lundi 16 décembre 2013

Six mille films, un seul homme

Conférence de Laurent Dandrieu, mardi 17 décembre au Centre Saint-Paul à 20H15.

Thème : Le cinéma entre morale et moralisme. Laurent Dandrieu signera son livre à l’issue de la conférence. Merci à mon alter ego Joël Prieur de son article qui essaie d'aller au fond de ce qu'apporte un critique.

Les éditions de l’Homme nouveau nous ont gâté pour Noël. Elles nous offrent un objet étonnant, plus qu’un livre, pas un simple répertoire. J’appellerais cela un recueil. Dans ce Dictionnaire du cinéma, en effet, chaque film a été cueilli par un fleuriste d’un goût très sûr et il est mis à sa place, majeure ou mineure, dans la composition, ou bien il est simplement rejeté si sa fleur s’est fanée en naissant. 

Six milles films. Un seul homme : Laurent Dandrieu, responsable de la rubrique Cinéma à l’hebdomadaire Valeurs actuelles. Sa méthode ? Voir : « chacune des critiques que vous lirez a été écrite immédiatement après avoir vu le film ». Nous émouvoir : oui, « nous émouvoir de compassion, d’amitié, de rire, de pitié ou de colère, sur cet étrange animal, notre frère, qui rampe dans la fange en rêvant aux étoiles ». Mais aussi juger en faisant appel à « une raison qui se nourrisse de l’émotion au lieu de se laisser réduire au silence par elle ». Ce jugement, Laurent Dandrieu le porte toujours avec audace, que cela plaise ou non. Il nous en avertit dans sa préface : « En matière de critique, oser : tout est là ». 

C’est ainsi que dès les premières pages, on tombe sur A bout de souffle, le film culte de Jean-Luc Godard, avec Jean-Paul Belmondo : étrillé. « Godard, dès sa première tentative accouche d’un cinéma nihiliste, sans personnage, sans récit, sans dialogue, sans psychologie, sans autre contenu que de sembler vouloir tout renverser ». Au final, c’est l’idole de la Nouvelle vague qui est renversée. Le jeu de massacre, avec l’accumulation stylistique des « sans », « sans », « sans », a quelque chose de jubilatoire, comme un « à la fin de l’envoi je touche ». On l’aura compris, ce Dictionnaire à panache n’a rien à voir avec une série de notules, sorties chiffonnées du grand fourre-tout d’Internet . Pour Dandrieu, non seulement le cinéma est un art, l’art peut-être qui sait le mieux nous parler des hommes et des femmes que nous sommes, l’art le plus proche et donc le plus vrai, mais la critique cinématographique, elle aussi est un art à part entière : comment parler dignement de l’art, sinon de manière artistique ? C’est ce qui fait la très grande rareté de ce Dictionnaire passionné : il constitue en lui-même une œuvre d’art. Il porte les lettres de noblesse de la vraie critique.

Attention : je parle d’art. Je ne veux pas dire par là que le Critique s’isolerait dans je ne sais quels cénacles de happy few, seuls capables d’entendre sa parole et de saisir « la tendance » qu’il faut avoir saisi. L’art de Dandrieu n’est pas un art pour connaisseurs qui seraient seulement fiers de leur savoir. Sa critique n’a rien à voir avec le discours pour initiés qu’ont pu distiller les Cahiers du cinéma dans la période où ils ne doutaient de rien, dans les années 70 et 80. D’abord, dans ce Dictionnaire passionné, il y a vraiment des films en tous genres, des sérieux, des guignolesques, on trouve de simples films d’animation aussi parfois dans cette sélection très ouverte. Ensuite, chacun peut se reconnaître dans des jugements, souvent frappés au coin de cette expérience commune qui fait de nous des hommes et des femmes. Simplement, le critique sait nous montrer quand, dans un film léger, notre essentiel se trouve mis en cause, et quand, dans un film lourd, les acteurs se racontent des histoires sans parvenir à convaincre. Il fait du simple spectateur d’abord un homme averti et puis au final un artiste.

Un conseil : gardez toujours ce monument – le Dandrieu – à proximité de votre programme télé : vous lui devrez quelques belles expériences de cinéma et vous apprendrez cet amour des autres qui naît avec la sévérité du regard, avec… comment dire : une certaine exigence.

Joël Prieur
Laurent Dandrieu, Dictionnaire passionné du cinéma, 6000 films à voir ou à fuir, éd. de L’Homme nouveau 2013, 1408 pp. 34, 90 euros

15 commentaires:

  1. « En matière de critique, oser ; tout est là » écrit J. Prieur – qui n’est pas l’abbé de Tanoüarn.
    Dans un film aussi célèbre que « A bout de souffle » un comédien prononce ces mémorables paroles : les cons osent tout, c’est à cela qu’on les reconnait.

