jeudi 19 août 2010

Une belle personne

C'est la rentrée. Lorsqu'on est responsable d'un bastringue, on fait le compte... Sur qui s'appuyer ? Avec qui compter ? Celui qui entreprend (et Dieu sait que notre Centre Saint Paul est une petite entreprise spirituelle) a besoin de savoir qui est solide, qui est imaginatif et entreprenant et qui est juste un mangeur de soupe... Ou pire, un déblateur qui vit aux dépens de celui qui l'écoute.

Je dois dire que cette année se présente sous les meilleurs auspices. Depuis cinq ans, j'ai des gens qui proposent des activités ou des cours et qui font tourner la machine. Le Centre Saint Paul devient un lieu de "conspiration" (au sens que Leibniz donne à ce terme : il ne s'agit pas de complot mais de convergence). Je remercie tous ceux qui "conspirent", Micheline, Benoît, Olivier, Matthieu, Matthieu Michel et Mathieu, Camille, Jérôme, Tristan, Catherine, Claude, Marie-Françoise, Gilles, Gilles, Jean-Pierre, Ombeline et tous ceux qui nous rendent service sans être inscrits sur les listes, ceux aussi que j'oublie. Tous les autres ! Je ne parle pas des ecclésiastiques !

Je voudrais tout de même évoquer d'une ligne l'abbé Winfried qui nous vient du Burkina,avec "l'ordre de mission" de son évêque : il découvre en ce moment la liturgie extraordinaire avec un enthousiasme qui me rappelle ma jeunesse."C'est très priant" me dit-il. Il fait des sermons simples et émouvants comme la foi. Et pendant qu'il est là, j'apprends que l'abbé Baumann, en vacances à la Martinique depuis quinze jours, a trouvé moyen de prêcher, impromptu, une récollection à une cinquantaine de personnes. C'est aussi ça l'universalité de l'Eglise : l'échange.

Faut-il des aptitudes ? Qu'est-ce qui est requis pour "conspirer" ? Qu'est-ce qui est requis pour manifester l'aujourd'hui de la chrétienté ? Mettre ses dons aux services des autres. Voilà le maître mot : le service. Chacun, ensuite, apporte ce qu'il possède.

On n'est pas jugé sur ce qu'on a, mais sur ce qu'on donne.

Ce qu'on a, ce qu'on donne ? N'est-ce pas la même chose ? J'ai mis très longtemps à comprendre la formule de Plotin : "Le bien donne ce qu'il n'a pas". On m'avait appris le bon sens scolastique renfermé dans le schiboletth : Nemo dat quod non habet. Personne ne donne ce qu'il n'a pas. Outre que les circuits financiers d'aujourd'hui contredisent à l'envi ce gros bon sens, car les banques passent leur temps à prêter ce qu'elles ne possèdent pas, il me semblait que Plotin voulait dire quelque chose qui ne relevait pas forcément de la science économique actuelle.

Le bien donne ce qu'il n'a pas ? C'est parce qu'il donne ce qu'il est. Et nous faisons tous de même comme dirait la chanson. Nous ne donnons pas ce que nous possédons, rassurez-vous, je ne suis pas un détrousseur. Nous donnons ce que nous sommes. Et c'est pourquoi souvent nous donnons en silence. Par l'exemple. En particulier aux enfants.

Qu'est-ce qui est requis de ceux qui donnent ? Posséder ? Non. Vouloir donner. Une communauté existe, elle rayonne, elle manifeste une joie quand elle est constituée de gens qui veulent donner.

Vous qui avez un peu vécu, si vous vous retournez en arrière, si vous faites un bilan, que vous reste-t-il ? Ce que vous avez acquis ? C'est tellement fragile. Ce que vous emportez derrière le rideau, c'est toujours... ce que vous avez donné. Vous avez cru le perdre. En le donnant, vous l'avez gagné. Vous l'avez gardé pour toujours. Amour, passions diverses, travail : ce qui nous reste, ce n'est pas ce que nous avons jalousement gardé et qui s'étiole entre nos mains, c'est ce que nous avons donné, et qui, de loin, brille encore comme un gage et comme une promesse.

Telle est la loi de la vie. Et c'est aussi, en une sublime redondance, la loi de la charité.

6 commentaires:

  1. Billy WINSTERSHEIM20 août 2010 à 07:23

    Cher Père,
    cela est une belle définition de la Charité. Notre vocation est bien celle de redonner ce que l'on a reçu de Notre Seigneur. Et ce que nous donnons avec excellence nous sentons bien que cela ne nous appartient pas, tellement cela est grand. Dieu se sert de ceux qui cherchent sa Volonté pour s'annoncer lui-même, nous sommes des passeurs d'Amour. Union de prière.

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  2. Toujours Lacan "l'amour donne ce qu'il n' a pas à qui n'en veut pas"..
    Cependant, les belles perspectives de l'AB2T me semblent singulièrement parcellaires et sans nuances...

    SERVIR: oui, il nous reste nos services. Le "service" du "peuple" (pour les maoistes qui ont quitté Normale sup pour Billancourt, ou le "service des plus pauvres" pour les "cathos" (les "talas" disait-on, ceux qui "vonT A LA messe") qui ont quitté leur carrière sorbonarde pour aller servir dans les "zones" rouges coco puis vert islam ..Mais ce service, pour réel qu'il fût, fut aussi un asservissement : asservissement au laïcisme (prétendu par les huiles épiscopales " apaiséi" quelle gourrance , messeigneurs!), au républicanisme, au démocratisme...asservissement à leur version "ecclésiastique" ( prétendue conciliaire),celle qui a béni tout cela au nom de la récupération des (supposés) biens issus de deux siècles de culture révolutionnaire-socialo-libérale...

