune interpellation. L'abbé Billot n'a rien "trouvé malin" (sic : on a l'impression que le scripteur parle d'un enfant). Il a simplement voulu, avec courage, faire un rempart de son corps, et ralentir l'assaut de l'autel et il m'a laissé le temps de communier.

Dans ma grande naïveté (Ah ! voilà un reproche que vous auriez pu me faire cher Père), je pensais que nous aurions le temps de parler avec les CRS. Puisqu'il a été impossible d'échanger avec eux, et qu'ils ont immédiatement attaqué au gaz dans un lieu fermé des gens à genoux ou qui ne bougeaient pas, j'ai estimé que je devais communier immédiatement et j'ai pensé que Jésus me comprendrait, le gaz devenant irrespirable. Son esprit était palpable à ce moment là, je lui rends grâce de la force qu'il m'a donnée. Ce souvenir restera merveilleux dans ma vie sacerdotale, comme un ostensoir invisible.

Alors pour vous, cher Père, vous décrivez ce moment, auquel vous n'avez pas assisté et à propos duquel vous n'avez daigné me poser aucune question, mais vous le décrivez tout autrement que mes souvenirs ne le gardent en moi. Je vous cite, dans le paragraphe qui suit immédiatement : "Toute cette mascarade, orchestrée par des gens en manque de reconnaissance et de lieux de culte ayant pignon sur rue, est récupérée par ceux qui réclament en permanence que le droit soit appliqué et crient à l'injustice et au blasphème, blasphème qu'eux-mêmes ont mis en scène en méprisant les rites sacrés". Dans ces trois lignes, une seule vérité : je fais partie des gens (des prêtres) assez nombreux dans l'Eglise de France en ce moment "qui n'ont pas de lieu de culte ayant pignon sur rue", comme vous en avez un, vous, magnifique, comme curé de Saint-Paul. Je ne suis qu'au Centre Saint Paul : c'est toute la différence, vous avez sans doute raison de me le rappeler.

Quant à "la reconnaissance"... Je crois en avoir beaucoup trop pour ce que je suis...

Pour le reste je n'ai pas crié au blasphème (comme vous me l'imputez) ; j'ai dit au contraire littéralement aux journalistes qui voulaient l'entendre, qu'il n'y avait eu "aucun blasphème et aucun sacrilège" Pour faire bonne mesure ce blasphème, c'est aussi à moi que vous l'imputez, en m'en reprochant même "la mise en scène" : de toute ma conscience de prêtre, je vous dis que vous parlez de choses dont vous n'avez pas été témoin, avec une légèreté qui m'effraie. J'ai simplement voulu vivre cet événement terrible dans la paix de la présence du Christ, qui, comme vous le savez, nous accompagne aussi aux périphéries et aux marges. Ce qui me choque le plus c'est que votre jugement sans appel se fonde sur une erreur factuelle : vous pensiez que l'abbé Billot disant la messe avait été traîné sur le sol, ce qui est faux. Vous ne connaissez pas la scène et vous criez au blasphème ! J'espère que vous ne traitez pas habituellement vos confrères prêtres du diocèse de blasphémateurs et que je suis le premier à faire les frais d'une telle agression...

Enfin, vous vous félicitez que le droit règne à Sainte-Rita. Allez vous faire croire à vos lecteurs que vous jouiriez, vous prêtre, du spectacle de cette église hâtivement vidée hier après-midi, sous l'égide des forces de l'ordre, par des apprentis déménageurs ? Je vous laisse à votre amour du droit en vous citant le vieil adage : "Le sommet du droit est le sommet de l'injustice".

Je crois qu'avec tous ça vous avez gagné le... droit de m'inviter au restaurant pour que nous fassions enfin connaissance de visu... pour que vous cessiez de parler dans les salons de quelqu'un que vous ne connaissez pas comme vous le faites, me dit-on depuis au moins trois ans, et que nous puissions répéter, sans rancune, le psaume : O quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum ! Oui, comme le parfum qui coule dans la barbe - la barbe d'Aaron.

