mardi 14 août 2012

Le Père Spicq : science et sagesse

Je ne résiste pas à vous communiquer un texte du Père Spicq éminent connaisseur des papyri grecs et spécialiste du vocabulaire du Nouveau Testament. Son gros lexique publié au Cerf sonne toujours juste. En spécialiste du langage, il me semble que sans aucune emphase, sans effet de manche, il a, du point de vue spirituel, le mot juste souvent, même dans les explications les plus techniques en apparence.

Grâce à mon bouquiniste préféré, j'ai mis la main sur La révélation de l'espérance, livre rarissime du Père Spicq, publié par la Maison Aubanel, imprimeur du Saint Père à Avignon (et revendiquant sans doute de l'être depuis le XIVème siècle, du temps de la splendeur du Palais des papes, avant l'invention de Gutenberg).

En 1931, le Père Spicq est déjà soucieux des termes qu'il utilise, mais, jeune moine, il laisse affleurer spontanément sa vie spirituelle.

A propos de la trahison de Pierre le chef des apôtres, que le Christ a expressément prévue et permise, le Père Spicq écrit : "Plus on se fait petit et plus on prend conscience de son néant (ce peut être le bénéfice de tout péché), plus Dieu se penche sur ce que nous sommes, le comble de ses grâces et l'exalte" (p. 116). En référence, est cité Luc 18, 13-14 : Jésus déclarant justifié le publicain et pas le pharisien.

Dans cette célèbre parabole, il ne s'agit pas pour le Christ d'inverser les valeurs et de nous dire que le publicain, ce Collaborateur des Romains, est un homme très bien. Laissons ce genre de perversion intellectuelle aux misérabilismes et au masochismes, fomentés par le XIXème siècle et ses suites. Non, le publicain n'est pas un homme bien. Mais, alors même que son activité de percepteur à la solde de l'ennemi n'est pas recommandable, il utilise ce handicap comme un moyen pour provoquer le coeur de Dieu à lui faire grâce : "Mon Dieu aie pitié de moi QUI SUIS UN PECHEUR".

Paradoxe : c'est son péché qui justifie la publicain, c'est la conscience qu'il en prend. Et nous ?

Quelle plus belle espérance que celle qui s'accommode du négatif pour en faire un moyen du pardon et de la grâce : non pas un échec mais une occasion supplémentaire d'entreprendre sous le regard de Dieu.

6 commentaires:

  1. Oui, mais pour avoir le pardon, il ne suffit pas de s'accuser de ses fautes. Faut-il encore avoir une vraie contrition.
    Cas concret qui se pose à moi : reconnaissant mes fautes, les confessant à un prêtre en lui avouant que je ne me sens pas de véritable contrition, est-il normal que celui-ci me donne son absolution, comme ce fut le cas ?
    Bien à vous In Xto
    Irène

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    1. La contrition, c'est bien, mais il manque encore une chose: prendre les mesures nécessaires pour ne plus pécher.
      Reconnaître ses fautes est assez facile, avoir un sincère sentiment de regret demande déjà un peu plus, mais changer sa vie, ses habitudes pour éviter le péché, voilà quelque chose qui demande beaucoup, car on implique la volonté.

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  2. Comme quoi il ne faut pas interpréter littéralement la Bible mais il faut en chercher le(s) sens caché(s).

    C'est en prenant conscience de nos péchés que nous sommes justifiés et pas non pas en nous glorifiant de nos (pseudo) bonnes actions. Mais il faut éviter de tomber dans la déréliction morose, sinon il n'y a plus qu'à se suicider. On peut se répéter cent mille ans que l'on est un pauvre type que cela ne fera pas avancer le schmilblic.

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    1. Prendre conscience ne suffit pas pour être pardonné, il manque l'implication de la volonté. Prendre conscience et s'accuser, voire faire pénitence, tout cela fait partie du processus, mais le but ultime est d'éviter de pécher, autant que possible, non pas en espérant ne plus commettre de faute, mais cherchant à faire ce que Dieu veut et non pas ce que nous voulons.

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  3. Oui cher AG2T, prendre conscience de son péché, se sentir si mauvais, si rampant, tel un ver de terre (c’est ma comparaison fétiche !) que, le nez dans la boue, à ce moment là exactement, nous pouvons connaître l’infinie grandeur de Dieu (et Sa miséricorde). Il faut toucher du doigt, notre infinie petitesse pour rencontrer le Christ. Je ne sais pas si c’est possible autrement. Peut-être que Dieu permet, à certaines occasions, que nous péchions pour que d’une part, nous devenions plus humbles et pour que d’autre part, nous n’ayons plus aucun jugement envers notre prochain. (la paille et la poutre)
    Et, en ce qui concerne le péché, Il y a une deuxième prise de conscience à effectuer : Se rendre compte que nous sommes tous solidaires dans le péché. Etre Solidaires dans la Grâce, ça ne nous affecte pas trop, au contraire, mais être solidaires, par Adam, dans le péché, c’est terrifiant. Pourtant, tous les péchés des hommes sont les nôtres aussi. Nous ne valons pas mieux que quiconque. Une circonstance malheureuse et chacun pourrait devenir le plus grand des pécheurs.
    Cette humilité là est vraiment la spécificité du chrétien. Elle est un préalable à l’amour. Une condition « sine qua non ».
    Le plus difficile, après tout cela, serait de s’aimer soi-même. Mon confesseur voit encore de l’orgueil dans le fait de ne pas s’accepter soi-même, tel qu’on est, pécheur. C’est pourquoi j’admire tant les Paul et Augustin. Ils ne culpabilisent pas.
    Benoîte













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