jeudi 10 mars 2011

Billet de Carême 2 Jeudi après les cendres

"Seigneur, je ne suis pas digne que vous veniez sous mon toit, mais dites seulement une parole et mon serviteur sera guéri" (Matth. 8, 7)

Au seuil de ce Carême, l'Eglise nous donne l'exemple du centurion et de sa foi intrépide. Ce personnage, membre de l'armée d'occupation, demande à Jésus d'opérer une guérison à distance - "Je ne suis pas digne que vous veniez sous mon toit" - parce qu'il comprend que celui auquel il s'adresse et qu'il appelle "Seigneur" agit sans être limité par le cadre étroit de l'espace et du temps et que, en tout état de cause, les forces de la nature lui obéissent. "C'est comme mes soldats vis à vis de moi, explique le militaire : je dis à l'un va et il va, à l'autre viens et il vient, à un troisième : fais ceci et il le fait".

Nous devons répéter cette parole, la prendre à notre compte : "Seigneur, je ne suis pas digne, mais dites seulement une parole !"

Ce ne sont pas nos oeuvres, ce ne sont pas nos bonnes résolutions qui nous rendront dignes de Dieu, c'est sa grâce, c'est le don qu'il nous fait de sa vie et de sa force. Poussons le paradoxe pour mieux le faire comprendre : le Christ n'est pas d'abord un exemple ou un modèle, il est, avant toutes choses, "l'auteur et le consommateur de notre foi" comme dit l'Epître aux Hébreux. Il est celui qui nous donne le salut.

Soyons optimistes : notre salut est toujours déjà acquis par Jésus et en Jésus. Comment pouvons-nous nous unir personnellement à ce salut ? Par des efforts surhumain ? En serrant les dents ? En répétant : jugulaire ! Jugulaire ! Non : par la foi. Et voilà pourquoi l'Eglise nous donne l'exemple du centurion. C'est sa foi qui change tout. C'est par sa foi qu'il obtient l'intervention de la Puissance de Dieu.

Elle est si fragile notre foi à nous. Il nous faut la nourrir. Il nous faut accepter de méditer, de réfléchir, non pas pour calculer un profit, non pas pour démontrer une idée, mais pour progresser vers Dieu par la foi. Dans son Commentaire des Noms divins, saint Thomas (dont nous avons célébré la fête lundi dernier) à cettre très belle définition de la foi : "La foi est une sorte de positionnement de nous-mêmes en Dieu". Spinoza, plus concret peut-être, nous enseigne à "voir les choses du point de vue de l'éternité" ; et en tant que chrétien j'ajouterai : en nous souvenant que l'éternité a un visage, celui de Notre Seigneur Jésus Christ.

L'expression "Notre Seigneur Jésus Christ" n'est pas une fleur de prédicateur. C'est une expression utilisée par saint Paul pour désigner celui auquel, sur le Chemin de Damas, il a donné sa foi.

Nous voulons apprendre à méditer pendant ce carême, à méditer pour augmenter la conscience que nous avons de notre foi. Voici un exercice pratique, facile et efficace (essayez vous verrez). Peut-être aujourd'hui pourrions nous simplement nous approprier cette expression : "Notre Seigneur Jésus Christ", en répétant la parole du Centurion, que nous nous appliquerons à nous-même : "Je ne suis pas digne que vous entriez chez moi, mais dites seulement une parole et votre serviteur sera guéri".

Nous la prononçons avant chacune de nos communions. Nous pouvons bien la répéter pour vivre, à un moment ou à un autre au cours de cette journée, même fugitivement une véritable communion spirituelle. Notre communion d'esprit à Notre Seigneur Jésus Christ pour que ce carême soit fructueux.

3 commentaires:

  1. Bonjour Monsieur l'Abbé,
    Je trouve des relents très luthériens à vos 4ème et 5ème alinéas ! Notez bien que je n'y vois pas d'objections : Luther n'avait pas tort sur toute la ligne. En tout cas pas sur la question du salut.
    Je vous souhaite un bon et saint Carême.

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  2. J'ai fait cela, j'ai répété cette invocation et me la suis appropriée. Cela m'a beaucoup fait réfléchir (on peut dire : méditer). J'ai découvert beaucoup de choses, cela fait grandir dans l'amour de Jésus, NOTRE Seigneur, le Trésor de nos vies, qui nous a été donné, confié, par le Père, comme l'un de nous...et qu'en avons-nous fait, nous, devenus ses frères et donc adoptés comme fils, autres Christ, par le Père ? Oui qu'avons-nous fait de notre Frère par excellence ?
    Et je suis allée retrouver cette Parole dans He 13, 20.
    Pas fini de l'approfondir!
    Merci pour votre initiative.

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  3. Magnifique initiative que la vôtre de nous faire passer le carême ensemble! Il est si difficile de comprendre la portée et le sens profonds du carême. Et pourtant, rien de tel qu'un parcours de carême. Sans doute, nous faut-il entrer dans un carême des commentaires. Aussi serai-je bref, m'abstiendrai-je de mettre mon grain de sel tous les jours et ne vous dirai-je pour aujourd'hui que ceci:

    dans la liturgie traditionnelle, il y a une traduction qui a toujours porté "haut le coeur" du priant qui est en moi, qui la reçois, plein de reconnaissance:
    "seigneur, je ne suis pas digne que Tu (ou que vous) entres (ou entriez) sous mon toit; mais dis seulement une parole et mon âme sera guérie." Pas moi, plus que moi, plus que mon "ego", mon âme!

    Mon âme peut-elle être malade? Mon amie posa un jour la question à un médecin chrétien, bien connu de beaucoup d'entre nous, au moins radiophoniquement: le Dr Plantey. Il lui répondit que non. Sans doute avait-il raison sur un plan spirituel: une âme ne peut pas être malade. Elle ne peut pas être malade en ce sens que le péché ne peut pas l'affecter au point d'être séparée de Dieu, si pécheresse soit la chair, qui tend à incliner notre coeur à ce que nous faisons. Pourtant, mon impression est que, si notre âme ne peut être malade sur un plan spirituel, elle peut l'être sur un plan psychique, c'est même une évidence, le psychique venant alors affecter le spirituel: nous n'arrivons plus à prier, ou tout simplement, nous n'arrivons pas à faire le bien que nous souhaiterions.
    "Seigneur, Toi qui viens me visiter, moi qui ne saurais en être digne, je t'en prie, guéris mon âme! Je te parle de mon âme, car aujourd'hui, dans ce carême, Tu veux me rencontrer, me recentrer à l'intime de moi-même. Et pourtant, Te parlant de mon âme, je suis loin de ne penser, de ne prier que pour moi!"

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