dimanche 6 juin 2010

C'est de la com', coco!

Le Progrès de Lyon (26 mai 2010) rapporte que des prêtres lyonnais suivent un stage «pour améliorer leurs sermons». Parmi les trucs qu'on leur donne: «Pensez Barack Obama». Dans cette formule choc (on le leur dit, d'ailleurs, «n'hésitez pas à employer des formules choc») Obama n'est ni le sujet ni l'objet du verbe penser - c'est l'adverbe. C'est que nous sommes dans la com', avec ses tics de langage directement décalqués de l'anglais américain. On s’entraine. On s’analyse. «Laisse-toi aller à sourire, on en a assez des prêtres sinistres» dit-on à l'un. «C'était remarquable, tu étais décontracté» dit-on à l'autre. C'est le «Service d'optimisation des homélies» qui est en charge de prodiguer ces bons conseils à une «assistance plutôt âgée» de prêtres dont le Progrès de Lyon précise qu’ils sont «tous volontaires». On s'entraine, on s'analyse, et on reçoit des conseils, comme ce «Pensez Barack Obama» donc. Un animateur explique concrètement que le président américain «balaie constamment des yeux son auditoire, ainsi tout le monde se sent concerné par ce qu'il dit».

Il y aurait beaucoup à dire sur les dangers de la com', sur l'importation dans le domaine spirituel de méthodes marketing, et des formules choc qui sonnent toc. Mais surtout, ce qui me frappe, c'est cette impression de déjà vu, comme si on enseignait aux prêtres des années 2010 les techniques à la Séguela des années 1980. D'où vient ce sentiment?

Sur son site Christian Terras (de la revue Golias) propose une explication. La raison serait à chercher du côté de ces «nombreuses officines qui sévissent à l’heure actuelle dans l’Eglise catholique, souvent composées de ‘seniors’, bien pensants, nombreux et toujours force de proposition ‘au service de l’Église’, au nom de leurs compétences acquises lors de leur vie professionnelle active.» Autrement dit, si la com' de l'Eglise semble datée, c'est qu'elle l'est. Et si elle l'est, c'est qu'elle serait produite par de jeunes retraités qui refourguent aujourd'hui aux diocèses ce qu'ils vendaient avant-avant-hier aux entreprises.

Vu sous cet angle, on comprend mieux une récente campagne de promotion des vocations, avec «cartes postales gratuites» distribuées dans les cinoches, encarts publicitaires, prêtre façon BD, pin’s «Jesus is my boss» à sa boutonnière. C’était là la manière de parler aux jeunes pour lancer un nouveau chewing-gum, il y a trente ans. On comprend mieux aussi la campagne «En 2010, Jésus Crise» par laquelle le diocèse de Nancy a pensé relancer le denier du culte. Là, avec le petit slogan d’enfer («Donnez, que diable!») fait pour choquer-mais-pas-trop, on est dans une com’ de type fin des années 80.

Décidément très en verve, Christian Terras règle aussi son compte à ce 'penser Obama' («en vérité, si le président américain Obama tourne la tête à droite et puis à gauche … c’est pour lire sur des prompteurs translucides!»), et conclut par une charge à sa manière: «Pour couvrir les silences assourdissants des épiscopats sur les mœurs... de leurs ouailles, il leur faut faire beaucoup de bruit!».

18 commentaires:

  1. Merci cher Webmestre, votre analyse est cinglante et remonte le moral.
    Lorsque j'ai lu, en effet, le slogan "laisse-toi aller à un sourire, on en a assez des prêtres sinistres", j'ai ressenti une grande peine, qui m'a étreint le coeur, je l'avoue, en songeant à notre curé, à la campagne, oh! il y a bien longtemps il est vrai, si bon, si doux, si bourru tout à la fois.

    Était-ce de lui, dont parlait cette ignoble slogan? pour le remercier d'une vie entière passée à soulager les souffrances morales et spirituelles (et souvent aussi, les souffrances tout court) d'une modeste population de paysans du fin fond de la Bourgogne?

    Sinistre aussi, cette "bonne soeur" que je connaissais, ayant passé sa vie à être une humble et discrète infirmière mais quelle infirmière! dont les bienfaits spirituels à l'égard des agonisants, se comptent certainement en milliers? Et toujours son sourire bienveillant, parlons-en justement de son sourire aux lèvres! Venu de son âme pure et qui a du en aider plus d'un, à passer paisiblement de vie à trépas.

