L’écrivain Witold Gombrowicz n’aimait pas les poèmes, il l’a dit fréquemment, il a même écrit un essai sur le sujet: «les vers me déplaisent et même m'ennuient un peu»! «le rythme et la rime m'endorment»! Il l’a fait dire à ses personnages – par exemple dans Ferdydurke, la scène où le professeur enseigne que «nous aimons Juliusz Slowacki et sommes enthousiasmés…» mais l’élève proteste: «Je ne suis pas du tout enthousiasmé! Je ne peux pas en lire plus de deux strophes…». Hélas à chaque fois il y avait des gens pour expliquer que bien plus sûrement Gombrowicz visait la mauvaise poésie. Il protestait, mettait les points sur les ‘i’… rien n’y faisait. C’est que ne pas s’émouvoir des grands poètes nationaux eut été un blasphème – la solution était donc de croire que Gombrowicz les aimait, fut-ce à son insu, et peu importe qu’il écrive que «la messe poétique a lieu dans le vide le plus complet».
Nous voyons un peu la même chose ces temps-ci. Quoi qu’un artiste fasse, et quoiqu’il puisse éventuellement revendiquer, il se trouvera une ‘bonne âme’ pour l’interpréter dans un sens autre, par exemple… christique. Il y avait eu quelques soutiens pour Piss Christ. Il y a eu le soutien de Mgr d’Ornellas au ‘Concept du Visage…’ de Castelucci («une telle œuvre ne peut être jugée blasphématoire», d'autant qu'elle est l’occasion d’«entendre monter dans son cœur les paroles mêmes des Écritures»). Bien, laissons Castelucci faire. Tout de même on pouvait penser qu’avec Golgota Picnic on atteignait la limite («l’avis est unanime»), le Cardinal Vingt-Trois lui-même estimant que ce spectacle «insulte la personne du Christ en croix».
Eh bien non. C’était compter sans les explications de La Croix, le journal officieusement officiel de la Conférence des Évêques de France. J’y apprends que Golgota Picnic peut certes «heurter, choquer», mais enfin seule une «poignée de manifestants» l’estime blasphématoire – et encore: «sans l’avoir vue» (et pan sur les intégroïdes!) Il s’agit bien plutôt, nous dit La Croix, d’«un Christ et [d’] une Passion regardés sur le mode de la protestation et de la dénonciation». Une remise en cause par exemple de la ‘consommation’, qui se termine en un grand «moment de paix et, pourquoi pas, de méditation». Consommatum est? Bigre. J’imagine la stupeur de l’artiste qui voudrait blasphémer, voir son désarroi. Qu’il pisse qu’il chie ou qu’il vomisse Jésus: rien n’y fait.
Nous voyons un peu la même chose ces temps-ci. Quoi qu’un artiste fasse, et quoiqu’il puisse éventuellement revendiquer, il se trouvera une ‘bonne âme’ pour l’interpréter dans un sens autre, par exemple… christique. Il y avait eu quelques soutiens pour Piss Christ. Il y a eu le soutien de Mgr d’Ornellas au ‘Concept du Visage…’ de Castelucci («une telle œuvre ne peut être jugée blasphématoire», d'autant qu'elle est l’occasion d’«entendre monter dans son cœur les paroles mêmes des Écritures»). Bien, laissons Castelucci faire. Tout de même on pouvait penser qu’avec Golgota Picnic on atteignait la limite («l’avis est unanime»), le Cardinal Vingt-Trois lui-même estimant que ce spectacle «insulte la personne du Christ en croix».
Eh bien non. C’était compter sans les explications de La Croix, le journal officieusement officiel de la Conférence des Évêques de France. J’y apprends que Golgota Picnic peut certes «heurter, choquer», mais enfin seule une «poignée de manifestants» l’estime blasphématoire – et encore: «sans l’avoir vue» (et pan sur les intégroïdes!) Il s’agit bien plutôt, nous dit La Croix, d’«un Christ et [d’] une Passion regardés sur le mode de la protestation et de la dénonciation». Une remise en cause par exemple de la ‘consommation’, qui se termine en un grand «moment de paix et, pourquoi pas, de méditation». Consommatum est? Bigre. J’imagine la stupeur de l’artiste qui voudrait blasphémer, voir son désarroi. Qu’il pisse qu’il chie ou qu’il vomisse Jésus: rien n’y fait.
Je me suis toujours demandé pourquoi ce journal profondément anti-chrétien conservait toujours pour nom le symbole de ce qu'il abhorre.
RépondreSupprimerMême les athées SAVENT que ce journal est anti-chrétien, alors pourquoi conserver ce nom qui ne sert même plus à leurrer qui que ce soit ?
