J’ai lu hier après-midi, d’une seule traite, très attentivement, ce livre, peu épais mais à la fois dense et lumineux, de l’Abbé Guillaume de Tanoüarn. Le titre m’avait d’emblée intrigué, les premières pages me surprenaient, la suite me captivait.
Au départ, une réflexion de psychologue sur le désir comme centre de l’aventure humaine. Notamment cette phrase superbe sur Marie-Madeleine à qui le père Bruckberger a consacré un de ses ouvrages les plus prenants : « Si on consulte l’Evangile, Marie-Madeleine est le personnage qui unit en une seule destinée les frasques du désir et les élans de la piété, avec, au centre, cette rencontre du Christ, qui a fourni à un immense désir en déshérence son Orient, son Soleil, son rayonnement. »
Les pages qui suivent nous apportent des considérations très pertinentes sur le devenir du désir dans l’esprit humain. Le danger mortel, et mortel pour l’âme, est de s’installer dans « le néant de la satisfaction ». Le désir se meurt alors dans l’ennui dont Bernanos parle comme de « la forme turpide du désespoir ».
Consommation et consumation sont les mots-clés de la réduction matérialiste du désir, celle de l’engourdissement de l’âme, du cheminement vers la mort. Seule la perspective chrétienne du désir préserve l’homme du néant. Le désir de Dieu est le seul dont on se nourrit sans jamais consommer, qui brûle éternellement sans jamais se consumer.
Et c’est là que se place la très poignante méditation de Guillaume de Tanoüarn sur Jonas. L’histoire de ce personnage biblique comme toute celle de l’Ancien Testament, rappelle-t-il avec insistance, ne peut être comprise dans la plénitude de son sens littéral (c'est-à-dire, selon Saint Thomas, le sens allégorique que l’auteur sacré a voulu donner à la lettre de son texte) qu’à la lumière du nouveau Testament.
Il ne s’agit pas d’un conte mythologique invraisemblable narrant l’ingurgitation d’un homme par une baleine qui ne le digère pas et le dégurgite tout vivant. La baleine c’est le Schéol, c’est la Bête dans le langage de l’Ecriture, c’est Satan. Dieu a appelé Jonas à prêcher à Ninive, la ville abominable. Ce dernier, qui aime tant dormir, veut se dérober à cet appel, refuse d’user du don de prophétie que Dieu lui a accordé dans sa « première grâce ». Il s’enfuit pour Tharsis (Cadix ?). Mais Dieu le rattrape. Il lui pardonne sa désobéissance délibérée, le tire du Schéol, l’extirpe de son désir de petit confort, le ramène à la vocation qu’il lui a assigné. Jonas va donc prêcher à Ninive. Avec succès. Et Dieu pardonne alors aux ninivistes qui trouvent la foi et font pénitence. Mais Jonas ne comprend pas ce pardon. Ce qu’il voulait à la rigueur c’est leur annoncer le châtiment. L’abbé de Tanoüarn cite ici à propos cette définition de l’intégriste par André Frossard : « un homme qui veut faire la volonté de Dieu, que Dieu le veuille ou non ». Jonas, le nationaliste étroit, ne saisit pas ce qui doit lui apparaître comme une révoltante incartade de ce Dieu qui ne devrait être que pour Israël. Alors il s’enfermera à nouveau dans sa léthargie, dans un sommeil qui est refus du désir de Dieu. Et nous lisons : « Le désir absent ? Mais c’est l’enfer… » Et Tanoüarn d’appuyer cela par l’intuition de Bernanos : « L’enfer, c’est le froid ».
Je n’ai pu me dispenser de cette recension, à chaud, insatisfaisante je le pèse bien, mais enthousiaste. J’ai retrouvé dans ces pages de l’abbé de Tanoüarn les formes, les grands accents, la virilité, la prise, comme à bras le corps, de la vigueur évangélique qui est la caractéristique des meilleures œuvres du Père Bruckberger. L’Evangile ce n’est pas du sentimentalisme, ce n’est pas de la guimauve. C’est Dieu qui désire le salut de l’homme et l’appelle au désir de Dieu.
