vendredi 14 juin 2013

François se dévoile peu à peu

Les simples propos du pape diffusés par le Clar [confédération latino-américaine et caraïbe des religieux et religieuses] et finalement confirmés par lui sont très instructifs de la spiritualité profonde qui anime le Vicaire du Christ. Les médias ont retenu la mention du "lobby gay" à la Curie. Mais il s'agit manifestement d'un obiter dictum, le pape soulignant par ailleurs qu'"il y a vraiment des saints à la Curie".

Certains traditionalistes se sont émus de ce que le pape semblait ne pas les aimer parce qu'il dénonçait un esprit restaurationiste qui donne "l'impression de vivre en 1940"... Moi qui suis un pur produit du Séminaire d'Ecône, je n'ai jamais eu l'impression que nous devions "restaurer" quoi que ce soit, ni que l'on nous encourageait à retrouver dans les chapelles de la Fraternité l'atmosphère des années 40. Je sentais au contraire un grand souci de "coller" à l'actualité de la vie de l'Eglise et l'impression d'en être à un nouveau commencement [était-elle excessive ? Sans doute un peu. Mais à l'époque - dans les années 80 - le cardinal Lustiger allait répétant, dans la revue Communio par exemple : "Nous sommes sans doute les premiers chrétiens". Le son de cloche n'était pas très différent à cet égard]. C'est en tout cas toujours par rapport à l'actualité du Concile et aux méfaits de l'après-concile que nous avons été formés.

Manifestement la réflexion du pape, toujours charpentée, en quoi elle est particulièrement intéressante, tourne autour de la désignation de deux attitudes ennemies de la foi (il n'est pas impossible qu'il y revienne dans l'encyclique sur la foi actuellement en révision). La première : le pélagianisme, qu'il a déjà évoquée lors de la messe chrismale, Jeudi saint dernier. La seconde, le gnosticisme, à quoi il se réfère depuis le tout début de son pontificat (et même dans tel entretien donné comme archevêque de Buenos Airès) de façon que je dirais respectueusement quasi obsessionnelle. Il précise cette fois qu'il entend par gnosticisme une forme de panthéisme.

Pélage ! Le nom de ce moine breton qui vivait au début du Cinquième siècle est à lui seul tout un programme. Surtout de la part d'un pape jésuite, alors que depuis trois siècles, dans le sillage du grand Arnauld, en échos aux terribles Provinciales de Blaise Pascal, on traite les jésuites de pélagiens ou de semi pélagiens. Hugues Kéraly avait écrit autrefois un petit livre intitulé Présence d'Arius, pour dénoncer les clercs qui ne croyaient plus en la divinité du Christ. Je crois que l'on pourrait équivalemment parler d'une présence de Pélage de plus en plus obsédante. Attention : si l'on se limite aux polémiques sur la grâce et la liberté, si l'on se contente d'ergoter sur ce qui vient de Dieu et sur ce qui vient de soi dans toute action humaine, on risque fort de passer à côté du problème.

A travers le pélagianisme, ce que le pape dénonce,c'est deux choses : le bon vieux naturalisme, c'est-à-dire l'idée qu'il suffit d'observer quelques règles à hauteur d'homme pour être sauvé... Disons en France, la confusion savamment entretenue entre éthique républicaine et morale chrétienne. Et puis, les pélagiens sont ceux qui nient les effets du péché originel dans notre existence. Pour eux le Christ n'est pas "cet homme nommé salut" (Jacqueline Genot Bismuth). Il est juste un modèle extraordinaire, comme les anciens héros grecs ou comme les modèles de l'histoire romaine : Exempla trahunt.

