lundi 19 mars 2012

Saint Joseph 19 mars - Lundi de la quatrième semaine

"Son père et sa mère étaient dans l'admiration des paroles dites à son sujet" (Lc, 2, 33). Voilà toute la vie de Marie et de Joseph rapportée en un mot ; vie non pas de paroles mais d'oraison et d'admiration. Joseph et Marie étaient pleins d'admiration devant cette crèche de l'enfant Jésus, comme les deux chérubins du Propitiatoire et de l'arche sainte qui étendaient leurs ailes l'un vis-à-vis de l'autre, comme dit l'Ecriture (Exode 37). Ces chérubins représentent Marie et Joseph, adorant, contemplant le  nouveau propitiatoire qui est Jésus et révérant sa divinité contenue dans l'arche de son humanité. O nouvel objet d'admiration et pour les anges et pour les hommes !"
Père François Bourgoing, Méditations sur les vérités et excellences de Jésus-Christ notre Seigneur, rééd. Téqui 1934 t. 1 p. 260
Le Père Bourgoing est le deuxième successeur du cardinal de Bérulle (après le Père de Condren) à la tête de l'Oratoire de France. Bossuet a prononcé son oraison funèbre, en expliquant qu'"il était prêtre avant que d'être prêtre", prêtre né en quelque sorte. Cet esprit sacerdotal renvoie à la spiritualité de l'Oratoire, essentiellement christique et donc sacerdotale justement. La manière dont le Père Bourgoing aborde la vie du Christ - avant tout en contemplatif - sa dévotion pour l'Incarnation et jusqu'à son style (avec l'emploi du participe présent : Marie et Joseph adorant, contemplant révérant...) dénote une longue fréquentation de la personne et des écrits du grand cardinal de Bérulle.

Joseph, modèle d'admiration, c'est un angle que l'on trouve rarement pour dire "la dignité de saint Joseph" comme parle Bourgoing. On exalte son silence (j'y reviens), son autorité et son efficacité à la tête de la sainte Famille, son obéissance à l'ordre de Dieu... Mais on ne fait pas attention à ce verset trente-troisième de saint Luc : "Joseph et Marie étaient dans l'admiration..." Sommes-nous capables de cette admiration devant le Mystère de Jésus, Dieu et homme ? Sommes-nous capables d'admirer ce Dieu qui vient à nous en se cachant sous la forme humaine ? Devant la crèche, dit Bourgoing, Marie et Joseph étaient comme deux Chérubins devant le trône de Dieu, coeurs parfaitement purs, capables de voir Dieu dans cet enfant.

Marie et Joseph sont introduits dans le Mystère de l'Incarnation, à travers la maternité virginale de Marie comme aucune créature ne le sera jamais. Ils participent de ce mystère, Joseph par son abstention, Marie par son enfantement. Ils sont mieux placés que quiconque pour REALISER ce qui se passe devant leurs yeux. Quant à Joseph, pour réaliser à quel point son abstention participe au Mystère, il doit associer Marie à Jésus dans une foi absolue. Il est le premier dévot de Marie. Il l'a cru, lorsqu'elle lui a dit sa virginité. Il croit en elle comme il croit en son fils, auquel il a lui-même donné le nom de Jésus, le reconnaissant ainsi pour son fils (Matth. 1, 21).

Pour comprendre son état d'esprit, il faut lire l'Evangile de saint Matthieu comme les exégètes contemporains (Xavier Léon-Dufour, René Laurentin etc.) nous apprennent à le faire, conformément d'ailleurs à la langue grecque. Nous trouvons non pas le doute dont parle Bossuet, mais toute la discrétion de saint Joseph, dont le premier mouvement est de s'effacer devant l'oeuvre de Dieu. Voici le texte relu par les spécialistes - qui nous montre comment dès le début Joseph admire en Marie enceinte l'oeuvre de Dieu : "Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie ton épouse. Certes ce qui s'est accompli en elle vient du Saint Esprit, mais elle enfantera un fils et c'est toi qui lui donneras le nom de Jésus..." Joseph, homme juste, ne veut pas rivaliser avec Dieu et c'est pourquoi il veut quitter Marie et "la répudier en secret". Il a écouté Marie lui raconter l'annonciation et il pense que Dieu n'a pas besoin de lui. Spontanément il s'efface et il admire. Dans le songe que je viens de citer, Dieu le rattrape par les cheveux pour être le père humain de Jésus.

