[…] L’anthropologie chrétienne, longtemps majoritaire dans les pays occidentaux, accordait une importance illimitée à toute vie humaine, de la conception à la mort ; cette importance est à relier au fait que les chrétiens croyaient à l’existence, à l’intérieur du corps humain, d’une âme – âme dans son principe immortelle, et destinée à être ultérieurement reliée à Dieu. Sous l’impulsion des progrès de la biologie devait peu à peu se développer au XIXe et au XXe siècle une anthropologie matérialiste, radicalement différente dans ses présupposés, et beaucoup plus modeste dans ses recommandations éthiques.
D’une part le fœtus, petit amas de cellules en état de différenciation progressive, ne s’y voyait attribuer d’existence individuelle autonome qu’à la condition de réunir un certain consensus social (absence de tare génétique invalidante, accord des parents). D’autre part le vieillard, amas d’organes en état de dislocation continue, ne pouvait réellement faire état de son droit à la survie que sous réserve d’une coordination suffisante de ses fonctions organiques – introduction du concept de dignité humaine. Les problèmes éthiques ainsi posés par les âges extrêmes de la vie (l’avortement ; puis, quelques décennies plus tard, l’euthanasie) devaient dès lors constituer des facteurs d’opposition indépassables entre deux visions du monde, deux anthropologies au fond radicalement antagonistes.
L’agnosticisme de principe de la République française devait faciliter le triomphe hypocrite, progressif, et même légèrement sournois, de l’anthropologie matérialiste. Jamais ouvertement évoqués, les problèmes de valeur de la vie humaine n’en continuèrent pas moins à faire leur chemin dans les esprits ; on peut sans nul doute affirmer qu’ils contribuèrent pour une part, au cours des ultimes décennies de la civilisation occidentale, à l’établissement d’un climat général dépressif, voire masochiste. […]
Sans me mesurer au talent de Michel Houellebecq pour décrire ce que Michel Foucault appelait l'épistémè d'une époque, talent qui éclate dans "Soumission" une fois qu'on a compris que ce roman est sans thèse et que, rédigé dans une "écriture blanche", il réussit le prodige (en l'espèce, c'en est un et c'est rarement le cas) de ne pas émettre de jugement de valeur; sans démentir (surtout pas) le commentaaire que j'ai posté à propos du pseudo-catholicisme du dr carriger, basé sur la folle transposition du modèle trinitaire dans la vie de la créature; sans savoir quelle part il faut faire à la question d'Origène que ravive Benoîte de l'éternité des âmes, et de leur coexistence à l'instant de la Création, force est de reconnaître que Houellebecq se trompe quand il oppose l'"anthropologie chrétienne" à l'"anthropologie mattérialiste". Car de fait et si paradoxal que cela puisse paraître, l'anthropologie chrétienne est plus matérialiste que l'anthropologie relationnelle ou socialiste, qui suppose que toute vie soit relationnelle ou le résultat d'un consensus social.
RépondreSupprimerLe paradoxe sans doute apparent de l'anthropologie chrétienne est qu'elle combine l'espérance du ciel avec le fait de tenir à mourir le plus tard possible.
Cela soit dit, je le répète, en tenant pour le respect de la vie, que le crime est un interdit absolu et que la vie est une valeur absolue. Et en distinguant euthanasie active et acharnement thérapeutique.
L'acharnement thérapeutique consiste à réanimer un coeur qui s'arrête pour une vie qui n'a plus aucune issue favorable.
La frontière indécise entre acharnement thérapeutique et euthanasie est d'une détermination douteuse et douloureuse lorsque des machines maintiennent en vie un corps qui souffre.
L'euthanasie est l'arrêt délibéré des soins.
Dans le cas de Vincent Lambert, il n'y a ni euthanasie, ni acharnement thérapeutique, car on se trouve face à un sujet qui n'est pas en fin de vie et qui n'est pas malade, mais handicapé. Et de plus on a affaire à un sujet conscient, de sorte qu'on ne peut même pas se réfugier derrière la question de savoir si la vie suppose la conscience, question à laquelle j'ai tendance à répondre par la négative, parce que la conscience du bébé est simultanée, c'est une conscience sans mémoire, une conscience qui n'imprime pas de souvenirs, et pourtant nul ne met en cause que le bébé vit, qu'il vit pour ainsi dire sans en être conscient.
citation :
RépondreSupprimer"L’anthropologie chrétienne, longtemps majoritaire dans les pays occidentaux, accordait une importance illimitée à toute vie humaine, de la conception à la mort ; cette importance est à relier au fait que les chrétiens croyaient à l’existence, à l’intérieur du corps humain, d’une âme – âme dans son principe immortelle, et destinée à être ultérieurement reliée à Dieu."
