Pourquoi je m'acharne sur ce pauvre Barabbas, qui, il y a deux mille ans, a sauvé sa peau dans un procès sordide , alors que nous venons de célébrer la résurrection de Jésus et sa victoire sur la mort, et que les cérémonies, cette année au Centre Saint Paul, nous ont apporté tant de paix ?
Ce sont les hypothèses de François Miclo sur le Blog Le Causeur qui en constituent l'occasion. François a découvert une curiosité dans l'Evangile. Et avec beaucoup d'assurance, il soutient la thèse de Barabbas sosie du Christ, thèse déjà soutenue avant la 2ème Guerre Mondiale par Paul Louis Couchoud, qui, lui, va jusqu'au bout et considère que Jésus n'est pas un personnage historique. Miclo, c'est Barabbas qu'il remet en question : il y a un début à tout. Le problème ? Cette mise en question qui passe pour érudite ne tient pas. C'est ce que je voudrais montrer maintenant, non de ma propre autorité, car sur ce chapitre, je ne suis pas un spécialiste, mais en me contentant (pour moi aussi c'est un début) d'une petite incursion dans ma bibliothèque personnelle.
Je ne prétends être ici qu'un transmetteur d'érudition.
Je suis d'abord allé voir le Commentaire de l'Evangile de Matthieu par le Père Buzy, un savant estimable et catholique convaincu. Voici sa trouvaille : "Barabbas (fils du père) était alors un nom très fréquent. Le traité berakoth raconte l'histoire de quelqu'un qui se rend au cimetière et appelle un mort : "je cherche Abbas. Les morts répondirent : il y a beaucoup d'Abbas par ici. Il cria alors : je cherche Abba bar Abba. Ils répondirent : il y a aussi beaucoup d'Abba bar Abba ici. Il cria : je cherche Abba bar Abba, père de Samuel, où est-il ?" - L'histoire est étrange. Elle montre bien que le patronyme Barabbas était très courant... Il y a ici un sens profond une sorte de prophétie cachée dans ce jugement de Barabbas. Mais rien qui indique un improbable sosie du Christ.
Le Père Lagrange, quant à lui, dans son Commentaire de saint Matthieu, s'intéresse au prénom Yoshua, donné à Barabbas par certaines versions et il souligne, en comparant des groupes de manuscrits (ce qui dépasse mes compétences) que l'on ne peut avoir aucune certitude sur l'authenticité de ce prénom : ce prénom est-il un ajout à prétention théologique ? A-t-il été ôté du texte original par respect pour Jésus ? Qui peut le savoir ? En tout cas les manuscrits les plus importants ne le comportent pas.
Origène s'en est saisi, tout en remarquant qu'il ne se trouvait pas partout dans la traduction manuscrite. dans ses œuvres, Origène, ce grand savant, si proche de l'origine puisqu'il meurt vers 250, évolue. Ici, le fameux auteur des Hexaples (juxtaposition de six versions du texte biblique) estime que l'on ne peut pas être sûr que Barabbas s'appelait bien Yoshua. Et là il se sert de ce prénom pour en tirer toute une théologie. Bref, il semble tenir le problème pour négligeable dans tous les cas.
Et c'est à la .f
Et c'est aussi le verdict de cet exégète ultra critique qu'est le Père Raymond Brown. A la page 904 de La mort du Messie, de Gethsémani au Tombeau, Encyclopédie de la Passion du Christ (Bayard 2005) l'exégète américain écrit après avoir passé toutes les hypothèses en revue, dont celle du sosie qu'il attribue à Couchoud : "Plutôt que des théories aussi fantaisistes, il faut beaucoup moins d'imagination pour poser en principe que historiquement, un homme réel portant le nom de fils d'Abba et le prénom de Jésus ait été arrêté durant une émeute à Jérusalem et finalement épargné par Pilate".
Je donne toutes ces références sans prétendre aucunement être exhaustif pour montrer la richesse de la tradition interprétative sur tout sujet tiré de l'Evangile.