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    1. Vous gagneriez à être mieux renseigné : cette réplique est de Lino Ventura à Francis Blanche dans Les tontons flingueurs. Exactement ainsi : "Les cons, ça ose tout. C'est même à ça qu'on les reconnait".
      C'est assez bien vu.

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    2. Déficit de ponctuation. Il fallait lire : Dans un film virgule aussi célèbre que A bout de souffle virgule …
      Les paroles furent citées de mémoire ; c’est pas mal pour un vieux chibani. Toutes ces scories ont affaibli la perfidie du message. Cela me désole.

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  2. Non ce n'est pas dans "à bout de souffle". C'est une répartie que Michel Audiard met dans la bouche de Lino Ventura dans le film culte "Les Tontons flingeurs" du au regretté Georges Lautner qui vient de nous quitter.

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  3. Ceci n'a rien à voir avec le thème mais est relatif à la controverse sur l'euthanasie et aux conclusions d'un pseudo-panel de citoyens courageusement anonymes (ce qui permet de dire n'importe quoi :

    Très bon article de JP DENIS sur le magazine "LA VIE" dont voici le lien :

    http://www.lavie.fr/debats/edito/la-question-de-la-fin-de-vie-meritait-autre-chose-17-12-2013-47865_429.phpo

    A lire et à méditer. Il n'y arien à ajouter si ce n'est que cela doit être dur de se dire catholique et de gauche.

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  4. La critique promue au rang des beaux arts, l'art soumis à la raison critique, voilà justement l'un des vecteurs du nihilisme européen, si souvent et si justement vilipendé sur ce blog.

    Tel est le destin de la critique qu'elle est devenue prescriptive au lieu de se cantonner à être normative et que ses normes aient été échafaudées par des artistes, qui trempaient les mains dans la poésie, le pinceau dans la palette de couleurs et la plume dans l'encrier.

    La critique prescriptive? C'est celle qui dissocie dans un film, à l'école de feu Pierre d'andré, "valeur artistique" et "valeur morale".

    La critique normative? Ce sont des arts poétiques, ici des arts filmiques, lentement élaborés, non par le cinéphile, mais par le cinéaste.

    La vraie raison sociale du critique? C'est d'être un dilettante, un spectateur, un réceptacle, un esthète. Or voilà que cet esthète se donne une raison éthique: celle-ci varie de: "Il faut filtrer" à: "Il faut discerner les chefs d'oeuvre."Mais non, il ne faut pas, les chefs d'oeuvre s'élèveront tout seuls, portés par le consensus des esthètes, modestes contemplatifs. Il ne faut pas que l'art aille dans le sens de son histoire. Il ne faut surtout pas qu'il s'imagine détenir et déterminer le sens de cette histoire avant de l'écrire. Depuis le structuralisme, l'art est plus que jamais devenu la chose des critiques. Je sais bien que Laurent dandrieu se situe aux antipodes du structuralisme, mais il partage avec ses grands et ses petits maîtres le préjugé que la critique est un art et, de ce fait, il ne dégrade pas l'art, mais il contribue à le faire descendre de son piédestal. Il empêche un peu "la beauté" de "sauver" ne fût-ce que la mondanité du "monde".

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  5. Etriller A bout de souffle ne manque pas de souffle. Le meilleur film de Godard, peut-être le meilleur de toute la nouvelle vague, effectivement le film culte de toute une époque française, où, dans un admirable noir et blanc et une photographie de rêve on se promène dans un Paris encore ville européenne, propre et amicale et sur les Champs Elysées avant Virgin et les roms. Quelle nostalgie !
    Ce cher Belmondo dans son meilleur rôle, inoubliable, création d’une silhouette dégingandée restée dans les yeux de tous les cinéphiles. La charmante et regrettée actrice - ni obèse, ni tatouée, sans anneau fiché dans la narine et sans ce regard glauque des intermittentes du spectacle actuelles – laquelle, représentait avec BB, les deux louques possibles de la jeune fille des années 60.
    Des acteurs de second plan impeccables.
    Les dialogues sans gras dans un français parlé aussi beau que du Céline.
    Une histoire sobre, linéaire, épurée comme une tragédie grecque.
    En somme une imposante œuvre française d’un illuminé suisse. Merci Godard.

    Pour une fois nous resterons polis. Ce critique est primaire et haineux. Décidément la droite ne se départira jamais de ses adhérences. Je parierais que ce Monsieur adore Rohmer, où, il est vrai, il y a beaucoup de sauce. Pour le situer totalement rappelons que pour lui le sommet du cinéma c’est Sunset Boulevard.

    L’abbé, bon camarade, vante complaisamment n’importe quelle marchandise. Savez-vous que l’on se déconsidère pour beaucoup moins ?

