mercredi 25 mars 2020

Gloire au Père...

Le psaume 42, qui décrit avec tant de précision les hauts et les bas de la vie spirituelle, se termine sur cette injonction à l'espérance, qui est sans doute l'injonction première, même si, à en croire Péguy, l'espérance est "la deuxième vertu" (après la foi). Notre société calculatrice a mis l'espérance en équation ; au nom du principe de précaution, elle a anéanti le risque. Elle a mesuré, rationalisé tout espoir, méprisant l'incalculable espérance, tout en vérifiant la formule que Dante avait inscrite à la porte de son enfer : "Vous qui entrez là, laissez toute espérance".

Après le psaume proprement dit vient la doxologie : "Gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit, qui clôt toujours la récitation liturgique des psaumes, comme pour indiquer qu'on lit désormais les psaumes, comme tous les livres de l'Ancien Testament, dans l'esprit de la nouvelle alliance. Saint Augustin a résumé cette attitude des chrétiens face au premier Testament dans la formule latine suivante :"Novum Testamentum in vetere latet, Vetus Testamentum in novo patet". Le Nouveau Testament est caché dans l'Ancien. L'ancien Testament apparaît clairement dans le nouveau. La traduction ne saurait rendre les assonances de la formule originelle. Mais l'idée est simple : le Gloria apparaît à la fin du psaume comme une sorte de signature chrétienne d'une parole souvent prophétique et qui se réalise dans l'Evangile.

Le Dieu Trinité des chrétiens est le même que le Dieu Un de l'Ancien Testament. Le Dieu Un de l'Ancien Testament s'exprime dès le livre de la Genèse dans une forme nominale au pluriel : Elohim, pluriel de El. Et Il parle au pluriel : "Faisons l'homme à notre image et à notre ressemblance" 'Gen 1, 29). Comme pour annoncer sa dimension Trinitaire, comme pour montrer par avance que si Dieu est unique parce qu'il est Infini, il n'est pas seul parce qu'il est Amour et qu'un Dieu d'amour qui serait un solitaire apparaîtrait en contradiction avec lui-même.

Nous avons insisté sur le Signe de la Croix initial sans marquer sa valeur trinitaire, qui va de soi : la messe est appelée pour cela le sacrifice de la nouvelle alliance. Nous verrons qu'elle est essentiellement un sacrifice trinitaire, que c'est parce qu'il y a ce sacrifice trinitaire dans l'éternité que l'on peut comprendre que le sacrifice du Christ dépasse l'espace-temps et puisse être le même à tous les instants depuis le Jeudi saint et dans tous les lieux du monde, comme l'avait prophétisé le prophète Malachie : "Du lever du soleil à son couchant, mon nom est grand parmi les nations, et en tout lieu, on sacrifie et on offre à mon nom une offrande pure, parce que mon nom est grand parmi les nations dit le Seigneur des armées". Le rappel de la Trinité n'est pas seulement comme une signature chrétienne du psaume 42, mais comme un rappel de la condition de possibilité du sacrifice eucharistique : il y a un vrai sacrifice sur la terre parce qu'il y a de toute éternité un vrai sacrifice dans le ciel au sein même de la Trinité, "au commencement et maintenant et toujours".

Petite remarque grammaticale pour la fin : "Sicut erat in principio..." Comme il était au commencement... Le verbe était au singulier n'est pas un verbe impersonnel, comme dans l'expression : "Il était tard" par exemple. Le singulier de erat possède un sujet : ce sont les trois personnes, le Père, le Fils et le Saint Esprit, qui ne forment qu'un seul sujet, car il n'y a pas trois sujets divins qui feraient trois dieux. Voilà ce qui fait que le verbe être est au singulier : "Comme il était au commencement...". Par ailleurs, le verbe était à l'imparfait désigne ce qui n'est jamais accompli, ce qui n'est jamais du passé ("Comme il a été au commencement..." par exemple indiquerait le passé).

1 commentaire:

  1. Monsieur l'abbé,
    Si vous permettez une petite précision pour la traduction du : "Gloria Patri ET filio ET Spiritui Sancto. Soit :"Gloire au Père ET au fils ET au Saint Esprit".
    On m'a appris que cette faute qu'on omet souvent dans la version française alors qu'elle figure bien dans la version latine(deux ET qui se suivent) était pour signifier l'égalité des personne divines. Idem en Grec semble t il : Δόξα Πατρὶ καὶ Υἱῷ καὶ Ἁγίῳ Πνεύματι.
    Amicalement in Christo Rege

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