En allant dire la messe aux religieuses de l'institution Saint-Pie X, ce matin à Saint-Cloud, j'écoutais RMC. Jean-Jacques Bourdin, le conformisme de l'anticonformisme, à moins que ce ne soit le contraire : l'anticonformisme du conformisme. En tout cas l'un des grands instituteurs, intronisé pour l'éducation bien pensante du peuple de France chaque matin, docteur en soft-idéologie. La question SMS du jour, nous sommes la Saint Sylvestre : Etes-vous heureux ? Entre neuf heures et neuf heures et demi, il y avait 65 et 66 % des réponses qui s'inscrivaient en négatif : non, nous ne sommes pas heureux. Enorme ! Enorme quand on sait avec Blaise Pascal que "tout homme cherche à être heureux, même celui qui va se pendre". Cela n'a pas fait vaciller le soft man de RMC. Pas de commentaire pour une fois sur ce chiffre, qui l'a pris par surprise. Autant dire que cela lui en a touché une... comme parlait le président Chirac. 66 % des Français à qui on pose la question et qui se donnent la peine de répondre se déclarent malheureux en Hollandie ? Pas de problème : depuis l'Elysée, on va leur répondre ce soir avec "des voeux d'espérance et de combat". T'es malheureux ? Combats quand même va... Comme à Dien Bien Phu ! La TVA augmente et ton pouvoir d'achat diminue ? Mais il faut avoir le moral ! C'est indispensable pour la consommation, et la bonne tenue de la consommation est indispensable pour l'économie... Alors ? Il ne s'agit même plus de bonheur, il s'agit d'euphorie. Répète après moi : Tout va bien ! Le seul ennemi de ton bonheur, c'est Dieudonné et sa quenelle, mais rassure-toi, on va l'interdire. Tu ne la sentiras plus monter...
Je suis vulgaire ? Je pense qu'on le serait à moins. 66 % des gens qui donnent encore leur avis sont malheureux ? Dans cette abbaye de Thélème qu'est la Société française d'aujourd'hui, une société d'abondance où tout est permis, même de se marier entre personnes de même sexe... Ces 66 %, il me semble que c'est un signe. L'euphorie obligatoire, le sourire cheese de rigueur, les photos en rose sur Facebook, qui singent un bonheur que chacun ne fait qu'entrapercevoir, ça ne marche plus.
Que se passe-t-il ?
Il me semble que l'on vit dans une société où tout est précaire, où la vie elle-même devient précaire, où personne n'a plus de statut, où le travail est méprisé et le travailleur jetable, où le capital est imposé et le petit capitaliste stigmatisé, où le plaisir est systématiquement disjoint de l'émotion qui le prolonge (mais que l'on fait disparaître à coups d'antidépresseurs s'il le faut). Que nous reste-t-il ? Un conjoint ? Il n'y a plus de lien et les hommes et les femmes se croisent comme des egos en perdition. Des enfants ? S'ils parviennent encore à faire la différence entre le virtuel, où ils sont englués et où ils endorment les traumatismes de vies familiales déchirées, et le réel (qui ressemble de plus en plus à l'impossible pour eux). Au moins peut-être nous reste-t-il une culture ? Un plaisir de savoir ? Que peut-on savoir à l'heure de la déconstruction ? Le savoir n'est plus qu'un calcul et le calcul ne rend pas heureux...
Nous prenons conscience petit à petit du mal moderne dans ses différentes dimension. A cause de cette prise de conscience, le mal moderne est en train de devenir le malheur moderne. Est-il irrémédiable ? Non ! Il nous reste une chose, la seule que l'on ne pourra jamais nous enlever, notre liberté. "Dieu a remis l'homme entre les mains de son conseil" dit le Livre de l'Ecclésiastique. Les valeurs ou plutôt les non-valeurs du monde ne nous rendent pas heureux ? Il nous reste notre liberté personnel, pour organiser l'espace de notre bonheur. Cet espace serait-il purement intérieur, dans l'échec de toutes nos entreprises extérieures, on ne pourrait pas nous le nier. Encore moins nous l'enlever.
Mais quel est cet espace direz-vous ? Cette métaphore géométrique est trop abstraite.
