jeudi 4 août 2016

Pourquoi tant de haine ?

Le Père Pierre Vivarès, curé de la paroisse Saint Paul Saint Louis est mon ami sur Facebook. Nous avons d'ailleurs un certain nombre d'amis communs, en particulier dans les milieux d'Action Française ou dans les milieux ecclésiastiques. J'imagine que nous sommes donc ecclésialement assez proches... Il vient de commettre un article sur Sainte-Rita : je ne peux pas le lui reprocher, tout le monde en parle. Après une mise au point factuelle (en même temps qu'assez peu charitable) sur les gallicans qui ont longtemps desservi l'édifice, il en vient aux événement d'hier 3 août, mais d'abord à votre serviteur. Il avait tous les moyens FB de me contacter pour préciser les données de sa mise au point. Il a apparemment préféré une mise aux poings.

C'est ainsi qu'il prétend : "Sans aucun mandat de l'archevêque de Paris, ni pour lui ni pour son soi-disant vicaire, il a commencé à célébrer régulièrement la messe à Sainte Rita pour une centaine de fidèles bien que tous les recours aient été perdus". Il y a quatre contre-vérités en trois lignes, qu'un simple message FB de la part de Pierre Vivarès aurait pu dissiper.
  1. J'ai commencé à célébrer la messe pour quarante personnes en novembre dernier. Il y en a au moins 150 ou 200 aujourd'hui et l'embryon d'une vraie communauté catholique.
                    
  2. Pierre Vivarès souligne que je n'avais pas de mandat. Il est sur ce coup-là plus royaliste que le roi : l'archevêché m'a donné non un mandat (inutile en l'espèce) mais un accord écrit pour célébrer la messe à Sainte-Rita, accord que je peux produire.
                      
  3. Mon soi-disant vicaire ne se dit pas vicaire lui-même (le pauvre !) mais il me remplace au Centre Saint-Paul, il est vicem gerens tenant la fonction depuis deux mois. Je l'ai donc appelé mon vicaire au détour d'une phrase, conformément à la langue française, mais, contre ce qui est insinué ici, je ne l'ai jamais "nommé" vicaire, grand Dieu !
                     
  4. Enfin "tous les recours n'ont pas été perdus" contrairement à ce que prétend Pierre Vivarès. Nous avons gagné en appel devant le TA et si l'affaire a été récemment portée devant le Conseil d'Etat, c'est qu'il y avait une vraie difficulté juridique. Le Conseil d'Etat nous a donné tort sur la forme mais le rendu du jugement indique aussi comment notre demande aurait pu (aurait dû) être faite par la Préfecture de Police. On peut donc considérer que l'affaire n'a pas été jugée sur le fond.
Je suis très attristé de ces quatre contre-vérités en trois lignes par ce qu'elles dénotent du scripteur : un homme à la superficie des choses, prompt à l'attaque mais ne daignant pas vérifier les faits ou simplement (s'il écrit sur mon compte) me rencontrer comme l'ont fait tant de journalistes (en accord ou en désaccord avec mon action) depuis quelques heures.

Je m'aperçois en le relisant que le paragraphe suivant n'est pas meilleur :  "L'arrêté d'expulsion ayant été plusieurs fois confirmé, l'abbé Billot a trouvé malin de commencer à célébrer la messe pendant que les CRS libéraient légalement les lieux afin que les images soient plus fortes pour BFMTV et pour faire un buzz politico-médiatique une semaine après la mort du Père Jacques".

Ce n'est pas l'abbé Billot qui célébrait la messe au moment de l'entrée des policiers, c'est moi : nous nous sommes enfermés dans la chapelle où nous avons prié depuis 6 H du matin pour l'avenir de Sainte-Rita. J'ai célébré une première messe. L'abbé Billot une seconde. Et moi une troisième, toutes trois religieusement suivies par les assistants, qui, pour ceux qui s'étaient groupé autour de l'autel, tout à l'effet du Sacrifice eucharistique, n'ont montré aucune violence lorsque les CRS ont fait irruption en utilisant, eux, la violence légale. Nous sommes d'ailleurs sortis en bon ordre et il n'y a eu aucune interpellation. L'abbé Billot n'a rien "trouvé malin" (sic : on a l'impression que le scripteur parle d'un enfant). Il a simplement voulu, avec courage, faire un rempart de son corps, et ralentir l'assaut de l'autel et il m'a laissé le temps de communier.