Et je pense en ce moment à mon ami Alain de Benoist, qui voulait montrer, lui, la fausseté de la révélation chrétienne, en démontrant que, selon le texte même de l'Evangile, Marie avait eu d'autres enfants que le Christ. Il en a sorti d'abord je crois pour le Bulletin de la Société Ernest Renan, puis, dans une deuxième version corrigée pour Nouvelle Ecole, un article énorme (qu'il m'a d'ailleurs dédié en souvenir de nos conversations). Cet article n'est pas convainquant. Il se heurte lui aussi aux homonymies très fréquente à cette époque : je le dis d'un mot et sans développer mais Mc 15, 40 suffit à expliquer Marc 6, 3 et les quatre (autres) enfants que l'on prête à la Vierge. Mais ceci est une autre affaire.
Ce qui est frappant, en tout état de cause, c'est l'extrême résistance de ce texte en quatre versions authentiques qui est l'Evangile. Plus qu'aucun autre texte au monde il a été saucissonné, analysé, tourné et retourné. Mais il est toujours là, aussi jeune, aussi vivant, aussi irritant qu'au premier jour... L'avez-vous lu ?
Cette résistance, c'est ce que j'appelle depuis 25 ans la preuve par l'Evangile.
Ce sont les hypothèses de François Miclo sur le Blog Le Causeur qui en constituent l'occasion. François a découvert une curiosité dans l'Evangile. Et avec beaucoup d'assurance, il soutient la thèse de Barabbas sosie du Christ, thèse déjà soutenue avant la 2ème Guerre Mondiale par Paul Louis Couchoud, qui, lui, va jusqu'au bout et considère que Jésus n'est pas un personnage historique. Miclo, c'est Barabbas qu'il remet en question : il y a un début à tout. Le problème ? Cette mise en question qui passe pour érudite ne tient pas. C'est ce que je voudrais montrer maintenant, non de ma propre autorité, car sur ce chapitre, je ne suis pas un spécialiste, mais en me contentant (pour moi aussi c'est un début) d'une petite incursion dans ma bibliothèque personnelle.
Je ne prétends être ici qu'un transmetteur d'érudition.
Je suis d'abord allé voir le Commentaire de l'Evangile de Matthieu par le Père Buzy, un savant estimable et catholique convaincu. Voici sa trouvaille : "Barabbas (fils du père) était alors un nom très fréquent. Le traité berakoth raconte l'histoire de quelqu'un qui se rend au cimetière et appelle un mort : "je cherche Abbas. Les morts répondirent : il y a beaucoup d'Abbas par ici. Il cria alors : je cherche Abba bar Abba. Ils répondirent : il y a aussi beaucoup d'Abba bar Abba ici. Il cria : je cherche Abba bar Abba, père de Samuel, où est-il ?" - L'histoire est étrange. Elle montre bien que le patronyme Barabbas était très courant... Il y a ici un sens profond une sorte de prophétie cachée dans ce jugement de Barabbas. Mais rien qui indique un improbable sosie du Christ.
Le Père Lagrange, quant à lui, dans son Commentaire de saint Matthieu, s'intéresse au prénom Yoshua, donné à Barabbas par certaines versions et il souligne, en comparant des groupes de manuscrits (ce qui dépasse mes compétences) que l'on ne peut avoir aucune certitude sur l'authenticité de ce prénom : ce prénom est-il un ajout à prétention théologique ? A-t-il été ôté du texte original par respect pour Jésus ? Qui peut le savoir ? En tout cas les manuscrits les plus importants ne le comportent pas.
Origène s'en est saisi, tout en remarquant qu'il ne se trouvait pas partout dans la traduction manuscrite. dans ses œuvres, Origène, ce grand savant, si proche de l'origine puisqu'il meurt vers 250, évolue. Ici, le fameux auteur des Hexaples (juxtaposition de six versions du texte biblique) estime que l'on ne peut pas être sûr que Barabbas s'appelait bien Yoshua. Et là il se sert de ce prénom pour en tirer toute une théologie. Bref, il semble tenir le problème pour négligeable dans tous les cas.
Et c'est à la .f
Et c'est aussi le verdict de cet exégète ultra critique qu'est le Père Raymond Brown. A la page 904 de La mort du Messie, de Gethsémani au Tombeau, Encyclopédie de la Passion du Christ (Bayard 2005) l'exégète américain écrit après avoir passé toutes les hypothèses en revue, dont celle du sosie qu'il attribue à Couchoud : "Plutôt que des théories aussi fantaisistes, il faut beaucoup moins d'imagination pour poser en principe que historiquement, un homme réel portant le nom de fils d'Abba et le prénom de Jésus ait été arrêté durant une émeute à Jérusalem et finalement épargné par Pilate".
