Reçue récemment sur Europe1 par Jean-Pierre Elkabach, la
Mère Agnès Mariam se vit taxée de « controversée » par le célèbre
interviewer. Son crime ? Dire la vérité sans concession. Avec la fougue et
l’indépendance d’esprit qui lui appartiennent, Mère Agnès évoque ici sans tabou
les malheurs du peuple syrien par delà toutes les confessions… Je donne ci-dessous l'entretien paru dans l'avant dernier numéro (décembre) de Monde et Vie, avec une présentation biographique de Mère Agnès. -- Le 2 février prochain, au Forum de Grenelle (5 rue de la Croix Nivert 75 015), nous recevons Mère Agnès-Mariam au cours d'un colloque consacré à La guerre des monothéisme aujourd'hui. Les renseignements sont donnés sur cccsp.fr.
Ma position n’est pas une position politique, c’est une
position éthique devant une situation d’agression flagrante contre la
population civile,. Alors que les médias « Mainstream » ne mettent en
lumière qu’une seule partie du tableau, je trouve qu’il est bon de compléter ce
tableau, par une vision qui aide l’opinion publique à se faire l’idée la plus
équilibrée des tenants et des aboutissants du conflit syrien. Certes je ne veux
pas effacer d’un coup de chiffon tout ce que les médias sont en train de dire.
Mais il est clair qu’il y a un discours dominant qui est tendancieux. On défend
unilatéralement une thèse que l’on aimerait favoriser par tous les moyens, mais
on le fait malgré l’évidence de beaucoup d’événements…
Quelle est cette thèse ?
La thèse que l’on veut défendre est que le régime est
l’unique responsable de la mort d’innocents et des destructions massives que
l’on constate en ce moment. Face à cette thèse « officielle », la
réalité est que ce sont les méthodes employées par des bandes armées affiliées
à l’opposition qui sont contraires autant sinon plus à la protection des
civils. Ce sont eux qui détruisent les infrastructures de l’Etat et les sites
patrimoniaux de façon gratuite. Ce sont eux qui déséquilibrent la société
civile, dans laquelle, quelles que soient les confessions religieuses, il y a,
aujourd’hui encore un large consensus pour la paix. Durant longtemps, la grande
presse a voulu ignorer l’existence grandissante de groupes extrémistes, qui
utilisaient la guerre sectaire pour
réaliser une redistribution géographique à base confessionnelle, en
incitant à la guerre civile. Ces groupes, d’abord ignorés, puis carrément
occultés, ont été identifiés par divers reporters comme étant des groupes
affiliés à Al Qaïda ou des mercenaires comprenant une proportion significative
en provenance des pays les plus divers, y compris l’Angleterre, la France,
l’Irlande, l’Australie et même la Suède. S’agit-il d’un recyclage de
terroristes, soudain adoubés en défenseur de la liberté et de la
démocratie ? Se poser la question, c’est y répondre…
Vous êtes donc, vous, du côté du Régime de Bachar el Assad, contre ces terroristes ?
Le régime de Bachar est un régime totalitaire socialiste à
la manière stalinienne. Ce n’est pas par amour pour le Régime mais pour le
peuple syrien et pour l’Eglise qui se déconsidèrerait si elle s’abstenait de
dire la vérité des faits, occultée par des considérations politiques. Je crois
que la société syrienne ne doit pas être étudiée à travers un schéma binaire,
avec les pro-régimes et les anti-régime. L’immense majorité du peuple syrien
n’est pas politisée. Il y a une immense majorité silencieuse, qui refuse d’être
instrumentalisée, déstabilisée et de perdre l’Etat (qu’il ne faut pas confondre
avec le Régime). La situation actuelle ne résiste pas à une analyse, même
élémentaire. Madame Clinton a eu l’instinct de se rattraper, en soulignant
publiquement que la Révolution légitime du peuple syrien a été détournée au
profit de mouvements extrémistes et sectaires. Même Laurent Fabius, votre
ministre des affaires étrangères, a évoqué « une guerre hétéroclite et
désordonnée ».
Mais êtes-vous en accord avec la hiérarchie catholique, lorsque vous soutenez ces thèses non-conformistes ?