    Ceci me rappelle un vieux Monsieur qui passa une grande partie de sa vie à rédiger une somme sur Watteau et qui ne ratait aucune occasion de hurler contre l’arkon. Mais, par ailleurs il n’oubliait jamais de donner des coups de chapeau appuyés au peintre Georges Mathieu au motif qu’il était monarchiste.

    Pour les fêtes offrez donc Tintin au Congo dans une édition non expurgée.

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  6. @ l'anonyme du 18 décembre de 15.28


    Eh bien non, c’est raté, Laurent Dandrieu n’aime pas le cinéaste Rohmer, à tort à mon avis. C’est raté cher anonyme votre attaque de partialité politique.
    Quand est sorti le superbe film « l’anglaise et le Duc « ( victime d’une censure idéologique ,, refus d e l’avance sur recettes) un film sur la grâce et la liberté, que j’ai commenté, dans une revue , j’ai téléphoné à Valeurs actuelles pour m’étonner du mauvais sort réservé à ce film et j’ai compris que Laurent Dandrieu n’accrochait pas au monde de Rohmer vu sa réponse . Est-il un fan de Bresson ? de Renoir d’Ophuls, des films intériorisés ? J’en doute . Il aime le cinéma américain pour des raisons différentes des miennes, Coppola par exemple, que je n ‘aime pas.
    Cher anonyme, l’idée que l’on aime un film par préférence idéologique est le contraire de ce qu’il faut dire pour deux raisons : la première , c’est qu’un film , opéra des visages , est réfractaire à toute une idéologie, à toute grille idéologie , ne peuvent t bien en parler que ceux qui l’ont aimé, encore faut-il que cela soit pour ru de bonnes raisons, pensons à Renoir, sa sublime Marseillaise qui est à l’opposé d’un film de propagandes, puisque dans une scène sublime on voit un émigré à Koblenz en proie à la nostalgie se son pays, la seconde, il n’y a que ceux qui aiment un film qui peuvent le défendre , comme vous avec « A bout de souffle » mais de grâce n’accrochez pas une grille idéologique à ceux qui ne partagent pas votre point de vue. Vous enfermez le débat.
    Aimer un film, c’est rencontrer un monde qui vous est révélé, aux antipodes d’une préférence réductrice Il ya peut être d’autres portes d’entrée que Laurent Dandrieu, mais laissez votre ……. au vestiaire.

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    1. Je pense que vous n'avez rien compris du tout au film de Renoir : la scène des émigrès à Coblence se moque de ces nobles à la perruque poudrée en train de danser sur des morceaux de musique anachroniques au son d'un clavecin aigrelet (il y avait longtemps que le pianoforte avait remplacé cet antique zinzin). Pendant ce temps, et comme par contraste, le cinéaste montre le peuple de France qui manifeste sa force et sa joie en chantant l'Hymne des Marseillais.

      Il s'agit sinon d'une oeuvre de pure propagande du moins d'une oeuvre militante financée par la CGT et le PCF. Les acteurs y ont joué sans réclamer de cachet. Jouvet qui figurait tout en haut de l'affiche (produit d'appel) y tient en fait un petit rôle (Roederer procureur syndic du département) mais il est admirable et "crève" l'écran.
      Seul bémol (sans mauvais jeu de mots) : on a mis une musique additionnelle de JS BACH, musicien absolument inconnu en France en 1789 et même de Rameau qui n'était plus joué (et dire que c'est le regretté "Déso", homme cultivé s'il en fut, qui dirigeait les orchestres).

      NB autre genre d'anachronisme qui me fait toujours bondir : dans une série télévisée consacrée à Mme de Maintenon, et dont j'ai oublié le titre, la musique d'accompagnement due à Haendel a été composée plus d'un demi-siècle après les évênements qui sont relatés. Non, on ne jouait pas les Fireworks Musicks le long du Grand Canal à Versailles.

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  7. Cher Monsieur Henri avec un i,

    Votre critique est substantielle. Peut-être le point de départ d’un réel débat, sans prise de tête.
    Pour le moment Bon Noël.