Puissent ces lignes susciter le désir de lire ce livre.
Au départ, une réflexion de psychologue sur le désir comme centre de l’aventure humaine. Notamment cette phrase superbe sur Marie-Madeleine à qui le père Bruckberger a consacré un de ses ouvrages les plus prenants : « Si on consulte l’Evangile, Marie-Madeleine est le personnage qui unit en une seule destinée les frasques du désir et les élans de la piété, avec, au centre, cette rencontre du Christ, qui a fourni à un immense désir en déshérence son Orient, son Soleil, son rayonnement. »
Les pages qui suivent nous apportent des considérations très pertinentes sur le devenir du désir dans l’esprit humain. Le danger mortel, et mortel pour l’âme, est de s’installer dans « le néant de la satisfaction ». Le désir se meurt alors dans l’ennui dont Bernanos parle comme de « la forme turpide du désespoir ».
Consommation et consumation sont les mots-clés de la réduction matérialiste du désir, celle de l’engourdissement de l’âme, du cheminement vers la mort. Seule la perspective chrétienne du désir préserve l’homme du néant. Le désir de Dieu est le seul dont on se nourrit sans jamais consommer, qui brûle éternellement sans jamais se consumer.
Et c’est là que se place la très poignante méditation de Guillaume de Tanoüarn sur Jonas. L’histoire de ce personnage biblique comme toute celle de l’Ancien Testament, rappelle-t-il avec insistance, ne peut être comprise dans la plénitude de son sens littéral (c'est-à-dire, selon Saint Thomas, le sens allégorique que l’auteur sacré a voulu donner à la lettre de son texte) qu’à la lumière du nouveau Testament.
Il ne s’agit pas d’un conte mythologique invraisemblable narrant l’ingurgitation d’un homme par une baleine qui ne le digère pas et le dégurgite tout vivant. La baleine c’est le Schéol, c’est la Bête dans le langage de l’Ecriture, c’est Satan. Dieu a appelé Jonas à prêcher à Ninive, la ville abominable. Ce dernier, qui aime tant dormir, veut se dérober à cet appel, refuse d’user du don de prophétie que Dieu lui a accordé dans sa « première grâce ». Il s’enfuit pour Tharsis (Cadix ?). Mais Dieu le rattrape. Il lui pardonne sa désobéissance délibérée, le tire du Schéol, l’extirpe de son désir de petit confort, le ramène à la vocation qu’il lui a assigné. Jonas va donc prêcher à Ninive. Avec succès. Et Dieu pardonne alors aux ninivistes qui trouvent la foi et font pénitence. Mais Jonas ne comprend pas ce pardon. Ce qu’il voulait à la rigueur c’est leur annoncer le châtiment. L’abbé de Tanoüarn cite ici à propos cette définition de l’intégriste par André Frossard : « un homme qui veut faire la volonté de Dieu, que Dieu le veuille ou non ». Jonas, le nationaliste étroit, ne saisit pas ce qui doit lui apparaître comme une révoltante incartade de ce Dieu qui ne devrait être que pour Israël. Alors il s’enfermera à nouveau dans sa léthargie, dans un sommeil qui est refus du désir de Dieu. Et nous lisons : « Le désir absent ? Mais c’est l’enfer… » Et Tanoüarn d’appuyer cela par l’intuition de Bernanos : « L’enfer, c’est le froid ».
Je n’ai pu me dispenser de cette recension, à chaud, insatisfaisante je le pèse bien, mais enthousiaste. J’ai retrouvé dans ces pages de l’abbé de Tanoüarn les formes, les grands accents, la virilité, la prise, comme à bras le corps, de la vigueur évangélique qui est la caractéristique des meilleures œuvres du Père Bruckberger. L’Evangile ce n’est pas du sentimentalisme, ce n’est pas de la guimauve. C’est Dieu qui désire le salut de l’homme et l’appelle au désir de Dieu.
Puissent ces lignes susciter le désir de lire ce livre.
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