    Cet asservissement n'a -il-pas rendu bien faible le "service"??? Celui-ci n'aurait-il pas été plus puissant, et surtout plus profond, plus attentif au réel, plus proche des personne, moins idéologisé, s'il avait été inclus dans le "saint esclavage" cher à Grignion de Montfort???
    On rejoint le "ce qu'on est" : si nous avons donné ce que nous étions( historiquement, sociologiquement, psychologiquement..bref, naturellement), que n'aurions nous pas donné si nous avions été "unis à Dieu", en état de grâce , si pour nous "la vie" c'eût été "le Christ" ...
    Il y a là de dramatiques ambiguités.
    A quand les distingos, les distinctions indispensables (1)?
    Comme si l'AB2T oubliait le féroce impératif catégorique que le parti intellectuel clérical (avec ou sans complot, je m'en moque) avait fait peser sur nos fragiles existences ( "avoir des gueules de Ressuscité", " être heureux" "rayonner", ...toutes choses qu'on nous intimait au moment même où on nous en retirait les moyens "spirituels" (2), messe, sacrements, modale,commandements, tradition, thomisme, augustinisme etc ) dans un mouvement pervers de marâtre envoie en mission

    A.S. (l'Ane Suppliant)

    (1) il s'est passé là ce qui s 'est passé dans de nombreuses familles "libérales": le vernis d'une éducation aux bonnes manières, souvent soumis aux images parentales pures, déconnectée des racines théologales et morales, a vite sauté sous les révolutions morales, féministes, homosexualistes et leur puissant appui sur les fantasmes d'une libido dévoyée...et maintenant que les enfants ne sont plus que des "rescapés d'avortement" dépendant de "projets parentaux" ..si maigres élans par rapport aux puissances naturelle ou surnaturelle, que sera-ce ?Quel être auront-ils reçu à donner dans ce désert artificiellement cultivé( comme les "richesses" fictives de la phynance mondialisée) ?

    (2) pas d'hésitation sur ce vocable: il désigne la vie dans l'ESprit Saint, sous sa conduite, avec ses dons perfectionnant les vertus ...ET RIEN D'AUTRE ( pour faire un plagiat "hors l'Esprit Saint, pas de spiritualité ..)

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  3. Cher Monsieur l'abbé,
    Je trouve très beau et très juste ce que vous écrivez sur le don. J'ai remarqué que la mort d'un proche nous cause une douleur d'autant plus grande que nous lui avons donné beaucoup, ou qu'il nous a donné beaucoup. S'il est au Ciel, il est heureux, alors pourquoi souffrons-nous? nous avons l'impression qu'un membre nous a été arraché. C'est tout ce que nous lui avons donné, justement, qui est parti avec lui, comme si c'était une partie de nous que nous avions mise en lui, et nous souffrons aussi de ce qu'il ne pourra plus de son côté nous donner de la même façon.
    Tout ce que nous avons, mais aussi tout ce que nous sommes, est un don, puisque c'est Dieu qui nous a donné l'être et l'existence naturels et la grâce surnaturelle. Au fond, en donnant, nous ne faisons que communiquer ce qui nous a été donné en gérance, Dieu ne nous a donné notre âme que pour que nous la Lui rendions afin qu'Il la rende bienheureuse. Retenir tous ces biens pour nous est contre notre fin, c'est suicidaire, c'est la part qu'a choisie le démon.
    Je souscris aussi à ce que vous dites sur la conspiration. Au sens classique (devenu maintenant littéraire hélas), c'est entreprendre une action de concert avec d'autres, concourir à une fin, préparer, organiser (au sens transitif: conspirer le succès d'autrui), et la convergence est l'action ou le fait d'aboutir à la même fin, de façon concertée ou pas. on dit: "Tout conspire à notre bonheur". Le mot ne prend un sens péjoratif que si la fin recherchée est mauvaise.
    Au sens courant, la conspiration vise à renverser un pouvoir politique, c'est un synonyme de complot. Ce peut être en vue de remédier à un mal, comme renverser un tyran, ou en vue de la révolution, comme en 1789, ou en 1958/1962 pour donner le pouvoir aux ennemis du Christ-Roi.

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  4. Sur ces belles paroles.... je vous souhaite une très bonne rentrée!!!

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  5. Bonsoir monsieur l'abbé,

    A quand un bilan et une prévision sur les futurs ordinations de l'ibp??

    Où en est l'institut, avez vous beaucoup de séminaristes?

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  6. Pour donner, il faut déjà avoir reçu et dans les églises. Il y a bien longtemps qu'on ne reçoit plus rien. La faute à ceux qui ont transformé le message de Jésus, ceux qui voilé le sens pour le pouvoir. Ceux qui ont de la bonne soupe parce qu'ils fourvoient les gens au lieu de leur donner ce qui compte le plus, les instructions qui mènent à dieux... les 7 églises de l'apocalypse de saint-Jean, ou plutôt les 7 chakras ! Comment maîtriser son esprit et avoir une vie dévouée à dieu et non pas au service d'un prêtre qui se fourvoit lui-même par ignorance ou amour du pouvoir qu'il a sur les autres ou de la place qui est bien bonne !

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