Tout ceci n'est pas très chrétien! Houellebeck montre ce qu'il est : un arabophobe et c'est tout. Il instrumentalise le christianisme pour en faire une machine de guerre contre les arabes qu'il dénomme musulmans car "çà passe mieux" Passe ton chemin Houellebeck des mecs comme toi j'en ai connu beaucoup et tu ne m'auras pas.
Quand à Vincent c'est une affaire de famille! La mère éplorée qui veut récupérer son fils et l'épouse qui en a marre et qui peut-être veut refaire sa vie.
Les catholiques, aidés du gouvernement socialiste, en ont fait un cheval de bataille parce que les 2 parties ont intérêt à ce que ce soit bien débattu pour que l'euthanasie passe CQFD. Il n'y a pas de complot mais une bonne stratégie pour le programme réussisse ( exactement comme avec le mariage gay )
"... Il instrumentalise le christianisme pour en faire une machine de guerre contre les arabes..." Il me semble que c'est à bon droit, au vu de l'islamisation régulière de notre France Chrétienne. Un Charles Martel en usa et en abusa il y a quelques années, même un Charlemagne...
SupprimerA moins de considérer l'Islam comme un bienfait, il s'avère que ce mec d'Houellebeck a autant sa place ici qu'ailleurs.
Je pense que ici, tout le monde a sa place! ( islam bien ou mal-faisant et bien d'autres "choses" ) Et c'est à partir de ce droit octroyé par le webmestre ( on n'est pas à Radio Courtoisie LOL ) que se pose le problème des trolls qui mettent le foutoir volontairement ou pas. Les trolls étant un phénomène sans doute vieux comme le monde car je me souviens, il y a fort longtemps, des AG étudiantes "explosées" par des intervenants adroits, généralement communistes. D'où pas mal de bastons ensuite pour régler par la brutalité ce qui n'avait pu l'être par la parole
Supprimer@Roger, vous caricaturez les raisons pour lesquelles l'affaire vincent Lambert rencontre un écho médiatique. J'ai tendance à croire que la mère et la femme de Vincent sont toutes les deux de bonne foi. ON dit que la femme n'a pas besoin de "refaire sa vie" puisque c'est déjà fait. Elle croit avoir recueilli dans la bouche de Vincent quand leur amour était actif une volonté de mourir que son visage dément aujourd'hui. La mère de Vincent défend aujourd'hui la volonté du visage de son fils. ele-même et surtout les gens qui l'entourent défendent aussi l'idée absolue qu'ils se font de la vie et que la religion a imprimé en eux. Si je m'écoutais, je les trouverais moin sympathiques, car je les sens moins libres que l'épouse, manifestement affectée par tout ce bruit fait autour de ce drame familial, il n'y a qu'à regarder la vidéo de sa plus longue interview sur Youtube. Mais c'est qu'il ne s'agit pas de s'écouter dans une telle affaire. Sympathiques ou pas, les parents Lambert mènent un combat essentiel dont la défaite serait une catastrophe pour ce qui reste de chrétien dans notre civilisation. Mère Thérésa écrivait à J.P. Maugendre: "Remerciez dieu de vous avoir choisis pour cette cause." Sympathiques ou pas, les parents Lambert sont honorables et ont la grâce d'avoir cette cause à défendre et je suis totalement derrière eux.
RépondreSupprimerJe voudrais préciser mon commentaire précédent relatif à la maladresse que j'ai relevée chez Houellebecq d'opposer "anthropologie chhrétienne" et "anthropologie matérialiste" en énonçant cette conception qui commence à se faire jour en moi:
il ya deux groupes de polarité qui se superposent, mais ne sont pas faits pour communiquer. Principiellement, il y a le matériel et le spirituel ; superficiellement, il y a le psychologique et le social. Le spirituel n’est pas fait pour s’imposer au social, il ne peut certainement pas s’empêcher de se communiquer à lui, mais il n’est pas certain qu’il y gagne. L’Invisible, raison du spirituel, est invisible/inaccessible au psychologique et au social.
Non, je ne les caricature pas et je ne mets pas ma sympathie en avant. Quoique je compatisse avec la mère. Nous sommes dans un pays où il n'y a pas de démocratie! Anglais et américains eux la connaissent. Surtout depuis la Vème tout est verrouillé au parlement. Alors le débat passe dans la rue. Au début agacés, sous De Gaulle, les autorités ont compris cela et s'en servent pour faire avancer les choses.Mais le débat n'empêche pas le gouvernement de continuer dans la direction qu'il a prise. Au contraire cela ne prendra que plus de relief. C'est très important pour tout ce qui concerne la vie en société. Pour le commerce c'est différent et comme on le voit avec le TAFTA, c'est très discret.