Non ! Rien n'est plus concret, mais il faut accepter de se passer de la métaphore géométrique et laïque de l'espace, il faut lui donner son vrai nom : la foi. Seul le bien nous rend heureux. La joie, disaient les scolastiques, est la certitude du bien possédé. Cette définition si sobre m'a toujours plongé dans des abîmes de réflexion. Car le bien, nous n'avons qu'une seule manière de nous y relier, ce n'est pas la raison, c'est la foi. Je ne veux pas parler seulement de la foi chrétienne, de la foi surnaturelle, mais de la foi dans tous ses états, la foi dans le bien, la foi dans l'amour, la foi dans l'avenir, la foi dans la vie et dans l'Evangile de la vie. Non pas quelque chose de vague et d'euphorique (ça c'est la caricature laïque de la foi). Non ! Une foi concrète dans un bien concret, qui ne se calcule pas, qui ne se programme pas et qui naît toujours de ce que Descartes, ce chrétien paradoxal, appelait la générosité. Non pas seulement la magnanimité d'Aristote, qui implique toujours un développement de l'âme (magna anima) qui est problématique. Non : Descartes a raison, ce qui rend heureux c'est la générosité, c'est-à-dire aussi l'offrande, le sacrifice. Peut-on être heureux si l'on ne possède rien à quoi se sacrifier ? Rien de plus grand que soi ?
Alors que 66 % des Français se sentent malheureux, alors que l'exigence du bonheur progresse avec la plus claire conscience du malheur, je forge ici le voeu qu'en cette fête de Saint-Sylvestre, chacun fasse l'inventaire des biens qui, dans sa vie, sont plus grands que lui et qui autorisent ou nécessitent le sacrifice. Heureux est-on si dans cette société de satiété on parvient encore à avoir faim et soif d'une justice qui nous dépasse et pour laquelle on est prêt au sacrifice.
je renchéris : cette blague venant d'un disciple du Christ : ça passe mal, désolé. je dirais même que c'est mal commencer l'année (ou la finir).
RépondreSupprimerMerci pour ce bel article !
RépondreSupprimerBonne année monsieur l'abbé. Écouter RMC? N'exagérez pas dans les pénitences.
RépondreSupprimerCroyez-vous qu'il y ait de quoi être heureux en 2014 avec toutes les guerres et les bombes atomiques sans compter les catastrophes écologiques et la surpopulation : dans 30 ans il n'y aura pas de quoi nourrir tous les habitants de la terre. bref je comprends les jeunes qui ne veulent plus faire d'enfants : c'est à dire de futurs chômeurs ou de futurs soldats. bref c'est la fin de la Terre à brève échéance. Quant à émigrer vers une autre planète, je n'y crois pas trop. L'homme a brulé la chandelle par les deux bouts ; bientôt il n'y aura plus de terres arables ; ce qui veut dire la famine pour tous : hommes et bêtes. Les gouvernements commenceront par rationner puis petit à petit il n'y aura plus rien à manger, plus de médicaments et les derniers hommes expireront en s'étripant. Ernest Renan disait que les civilisations sont mortelles, moi je dirais que c'est LA Civilisation qui est mortelle. Au 19ème siècle on ne pouvait pas imaginer que l'homme détruirait la terre et pourtant c'est ce qui arrive. Le progrès a tué le progrès. Jadis les guerres n'étaient pas trop méchantes, c'était vraiment artisanal. Maintenant il suffit d'appuyer sur un bouton pour tuer des millions de gens et rendre des contrées entières inhabitables pour des milliers d'années.
RépondreSupprimerIl n'y a rien à répondre à ce torrent d'impécations, sinon de rentrer chez vous comme dit Tintin dans l'étoile mystérieuse " au prophète Philippulus doublure du savant Callixte, lui aussi déjanté
SupprimerCroyez-vous qu'avec la croissance exponentielle de la population (nous sommes déjà près de 8 milliards) on pourra nourrir toute l'humanité en 2050 ?