Comme exemple de pélagianisme, notre pape prend "ceux qui vivent sous des règles anciennes", des règles humaines, trop humaines, présentées comme permettant de se sauver. Voilà l'attaque contre les restaurationnistes. Et il conte une anecdote personnelle : « J'ai eu à en recevoir à Buenos Aires… (…) Une anecdote, seulement pour illustrer mon propos, ce n'est pas pour se moquer, je l'ai prise avec respect, mais cela me préoccupe : lorsqu'on m'a élu, j'ai reçu une lettre d'un de ces groupes qui me disait : “Sainteté, nous vous offrons ce trésor spirituel, 3 525 rosaires.” Pourquoi ne disent-ils pas : nous avons prié pour vous, demandé… mais cette histoire de tenir des comptes… ".

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais cette allusion à un groupe de Buenos Aires me fait irrésistiblement penser au million de chapelets revendiqué par Mgr Fellay. Faire dire un million de chapelets et croire que cela suffit qu'il n'est pas nécessaire de payer de sa personne, de prendre des risques, d'en faire prendre peut-être à son Institut, et qu'un vieux pape devra s'en contenter, oui, François a raison, c'est du pélagianisme. C'est une manière d'absolutiser les moyens humains, en oubliant la grâce de Dieu, la confiance qu'il met dans nos coeurs, sa Providence qui nous aide à prendre des risques (à "parier" dirait Pascal)... Je ne parle pas seulement pour la FSSPX. Je connais intimement un Institut qui a besoin de se défaire du pélagianisme spirituel.

Lorsque le traditionaliste devient intégriste, il est pélagien. Comme dit André Frossard, il est "celui qui veut faire la volonté de Dieu que Dieu le veuille ou pas", celui qui absolutise des moyens humains objectivement bons en les croyant suffisants alors qu'ils ne sont qu'humains.

Quant à la gnose... C'est la bouteille à l'encre. Le n°4 de la Nouvelle revue Certitudes comporte tout un dossier toujours disponible, intitulé La gnose, éternelle hérésie et nouvelle religion. Le pape argentin, évoquant l'actualité de la gnose dans l'Eglise, ne peut pas ne pas connaître le Père Julio Meinvielle (argentin lui aussi, mort en 1973) et son ouvrage (un peu imparfait mais suggestif) consacré à la gnose du progressisme (réédité à Ecône voici 15 ans par l'abbé de Jorna). L'idée d'une rivalité bimillénaire entre gnostiques et catholiques orthodoxes vient des milieux traditionalistes (Etienne Couvert ne l'a pas inventée), même si elle a été reprise par quantité de savants. Je citerais parmi eux Hans Jonas, Tomas Molnar, Henri de Lubac, Humbert Cornelis etc.

Notre pape appelle gnose tout ce qui ressemble à la tentation de rendre le Christ historique facultatif et de le remplacer par une idée. Il cite une anecdote révélatrice : "Les deux courants [gnose et pélagianisme] sont des courants d'élites, mais d'une élite mal formée. J'ai su qu'une supérieure générale invitait les soeurs de sa congrégation à ne pas prier le matin, mais à prendre un bain spirituel dans le cosmos, des choses de ce genre… Ils me préoccupent parce qu'ils enjambent l'incarnation. Or, le Fils de Dieu a pris notre chair, le Verbe s'est fait chair! Qu'est-ce qu'on fait avec les pauvres, les souffrants? Voilà notre chair! (…) L'Evangile n'est ni une règle ancienne ni ce panthéisme. Si vous regardez les banlieues, les indigents, les drogués, la traite des personnes… là est l'Evangile, les pauvres sont l'Evangile".

Là encore, le pape nous donne l'occasion d'un examen de conscience : cherchons-nous vraiment à connaître et à suivre le Christ ou bien sommes nous auto-centrés dans les certitudes d'une idéologie chrétienne ? Pour le coup, il n'y a pas que les intégristes qui devraient se sentir visés !