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  8. « A bout de souffle » oui, c’est bien une histoire de cons : « Après tout, j’suis con », sont les premiers mots du film et de Bébel, mais la vraie citation dans ce film et qui lui donne son sens, c’est celle de W.Faulkner : « Entre le chagrin et le néant, je choisis le chagrin ».
    Cela donne l’occasion à Godard de dépeindre les sentiments de la "nouvelle vague" surfant sur les idées de l’existentialisme. Voici ce qu’il fait répliquer à Belmondo :
    -« Le chagrin, c’est idiot. Je choisis le néant. C’est pas mieux, mais Le chagrin c’est un compromis. Faut tout ou rien. Je le sais maintenant… » Notre personnage a trouvé l’amour, alors il préfèrera la mort à la médiocrité. Puisque même l’amour est impossible, alors j’opte pour la mort ! (librement aurait dit Camus !)
    L’actrice, Jean Seberg montre au contraire l’autre version de notre existence : Rien n’est ni tout noir ni tout blanc. Elle aussi cherche l’absolu, celle de l’amour (de Romeo et Juliette). Bébel, comme Sartre, choisit l’absolu du néant.
    Jean Seberg lui réplique donc :
    « J’essaye de fermer les yeux pour que tout devienne noir. Je n’y arrive pas. C’est jamais complètement noir. »
    Ce film ne nous éloigne pas des derniers sujets traités sur ce blog : Dans toute relation d’amour il faut une troisième personne entre les protagonistes, sinon rien ne fonctionne. Le Christ. C’est lui qui rend possible l’amour et qui le transcende.

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    1. Voila un bel exemple de ce que Monsieur l’abbé, fort linguiste, appellerait une notule internétogène.

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  9. Cette reconnaissance du con est désuète. On le distingue maintenant par l’utilisation de la formule « Je parle sous le contrôle de X ou de Y ».

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  10. @Chère Benoîte,

    Pardonnez-moi cette contribution nihiliste, mais il se trouve que je suis un peu plus qualifié pour parler du néant que beaucoup d'entre nous.

    En effet, je ne vois rien et n'ai jamais rien vu depuis mon origine. Ce qui m'amène à vous dire, non pas que j'ai la notion du néant, mais que j'ai la notion d'un néant ou une notion de néant. Et je tire de cette expérience:

    1. que le néant n'est pas tragique, pourvu qu'il ne se sache pas la nostalgie d'un tout antérieur: la vue ne manque pas à celui qui ne l'a jamais eue. En revanche, ceux qui perdent la vue ne perdent jamais l'image, et ils gardent à l'esprit "la lumière du cerveau" (dit mon amie Nathalie);

    2. Il (le néant) ne coïncide aucunement avec sa définition bergzsonienne, selon laquelle il est une négation qui suppose l'être en creux.

    3. L'être n'est pas plus le contraire du néant que le noir n'en est le synonyme. Et on croit par-dessus le néant, pas contre lui.

    C'est pourquoi la foi a partie liée à l'espérance, par-dessus le pessimisme qui est une question de nature et de représentation du monde.

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  11. Cher Julien, en fermant les yeux, Jean Seberg cherchait une métaphore du Néant. Il ne s’agissait pas de traiter de la cécité. Elle cherchait à éprouver une sensation métaphysique du « Rien ». Par contre, si vous dites que la vue ne manque pas à celui qui ne l’a jamais eu (elle doit bien manquer d’un point de vue pratique quand même !), je peux alors me permettre de vous dire que la cécité d’une certaine manière, permet, en ne favorisant plus l’illusion, de se rapprocher de la vérité. J’ai souvent remarqué, par exemple, que dans vos commentaires, vous aviez parfois des fulgurances ! Sans doute, êtes-vous obligé de tout voir « de l’intérieur ». Vous n’avez pas tous les parasites visuels qui nous encombrent nous, voyants. La nature est d’une incomparable beauté mais pourtant nous ne la voyons pas sous son vrai jour, car nos yeux ne sont pas faits pour voir mais pour nous aider à survivre dans notre environnement. En réalité on devrait avoir un autre regard sur les choses. Le monde n’est pas tel qu’on le voit. La science nous le dit aujourd’hui, mais la Poésie n’a pas attendu l’astrophysique pour nous transmettre cette vérité. Les gens s’arrêtent à ce qu’ils perçoivent de la vie, c’est à dire, justement au « rien ». Avez-vous vraiment une notion du néant plus forte que nous ? Permettez-moi d’en douter. C’est (à mon humble avis) Sartre qui a vécu dans ses tripes ce vide existentiel (qu’est l’existentialisme). Voyez donc son expérience (car c’est une expérience et non pas uniquement une réflexion philosophique) de la racine de l’arbre qu’il contemple jusqu’à la nausée. Si la réalité n’est pas transcendée par une autre réalité plus vraie, plus belle et plus vivante, si ce qui existe devant nos yeux ne contient pas l’éternité, alors oui, on attrape la nausée et de surcroît, l’angoisse du vide. C’est ça le Néant : Ce que l’on voit est inexistant, ne contient pas d’Être. Par contraste, ce qui existe vraiment, nous ne pouvons pas le voir. C’est comme l’Eucharistie. On ne voit rien et c’est la chose la plus Réelle qui soit. Elle ne contient pas de Non Être. (C’est pour cela que nos yeux ne peuvent pas voir ce qu’Elle est vraiment). Notre monde n’est qu’une construction mentale, donc du Néant. De ce point de vue, Sartre a raison. Alors bien sûr la Foi, l’Espérance…

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