SupprimerBonne année mr l'abbé ! Vous avez raison le bonheur c'est l'amour,le vrai celui qui ne jalouse pas, ne calculé pas, et pardonne tout, donc celui qui est de donner soit-même . Anthony
RépondreSupprimerVous écrivez: “Le savoir n´est plus qu´un calcul et le calcul ne rend pas heureux... »
RépondreSupprimerLe savoir ne nous mène pas à la foi, ne nous mène pas à la miséricorde, ne nous mène pas vers l´autre. Ici, vous avez écrit : « Les valeurs ou plutôt les non-valeurs du monde ne nous rendent pas heureux ? Il nous reste notre liberté personnel, pour organiser l'espace de notre bonheur. « Très sérieux. Cependant, il me semble que les gens, en général, ont peur d´être altruistes, généreux... Le monde est beaucoup matérialiste, froid, égoiste. Quand on voit cela, nous restons dans une attitude de défense, pour parer les coups... sans compter les masques que, parfois, le monde nous oblige à porter...
Bien, la foi est un bien précieux. Mais inutile d´avoir « foi » seulement pour nous-mêmes, tandis que le monde tourne en sens inverse, tandis que certains appelent à un peu d´espoir et nous ne la pouvons pas donner... Ou pouvons-nous ? Peut-être en essayant de nous guérir de nos propres peurs... pour aider l ´autre. Mais nous pouvons toujours prier, cela fait faute sur le monde...
« ... la foi dans tous ses états, la foi dans le bien, la foi dans l'amour, la foi dans l'avenir, la foi dans la vie ... » C´est difficile de mantenir la foi dans la vie, quand la vie nous renvoie la froideur, l ´intérêt, l ´égoisme, les luttes de pouvoir. Mais particulièrement, je pense que sont les craintes nos pires ennemis. Quand on a peur d´une étreinte de confort. D´un mot de soutien.
D `une attitude concrète. Et surtout, il y a un grand peur dans le monde : la peur « de ce que les autre vont penser de nous. » C´est une sorte de peur qui paralyse l´amour, l´amitié, qui paralyse la foi, parce qu´elle nous enlève l ´humilité de nous montrer tels que nous sommes...
Mais prions, la prière est le seul chemin... Merci de votre text.
N.N.
Dans le temps : Je ne suis pas comme ça, je ne m´inquiète pas de ce que les autres pensent de moi. Donc, je suis la personne bizarre et étrange.... Mais je remarque cette peur même parmi quelques prêtres que je connais. C´est dommage ! (Je ne vis pas en France). N.N.
RépondreSupprimerHeureux ceux qui éprouvent tous ces malheurs ! Ceux qui ont des problèmes au travail, ceux qui ont de plus en plus de difficulté à joindre les deux bouts. Heureux ceux dont les liens familiaux se dégradent, en un mot heureux ceux qui pleurent, car même avant de parler de promesse de vie éternelle, ils ont la chance de prendre conscience de la façon dont l’être humain a tout détruit. Cette décomposition de civilisation nous sert à cela. Heureux ceux qui ne croient plus au paradis terrestre en cherchant une forme politique conforme à ce projet. Heureux ceux qui prennent conscience de ce qu’est l’homme ici, sur terre : Un prédateur pour son espèce et pour toute la nature. Cette joie bien terrestre est indécente et pourtant chacun la recherche encore. Heureux celui qui touche le fond du puits : Il lui restera qu’une seule chose : appeler Dieu non pas pour lui demander de reconstruire ces sables mouvants mais, comme Job, l’aimer et l’espérer. « En Son Nom les nations mettront leur espérance » (Isaïe). Les vœux de bonne année sont une continuation de ce vieux monde qui agonise. On n’en veut plus. Pourquoi alors souhaiter que 2014 continue l’illusion. Non, souhaitons plutôt de rendre grâce à Dieu et de plus, pour nous chrétiens, l’année liturgique commence le premier dimanche de l’avant ; Prions depuis cette date pour que Dieu « vienne » en nous.
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RépondreSupprimerRécemment un prêtre ensoutané de 50 ans déclara que, dans l’ordre du politique, il n’y avait que le marxisme et l’Action Française.
J’en eus un coup de blouse sévère.
Que faire pour ceux qui connurent à la libération le rationalisme organisateur des cocos et qui débranchent leur sonotone dès qu’ils entendent parler de Maurras.
Soudain, à la manière de Péguy, avec un lâche soulagement, je vis, entre la grande sœur Intelligence et la petite sœur Sensibilité, le corpus flamboyant des paroles du Christ disséminées dans les 4 Evangiles.