Je voudrais m'attarder sur la dernière phrase de François : "Les pauvres sont l'Evangile". Vous rêvez peut-être à je ne sais quelle contamination des théologiens de la Libération sur le pape François ? Mais cela n'a rien à voir. C'est du Léon Bloy tout pur ! Le voici par exemple, cet auteur qui se disait lui-même maudit, dans Le sang du pauvre : « La Pauvreté groupe les hommes, la Misère les isole, parce que la pauvreté est de Jésus, la misère du Saint-Esprit. La Pauvreté est le Relatif, – privation du superflu. La Misère est l’Absolu, – privation du nécessaire. La Pauvreté est crucifiée, la Misère est la Croix elle-même. Jésus portant la Croix, c’est la Pauvreté portant la Misère. Jésus en croix, c’est la Pauvreté saignant sur la Misère ». Les pauvres sont l'Evangile dit le pape François. Les pauvres sont Jésus dit Léon Bloy (cité par le pape dans son premier discours à la Chapelle Sixtine).

Le message du pape François est absolument claire. Il se dévoile dans sa radicalité.

N'ayons pas peur de sortir de nos sentiers battus, nous dit-il, n'ayons pas peur d'aller aux pauvres, à ceux qui ne se contentent pas des mensonges ambiants ou des belles idées menteuses (tournant toutes autour de la mondialisation heureuse) parce qu'ils ne sont pas "gnostiques", à tous ceux qui ne se contentent pas des recettes humaines trop humaines du vieux temps, les nouveaux pélagiens, à ceux en un mot qui, d'où qu'ils viennent, ont conscience que sans un sauveur plus qu'humain, tout est f...

13 commentaires:

  1. Monsieur l'abbé,

    Alors là, j'ai du mal, beaucoup de mal à suivre votre démonstration! non pas sur l'aspect théorique de celle-ci, mais sur l'exemple pris.
    quoi? le rosaire, ce don de la Sainte Vierge à l'humanité, pour obtenir d'Elle la plus sûre intercession auprès de la Miséricorde divine, le chapelet est donc humain, trop humain ?! Fichtre: quelle piété nous reste t'il pour interpeler le Ciel et obtenir Miséricorde? Si le chapelet est trop humain, quid de nos prières plusieurs fois par jour, quid de l'adoration du Très Saint Sacrement? Quid de toute prière? Comment distinguer dans les actes que nous posons vers le Ciel ce qui est motion du Saint Esprit et initiative purement humaine? Le dénombrement des rosaires priés par telle communauté doit-il être stigmatisé selon une logique comptable? Ne peut-il/doit-il pas être compris comme: regardez, Sainteté, comme le Saint-Esprit agit toujours sur le peuple de Dieu: il a insufflé dans 3525 âmes la constance de dire le rosaire à l'intention du vicaire du Christ, plusieurs milliers d'âmes se sont unies spirituellement pour que vous soyez fortifié dans votre ministère: c'est humain tout ça? Ben peut-être, mais ça m'a tout l'air divin aussi. Mais il se peut que l'auteur de la missive soit d'abord dans une démarche de vieil homme (pas d'homme nouveau)voulant prouver quelque chose d'humain au pape, sa force de mobilisation par exemple, certes. Mais ce n'est pas dit, ce contexte n'est pas précisé dans votre billet, et il fait franchement défaut, car il conduit à la perception que je viens de décrire, qui est la mienne en vous lisant. Le rosaire, simplement humain, ce n'est certainement pas ce que vous avez voulu signifier, mais c'est ce que j'ai perçu, d'où ma perplexité. Merci donc, de bien vouloir revenir sur ce point. Hervé

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  2. merci pour cette très intéressante analyse. En même temps, je pense que Mgr Fellay, en lançant des campagnes de rosaires, avait remis la prière au centre... Jusque là, on était persuadé d'être sauvé simplement en étant dans le camp "du bien", de la bonne doctrine... Et on était sûr d'être dans le camps du bien en anathématisant ceux que l'on estimait dans le camp "du mal"... Donc on passe du catharisme au pélagianisme en quelque sorte... Est-ce un progrès ?! Sans doute, il ne faut pas désespérer ! Mais on reste dans le cléricalisme qui incite les fidèles à ne pas agir puisque l'institut (quel qu'il soit) "agit" pour nous...
    Sinon, ce Pape François est doctrinalement étonnant : vous avez raison de le souligner. Nous avons un pape qui prêche de la façon la plus traditionnelle qu'il soit, avec une doctrine solide, une spiritualité profonde et surtout une dévotion mariale forte. Comme quoi la formation jésuitique reste inégalable, on a tort de la sous-estimer !