Le début de l'affaire

"J'ai peur que Sainte-Rita, que la destruction de Sainte-Rita ne soit le début de quelque chose" me confie ce matin une journaliste au téléphone. Attention ! L'Etat met tout son poids dans la fragile balance que représente le destin de cette église, construite en plein XVème arrondissement. Premier indice : Stéphane Le Foll, porte parole du Chef de l'Etat, est intervenu en personne sur le sujet, dans le plus grand flou d'ailleurs et juste pour expliquer que la destruction de cette église relevait du droit privé.

Du droit privé ? Allez détruire ne serait-ce qu'une longère bretonne, pour la remplacer par un pavillon F5, avec piscine et véranda, bref une construction laide mieux adapté à votre mode de vie. Vous verrez si l'exercice du droit de propriété est si simple. Je ne parle pas ici d'un édifice classé, mais simplement de n'importe quelle maison typique. Comme Sainte-Rita est typique.

Est-ce simplement parce qu'il n'a pas de sang chaud ? Est-ce parce qu'il est "le plus froid des monstres froids" comme dit Nietzsche? L'Etat est donc sans état d'âme du côté du nihilisme. La bonne nouvelle du Néant tend à devenir la religion collective.

"J'ai peur que la destruction de Sainte-Rita ne soit le début de quelque chose" : oui le début d'un monde où seul est pris en compte l'intérêt financier. Le début d'un monde dans lequel, très officiellement, la vie spirituelle sera mise de côté comme ne représentant nulle valeur. Il ne faut pas s'étonner, dans cette perspective si la civilisation fout le camp et si des sauvageons sans foi ni loi s'amusent à vous égorger ou à vous roulez dessus, au volant d'un camion de 19 tonnes.

Ce début de quelque chose s'est matérialisé dans l'intervention sous haute surveillance policière des déménageurs-destructeurs, programmés par Lamotte promotion pour intervenir dès que les CRS ont eu fait leur "travail". Aujourd'hui l'église est vide. L'autel est au garde-meubles. Demain... 

Si nous assistons au "début de quelque chose", ce début est suffisamment éloquent pour avoir attiré sur place quelques uns de ceux que Nietzsche appelle "les derniers hommes". En se plaçant dans cette profondeur de champ qui appartient à l'intelligence, mais qui souvent nous déconcerte, il aimait à évoquer ces derniers hommes, les derniers à vivre non seulement d'une certaine idée de la France, comme aurait dit le Général, mais d'une certaine idée de l'Ordre humain, où le spirituel est forcément supérieur au matériel et, toutes confessions confondues, réclame impérieusement protection de l'autorité politique.

Je remercie tous les jeunes qui ont pris sur leurs vacances pour venir défendre Sainte-Rita, et qui ont fait là une expérience spirituelle particulièrement intense. Mieux qu'une retraite : une leçon de choses spirituelle qu'ils ne devront pas oublier. Comme je n'oublierai jamais leur silence (un silence palpable) lors de la consécration durant ce sacrifice eucharistique matinal. 

Je remercie bien sûr aussi les vieux, qui ont pris le risque de la violence policière, pour être là, j'embrasse la doyenne des participants, Madame B. je n'oublierai pas ses larmes lors de l'intervention des CRS. Je pense évidemment à tous ceux qui ont pu être présents malgré l’heure matinale et la date estivale. mais aussi à tous ceux, nombreux je le sais beaucoup me l'ont dit, qui se sont joints à nous par la prière – ou la pensée. Je remercie les politiques, les élus locaux, qui savent, eux, ce que représente Sainte Rita dans le quartier, le député qui a écrit au pape et tous les politiques qui sont intervenus sur twitter (oui tous, qu'ils aient dit des choses agréables ou non), je pense bien sûr au maire du XVème, parce qu'"on" a spéculé sur son absence, je pense à tous ceux qui se joindront à nous dans l'avenir. Merci également aux journalistes de la presse écrite ou audiovisuelle, tous ceux qui sont venus aux nouvelles et qui ont ensuite traité le sujet avec objectivité, selon leur sensibilité respective. Merci à ceux – très nombreux – qui ont relayé les informations au sujet de Sainte Rita, par exemple sur FaceBook ou sur twitter. "Sainte-Rita" a été le premier hashtag sur twitter, hier, et cela ne fait que commencer, car l'affaire Sainte-Rita n'a vraiment commencé qu'hier, grâce à cette grande chaîne virtuelle, inestimable, que nous formons tous. 