Bonne année camarades.
Monsieur AG2T ou Webmestre ou comme vous voulez. J'ai écouté votre émission sur RC et moi non plus je ne suis pas maurassienne ; Le maurassisme est mort deux fois : en 1926 et en 1945. Les oeuvres littéraires de Maurras sont très datées et son oeuvre politique relativement médiocre : il n'y a aucune pensée économique. Il n'avait rien compris du tout à la crise de 1929. Il faut tourner la page.
RépondreSupprimerDaté? mort? médiocre? que vous dites!
SupprimerPersonne ne lit plus Maurras qui est aussi rasoir que Taine et autres "penseurs" académiciens de la ème République. Par contre on lit toujours Karl Marx même (et peut-être surtout) dans les cercles libéraux . Curieux n'est-ce pas ? Ceci dit, Maurras, de par son antisémitisme sénile, est vraiment indéfendable. Point barre, la messe est dite.
SupprimerPour le citoyen lambda la problématique politique est autre que celle du prêtre de 50 ans lequel, pour sa part, la situe entre Karl et Charles. Elle serait plutôt entre le peuple et le politicien.
RépondreSupprimerJ’appelle politicien tout individu qui a le pouvoir, ou du pouvoir, ou une part de pouvoir. Ou qui l’a eu, ou qui va l’avoir, ou qui se prépare à le conquérir dans un avenir proche.
Mais aussi celui qui y pense – avec l’aimable contribution de ses géniteurs, parents et alliés – dés son plus jeune âge et qui va suivre la classique filière des études adéquates : parole verbale souple, réaction primaire instantanée, culture générale basique (ignorance absolue de La Princesse de Clèves et autres machins du même tonneau), absence de convictions, ignorance des valeurs morales, veulerie pour les puissants, mépris pour les autres, conformisme inaltérable pour toutes les modes du temps.
Si tout se passe bien, le parcours classique Bac P, Sciences Po, Ena, papa, cabinet et la suite, peut conduire au plus haut - jusqu’à embrasser la môme Merkel à chaque fête carillonnée - pour peu qu’on ait jamais eu la malchance de tomber sur une femme noire en sortant de sa salle de bain.
Dans cet ensemble du politicien il faut adjoindre à tous ceux qui pratiquent le pouvoir ceux qui en vivent directement, statutairement, honorablement mais aussi ceux qui en profitent en se glissant par tous les interstices de la magouille, de la prévarication, des abus de pouvoir, des gaspillages, de la mégalomanie et des pulsions malsaines des potentats.
On reconnaîtra bien que cet ensemble politicien a un cardinal non nul. Quant au peuple on le définira comme l’ensemble des individus qui ne sont pas des politiciens – le complémentaire des politiciens pour continuer dans la terminologie Bourbakiste.
Comme on me reproche souvent de ne pas être très clair prenons quelques exemples. Un agriculteur, un boulanger, un savetier, voila des gens du peuple ; les deux premiers nourrissent, le troisième vêt. Et ceux qui fournissent lumens et thermies, de l’ingénieur de recherche développement au plombier, ils en sont aussi.
Mais qu’en est-il des 150.000 gratte-papier du ministère des finances ? (écartons le débat sur leur nombre, 10 fois trop nombreux, 10 fois pas assez) Pas facile de répondre.
En revanche la réponse est aisée pour les chauffeurs du parc automobile des officiels, pour les cavistes des conseils généraux et régionaux, pour les membres du conseil économique et social, pour les coiffeurs et barmen de l’assemblée nationale, pour le buraliste du sénat, et comme cette liste pourrait être interminable terminons par une cerise sur le gâteau : les 50.000 fonctionnaires de Bruxelles.
De fait, comme on peut le voir clairement sur ces exemples, l’appartenance à l’un ou l’autre de ces deux ensembles est aisée à formuler : est du peuple celui qui par son activité sert à quelque chose, est utile à quelqu’un.
Ceux qui sont savants vont devoir nous expliquer pourquoi, depuis tant de siècles, tant de penseurs de la politique, de Socrate à Botul H Lévy, n’ont pas, sinon résolu, mais posé la question dans cette problématique peuple/politicien. Je suis partial, certains y ont réfléchi : ils proposèrent de changer le peuple.