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  3. Monsieur l'abbé, Vous êtes comme le grand Babu. Il n'y a que vous qui sentiez l'eau de Cologne. Quand Mgr Fellay a fait dire le million de rosaires, tous les gens de bonne foi ont compris que c'était un moyen surnaturel pour toucher NSJC par l'intercession de sa Sainte Mère. Que pouvait-il faire d'autre? Tomber dans les pièges humains qui lui étaient tendus de toutes parts? La réponse de la Sainte Vierge a été claire. Rien à attendre de ces gens-là. Timeo Romanos. Leurs offres sont clairement inacceptables. Ce qui a suivi n'a fait que confirmer : démission du melliflu Benoît XVI, élection de François Ier qui dit des messes avec ballons rouges totalement désacralisées. Vous me faites penser à ce directeur d'un hebdo nationaliste (d'un niveau pourtant supérieur aux vôtres) qui accusait Mgr Fellay de blasphémer avec ses chapelets. J'ai immédiatement suspendu mon abonnement. Ressaisissez-vous!

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    1. Certains messages me semblent écrits dans le but de porter quelques piques. On sent (presque) une jubilation de l'auteur, comme si on l'entendait rire de sa trouvaille ("haha, tu as vu ce que je lui envoie! Attends, à moi, à moi!")

      Bon - un peu de sérieux. Ce que Rivarol reprochait à Mgr Fellay, ce n'était pas d'avoir fait dire 1.000.000 de chapelets. C'était bien plutôt de les avoir fait dire à une intention (la levée des excommunications) que Rivarol estimait dépendre du seul Mgr Fellay.

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  4. Il me plait bien ce pape. C'est très présomptueux d'écrire un truc pareil, j'en suis bien consciente, mais bon, c'est ainsi. Peut-être allons nous enfin revenir aux fondamentaux, comme disent les sportifs. Et puisque Benoît XVI a rétabli la messe de toujours dans ses droits...
    Quand on voit la générosité des gens et l'incurie de la plupart de ONG financées par cette générosité, on se dit que -ne serait-ce que dans ce domaine- l'Eglise manque au monde.
    Imaginons trente secondes le bien que ferait le fruit de cette générosité entre les mains d’œuvres d'Eglise...

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  5. Toujours aussi intéressant mais il y a quelques chose qui me gêne dans cette façon de citer publiquement ces compteurs de rosaire pour les rabrouer. Et souvent depuis le début de ce pontificat je suis ainsi à la fois intéressé par le fond mais tefroidi par une forme -- allons, j'ose -- que je trouve peu romaine.Louis.

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  6. Cher Monsieur l'abbé,

    Il ne manquera pas de commentateurs pour vous reprocher votre volte-face au sujet de Léon Bloy. En l'occurrence, sa citation n'est pas limpide, car le Saint-Esprit qu'il identifie à la misère, qui serait le contraire de la pauvreté qui créerait du lien, est le contraire de ce qui isole, la Pentecôte est là pour en témoigner.

    Mais le pape voue au même danger pour l'eglise les pélagiens et les gnostiques. D'abord, on pourrait se demander: pourquoi en fait-il deux groupes distincts? car enfin ce sont les mêmes. Les pélagiens et les gnostiques demandent au christianisme ce qu'il a fait de l'incarnation et pourquoi cette religion de l'INcarnation a un problème avec l'Incarnation, de même que le bouddhisme, philosophie qualifiée par l'Occident, de "religion de la réincarnation", a un problème avec le désir, désir qui fait partie de l'Incarnation. Et le christianisme n'est pas non plus très à l'aise avec la libération qu'a apportée Celui que françoise dolto appelait "le Maître du Désir".

