Il y a trois mois le blog François de Souche citait une brève de Ouest France, rapportant la visite de collégiens à la mosquée de La Roche. Ces élèves d’un établissement privé catholique (Saint-Pierre, en Vendée, aux Essarts) ont «posé leur regard sur la mosquée», on les voit sagement assis sur le tapis rouge de la salle de prière. Il s’agit de «comprendre au mieux» le programme d’histoire, qui en 5e porte aussi sur les «débuts de l'Islam». Jusque là rien de bien extraordinaire, et le titre surprenant de l’article («Des collégiens s'imprègnent de l’islam») n’engage que le journaliste.
Photo réelle - légende bidon. |
'F de Souche' publiait également une autre photo, que vous voyez ici: des enfants sur un tapis vert, en position de prière, à la musulmane. 'F de Souche' pense qu’il s’agit aussi d’une sortie scolaire, et indique que la photo a été prise ailleurs (en GB en l’occurrence). Sans doute 'F de Souche' a-t-il voulu illustrer toute la différence qu’il y a entre la visite culturelle dont il rend compte, d’une part… et ce qui se ferait dans d’autres pays, d’autre part. Ou peut-être s’agissait-il de corser un peu le post?
Le problème est qu’à partir de là, l'image est reprise par toute une série de blogs et de sites, qui veulent croire (et faire croire) qu’elle représente les élèves du Collège Saint-Pierre, aux Essarts, dans le diocèse de Lucon. Avec divers commentaires : offusqués, ironiques, scandalisés…
C’est ainsi que l’on retrouve cette photo sur…
- Le site italien de la FSSPX, d’abord, qui écrit que «les jeunes catholiques français ne vont plus à la messe. Que faire? Les encourager à mieux connaître… l’islam»
- Rorate Caeli suit, avec des commentaires qui s’effraient que cette horrible chose ait eu lieu justement en Vendée.
- Vient Orate Fratres, qui suggère une neuvaine pour l’Eglise de France.
- Puis Katholisches, site allemand qui réalise l’exploit de faire parler l’enseignant de la classe… en plaçant des guillemets autour de quelques mots traduits depuis la brève de Ouest-France.
(Je passe sur les nombreuses reprises sur des blogs d’importance secondaires, en anglais, en portugais, en grec, en polonais, etc. Je passe aussi sur les reprises par des pages plus politiques.)
- Dernier en date: La Porte Latine, site de la FSSPX française, reprend l'image et l'intitule: «Les jeunes collégiens de Saint-Pierre des Essarts ‘mis en condition’...».
J'ose deux hypothèses: la première c'est que ces blogs et sites se reprennent les uns les autres, que chacun paraphrase l'autre, que l'info tourne en rond, et qu'une fois qu'une erreur est entrée dans la boucle, elle y prospère de manière virale - d'autant plus facilement qu'elle est extravagante.
L'autre hypothèse, qui n'est pas incompatible avec la première, suppose que les blogueurs traditionalistes ne se satisfont pas de notre société, ni de ses choix culturels, politiques, économiques. Qu'ils ressentent divers problèmes, réels mais diffus et malaisés à circonscrire. Prenez cette visite d'une mosquée par exemple: rien que de très banal... mais il y a un petit malaise: Ces adolescents «curieux et ouverts» qui entrent pour la première fois sans doute dans une mosquée, les emmènera-t-on aussi dans une église? Si on ne le fait pas, le tradi souffre: il a l’impression d’une ouverture à sens unique, d’une découverte des seuls ‘autres’, quand tant d’enfants de France ne connaissent rien du catholicisme. – Maintenant, si ces collégiens visitent aussi la paroisse voisine, le tradi souffre encore et se demande (par exemple) ce que vaut une école ‘catholique’ qui doit organiser une demie journée découverte pour que ses élèves sachent à quoi correspond concrètement le mot ‘église’.
Bref dans les deux cas, le tradi souffre - et à juste titre, et d'autant qu'il n'a rien de bien concret pour illustrer son malaise. C'est alors (c'est ma seconde hypothèse) que nait la tentation de grossir le trait. De transformer, par exemple, la visite-culturelle-qui-dérange-un-petit-peu en initiation-cultuelle-carrément-scandaleuse. Et pour ce faire, quoi de mieux qu'une bonne photo bien choquante? Elle est bidon... et alors?
Le plus extraordinaire dans cette histoire est qu'il est à peu près impossible de savoir où et quand cette photo a été prise. Elle est sur internet depuis fin 2007 au moins, d'abord sur des sites arabophones. Tantôt elle a été prise «in Massachusetts» (USA), tantôt il s'agit de jeunes Danois originaires d’«Aarhus, dans la banlieue de Hammel».
Bref dans les deux cas, le tradi souffre - et à juste titre, et d'autant qu'il n'a rien de bien concret pour illustrer son malaise. C'est alors (c'est ma seconde hypothèse) que nait la tentation de grossir le trait. De transformer, par exemple, la visite-culturelle-qui-dérange-un-petit-peu en initiation-cultuelle-carrément-scandaleuse. Et pour ce faire, quoi de mieux qu'une bonne photo bien choquante? Elle est bidon... et alors?