SupprimerAlors que la première question sérieuse posée au sujet de l’affaire que vous savez est toujours sans réponse, une deuxième arrive au galop. Quel a été le comportement réel du néo-français Lassana Bathily pendant les heures les plus sombres de l’Hyper Cacher Coulibalien ?
RépondreSupprimerOn attend la question suivante.
Excellent choix de texte, M l'abbé. Je n'ai jamais rien lu de Houellebecq. Je commence à comprendre votre sympathie pour cet auteur. J'ai découvert Chesterton grâce à vous. Il va falloir que je me mette à Houellebecq.
RépondreSupprimerCeux qui croyaient que Houellebecq était scénariste dans une société de production de films pornographiques vont être surpris.
RépondreSupprimerNotre abbé nous donne à lire un texte qui mérite une mention honorable. Du temps de Camus d’Alger son auteur aurait été largement considéré comme un philosophe pour classe terminale. Autant dire que dans cette période des épreuves du « baccalauréat pour tous c’est maintenant » il n’est pas à laisser moisir au fond des cartables.
Toutefois nos jeunes doivent être prévenus. Il y a arnaque : ce monsieur est un littéraire pur qui ne s’y connait pas plus en biologie fondamentale que dans la structure intime des particules élémentaires. En réalité sa véritable fonction est d’alimenter les échanges bobo-bobo dans les soirées germanopratines.
Mais la force du bonhomme est ailleurs. C’est un immense poète. Comment évoque-t-il, par exemple, le fruit qui se développe dans le sein de la maman, cette merveille de la création, constamment renouvelée à chaque génération ? Un « petit amas de cellules en état de différentiation progressive » On est bouleversé, on sent la patte d’un grand, on sait qu’il finira dans les anthologies.
Et pour exprimer sa sensibilité pour le troisième âge, le quatrième et plus, ne nous donne-t-il pas cette fabuleuse image : « amas d’organes en état de dislocation continue », le « vieillard » n’étant considéré que dans la mesure où il assume une « coordination suffisante de ses fonctions organiques ».
Cette dernière citation est de grand intérêt ; c’est une clé pour mieux appréhender cette personnalité complexe. Car de toutes les fonctions organiques la primordiale est la génésique et sa disparition est inexorable au-delà d’un certain seuil. Le tri euthanasique se ferait donc sur cette fonction ; c’est ce que semble suggérer Houellebecq, auteur phallique s’il en est, constamment obnubilé par le sexe, au point qu’il en fourre – si je peux me permettre – à chaque page de ses ouvrages.
En cela il est parfaitement représentatif de notre époque dont le grand œuvre plastique est l’intromission des plug anaux de la place Vendôme dans les vagins royaux des jardins de Versailles.
Un autre de ses points forts est son habileté à conjecturer. Il nous annonce ici que nous vivons « les ultimes décennies de la civilisation occidentale ». Cette affirmation est incontestablement une prédiction : dans quelques années le christianisme kaputt. Même dans la vieille Europe. La pensée rationnelle hors-sol enfin seule, tel un torrent, emporte tout.
Mais on a tout de même de quoi se rassurer. Ce rôle de pythonisse délibérante lui va mal. Rappelons-nous son dernier bouquin. Il nous explique que les arabes installerons leur pouvoir en France par le haut, démocratiquement, au détour d’une présidentielle banale. Un musulman à l’Elysée, Candide pourra venir cultiver son jardin chez nous. Rien n’est plus absurde que cette vision conjecturale. Chaque fois qu’ils se sont installés quelque part ils se sont maintenus par le fer et par le feu. Depuis le temps de leur prophète rien n’a changé pour eux ; hormis les revenus du pétrole.
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Ce n’est pas tout. Aujourd’hui si vous n’êtes pas un spécialiste de l’histoire comparée des civilisations vous n’êtes rien. Houellebecq est. Il est même fameux.
RépondreSupprimerLe voici donc aux prises avec les deux anthropologies occidentales. L’une bimillénaire, l’autre bicentenaire « radicalement antagonistes ». La seconde – la plus courte ! – est née de la biologie. Quelle erreur ! On serait même tenté de crier : quelle grossièreté. La biologie, comme toutes les sciences, est neutre. Fol est celui qui l’utilise à des fins sociologiques ou politiques. Certains le firent, ils sont unanimement considérés comme des criminels. « L’anthropologie matérialiste » a germé au XIXème « le siècle stupide, père du criminel XXème » dans le cerveau d’une poignée de barbus sectaires – c’est-à-dire ascientifiques – faussement altruistes, qui reprirent les élucubrations d’une poignée de petits fats modèle Louis XV. Leur succès n’est nullement dû à leur qualité mais au soutien du peuple vociférant, lequel après avoir viré les aristos s’est rapidement aperçu que les bourgeois qui les avaient remplacés étaient pires.