@Anonyme du 7 janvier aux environs de 16h45,
RépondreSupprimerVous nous donnez là une contribution rudement intéressante.
D'habitude, je n'aime pas que l'on oppose "le peuple" aux "politiciens", car je trouve que cela déresponsabilise le peuple d'avoir les politiciens qu'ils méritent et d'être aussi corrompu, dans son fond qui emprunte à la nature humaine, que les politiciens qu'il réduit à leur corruption réelle, supposée ou amplifiée.
Mais votre "sociologie du politicien", outre qu'ele est très juste, me fait nuancer mon jugement: la part de responsabilité du peuple est en effet diminuée du fait que le peuple ne vit pas dans des conditions propres à lui donner beaucoup plus qu'une fiction de pouvoir et de souveraineté. Et pour autant, le peuple a moins besoin de pouvoir que d'être utile, l'utilité étant plus noble (et plus utile... sic) que le pouvoir.
Je ne sais si c’est rudement intéressant mais, venant des sciences dures, je ne prends pas exactement comme un compliment démesuré d’être rangé dans la sociologie. Un jour, quand on aura le temps, je raconterai une anecdote sur le bourbeux Bourdieu - pape de la dite discipline - qui ne tiendra pas dans une musette.
SupprimerJe me permettrai de vous reprendre sur la fameuse phrase « les peuples ont les politiciens qu’ils méritent » que je considère comme une abomination. Un peuple si corrompu soit-il, composé d’individus les plus abjects est toujours meilleur que le plus admirable des politiciens car ce dernier porte en lui le péché monstrueux du pouvoir et de la domination sur autrui – péché pire que tous les autres – auquel, par définition, le peuple est exempt.
Puisque vous m’avez donné l’occasion de reprendre la plume je souhaiterais m’expliquer plus complètement sur le coup de colère déclenché par notre cher abbé lorsqu’il réduisit l’autre jour le débat politique à une confrontation entre un juif londonien et un méridional malentendant. Et par suite pour justifier la place dans ce blogue d’une réflexion proprement catholique, voire chrétienne.
Loin des délires prétentieux des utopistes des siècles passés, imaginons, pour le besoin de la démonstration (et cela seulement), une cité qui serait composée d’individus aux qualités morales sans faille, tant sur le plan personnel et dans la vie privée que dans la vie publique ; qu’ils ne s’en tiendraient dans leurs désirs qu’à ce qui leur est indispensable, qu’ils tiendraient les gadgets superflus comme obscènes et qu’ils jouiraient de l’espace public aussi respectueusement que de leur domaine privé.
Naturellement cette cité serait constituée en état indépendant de leurs voisins (*). Qui dit état dit politicien.
J’en arrive au dur. Dans une telle cité y aurait-il besoin de politiciens ?
Comme je sens que vous n’aurez pas le courage de répondre non je vous pose quelques questions subsidiaires :
Seraient-ils en grand nombre ? Seraient-ils choisis parmi les moins valeureux ? Une fois désignés, se prêteraient-ils au contrôle ? Considèreraient-ils leur mandat comme une charge pénible ou comme une jouissance due ? En quittant leurs responsabilités auraient-ils le sentiment d’avoir accompli un devoir indispensable à tous ou en tireraient-ils une vaniteuse et grotesque satisfaction ? Etc...
Je vous laisse le soin d’en imaginer d’autres.
Revenons au réel. La lente imprégnation - au sens girardien - de l’esprit de Dieu dans les sociétés au long des siècles d’une part, l’adéquation entre la barbarie des civilisations et l’ignominie des tyrans auxquelles elles sont soumises d’autre part conduisent à une corrélation entre la part du péché dans l’homme et celle du politicien dans le peuple. En d’autres termes la nécessité du politicien ne serait due qu’à la nature péccamineuse de l’homme, son existence pensée comme un reliquat, un relief.
Le peuple est tout, le politicien n’est rien. « Le politicien voilà l’ennemi » (Pour ceux qui aiment les slogans).
Bonne année camarade.
(*) L’hypothèse selon laquelle cette cité n’aurait pas de limite et s’étendrait à la terre entière, bien que souhaitable, serait une utopie dans l’utopie proprement eschatologique, que j’écarte, pour le moment, de la démonstration.