samedi 24 décembre 2011

Nous habituer à Noël

Lu sur la carte de voeux internautique d'un filleul cette formule de saint Irénée : "Dieu a voulu s'habituer à habiter parmi nous pour que nous aussi nous ayons l'habitude d'habiter avec lui"... Rien de très original direz-vous ! Cherchez bien ! Ce qui est original, c'est l'habitude. Ce qui est original c'est de demander une véritable habitude de Noël.

Pourquoi la demander ? Nous avons l'habitude de Noël, l'habitude des courses (Ah ! Faire chauffer la carte bleue), l'habitude des cadeaux (en donner, en recevoir aussi parce que je le vaux bien), l'habitude des guirlandes, l'habitude des chants de Noël (quoi qu'on les entende de moins en moins, il faut bien le dire)... Mais avons nous vraiment l'habitude de Noël ? mesurons-nous ce que cela représente ?
 
Nous avons l'habitude de la représentation de Noël, la crèche, les santons : au Centre Saint Paul, elle est magnifique, merci à ceux qui l'ont faite, avec amour. Il ne faudrait pas que nous prenions ces habitudes là. Noël devrait pouvoir nous surprendre, nous devrions y donner une âme neuve, disponible, et nous nous y mettons, l'âme déjà blasée.

En revanche, il est une chose à quoi il faut que nous nous habituiions : habiter avec Dieu, vivre dans la perspective de l'éternité, accomplir nos actes en pensant qu'ils recèlent quelque chose d'infini. Faire toutes les petites choses que nous faisons chaque jour comme si c'était des grandes, parce que ce sont  des actes qui, même modestes, ont un poids d'éternité.

C'est en prenant exemple sur cet enfant dans la crèche que nous pouvons comprendre ce mélange de fini et d'infini que nous sommes devenus. Cet enfant, c'est lui d'abiord, lui le premier qui représente à la fois l'Infini et le fini. En lui est toute la puissance de Dieu qui l'a fait naître d'une mère vierge. En lui est toute l'impuissance de l'homme et jamais l'homme ne peut se considérer comme moins puissant qu'en cet état de petite enfance. Je m'amuse souvent à imaginer les monstres (Staline Hitler) ou les Grands conquérants (Alexandre, Napoléon) quand ils étaient petit enfants. Mais Dieu enfant ?  Il faut nous habituer à ce spectacle de l'Enfant-Dieu, ou plus exactement essayer d'en prendre l'habitude.

Nous vivons dans un monde de peur, où l'homme est seul, sans Dieu, à la merci de toutes ses propres bêtises. On nous fabrique des accroche peur pour servir de dérivatifs, mais nous savons, depuis Nietzsche, que la peur la plus fondamentale est celle qui saisit ceux qui cru pouvoir tuer Dieu. Nous vivons dans un monde désenchanté, un monde sans Dieu, où l'Infini spatio-temporel est la seule explication tolérée. Il faut que ce soit Noël sur notre monde. Il faut que cet enfant nous guérisse des peurs irrationnelles qui nous saisissent. Il faut nous réhabituer au fait qu'il habite ce monde, qu'il est vraiment "Dieu avec nous" Emmanuel.

Même dans nos messes, nous ne savons plus reconnaître la présence de Dieu et les prêtres nous disent juste comme un souhait "Le Seigneur soit avec vous". Depuis Noël, il faut savoir que le Seigneur est avec nous. Ce n'est pas un souhait. peut-être parfois cela nous fait peur et nous avons envie de dire comme saint Pierre : "retire toi de moi Seigneur car je ne suis qu'un pécheur". Mais il faut nous habituer à Lui comme il s'est habitué à nous. Il EST avec nous. Réaliser la force de cette présence, la joie qu'elle procure, quelles que soient les crises, la certitude qu'elle nous apporte, avec l'élan qui va avec la certitude, voilà notre travail de Noël. Nous sommes trop habitués au folklore de Noël et pas assez habitués, pas habitués du tout à sentir le Seigneur avec nous : Emmanuel.