Le plus extraordinaire dans cette histoire est qu'il est à peu près impossible de savoir où et quand cette photo a été prise. Elle est sur internet depuis fin 2007 au moins, d'abord sur des sites arabophones. Tantôt elle a été prise «in Massachusetts» (USA), tantôt il s'agit de jeunes Danois originaires d’«Aarhus, dans la banlieue de Hammel».
Qui grossit le trait ?
RépondreSupprimerRien de concret dites-vous ?
M. l'Abbé je ne vous suit pas.
Certes profiter d'une photo pour forcer le trait n'est plus un effet de style mais franchit la ligne jaune de l'honnêteté; mais n'est ce pas là un procès en diversion que vous menez ?
Autre exemple, à Brest cette fois, établissement dit Catholique, mon fils 9 ans, "Papa mon cours de catéchisme était très intéressant, j'ai appris des tas de choses" le père fier de son fils "ah bon raconte moi", le fils "vois tu j'ai appris que Mahomet est né en Arabie Saoudite, que la Mecque ..."
Allez vous répondre que c'est anodin ? combien d'enfants de cet âge dans les établissements dits Catholiques, reçoivent ne serait ce qu'une once de Catéchisme Catholique ?
La multiplication des exemples connus, ceux du collège des Essarts, et trop peu connus, visite de tel ou tel évêque dans une mosquée alors que grand jamais ils n'iraient se montrer dans un Prieuré tradi, vente ou prêt d'une Eglise comme à Clermont-Ferrand, d'une aumônerie comme à Bordeaux pour en faire une mosquée salafiste, mis en relief avec le niveau d'inculture Catholique de nos enfants, de démission du clergé dans son devoir de transmission, ... oui effectivement, tout cela génère une souffrance pour le témoin du Christ lambda, celui qui récite son credo avec conviction, celui que vous appelez le tradi.
Certains penseront que visiter une mosquée c'est un peu comme visiter une Eglise ... enfin bon, un musée, cela revient au même aujourd'hui.
Pour l'avoir vécu au Maroc, dans le premier cas on ne vous laisse pas rentrer sauf si vous êtes musulman, si on vous y invite c'est dans un but de conversion, rien d'anodin.
Hier à Strasbourg la paroisse Saint-Maurice a préféré fermer l'Eglise et supprimer sa Messe de 11h pour visiter une mosquée.
Coïncidence ? la multiplication de ces exemples montre que non.
Dhimmitude avancée ? Œcuménisme conciliaire ? ou tout simplement un arianisme latent qui s'épanouit avec la banalisation de l'Islam, contagion identique car raison identique à la diffusion de l'Islam dans le moyen orient sous Byzance?
Imaginons un instant l’image que l’Occident renvoie à ces Chrétiens du Moyen Orient pour qui nous représentons un immense espoir… ?
cher Alain, je vous encourage à (re)lire le post dans son intégralité, à commencer par la première ligne qui indique assez que c'est moi, l'indigne webmestre, et non l'abbé, qui ai écrit ce texte. Vous relirez aussi la phrase qui dit que le tradi (j'en suis un) "a l’impression d’une ouverture à sens unique, d’une découverte des seuls ‘autres’, quand tant d’enfants de France ne connaissent rien du catholicisme"! Au fond, que dites-vous dans votre commentaire que je n'ai déjà dit?
RépondreSupprimer"Il s’agit de «comprendre au mieux» le programme d’histoire, qui en 5e porte aussi sur les «débuts de l'Islam». Jusque là rien de bien extraordinaire." Ben si, c'est extraordinaire. Des écoles dites catholiques qui font visiter des mosquées à leurs élèves au lieu de les conduire à la messe. Alain a dit ce qu'il fallait dire. On se demande si le but de votre post, M le webmestre, n'était pas de tenter de déconsidérer votre homologue de La Porte Latine, ce "bidonneur".
RépondreSupprimerCher Marek, soyez certain de deux choses - la première c'est que lorsque mon 'homologue' de La Porte Latine a quelque chose à me dire, il me contacte sans gène. La seconde est que si mon post (qui le mentionne) devait le "déconsidérer" (?!), il aurait retiré la photo que je déplore, ou du moins modifié la légende.
RépondreSupprimerJe suis âgé e 80 ans. J'ai fait toutes mes études dans des écoles laïques, jusqu'au bac inclus. On ne m'a jamais emmené visiter une église, un temple ou une mosquée (il n'y en avait pas encore). Mais on m'a appris la discipline, le respect des autres,la droiture et... cerise sur le gâteau, à lire, écrire, calculer et même chanter.
RépondreSupprimerJe suis maiantenant un "tradi" pur jus et s'il m'arrive de passer devant un temple protestant je n'y entre pas car le curz de mon enfance me l'avait interdit.
Je ne suis pas choqué que l'on fasse visiter à des élèves une mosquée, une synagogue ou un temple bouddhiste. Il faut s'ouvrir au monde et connaître les autres religions. Il est vrai qu'il est difficile de connaître la civilisation et l'art islamique si l'on n'a jamais visité une mosquée. J'ai visité tout seul la Mosquée de Paris à 14 ans avec un guide local et je ne suis pas devenu mahométan pour autant.
RépondreSupprimerIl y a cependant une condition sine qua non : que ces visites soit uniquement informatives et cultuRelles et ne donnent lieu à aucun prosélytisme.
NB comment faire étudier le Mahomet de Voltaire ou l'Enlèvement au Sérail de Mozart à des élèves n'ayant aucune connaissance de l'Islam ?