    Ces deux formes de "religion naturelle", le pélagianisme et la gnose, traduisez le progressisme et le "new age", demandent au christianisme des comptes au sujet de la nature. Elles lui demandent ce qu'il a fait de la nature au nom du surnaturel et au bénéfice exclusif de la grâce. Ces deux interpellations doivent être reçues avant d'être condamnées, "aussi bien le panthéisme à la mystique cosmique que le progressisme du "levain dans la pâte" et du "sens de l'histoire", qui croit en "les forces de l'esprit" et "en l'homme complet, sorti des mains de dieu... et destiné à y faire retour avec ses frères."

    Condamnation des deux tendances les plus profondément religieuses de notre temps (l'eglise n'aurait donc riein appris...), auxquelles s'ajoute la condamnation du "restaurationnisme", forme de superstition qui demande, dans l'insécurité spirituelle où se voit et se meut le monde, la protection du Fils de Dieu et de sa mère contre l'aventure humaine et ses tribulations. Si on ne veut recevoir, ni le pélagianisme, ni le progressisme, on laisse la porte ouverte à l'obscurantisme évangéliste, que pourrait tempérer le "restaurationisme", qui mérite au moins le respect que l'on doit à cette forme archaïque de prière qu'est la prière de demande, qui veut vivre en relation avec dieu.

    Mais il y a une chose qui m'inquiète encore plus dans ces confidences du pape: c'est qu'il se vante de n'avoir pas de plan. Benoît XVI aussi, lors de l'homélie de sa messe d'intronisation, assurait ne pas avoir de programme et ne pas vouloir suivre ses idées. Seulement, la méditation du chemin de croix et l'homélie de la messe d'entrée en conclave avaient démontré le contraire. Ici, une habitation singulière de la fonction pontificale m'a déjà amené à me demander naguère sur ce métablog ce que le pape souhaitait faire de cette fonction et de cette mission de Pierre. A l'en croire, il ne sait pas, c'est d'autant plus inquiétant, dans une époque déboussolée et un monde sans repères...

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  7. Pour moi, les excommunications dépendaient du seul Benoît XVI, la main conduite par la dispensatrice de toutes grâces. Des piques, d'accord. De la jubilation, non. Maintenant, l'abbé G de T peut rester dans sa tour d'ivoire à distribuer des bons et des mauvais points. C'est son affaire. Plus la mienne. Adios.

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  8. Merci pour cette écoute attentive, cette lecture forte - qui change des vaticaneries en tous genres ( et merci aussi pour le clin d'oeil involontaire qui vous fait écrire que "le message de François est clairE"...)

    La question lancinante que votre réflexion réveille chez moi: oui, ce qui fait le christianisme, c'est la grâce (langage paulinien), ou l'advenir du Royaume (langage synoptique), ou le salut (langage johannique). Mais la grâce (pour dire vite), comment la penser et l'exprimer d'une façon qui n'en fasse ni une figure de style ( soit pélagienne, soit gnostique), ni une sorte de magie (le "surnaturalisme") ?

    Cette question concerne d'abord la façon dont on lit l'Ecriture. Toute la pensée de la démythisation a déconstruit l'interprétation "magique" de la grâce/salut/royaume; mais je ne suis pas sûr qu'une autre compréhension ait encore trouvé ses mots (des mots qui fassent sens juste dans notre culture). Y a-t-il un autre langage positif de la grâce que le témoignage, narratif (comme les évangiles) ou poétique ?

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  9. Enfin une distinction entre pauvreté et misère. Cette époque a tendance a les mettre dans le même sac.Collégien des Frères de St JB de la Salle ,j'ai appris que la pauvreté est un manque de moyens , la misère la perte de la dignité.
    Beaucoup de journalistes ne savent pas faire la différence car ils craignent d'être taxés de paternalisme en ne considérant pas la pauvreté comme un mal absolu confondu de ce fait avec la misère.
    Sur le plan spirituel la misère c'est de n'avoir aucun espoir.
    Dante signale que c'est ainsi que l'enfer se présente.