Réaliser cette présence, c'est comprendre que nous sommes tout proches de lui, que nos coeurs lui servent de crèche, même si ils ont été remplis d'ordures, même si dans cette mangeoire trop souvent nous nous sommes salement goinfrés. Réaliser cette présence, c'est comprendre que Dieu devenu enfant est tout proche de nous, mais qu'il est toujours très loin, et que sans le don de la foi, les Bergers eux-mêmes n'auraient pas pu l'adorer. Sans le don de la foi, les mages ne seraient pas venus de si loin. Il est tout près mais toujours à bonne distance. Nous ne pourrons pas le saisir, l'embrasser. Le spectacle nous est donné, l'Enfant n'est pas pour nous, c'est nous qui sommes pour lui. Il faut nous habituer à Noël, c'est-à-dire à cette toute proximité qui reste une distance incompressible. On ne rejoint cet enfant que par nos actes, par nos offrandes et par nos coeurs surtout.

Heureux les coeurs purs, car ils verront Dieu dans cet Enfant. Heureux les coeurs purs car ils sauront le dévorer des yeux, sans jamais prendre sa divine fragilité dans leurs bras, sans croire qu'ils pourraient jamais prendre Dieu pour eux, sans imaginer que cet Enfant puisse jamais leur appartenir.

4 commentaires:

  1. Joyeux Noël !!!! c'est vrai Dieu ne nous appartient pas Il se donne librement à qui Il veut !

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  2. Dans le récit de l'annonciation qui fut lu le dernier dimanche de l'Avent dans la forme ordinaire en tout cas, après la salutation angélique qui se conclut par:

    "Le Seigneur est avec toi",
    Marie fut bouleversée, et je crois que c'est moins par la salutation angélique que par cette révélation qui lui rend le seigneur Présent avant même que l'esprit ne la couvre de son ombre pour engendrer le fils par la volonté du Père.

    Nous incitant à redire le chapelet, je crois, naïvement sans doute, qu'elle a besoin, au jour le jour, d'entendre proclamer par "touttes les générations" ce bouleversement qui la rend "bienheureuse". On n'est jamais tellement exalté, dans son intimité avec Dieu, que lorsque celle-ci est reconnue par les autres et alimentée en prière, lorsque notre proximité objective de dieu nous rend dignes d'être intercesseurs.

    Et, recevant cette reconnaissance de notre part de la Présence de dieu en elle, elle fait de nos coeurs des matrices pour le Seigneur.

    Oh oui, ne cessons jamais de prier pour avoir un coeur pur, dans l'acception où dieu l'entend!

    Joyeux Noël à tous ceux qui font le métablog, en en rédigeant les articles, en y postant, en y consacrant du temps, en en faisant un point d'ancrage de sa méditation ou d'ancrage familial ou tout simplement en le lisant ou en y passant.

    "seigneur, qu'aucun de ceux que tu as mis sur ma route ne se perde, ni pour le temps, ni pour l'éternité" (prière quotidienne de ma grand-mère).

    Prions les uns pour les autres.

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  3. S'habituer à vivre avec Dieu ?
    Je crois que l'éternité n'y suffira pas !
    S'habituer au fait qu'il va falloir s'habituer à ne pas s'y habituer... Peut-être !

    Vous avez raison, mon père, quand vous dites que nous avons trop d'habitudes à Noël. Je ne pense pas qu'elles soient réellement mauvaises en soit, mais qu'elles masquent l'essentiel.

    Pour Julien : Bien jolie prière que celle de votre grand-mère.

    Joyeux Noël à tous !

    Clément d'Aubier (pseudo de rêverie)

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  4. Excellente phrase de St Irénée. Il est toujours étonnant de (re)découvrir cette modernité des grands anciens !
    Sur le fond, évidemment en phase, mais il me semble que le monde a toujours été asservi par la peur et le désenchantement, et que l'Eglise a toujours été le fer de lance de ce "réenchantement" par la révélation de la présence du petit enfant Jésus, sa vie, sa mort et sa résurecitn, dans sa création et chacun de nos frères... Cette habitude à reprendre tous les matins, par notre volonté et la grâce de Dieu !

    Bonnes habitudes de Dieu pour 2012 !

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