Ici en Occident, on essaie de faire croire que je ne le suis
pas. Mais c’est faux. Sa Béatitude Grégoire III Laham, patriarche des melkites
grecs catholiques a récemment proposé 24 observations sur la crise en Syrie qui
vont tout à fait dans ce sens. C’est lui qui a déclaré : « En Syrie, il n’y a plus de Révolution, il n’y a plus de
manifestations. Il y a seulement du banditisme et le monde entier refuse de le
reconnaître ». Il parle aussi de « complot international contre la
Syrie ». Tout cela d’ailleurs recoupe l’appel urgent des évêques de
Hassaké en Mésopotamie syrienne, dans lequel les prélats des Eglises locales,
tous rites confondus, font état de véritables agressions contre la population
civile de la part des rebelles – ces mêmes rebelles dont la presse mainstream
justifie le port d’armes par leur soi-disant protection des civils. C’est
vraiment la raison du plus fort qui est la meilleure ! Quant aux sociétés
occidentales, elles en sont arrivé à la justification idéologique de la
violence : vice inquiétant.
Y a-t-il un espoir pour la Syrie aujourd’hui d’après vous ?
Ce qui est complètement occulté
aujourd’hui, c’est la présence d’une majorité silencieuse qui n’est pas
polarisée, qui aime son pays, qui en connaît les bienfaits et les travers.
Diverses initiatives ont vu le jour pour ressouder l’unité civile et arrêter
l’effet dévastateur qu’a produit l’ouverture de la boîte de Pandore de la
Révolution arabe. Le Forum des familles s’est tenu il y a quinze mois. Les
délégués et activistes (sic) appartenant aux diverses composantes du riche
tissu social syrien, si diversifié d’un point de vue ethnique, religieux et
culturel. Ce Forum a fait émerger l’initiative de réconciliation nationale,
avec à sa tête le chef d’une des plus prestigieuses tribus arabes, les Naïms
(représentant ici en Syrie trois millions de personnes). L’autorité naturelle
du Cheikh Saaleh El Naïm a permis que se créent un peu partout dans le Pays des
groupes de réconciliation nationale (en arabe : Musalaha) qui s’illustrent
par des réalisations ad hoc in situ, pour prévenir la guerre civile, arrêter la
violence, payer les rançons et s’occuper du quotidien de la vie sociale
syrienne, en se servant du vaste réseau d’accointances qui existe entre les
différents chefs tribaux, comptant parmi les leaders les plus influents des
diverses confessions, sunnites, alaouites, chiites, chrétiens, druzes,
ismaélites, yézidis et sabéens transfuges de l’Irak. Face à une telle
organisation, je le demande, que vient faire la France pour décider qui va
représenter loe peuple syrien ? J’appelle cela un détournement. Le conflit
syrien est en train de dévoiler le vrai visage de la Démocratie occidentale.
Pourquoi ce mouvement « Musalaha », ce mouvement pour la réconciliation des Syriens est-il si peu connu ?
Aujourd’hui, la Communauté
internationale cherche à prendre de vitesse la majorité du peuple syrien qui
n’a pas pris les armes. Alors que le mouvement Musalaha s’évertue à maintenir
la paix civile, en pacifiant les populations, en les aidant matériellement, tout
en arborant les deux drapeaux, celui de la Révolution et celui du régime, on
cherche surtout des raisons pour intervenir, en armant les rebelles. On nous
dit qu’il y a une guerre civile en Syrie. On compte quelque 500 000 morts
depuis le début des hostilités. Mais ce n’est pas une guerre civile, ce n’est
pas une guerre entre les composantes civiles du Pays, mais la répression par
l’armée du régime de l’insurrection d’une partie du Pays aidée de volontaires
internationaux. C’est une Guerre entre l’Armée Libre de Syrie (miliciens ou
mercenaires) et l’armée régulière. Dans cette guerre , les civils de
toutes confessions sont pris en otages ; c’est ainsi que dans les
quartiers résidentiels infiltrés, les gens sont séquestrés et rançonnés. Il
faut dire que ce conflit a été préparé depuis des années ! N’a-t-on pas
retrouvé les souterrains qui ont permis à l’ALS de prendre pied dans ces
quartiers sans coup férir ?
Et le Régime…
Le Régime est mort depuis le
début de l’année 2012 puisqu’il a renoncé officiellement au principe du Parti
unique. Certes c’est un régime très dur avec ses opposants, mais jusque là, le
Pays n’avait pas de dette et surtout il était autosuffisant jusqu’à cette
guerre, avec d’abondantes réserves, systématiquement détruites aujourd’hui par
les mercenaires djihadistes. L’Etat assurait en outre les écoles, la gratuité
des soins, la gratuité des médicaments avec une véritable industrie
pharmaceutique nationale. Pour nous, la véritable question n’est pas que
restera-t-il du régime de Bachar, mais que restera-t-il de l’Etat syrien, qui,
jusqu’ici, assurait la paix civile avec de vrais moyens économiques ?