    Moi, je ne voudrais pas mourir, avec un type à côté de moi, qui a une formation en publicité et en marketing, me racontant que c'est un mauvais moment à passer mais que le film reprend après l'entracte!

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  2. Un problème réglant l'autre... je lis sur le site du diocèse de Nancy que la moyenne d'age des donateurs est de 73 ans. D'autre part la Croix écrit que l'âge moyen des prêtres est de 75 ans. Ces deux groupes n'ont cessé de vieillir ces dernières années. L'allongement de la durée de vie ayant ses limites, on arrive au moment où leurs effectifs respectifs vont fondre de manière importante. Peu importe, d'un point de vue financier, tant que le ratio ressources/besoins reste constant.

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  3. Bonne idée d'attirer l'attention, on pourrait imaginer que le pupitre du prêtre soit davantage surélevé. Bonne idée de regarder directement toutes les parties de l'assistance, on pourrait installer le prêtre au milieu d'elle.
    j'ai soudain une idée créative : et si on construisait attaché à un des piliers de la nef, un petit édicule bien mis en valeur, auquel le prêtre monterait pour prononcer son sermon, pardon son homélie ?

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  4. Méthode Obama pour homélies de fin de semaine. De Yes we can à Yes week end !

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  5. Je pense que Saturnin veut par ler d'une chaire ?

    Plus sérieusement la com n'y fera rien. Si les sermons sont inécoutables, c'est qu'ils sont mauvais et que le fond est nul. Du préchi-précha l'eau de rose.

    Quand j'écoute un sermon dans une église catholique, j'ai envie de dormir ; par contre je trouve les prédicateurs évangéliques percutants car leurs propos (même s'ils sont contestables) interpelle les gens.

    Le pont faible de la nouvelle messe qui fait fuir les fidèles c'esr bien la nullité des homélies.

    je connaissais un prête remarquable pour ses homélies, malheureusement son cardinal archeveque l'a exilé à 1000 klms et depuis nous n'en avons jamais eu de nouvelles. Depuis son église s'est littéalement vidée (40 personnes à la messe du samedi soir l'été ; l'hiver moins de 20).

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  6. On ne 'vend' pas Jésus comme on 'vend' des savonnettes, ou comme on 'vend' un candidat aux élections. Dans les années 1970/1980 des évangélistes américains ont progressé en acclimatant à leur religion ce qu'ils avaient appris chez Unilever. Mais ils 'vendaient' leur religion justement, pas la nôtre. Le catholicisme ne se prête pas aux MegaChurchs, aux gadgets des communicants, aux syndicated broadcasts et autres Christian Pride. Ca ne correspond pas à notre ADN. C'est contre nature. Intoxication assurée.

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  7. J'ai regardé la vidéo, et très honnêtement, les profs de communication, je ne les ai pas trouvés communicatifs eux-mêmes: "ca se sent... euh... dans votre euh... ah bon... mais non... euh... mais le problème n'est pas... euh". La chemise rose ou les lunettes hi-tech noFrames n'y changent rien, et je vois un troisième problème à ceux qui ont été énoncés plus haut:

    Oui, c'est daté et périmé. Non, ça ne correspond pas. Mais en plus de ne pas être le bon produit, le produit n'est pas bon.

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  8. Je n'aime pas l'abbé Guy Gilbert et sa démagogie "jeuniste" mais je dois reconnaître que dans ses sermons il "accroche" son auditoire ; un peu dans le même registre que, dans un autre domaine, Arlette Laguiller ou JMLP qui ont de l'"abattage".

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  9. J’ai été accroché il y a 57 ans par un prêtre à ma récollection de première communion à la chapelle du Lycée Hoche de Versailles. Il nous a dit à nous, qui n'avions que 11 ans, que cela n'allait pas toujours être facile; bref que la vie religieuse n'était pas un long fleuve tranquille. Je ne l'oublierai jamais IL nous empoigné aux antipodes de "la com" douceâtre à la Obama. Merci à lu, s'il vit toujours. Si ma foi a survécu à mes errements, c’est grâce à lui! Aujourd'hui nos touchons le fond d'une comme complètement déconnecté d'une vie intérieure.
    Il nous reste qu'à espérer que ces vieux prêtres, ou évêques de ma génération s'endorment et prions pour eux, mais qu'une nouvelle génération surgisse, qui renouvelle notre foi et ne confonde plus marketing !!et parole qui nous fait vivre. .

