lundi 30 août 2010

Jean-Marie Paupert : Paix en la Demeure

Texte repris de Monde&Vie n°831 - 28 août 2010


Jean-Marie Paupert me l’expliqua sans ambages durant la visite que je lui rendis dans son bel appartement du Quai Voltaire : il y avait pour lui deux parties dans sa vie. Une partie où il s’était trompé et une partie où, chevaleresque, il avait entrepris de lutter contre le grand lâcher tout dont il s’accusait de l’avoir provoqué pour une part. Quel est le moment où son avis bascule? Je lui posai la question mais n’eus guère de réponse. Le fait est que dans Vieillards de chrétienté et chrétiens de l’an 2000, publié en 1967, il accuse pêle-mêle Jacques Maritain, François Mauriac et Jean Guitton d’être ces « vieillards de chrétienté », presque « des intégristes ». Et il professe, avec cette sorte de naïveté rafraîchissante qu’il a dû garder jusqu’à son dernier souffle, son admiration pour le Père Chenu (« bien plus intelligent que le Père Congar » me glissait-il encore trente ans plus tard) et son enthousiasme pour la nouvelle ère et « cet avenir de rites, reverdoyant constamment ». Je dirai qu’il était l’un de ces progressistes plein de foi dans l’avenir. Sa foi a été assez grande pour lui permettre de reconnaître qu’il s’était trompé dans ses espérances.

Une position de défense de la culture

Où est chez lui la ligne de partage des eaux ? Si l’on regarde sa bibliographie, il y a bien sûr Péril en la demeure, en 1979, dans lequel il sonne le tocsin de la crise de l’Eglise. Mais l’année précédente son livre sur Les Mères Patries, Jérusalem Athènes et Rome marque bien qu’il se trouve dans une position de défense de la culture, qui va l’amener à défendre la foi, foyer de cette culture. Il le fait dans Les chrétiens de la déchirure: « Je crains aujourd’hui que le catholicisme – oserais-je dire l’Eglise, ne perde son âme. Y restant, je reste dans l’incertitude ». L’animal souffrait et il éructait sa souffrance, comme il éructa naguère son optimisme.

Il avait commencé sa vie comme novice dominicain. Il avait ensuite été éditeur, responsable avec Daniel-Rops, de la fameuse collection Je sais Je crois chez Fayard. Il est resté toute sa vie l’homme d’une parole écrite. Il trouva à La Nef, grâce à Christophe Geffroy, un lieu tranquille d’où il pouvait continuer à éructer… Et au Ciel, où il a tant désiré se rendre, il doit continuer à fulminer, en portant sa récrimination, directe au Père éternel, qui, le voyant venir de loin, trouve les mots pour apaiser dans sa lumière cet honnête émule de Léon Bloy. Il avait toujours su d’avance, ce cher Paupert, que dans l’imprécation, étymologiquement, il y a la prière !

Abbé Guillaume de Tanoüarn

2 commentaires:

  1. Merci pour cet article. J'aimais beaucoup Paupert dans ses deux manières (avant et après). C'était vraiment quelqu'un de bien. Il nous manquera beaucoup. Tout comme lui j'ai eu de grandes espérances lors du Concile Vatican II et hélas ! il a fallu attérir pour nulle part (on a abandonné le chateau de famille dans l'Anjou pour un F 2 dans le 9 cube).

    RépondreSupprimer
  2. En toute immodestie, je dirais, ayant lu l'ancien Paupert quand j'étais progressiste ultra-communiste( situationniste etc)...puis l'ayant retrouvé quand j'ai découvert la Tradiiton, que la ligne de fracture est entre l'Adoration grâce au donné Révélé et à la vie sacrametelle( union à Dieu-Croix-Gloire dans la pensée de l'être et la vie des vertus au service ...) et les retombées civilisationnelles ( qu'elles soit de déchéance et de révolution, ou de Culture et de civilisation...)
    L'ultra progressisme politique que je professais ( réconcilier la vraie marxologie anti léniniste anti étatique et le vrai christianisme post conciliaire, pour faire gros)ne m'a jamais empêché de lutter pour la culture et la civilisation : justement, il était question de promouvoir auprès des "masses" et par les masses ("Au coeur des masses" titrait Voillaume) une culture et une civilisation nourries des longues histoires (du code d'Hammourabi, des grecs et des romains à nos jours) mais pas mutilées par leur élitisme étriqué (toujours les rares "citoyens" de la politique et de la culture contre les masses esclavagées). ainsi ai-je emprunté l'ascenseur social dans els ens de al descente( de la montagne Ste Geneviève aux banlieues), sorte d'imitation "sociale" de la kénose de Jésus ..
    N s'agissait-il pas de "servir les plus pauvres" (quitte à être contaminé par le "servir le peuple "des maos..) N'étais-ce pas le mouvement même de Madeleine Delbrel? ou du P.Peyriguière( "la vie de Nazareth")?
    Et j'ai découvert dans les zones, la soif d'apprendre et de découvrir ( des élèves m'apportant des recueils de poèmes de leurs propres terreaux, tandis que je faisais lire en prêtant mes livres , ce qui a fait l'occident)...soif bien sûr éteinte par le laïcisme( '"laicité apaisée" disaient les pasteurs abandonniques) et la révolution pédagogiste qui , pour se "mettre au niveau des élèves" ne se met qu'au niveau minable imaginé par les têtes minables et médiocres qui dirigent et terrorisent (en réput'blique,c 'est synonyme)les ministères de la Révolution finale terminale..

    A quand un "shadow cabinet" de la royauté du Christ, de la diffusion de la civilisation et de la culture..Il se fait très tard ..et les masses se désagrègent en petites meutes criminelles et troupeau passif sacrifié ...Où est donc le peuple des populistes???Et le souverain de ce peuple?
    Viens Seigneur Jesus (version temporelle:Louis XX, reviens!)

    A.S. l' Assistant Social

    RépondreSupprimer