Repris de Minute - 17 mars 2010
Nous célébrons cette année le quatrième centenaire de la mort de Caravage, le grand peintre italien du clair obscur et une exposition à Rome, ajoutée à la publication d’un certain nombre d’ouvrages, rétrospectives en images ou biographies, nous permettent de vérifier que le génie classique de ce jeune bagarreur de 39 ans n’a pas pris une ride.
Moderne Caravage ? On le voit avec son Saint François en méditation, présenté en ce moment à Paris à l’exposition sur les Vanités (61, rue de Grenelle). Il est plus moderne que ses contemporains, plus moderne aussi que ceux qui l’ont copié, les caravagesques, même ceux qui avaient du génie, Georges de La Tour ou Rembrandt. Caravage parvient toujours à nous surprendre et cela est dû non seulement au clair obscur dans lequel se détachent ses personnages (ce clair obscur qui agaçait tant Stendhal lors de son voyage en Italie) mais surtout à la manière dont ses personnages occupent l’espace et à leur naturel. Les pèlerins de Lorette ? Ils ont les pieds sales et cela se voit. La Madeleine ? Même pas besoin de montrer un décolleté plongeant, elle est sobre dans ses attitudes mais – par exemple dans La Mort de la Vierge, tableau que l’on trouve au Louvre – c’est la vivacité de sa douleur qui suffit à nous la désigner. Saint François ? Son vêtement est troué, laissant deviner un corps robuste et un homme qui ne s’en laisse pas conter. Le Triomphe de l’amour ? C’est un Cupidon plus espiègle encore que sensuel dont la nudité défie le spectateur.
Parmi bien d’autres publications, la biographie de Laurent Bolard, parue chez Fayard, permet de bien comprendre le contexte de la vie du peintre. Et d’abord son milieu d’origine, près de Milan, profondément catholique, marqué par la grande personnalité de saint Charles Borromée. Puis les circonstances de son arrivée à Rome, la personnalité de ses protecteurs, la vie de Bohême qu’il mène dans le vieux centre historique, autour de la Via della Scrofa qui n’a pas changé de nom. Enfin l’atmosphère de sa fuite, après qu’il a tué en duel un capitaine de la police du pape, son désir d’être fait chevalier de Malte, les appuis qu’il reçoit à La Valette et puis (après un nouveau meurtre ?) encore l’errance et ce pardon du pape qui arrive au moment où il tombe malade, épuisé.
Les Italiens font bien les choses et pour l’anniversaire de sa mort, ils se préparent à identifier son cadavre dans une fosse commune de Porto Ercole. Pour nous il est temps d’exhumer Caravage de nos souvenirs fanés et de revoir ses toiles, toutes magnifiquement restaurées, en nous plongeant avec Laurent Bolard dans l’atmosphère unique de la Rome des papes. Une chose est sûre : après quatre siècles, Caravage n’a pas fini de nous étonner.
Joël Prieur
Laurent Bolard, Caravage, éd. Fayard, 288 pp. (avec un cahier couleur), 27 euros port compris. Commande à : Minute, 15 rue d’Estrées, 75007 Paris
Nous célébrons cette année le quatrième centenaire de la mort de Caravage, le grand peintre italien du clair obscur et une exposition à Rome, ajoutée à la publication d’un certain nombre d’ouvrages, rétrospectives en images ou biographies, nous permettent de vérifier que le génie classique de ce jeune bagarreur de 39 ans n’a pas pris une ride.
Moderne Caravage ? On le voit avec son Saint François en méditation, présenté en ce moment à Paris à l’exposition sur les Vanités (61, rue de Grenelle). Il est plus moderne que ses contemporains, plus moderne aussi que ceux qui l’ont copié, les caravagesques, même ceux qui avaient du génie, Georges de La Tour ou Rembrandt. Caravage parvient toujours à nous surprendre et cela est dû non seulement au clair obscur dans lequel se détachent ses personnages (ce clair obscur qui agaçait tant Stendhal lors de son voyage en Italie) mais surtout à la manière dont ses personnages occupent l’espace et à leur naturel. Les pèlerins de Lorette ? Ils ont les pieds sales et cela se voit. La Madeleine ? Même pas besoin de montrer un décolleté plongeant, elle est sobre dans ses attitudes mais – par exemple dans La Mort de la Vierge, tableau que l’on trouve au Louvre – c’est la vivacité de sa douleur qui suffit à nous la désigner. Saint François ? Son vêtement est troué, laissant deviner un corps robuste et un homme qui ne s’en laisse pas conter. Le Triomphe de l’amour ? C’est un Cupidon plus espiègle encore que sensuel dont la nudité défie le spectateur.
Parmi bien d’autres publications, la biographie de Laurent Bolard, parue chez Fayard, permet de bien comprendre le contexte de la vie du peintre. Et d’abord son milieu d’origine, près de Milan, profondément catholique, marqué par la grande personnalité de saint Charles Borromée. Puis les circonstances de son arrivée à Rome, la personnalité de ses protecteurs, la vie de Bohême qu’il mène dans le vieux centre historique, autour de la Via della Scrofa qui n’a pas changé de nom. Enfin l’atmosphère de sa fuite, après qu’il a tué en duel un capitaine de la police du pape, son désir d’être fait chevalier de Malte, les appuis qu’il reçoit à La Valette et puis (après un nouveau meurtre ?) encore l’errance et ce pardon du pape qui arrive au moment où il tombe malade, épuisé.
Les Italiens font bien les choses et pour l’anniversaire de sa mort, ils se préparent à identifier son cadavre dans une fosse commune de Porto Ercole. Pour nous il est temps d’exhumer Caravage de nos souvenirs fanés et de revoir ses toiles, toutes magnifiquement restaurées, en nous plongeant avec Laurent Bolard dans l’atmosphère unique de la Rome des papes. Une chose est sûre : après quatre siècles, Caravage n’a pas fini de nous étonner.
Joël Prieur
Laurent Bolard, Caravage, éd. Fayard, 288 pp. (avec un cahier couleur), 27 euros port compris. Commande à : Minute, 15 rue d’Estrées, 75007 Paris
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