2 commentaires:

  1. Joseph admire, oui, sans doute. Cependant, ne dévirilisons pas Joseph. Car Joseph est efficace, c'est peu dire.

    Figure de Moïse, il évite à l'Agneau pascal d'être massacré par Hérode et de mourir avant que d'avoir accompli Sa Mission, Son destin. Mieux, Joseph Lui fait vivre la Pâque des juifs, l'introduit à l'exode qu'il doit vivre pour vivre en abrégé le destin du peuple auquel Il appartient. Joseph conduit Jésus en Egypte, puis L'en ramène. Dans ce chemin vers l'Egypte et de l'Egypte vers Israël, Joseph, en passant, revit quelque chose du destin du patriarche, son homonyme. Que n'assimile-t-on plus souvent ces deux figures! La figure de Joseph en sortirait grandie pour nous qui avons trop souvent tendance à le voir comme quelqu'un qui subit. Or, jusqu'au cas que Joseph fait des songes le rapproche de Joseph, le patriarche. Et quand le temps est venu, Joseph ramène Jésus et Marie en terre promise, trouvant refuge en gallilée.

    Joseph qui, quoique de descendance davidique, paraît être bien seul. On ne parle guère des rapports qu'il peut avoir entretenus avec sa famille. Joseph qui, vous faites bien de le souligner, donne son nom à Jésus. De sorte que s'opère le Mystère d'une double adoption: c'est sous la condition d'être adopté par Joseph que Jésus peut adopter le genre humain. Et Joseph ne rechigne pas à cette adoption, contrairement à Zacharie à qui il ne suffisait pas d'avoir obtenu qu'elisabeth engendrât en son grand âge: il voulait que cet "enfant du miracle" portât son nom à lui, ce simple grand prêtre, détenteur du privilège de nommer le Dieu Innomable! Joseph n'a aucune prétention de ce genre. Cet enfant n'est pas de lui; dans la confiance, il l'accueille; il fait acte de le noommer; et il ne revendique pas que ce Sauveur s'appelle comme lui. Il lui suffit que son nom à lui, Joseph, soit le signe de la Justice que vient rendre, mais surtout que contient le Sauveur, pour tous les pécheurs qui viendront se confier en Lui!

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  2. Personnellement, je trouve aussi très étrange de déviriliser Joseph ! Cela me semble être un anachronisme historique. Dans une société aussi patriarcale cela ne paraît pas réaliste du tout d’y voir le personnage de Joseph effacé comme un capucin prêt à se retirer du monde ! Au contraire, Dieu l’a certainement choisi pour sa accomplir son rôle de protecteur avec force, courage, détermination et justice!
    Très intéressant aussi le parallèle avec Joseph, le patriarche. Et comme disent les Dupond (et Dupont) « je dirais même plus » !
    Comme dans le dessein de Dieu il n’y a pas de place ni pour le hasard ni pour l’anecdote, Effectivement, en plus d’échapper à Hérode, le Christ non seulement revit quelque chose du destin du peuple juif, comme le fait remarquer justement Julien, mais encore c’est comme s’il allait le chercher dans son histoire, dans ses fondements ( exode, Moïse, les tables de la Loi etc…) La nouvelle alliance va chercher l’ancienne au sens propre ! Et Joseph, père putatif de l’enfant Jésus représente aussi l’ancienne alliance. Il est la figure de tous les patriarches. C’est sur ce terreau, c’est à cette croisée des chemins que commence l’Histoire…
    Benoîte

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