On n’est pas obligé d’être un scientifique pour être intelligent. Mais, tout de même il y a des limites. Mettre en balance l’anthropologie chrétienne avec n’importe quoi d’autre est affligeant. 2.000 années de travail intellectuel tous domaines, de lissage des mœurs et du droit, l’extraordinaire épanouissement de la sensibilité, l’explosion de l’art, du Christ de Cimabue aux vierges maniéristes sans oublier les messes de Bach et le requiem de Fauré, les églises romanes, les cathédrales gothiques, les hospices avec leur passe-plat pour les enfants abandonnés, les milliards de prières qui montent sans qu’on soit jamais certain qu’elles soient audibles, l’honneur des martyrs, les sacrifices assumés des pauvres, les injustices pardonnées….Merde, qu’est-ce qu’il vous faut !
Selon notre auteur la civilisation occidentale aurait contribué « à l’établissement d’un climat général dépressif, voire masochiste ».
Plus clodo dépressif masochiste que Houellebecq tu meurs.
Tout à fait d'accord avec vous! je raconterai un jour comment je suis devenu catholique, et combien à joué cet argument des deux millénaires "de travail intellectuel tous domaines, de lissage des mœurs et du droit, l’extraordinaire épanouissement de la sensibilité, l’explosion de l’art". La-dessus, on est d’accord et ce que vous dites me remet en mémoire une certaine rencontre.
SupprimerCependant, je crois que vous faites un contre-sens sur le "climat général dépressif": ce n'est pas la civilisation occidentale qui l’amène, mais sa décrépitude actuelle. Onfray ne dit pas autre chose.
La décrépitude que vous évoquez me rappelle la phrase éclatante de Paul Valery sur la mort des civilisations. La décrépitude n'est que la mort annoncée de la civilisation en question qui tombe d'abords en décrépitude. CQFD!
SupprimerPar ailleurs vous et Anonyme parlez de la culture. Vous êtes, avant tout, des chrétiens culturels. Tomber amoureux de la culture d'un pays, d'un peuple, pourquoi pas! Mais cela reste stérile. ( comme les mariages gay lol ) Les juifs, confrontés à ce même problème depuis plus longtemps que nous s'en sortent par le biais des ultra orthodoxes qui font des enfants à leurs places et qui représente un vivier de futurs juifs culturels. Je ne crois pas, hélas, que nous soyons dans la même configuration. Le christianisme n'est pas un idéalisme et sa culture produite n'est venue qu’après coup. De très beaux fruits certes mais il faudrait quand même s'occuper de l'arbre et ne pas se gaver de ses fruits. Et l'arbre c'est la prière sous toutes ses formes et puis la théologie et bien sûr la piété c'est à dire, et je crois utile de le rappeler la participation à la liturgie. Bref l'ascèse dont l'étymologie signifie ascension. Bref encore, c'est l'amour du Christ et pas les bonnes œuvres qui n'en sont que la répercution..
Certains sont allés admirer le vagin de Marie Antoinette exposé en ses jardins. D’autres (1.200.000) dont Francesco di Lampedusa se sont rendus à Turin à l’occasion d’une nouvelle ostension. Voila une belle preuve de vitalité à opposer aux thuriféraires de la mort de Dieu [les ultimes décennies de la civilisation occidentale !].
RépondreSupprimerMerdia, nouveau Moloch, a ignoré. L’Eglise Gaucho Gallicane (EGG), entièrement obnubilée par le migrant, s’est tue. Même notre cher abbé ne semble pas concerné par l’événement ; la « matérialité » du phénomène serait-elle en cause ?
A Saint-Sulpice, dans la première chapelle latérale gauche, est exposée une réplique photographique en vraie grandeur. On y vient méditer « face à face » en toute tranquillité. Les touristes japonais, impassibles, ne s’arrêtent pas, les américains sont refoulés à l’entrée pour tenue indécente, on ne voit pas d’arabes et cela durera tant que la revendication du grand mufti de Paris n’aura pas été agréée.
L'abbé de Tanouarn serait-il mort englouti par la montée des eaux océanes dont nous parle François ? (à moins qu'il ne soit tout bonnement noyé dans les 200 p de Laudato si...) en tout cas il nous manque!
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