Le Christ est venu à un moment du temps, mais il est venu pour tous les temps. C'est ce que l'Eglise affirme lorsqu'elle dit que le Christ est descendu aux enfers.
Attention à bien distinguer les enfers et l'enfer en français. On a l'habitude de considérer que l'enfer au singulier est, d'après l'Evangile, le châtiment éternel auquel se condamnent ceux qui ont refusé Dieu durant toute leur vie, en fermant hermétiquement leur coeur, comme par exemple dans la parabole du pauvre Lazare, qui, mendiant à la porte des riches, a reçu la vie éternelle en héritage alors que ceux devant qui il mendiait et qui ne lui ont jamais adressé ne serait-ce qu'un sourire, sont précipité en enfer. A dire vrai, ils se précipitent eux mêmes en enfer. En enfer, il n'y a que des volontaires. Dieu n'est pas un flic qui condamnerait arbitrairement. Il entérine notre propre volonté devant lui.
Les enfers, cela signifie autre chose que l'enfer, en, rapport avec les croyances grecques. La mort est toujours la plongée dans l'Hadès, expression grecque pour signifier les enfers, ce lieu où les âmes attendent le Souverain jugement, qui actualise le leur. Depuis le commencement du monde, les âmes attendaient celui à qui a été confié le jugement (Jean 5) dans les enfers, ce lieu des morts. "En même temps, écrit saint Jean dans l'Apocalypse, je vis paraître un cheval pâle, et celui qui était monté dessus s'appelait la mort et l'Hadès le suivait" (Apoc. 6, 8).
Le Christ n'arrive pas aux enfers en triomphateur. Il n'est pas encore ressuscité, il est encore pour tous objet de foi et non de vision. C'est en tant qu'objet de foi qu'il va commencer aux enfers sa dernières prédication pour tous ceux qui n'ont pas eu l'occasion de le voir ou de l'entendre sur la terre. Nous avons une idée de cette prédication au chapitre 3 verset 19-20 de la Première épître de saint Pierre. Voici ce qu'explique le chef de l'Eglise à propos de la descente du Christ aux enfers : "Par l'Esprit aussi Jésus-Christ alla prêcher aux esprits qui étaient retenus en prison, qui autrefois avaient été incrédules, lorsqu'au temps de Noé ils s'attendaient à la patience et à la bonté de Dieu, pendant que l'on préparait l'arche dans laquelle peu de personnes, savoir huit en tout, furent sauvés au milieu de l'eau".
Les termes sont précis : l'oeuvre de Jésus aux enfers consiste à prêcher aux morts qui n'ont pas eu l'occasion de répondre au Seigneur durant leur vie. C'est une chance ultime qui leur est laissé de se prononcer pour Jésus devant les hommes pour que Lui se prononce pour eux devant son Père au plus haut des cieux. Il ne s'agit pas d'un sauvetage massif et indifférencié mais d'un appel à leur liberté, une proposition de délivrance adressée "aux esprits", grec : pneumasi. Il y a trois dimensions de l'être humain (cf. I Thess, 5, 11). Jésus prêchant aux morts dans les enfers ne s'adresse pas aux hommes qui ont vécu engoncés dans la matière, à la merci de leurs désirs animaux (les hommes hyliques, voilà pour la première dimension), ni non plus à ceux qui se contentant de leur psychologie ont passé leur vie à manifester leur volonté de puissance (les hommes psychiques, c'est la deuxième dimension).
C'est bien aux pneumatiques (pneumasi : aux spirituels) que s'adresse Jésus aux enfers, à ceux qui ont ouvert leur coeur et qui cherchent la lumière, ceux-là mêmes dont il a dit : "Qui cherche trouve et à qui frappe on ouvrira"(Matth. 7, 8 ; Luc 11, 10). Le Christ ne laissera pas une seule de ses brebis dans la prison infernale. Il libère tous les siens. Mais ses brebis ne forment pas la majorité, loin de là : "seulement huit en tout" dit saint Pierre, furent sauvés des eaux au moment du déluge. Il ne s'agit pas, sous la plume de l'apôtre, d'une référence historique : sait-on ce qu'a été le déluge ? Non, bien sûr. Mais il s'agit de nous faire comprendre que d'un côté du voile comme de l'autre, il reste vrai qu'"il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus" (Matth. 20). Ce ne sont pas ceux qui se contentent d'une honnête moyenne qui seront sauvés : leur calcul ne les sauvera pas. Sont sauvés ceux qui se donnent sans calcul, " qui reçoivent la parole avec un coeur bon et excellent" et "qui portent du fruit avec abondance" (Lc 8, 15).
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