Dans ma grande naïveté (Ah ! voilà un reproche que vous auriez pu me faire cher Père), je pensais que nous aurions le temps de parler avec les CRS. Puisqu'il a été impossible d'échanger avec eux, et qu'ils ont immédiatement attaqué au gaz dans un lieu fermé des gens à genoux ou qui ne bougeaient pas, j'ai estimé que je devais communier immédiatement et j'ai pensé que Jésus me comprendrait, le gaz devenant irrespirable. Son esprit était palpable à ce moment là, je lui rends grâce de la force qu'il m'a donnée. Ce souvenir restera merveilleux dans ma vie sacerdotale, comme un ostensoir invisible.

Alors pour vous, cher Père, vous décrivez ce moment, auquel vous n'avez pas assisté et à propos duquel vous n'avez daigné me poser aucune question, mais vous le décrivez tout autrement que mes souvenirs ne le gardent en moi. Je vous cite, dans le paragraphe qui suit immédiatement : "Toute cette mascarade, orchestrée par des gens en manque de reconnaissance et de lieux de culte ayant pignon sur rue, est récupérée par ceux qui réclament en permanence que le droit soit appliqué et crient à l'injustice et au blasphème, blasphème qu'eux-mêmes ont mis en scène en méprisant les rites sacrés". Dans ces trois lignes, une seule vérité : je fais partie des gens (des prêtres) assez nombreux dans l'Eglise de France en ce moment "qui n'ont pas de lieu de culte ayant pignon sur rue", comme vous en avez un, vous, magnifique, comme curé de Saint-Paul. Je ne suis qu'au Centre Saint Paul : c'est toute la différence, vous avez sans doute raison de me le rappeler.

Quant à "la reconnaissance"... Je crois en avoir beaucoup trop pour ce que je suis...

Pour le reste je n'ai pas crié au blasphème (comme vous me l'imputez) ; j'ai dit au contraire littéralement aux journalistes qui voulaient l'entendre, qu'il n'y avait eu "aucun blasphème et aucun sacrilège" Pour faire bonne mesure ce blasphème, c'est aussi à moi que vous l'imputez, en m'en reprochant même "la mise en scène" : de toute ma conscience de prêtre, je vous dis que vous parlez de choses dont vous n'avez pas été témoin, avec une légèreté qui m'effraie. J'ai simplement voulu vivre cet événement terrible dans la paix de la présence du Christ, qui, comme vous le savez, nous accompagne aussi aux périphéries et aux marges. Ce qui me choque le plus c'est que votre jugement sans appel se fonde sur une erreur factuelle : vous pensiez que l'abbé Billot disant la messe avait été traîné sur le sol, ce qui est faux. Vous ne connaissez pas la scène et vous criez au blasphème ! J'espère que vous ne traitez pas habituellement vos confrères prêtres du diocèse de blasphémateurs et que je suis le premier à faire les frais d'une telle agression...

Enfin, vous vous félicitez que le droit règne à Sainte-Rita. Allez vous faire croire à vos lecteurs que vous jouiriez, vous prêtre, du spectacle de cette église hâtivement vidée hier après-midi, sous l'égide des forces de l'ordre, par des apprentis déménageurs ? Je vous laisse à votre amour du droit en vous citant le vieil adage : "Le sommet du droit est le sommet de l'injustice".

Je crois qu'avec tous ça vous avez gagné le... droit de m'inviter au restaurant pour que nous fassions enfin connaissance de visu... pour que vous cessiez de parler dans les salons de quelqu'un que vous ne connaissez pas comme vous le faites, me dit-on depuis au moins trois ans, et que nous puissions répéter, sans rancune, le psaume : O quam bonum et quam jucundum habitare fratres in unum ! Oui, comme le parfum qui coule dans la barbe - la barbe d'Aaron.

2 commentaires:

  1. Il y a tout de même quelque chose qui échappe à l'entendement... Laurent Dandrieu, qu'il est difficile de classer parmi vos opposants, publie ce jour un compte-rendu, sur le site de Valeurs Actuelles, de ce qu'il a vu hier. Pourquoi avoir commencé une messe alors que les CRS étaient déjà présents à l'entrée de l'église ?

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  2. Vous avez été touché mon père, au plus profond de vous même, et je vous comprends.
    Mais vous êtes prêt à pardonner la médisance d'un incompétent, qui plus est, mal informé, vous êtes prêt à faire plus ample connaissance autour d'un repas, avec un tel homme. Je sais pourquoi j'ai toujours eu confiance en vous. Bon courage!!!

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