"Nous assistons au début de quelque chose" me disait ma correspondante au téléphone ce matin : oui, c'est le début de l'affaire Sainte-Rita.

mercredi 3 août 2016

Ce qui s'est vraiment passé à Sainte-Rita du Quinzième

L'opération avait été préparée dans le plus grand secret. Elle devait se dérouler sans anicroche dans la moiteur d'un été sans relief. Nous avons pu être au courant de ce que préparait la Préfecture de Police contre l'église Sainte-Rita quelques heures auparavant. Nous savions que les CRS auraient le dernier mot, l'Etat ne possède pas pour rien ce que Max Weber appelle le monopole de la violence légale. Mais nous ne voulions pas que le bouclage de Sainte-Rita en vue de sa destruction par le Promoteur Lamotte, soit un acte purement administratif. Ce haut lieu spirituel devait recevoir l'hommage qui lui est dû, au moins de notre part. Quelques coups de fil plus tard, dans Paris vidé de ses habitants, l'équipe des résistants était constituée. Surprise : le jour J, nous étions une centaine, en comptant ceux qui avaient passé la nuit dans l'église. Nous étions prêts à élever une protestation spirituelle digne de l'esprit des lieux contre le bouclage administratif de l'église Sainte-Rita. Oui une messe.

Quel est l'esprit des lieux ?

Sainte Rita a été construite au début du XXème siècle - dans un style qui marie harmonieusement le premier béton avec le néo-gothique - par une communauté d'origine anglicane. Ces fidèles se sont très vite appelés eux-mêmes les catholiques apostoliques. Leur rôle ? Diffuser le message décisif pour tous les chrétiens : la fin du monde est proche. C'était au début du XIXème siècle... Aujourd'hui, ce groupe est réduit à des personnes âgées et très peu nombreuses. L'église Sainte Rita avait été louée depuis une vingtaine d'années à des gallicans sans rapport avec Bossuet, que l'on peut définir comme des catholiques dissidents. Ils avaient donné à Sainte Rita un vrai rayonnement spirituel, à travers les bénédictions d'animaux et la prière à sainte Rita, patronne non seulement des causes désespérées mais de la paix dans les familles. Lorsque Mgr Philippe quitte l'édifice, de son propre mouvement, cela crée un grand vide. La communauté est en déshérence.

C'est dans cette situation que l'un des responsables me demande de venir célébrer la messe pour eux. Comment ne pas recevoir cet appel au secours ? Fin novembre 2015, je propose d'élever une protestation contre les desseins du Promoteur Lamotte, en célébrant la messe chaque dimanche à 16 H (le seul créneau libre dans ma journée, un horaire de messe incongru). Mais bientôt l'église est pleine. J'ai rajouté une messe à 11 H : on a fait le plein durant tout le mois de juin. J'étais prêt à en ajouter encore une... Les églises de Paris - il faut le dire - sont toutes pleines (en particulier dans le XVème), et il n'y a pas concurrence mais une offre encore insuffisante.
           
C'est dans ce contexte qu'une image fait le tour du monde, celle de l'abbé Billot, prêtre du Centre Saint-Paul depuis plusieurs années, maltraité par les policiers qui le traînent à terre alors qu'il se trouve encore en ornement sacerdotaux. Attention ! Il n'y a pas eu de scandale ni de profanation des saintes espèces, simplement une messe, la mienne, "finie au gaz" si vous... sentez ce que je veux dire, et puis des policiers un peu expéditifs avec un ministre de Jésus Christ.

Sainte-Rita ne demande qu'à vivre ! Il me semble que le dernier mot de cette affaire ne doit pas rester à la violence policière, ni à des calculs de rentabilité. Il importe que les partis en présence se mettent autour d'une table (sous l'égide par exemple du maire du XVème) pour décider de ce que l'on fera de cette église ? Un parking ? Des logements sociaux ? Ou - ce qu'elle a toujours été - une Maison de l'Esprit saint, où chacun pourra trouver ce Dieu qui se laisse chercher, en particulier dans la splendeur des liturgies traditionnelles ?