Je donne toutes ces références sans prétendre aucunement être exhaustif pour montrer la richesse de la tradition interprétative sur tout sujet tiré de l'Evangile.
Et je pense en ce moment à mon ami Alain de Benoist, qui voulait montrer, lui, la fausseté de la révélation chrétienne, en démontrant que, selon le texte même de l'Evangile, Marie avait eu d'autres enfants que le Christ. Il en a sorti d'abord je crois pour le Bulletin de la Société Ernest Renan, puis, dans une deuxième version corrigée pour Nouvelle Ecole, un article énorme (qu'il m'a d'ailleurs dédié en souvenir de nos conversations). Cet article n'est pas convainquant. Il se heurte lui aussi aux homonymies très fréquente à cette époque : je le dis d'un mot et sans développer mais Mc 15, 40 suffit à expliquer Marc 6, 3 et les quatre (autres) enfants que l'on prête à la Vierge. Mais ceci est une autre affaire.
Ce qui est frappant, en tout état de cause, c'est l'extrême résistance de ce texte en quatre versions authentiques qui est l'Evangile. Plus qu'aucun autre texte au monde il a été saucissonné, analysé, tourné et retourné. Mais il est toujours là, aussi jeune, aussi vivant, aussi irritant qu'au premier jour... L'avez-vous lu ?
Cette résistance, c'est ce que j'appelle depuis 25 ans la preuve par l'Evangile.
C'est exprès que vous n'évoquez pas le "Jésus de Nazareth" de J. Ratzinger ?!
RépondreSupprimerEn citant M. l'Abbé :"Mc 15, 40 suffit à expliquer Marc 6, 3 et les quatre (autres) enfants que l'on prête à la Vierge."
RépondreSupprimerPar rapport au supra, une question rencontrée fréquemment : cela changerait-il quelque chose à notre vénération pour Notre-Dame si Marie avait eu d'autres enfants après Jésus ? La plupart des personnes (catholiques) interrogées répondent "non" (test effectué lors d'une retraite à Lourdes). La grande majorité (100% moins une personne !) ont répondu que la virginité de Marie n'avait aucune importance, ne changeait absolument rien à la vénération qui lui est portée.
Pourriez-vous expliquer ce point ? En quoi le fait de rester vierge (plutôt que de vivre un mariage heureux avec Joseph, tout en élevant Jésus, le premier-né) rend Marie meilleure? N'accordons-nous pas une trop grande importance à cette question de virginité (en particulier et en général aussi)?
Une femme (ou un homme) est-elle vraiment meilleur(e) de coeur, de l'âme, de l'esprit n'ayant pas de relation amoureuse dans sa vie ? Généralement on observe le contraire : frustrations, amertumes, caractère aigri, tendence à la médisance, à l'avarice etc. Ceci y compris chez les époux qui ont cessé d'avoir une vie de couple dans leur mariage (plus que l'on ne pense!), donc la "chasteté" ici, plutôt que la virginité, mais sur le fond cela revient au même. On n'est pas meilleur.
Par contre devient-on "pire" ayant des relations amoureuses avec l'autre ? En quoi aimer Joseph aurait-il entaché Marie ? J'avoue que cette question de la virginité, de la chasteté dépasse nombreux d'entre nous car elle n'est point en corrélation avec les commandements de Dieu (le 6 & 9 ne portent que sur le "vol" de l'époux/se d'un autre, c'est ce vol, cette convoitise de ce qui est à autrui qui sont visés, plutôt que le fait en soi ) ni en corrélation avec la bonté dans la vie en général. Souvent on a l'impression que les "chastes", parce qu'ils sont "chastes" et donc ne commettent pas un des 7 péchés cardinaux, se croient autorisés d'aller allégrement dans les six autres ! Et encore, il n'est point question de luxure ici (ce n'est pas une "relation amoureuse"), mais de réfléchir sur cette portée sur le piédestal de la virginité, et, par extension, de la chasteté, alors que l'on peut être vierge ou chaste et... absolument abominable dans la vie, car ni la virginité ni la chasteté n'apportent ni la bonté, ni l'intelligence,ni le discernement, on aurait plutôt l'impression qu'elles endurcissent le coeur
(il n'est ici bien entendu question que des laïques, les prêtres ont la grâce qui les met à l'abri de cet endurcissement). Merci à M.l'Abbé de nous éclairer.