Propos recueillis par l’abbé G. de Tanoüarn
Les médias : entre information et propagande
« La position timorée des médias sur la Guerre en Syrie me rappelle
un incident significatif. Une de nos fondatrices subit jadis un malaise
cardiaque et fut transportée à l’hôpital où l’électrocardiogramme n’enregistra
aucune anomalie. Les médecins nous rassurèrent mais, à peine arrivée au
monastère, elle eut une attaque fatale et succomba sous nos yeux. Rappelé
d’urgence, le médecin qui venait de la congédier brandissait
l’électrocardiogramme pour assurer que la religieuse n’avait rien. Malgré
l’information fournie par son appareil de contrôle, notre sœur est décédée. Je
crains que le même scénario ne se répète aujourd’hui dans le domaine des
événements sociopolitiques. Qu’à force d’être soumis à un système de
désinformation, on ne se laisse berner jusqu’à un point de non retour. La
faute de la désinformation retombe, dit-on, sur le régime syrien qui empêche le
libre accès des médias. C’est vrai. Mais faudrait-il pour cela punir la
population et ne plus l’entendre en bloquant son témoignage et en refusant de
le diffuser ? (…) Les versions des télévisions syriennes pro-régime
s’accordent plus avec la réalité. Nous avons essayé de nous documenter en temps
réel en téléphonant à des proches sur les lieux mêmes des incidents
décrits : la situation ressemblait plus à ce qu’en disait la télévision
syrienne qu’à celle propagée par Al Jazzirah, BBC ou France 24, Al Hurra ou Al
Arabia à travers des montages et autres compilations audio-visuelles
mensongères et de mauvaise qualité »
Mère Agnès-Mariam
BRAVO! pour ce commentaire qui nous sort du politiquement et médiatiquement correct!
RépondreSupprimerBRAVO!
je suis heureux de lire ce remarquable témoignage qui vient confirmer ce que je pensais depuis le début des "évènements" syriens.Quelle lucidité et quel courage , cette Mère Agnès-Mariam !
SupprimerPour une fois, j'aurais aimé participer à un colloque organisé par l'abbé GdeT. Malheureusement je ne pourrai pas. Cette mère Agnès-Myriam a du punch. Je me doutais aussi que les images tremblantes et apocalyptiques qu'on nous donne de la Syrie sont du pipeau. Il y a quelques jours, BFMTV nous présentait encore un livre larmoyant sur les honnêtes révoltés matraqués. Les choses ont l'air de se tasser depuis que le général Puga a déclenché la contre-offensive sur les "terroristes" au Mali. L'action néfaste de Sarkö, conseillé par BHL, en Libye, apparaît au grand jour. Ce n'est plus le printemps mais déjà l'automne arabe. Rendez nous nos bons vieux dictateurs! Et ayons une pensée pour notre ami correspondant de guerre belge tué par un sniper en Syrie.
RépondreSupprimerCertains confondent l'éthique(et donc la vérité et la métaphysique) et le politique !
RépondreSupprimerQue cette courageuse Soeur en Christ continue de faire ce genre de "politique".
La confusion , entretenue , entre éthique et politique vise à mieux faire disparaitre et phagocyter l'éthique dans le politique alors que l'éthique(et dc la métaphysique) doit permettre de juger le politique et les politiques
M.AG2T, ça n’a pas fait « long feu », votre article est déjà sur le site de réinformation de l’actualité en Syrie : Info Syrie. Je m’en réjouis car il est vrai qu’il est courageux de dénoncer la désinformation continuelle de nos médias. Je renvoie les lecteurs de ce blog sur ce site car il est très bien fait. J’y avais lu il y a quelques jours, un témoignage de carmélites dont le couvent jouxte l’université d’Alep qui vient d’être bombardée. Il faut les unir à votre prière !
RépondreSupprimerJ’envoie aussi quelques extraits que j’ai trouvés sur ce site qui en diront plus que ce que nous sommes capables d’analyser :
« … Dans moins de 2 mois la crise syrienne aura atteint sa deuxième année. Le premier appel à la démission du président syrien par son homologue US, M. Barack Obama, a été lancé il y a 18 mois, le 18/08/2011 ; précédé par celui du président français Nicolas Sarkozy, le 28/05/2011. Entretemps, des dirigeants turcs et arabes n’ont cessé d’annoncer son départ »
« … Dès le début en mars 2011, les États-Unis et leurs alliés ont soigneusement planifié et soutenu la formation d’escadrons de la mort et l’incursion de brigades terroristes…. L’Armée syrienne libre (ASL) Washington et ses alliés ont répliqué en Syrie les caractéristiques essentielles de l’« option Salvador irakienne », menant à la création de l’Armée syrienne libre et ses diverses factions terroristes, dont les brigades Al-Nosra affiliées à Al-Qaïda.Bien que la création de l’ASL ait été annoncée en juin 2011, le recrutement et la formation des mercenaires étrangers a débuté bien avant.