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  10. Je ne connais pas suffisamment l'Abbé Guy Gilbert, pour porter un jûgement sur sa "démagogie jeuniste": en tout cas moi, je vote pour lui, pour le peu que je l'ai vu ici ou là (ça remonte d'ailleurs à pas mal de temps, je n'ai aucune idée s'il se bonifie, en vieillissant) il m'a paru être quelqu'un de très sincère et authentique et finalement tous ses gadgets (moto, pins) ont fini, contre toute attente, par me le rendre fort sympathique!

    Mais enfin, ça n'engage que moi, vous savez combien je peux me planter maintenant (après ma sortie dythirambique sur le Père Bruckberger...lol...qui doit être au Purgatoire, pour un sacré bout de temps, d'après certains ici).

    Très touché par le témoignage d'Henri (à 16h52)

    Je souhaite une excellente semaine à toutes et à tous,

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  11. C'est qui, Christian Terras ? Qu'est ce qu 'il a fait de si important ? Des idees geniales ? Des livres traduits en vingt langues ? Des actes d'heroisme extraordinaire ?

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  12. Vous ne connaissez pas terras? tant mieux. Vous devez donc juger ses propos sur ce qu'ils sont, et non sur leur auteur.

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  13. Pathétique,l'agonie en images de Vatican II. Prochaine étape, un prêtre à "La Ferme des célébrités" !
    Je vais faire un acte de charité, dominer mes passions, contenir cette furieuse envie de rire comme on rit des guignols, les prendre en pitié, continuer d'espérer que le Christ qu'ils ont reçu à leur baptême est juste enseveli, englué dans la naphtaline de Vatican II, qu'il leur suffira de demander pour obtenir,car finalement, je n'aimerais pas être à leur place à l'heure de Dieu, il ne suffit pas toujours de vouloir bien faire, les pauvres...

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  14. Et si le prêtre commentait tout simplement l'Evangile en essayant d'en tirer quelque enseignements pour aider le troupeau en face de lui ?

    C'est ce que les gens, même le plus "modernes" attendent : du secours, un peu de force pour la semaine à venir.

    Aux prêtres :
    si vous arrivez à aider, à reconforter les gens ne serait-ce qu'un petit brin (moralement, intellectuellement, spirituellement... tout type de reconfort) vous n'aurez pas besoin de la danse de sept voiles pour les faire venir, ils viendront d'eux-mêmes.

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  15. C'est réel? Non, vraiment on croit rêver!!
    Cela doit être une nouvelle façon pour l'Eglise de s'adapter au monde...on a vu les résultats. Je hais profondément tous ces gens de la "communication" avec leurs techniques pour débiles mentaux. La foi est donc devenu un produit marketing, c'est triste et encore plus tous ces prêtres vieillissants qui se perdent dans les méandres de leur ineptie.

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  16. Beatrice Klenik7 juin 2010 à 17:39

    quelle tristesse.. donner B.O. en exemple ?? Nous n'avons pas le meme Dieu. Le notre est JESUS CHRIST, CELUI qui AIME et qui respecte la Vie.
    Nos pretres sont inspires par l'Esprit Saint pour guider les fideles.
    Ils n'ont rien a vendre, ils sont Temoins de Notre Seigneur.
    Nos seminaires traditionnalistes sont pleins et n'ont pas besoin de ces methodes pour former les futurs pretres, ces methodes dont nous constatons depuis 2 siecles les mefaits.

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  17. Je pense que toutes le méthodes de com les plus sophistiquées seront sans effet pour transformer un orateur médiocre en un nouveau Bossuet.

    On est doué pour parler en public ou on ne l'est pas.

    Le Curé d'Ars n'avait pas fait d'études bienbrillantes (il avait risqué de ne pas être ordonné car il n'avait jamais pu apprendre le latin) et pourtant tous ceux qui l'écoutaient se rappelaient ses propos longtemps après.

    Le problème actuel des prêtres c'est qu'outre leur manque de communication et d'adaptation au "public" ils n'ont rien à dire : leur propos sonne creux ; a croire qu'il s'appellent tous "Père Gillette".

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  18. La meilleure technique... c'est encore d'être toujours plus profondément ancré dans la prière : le coeur du saint est une caisse de résonance de la Parole de Dieu. Toucher les coeurs par sa prédication est un charisme, un don de Dieu, pas une technique.

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