vendredi 26 septembre 2008

Saint Paul est-il infréquentable ?

"Nous, tout ce que nous savons, si toutefois nous savons quelque chose, nous ne l'avons pas appris grâce aux qualités et grâce aux forces de notre esprit, mais bien plutôt dans un entretien continu avec cet homme -Paul - et dans l'affection que nous lui portons". Ainsi parlait saint Jean Chrysostome au IVème siècle. Mais beaucoup d'eau a passé sous les ponts de l'histoire et rares sont ceux qui continuent à penser que saint Paul est un personnage non seulement intelligent - c'est un des plus grands génies de l'histoire de l'humanité - non seulement fascinant -il a dévoré à belles dents deux cultures, la juive et la grecque, pour s'installer au nom du Christ juste au milieu - mais tout simplement... sympathique.

A ses amis Philippiens, les premiers Grecs de Grèce, les premiers Grecs d'Europe qu'il ait rencontrés après avoir traversé le Bosphore, il se présente sans concessions : "Ayant été circoncis au huitième jour, étant de la race d'Israêl, de la tribu de Benjamin, né hébreu, de père hébreu, pour ce qui est de la manière d'observer la Loi, ayant été pharisien, pour ce qui est du zèle du judaïsme, ayant été jusqu'à persécuter l'Eglise, et pour ce qui est de la justice de la Loi, ayant mené une vie irréprochable". Il ne cherche pas à adoucir ou à édulcorer son portrait moral ! C'est vrai qu'aujourd'hui on dira sans doute : pas très sexy le gars !

A-t-on mesuré quelle intensité d'amour suppose, au moins en germe, une telle observation de la Loi juive, une consécration de son existence qui lui permette de déclarer en toute modestie et sans effets de manches : "j'étais irréprochable". Rencontrer saint Paul, c'est d'abord percevoir cette intensité sans pareille. Avant et après sa conversion sur le Chemlin de damas, c'est la même intensité, la même exigence, le même perfectionnisme. Mais après le Chemin de damas, le perfectionnisme de saint paul cesse de s'épuiser dans une observance minutieuse. Saul a rencontré, dans le Christ ressuscité, la perfection qui lui manquait et dont il était altéré. Son perfectionnisme intensif devient transformation, changement, conversion. "Nous ne mourrons pas tous, écrit-il aux Corinthiens en 50, mais tous nous serons transformés". La conversion au Christ n'est pas d'ordre moral. Elle est ontologique. Elle s'effectue dans l'épaisseur de l'existence. La conversion au Christ est une transformation dans le Christ : "tous nous serons transformés".

Saint Paul en perfectionniste aigu, était toujours insatisfait de lui-même. On a l'impression que, juif, la loi elle-même ne lui suffisait pas. Cette insatisfaction, on en possède la confidence au chapitre 7 de l'Epître aux Romains. Le vers qu'en a fait Racine est célèbre : "Je ne fais pas le bien que j'aime et je fais le mal que je hais".

Ce qu'il découvre c'est que le Christ, qui nous transforme tous en lui, en se donnant à nous, vient délivrer l'humanité de cette perpétuelle insatisfaction, de cet ennui chronique, de ce vague à l'âme de ce désespoir... Comment adhère-t-on au Christ ? par la Loi ? Non répond saint Paul, comme Abraham : par la foi.

Cette foi est seule capable de nous transformer dans celui auquel nous croyons. Comme le dit Jésus dans l'Evangile de Jean : "Croyez à la Lumière afin de devenir des enfants de Lumière". Saint Jean parle d'illumination. Les Synoptiques appellent cela le Royaume de Dieu, ce monde où l'homme, vivant de l'amour du Christ se transforme en "un homme nouveau" (et l'homme nouveau, c'est saint Paul qui en parle constamment : nova creatura dit-il aux Galates, une créature nouvelle, dans la jérusalem nouvelle. le Royaume de Dieu ? Saint Paul n'emploie jamais cette expression de Jésus. Mais il prêche le renouvellement de toutes choses en Jésus Christ. En plus abstrait, c'est le même thème : celui de la métamorphose qui attend toute créature.

Croire c'est reconnaître ce pouvoir de métamorphose qui se trouve en chaque personne, en tant qu'elle est un sujet, intelligent et libre. Tresmontant qui allait toujours à l'essentiel voyait dans Paul de Tarse le grand théoricien de cette métamorphose de l'homme qu'on appelle aussi le salut.

1 commentaire:

  1. Bon, ça prête moins à polémique, ce post, ou ça vole trop haut... alors pas de commentaire !
    Bon, je m'y colle !
    On a l'impression, à vous lire que seule la foi sauve... Si on peut aller au Christ par la foi alors seule la foi est nécessaire ?
    Pourriez-vous développer en qq mots pour mieux comprendre ?
    Sinon, pour revenir dans le registre polémique, on a parfois l'impression avec certains tradis qu'ils s'estiment sauvés parce qu'ils détiennent la vérité... Dit d'une autre façon "seule la vraie foi sauve et nous sommes sauvés (ou du bon côté) parce que nous avons la foi de toujours"... C'est la version jusqu'au-boutiste de Saint Paul, non ?!

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