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  10. Laguérie a tort d'apostropher comme il le fait le Président de la CEF. Sa lettre est ironique et le ton déplacé. Ceci dit, est-ce que la CEF est sur la même longueur d'ondes que le pape François après son discours aux parlementaires français (de droite)? L'explication de texte risque d'être difficile et la prochaine Assemblée générale houleuse. L'épiscopat est comme l'UMP: divisé.

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  11. Bonsoir mon père, certains conciles oecuminique ou nationaux ont condamné tour à tour, le pelegianisme, le semi pelegianisme et l'augustinisme tout en reconnaissant la prédestination (époque médiévale).
    On sait que les orthodoxes sont semi pelagiens, et les lutheriens et calvinistes sont augustiniens.

    Quelle est donc la doctrine officielle de l'Eglise Catholique entre le libre arbitre et la predestination? Si, elle a tranché.

    Merci

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  12. Cher Monsieur l'abbé,

    Il ne manquera pas de commentateurs pour vous reprocher votre volte-face au sujet de Léon Bloy. En l'occurrence, sa citation n'est pas limpide, car le Saint-Esprit qu'il identifie à la misère, qui serait le contraire de la pauvreté qui créerait du lien, est le contraire de ce qui isole, la Pentecôte est là pour en témoigner.

    Mais le pape voue au même danger pour l'eglise les pélagiens et les gnostiques. D'abord, on pourrait se demander: pourquoi en fait-il deux groupes distincts? car enfin ce sont les mêmes. Les pélagiens et les gnostiques demandent au christianisme ce qu'il a fait de l'incarnation et pourquoi cette religion de l'INcarnation a un problème avec l'Incarnation, de même que le bouddhisme, philosophie qualifiée par l'Occident, de "religion de la réincarnation", a un problème avec le désir, désir qui fait partie de l'Incarnation. Et le christianisme n'est pas non plus très à l'aise avec la libération qu'a apportée Celui que françoise dolto appelait "le Maître du Désir".

    Ces deux formes de "religion naturelle", le pélagianisme et la gnose, traduisez le progressisme et le "new age", demandent au christianisme des comptes au sujet de la nature. Elles lui demandent ce qu'il a fait de la nature au nom du surnaturel et au bénéfice exclusif de la grâce. Ces deux interpellations doivent être reçues avant d'être condamnées, "aussi bien le panthéisme à la mystique cosmique que le progressisme du "levain dans la pâte" et du "sens de l'histoire", qui croit en "les forces de l'esprit" et "en l'homme complet, sorti des mains de dieu... et destiné à y faire retour avec ses frères."

    Condamnation des deux tendances les plus profondément religieuses de notre temps (l'eglise n'aurait donc riein appris...), auxquelles s'ajoute la condamnation du "restaurationnisme", forme de superstition qui demande, dans l'insécurité spirituelle où se voit et se meut le monde, la protection du Fils de Dieu et de sa mère contre l'aventure humaine et ses tribulations. Si on ne veut recevoir, ni le pélagianisme, ni le progressisme, on laisse la porte ouverte à l'obscurantisme évangéliste, que pourrait tempérer le "restaurationisme", qui mérite au moins le respect que l'on doit à cette forme archaïque de prière qu'est la prière de demande, qui veut vivre en relation avec dieu.

    Mais il y a une chose qui m'inquiète encore plus dans ces confidences du pape: c'est qu'il se vante de n'avoir pas de plan. Benoît XVI aussi, lors de l'homélie de sa messe d'intronisation, assurait ne pas avoir de programme et ne pas vouloir suivre ses idées. Seulement, la méditation du chemin de croix et l'homélie de la messe d'entrée en conclave avaient démontré le contraire. Une habitation singulière de la fonction pontificale m'a déjà amené à me demander naguère sur ce métablog ce que le pape souhaitait faire de cette fonction et de cette mission de Pierre. A l'en croire, il ne sait pas, c'est d'autant plus inquiétant, dans une époque déboussolée et un monde sans repères...

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