À bien des égards, l’ASL est un écran de fumée. Les médias occidentaux la présente comme une véritable entité militaire résultant des défections massives des forces gouvernementales.
L’ASL ne constitue pas une entité militaire professionnelle. Il s’agit plutôt d’un réseau informel de brigades terroristes distinctes, composées de nombreuses cellules paramilitaires opérant dans différentes parties du pays.
Chacune de ces organisations opère indépendamment des autres. L’ASL n’exerce pas véritablement de fonctions de commandement et de contrôle, dont la liaison entre ces diverses entités paramilitaires. Ces dernières sont contrôlées par les forces spéciales et les agents du renseignement parrainés par les États-Unis et l’OTAN et intégrés aux rangs des formations terroristes sélectionnées.
Ces forces spéciales sur le terrain (bien entraînées et dont bon nombre sont des employés d’entreprises privées de sécurité) sont régulièrement en contact avec les unités de commandement de l’armée et du renseignement des États-Unis, de l’OTAN et leurs alliés (dont la Turquie). Il n’y a pas de doute que ces forces spéciales intégrées sont elles aussi impliquées dans les attaques soigneusement planifiées et dirigées contre des édifices gouvernementaux, des complexes militaires, etc.
Les escadrons de la mort sont des mercenaires entraînés et recrutés par les États-Unis, l’OTAN, leurs alliés du Conseil de coopération du Golfe et la Turquie. Ils sont supervisés par des forces spéciales alliées (dont les SAS britanniques et les parachutistes français) et des firmes de sécurité privées à contrat avec l’OTAN et le Pentagone...
Le Front Jabhat Al-Nosra
Le Front Jabhat Al-Nosra, responsable de plusieurs attaques à la bombe très médiatisées et qui serait affilié à Al-Qaïda, est décrit comme le groupe de combattant le plus efficace de « l’opposition ». Les opérations d’Al-Nosra, considéré comme un ennemi des États-Unis (figurant sur la liste des organisations terroristes du département d’État), portent néanmoins les empreintes de la formation paramilitaire, des tactiques de terreur et des systèmes d’armes étasuniens. Les atrocités commises contre des civils par Al-Nosra (financé clandestinement par les États-Unis et l’OTAN) sont semblables à celles perpétrées par les escadrons de la mort soutenus par les États-Unis en Irak…etc…etc… »
Benoîte
Il est fort énervant de voir les médias français enfourcher en choeur la même rengaine sans nuances et mensongère concernant la Syrie.Comme si ces mêmes médias lisaient servilement les mêmes instructions venues de ....?
SupprimerQuel est le schéma caché?
Des contradictions commencent à voir le jour , obligatoirement.Ces islamistes combattus au Mali et aidés en Libye et en Syrie ! Le journaliste tué non par les forces loyalistes mais par des insurgés.
A qui profite le crime?
Qui prospère dans le chaos ambiant ?
Bonjour monsieur l'abbé, j'aurais aimé vous contacter par mail, mais n'ayant pas trouvé votre adresse je vous laisse ici mon message.
RépondreSupprimerConnaissez-vous les stupéfiantes prédictions d'une simple paysanne catholique, illettrée de surcroît, dont le procès en canonisation est en cours ; il s'agit de Marie July Jahenny née au 19ème siècle et qui a annoncé des prophéties absolument confondantes, en voici un petit extrait:
« Époque endormie, anesthésiée, par la recherche effrénée du confort et des plaisirs, oublieuse du sens de la vie, de ses devoirs envers Dieu et envers elle-même, époque rêvant à un avenir utopique, qui se révèle être un terrible cauchemar. Qui ne sent le besoin d’un brutal " son de cloche " poux échapper au coma définitif ! Si les hommes dorment, les démons révolutionnaires, eux, travaillent jour et nuit ! Leur oeuvre est souterraine et continue, avec des moments forts. Le principe de l’action subversive est l’installation d’un désordre total, alliant guerres extérieures et guerre civile. »
Par ailleurs, elle annonce la déchristianisation de notre pays et surtout : « la France sera mahomète, niant la divinité du Christ »...
Voici un lien pour mieux connaître cette femme extraordinaire et ses très troublantes prophéties:
http://vincent.detarle.perso.sfr.fr/catho/mariejulie.htm
Merci Armel
RépondreSupprimerSi je puis me permettre , je dirais n'en restons pas à ces prophéties terribles qui semblent bien passe de se réaliser .
En Jésus-Christ Sauveur RIEN n'est écrit ! Il n'y a pas de fatum et de destin inéluctable si ce n'est celui de la Parousie