S'il doit n'en rester qu'un à voir de l'adoration là où il y a blasphème, ce sera celui-là, celui qui s'appelle "La Croix".
Océane : bigre, que serait-ce si vousn'étiez pas pacifique.
RépondreSupprimerJe pense que vou spoussez le bouchon un peu loin.
Dézinguer un journal pour un seul article contestable, c'est jeter le bébé avec l'éau du bain.
Bigre bigre si je lsi Océane et Anonyme, à quel Saint me vouer ?
RépondreSupprimerJ'ai été sur le site du diocèse de Rennes où Mgr D'Ornellas s'explique dans une vidéo avec un aumônier d'étudiants, de Rennes dont le look semble sorti tout droit sorti d'un livre de Maurice Clavel des années 1975. (Aumônier d’étudiants qui fait par ailleurs un éloge dithyrambique de la pièce sans en indiquer l’odeur, dans un style proche des commentaires de galeries d’art contemporain, où le procès d’intention favorable abolit tout esprit critique)
RépondreSupprimerPremièrement, comme cela a été déjà expliqué ici, comment l'archevêque peut –il juger du caractère chrétien d’une pièce sur les bonnes intentions de l'auteur Castelluci, (ben voyons, le bon apôtre !) Ensuite à la fin, l’archevêque semble admettre qu'on aurait pu, pour des âmes simplettes, sans doute, avoir été choqué et demande alors de pardonner au nom d'un christianisme qui pardonne tout;
Je n'ai pas envie de polémiquer avec un évêque mais quelle confusion épiscopale. (D’ailleurs la qualité d’évêque ne rend pas infaillible pour la critique, cela semble évident !)
Par exemple, si un de mes élèves se conduit mal, je ne lui pardonne pas, non, je m'arrange pour l'empêcher de nuire, parfois physiquement si besoin est! (en cas d'agression physique ou autre...) Je lui pardonne après, une fois le calme revenu. et qu’il ait été mis devant ses responsabilités.
Si vraiment tel auteur insulte ou scatologise la figure du Christ, je n'ai pas à pardonner à la place du Christ, par avance et automatiquement. Quelle confusion ! Ensuite, si je peux, en tant que chrétien ou même agnostique protester ou l'empêcher de le faire par les moyens dont je dispose légalement ou pour lui montrer qu’il le fait contre ma volonté et mon financement, rendu obligatoire par les subventions publique. A-t-on encore le droit d’avoir une opinion argumentée ou non et se protester contre l’usage que l’on fait de notre argent ?
Bien sûr il ya aura un moment où je lui pardonnerai la peine qu'il m' fait personnellement mais cela ne m'empêche pas d'agir et de remettre les pendules à l’heure.
Nouveau slogan épiscopal de Rennes: pardonné, avant d'agir légitimement, sans demander raison à nos persécuteurs de leurs actes Ce n'est pas chrétien.
Les chrétiens ont toujours eu tendance à sauver les gens malgré eux.
RépondreSupprimerJulien, vous n'êtes pas obligé de vous sauver, de vous laisser sauver, et si vous voulez vous damner, c'est votre choix et votre responsabilité. Faites-donc !
RépondreSupprimerCeci dit, je trouve que ce petit article est plein d'humour et le le partage sur ma très modeste page facebookienne, merci.
Je me demande pourquoi toutes ses polémiques pour des représentations théâtrales qui ne valent pas tripette.
RépondreSupprimerChose curieuse, les attaques venant des milieux intégristes interviennent au moment des dscussions entre le Saint-Siège et la FSSPX.
Est-ce que certains ne voudraient pas faire capoter tout éventuel accord entre les parties prenantes en raidissant les Evêques qui sont contraints de condamner des manifestations violentes et en faisant monter les (derniers) progressistes au filet.
Je ne comprends d'ailleurs pas les Evêques qui paraissent incapables d'adopter une position unie. C'est la qu'on voit combien une personnalité comme le regretté Cardinal Lustiger nous manque.
La Croix ne fait que suivre les "explications" - "arguments spécieux pour justifier l'injustifiable" (Mgr Brincard) - de la Note signée par Mgr Wintzer au nom de l'Observatoire de la Culture. A la lecture de ce texte, toute oeuvre est interpellation et doit être bénie d'avance si j'ai bien compris. L'évêque du Puy, pas plus que celui de Vannes, ne sont de cet avis et je les suis bien volontiers.
RépondreSupprimerMon collègue F. Boespflug a donné par deux fois des éclairages bienvenus qui ne cautionnent pas l'accueil sans discernement de toute provocation "artistique". Le cardinal Ravasi, que cite la Note de Mgr Wintzer en détournant le sens obvie de la citation, rejette de même l'approbation a priori de "l'art contemporain", au sens idéologique du mot. A la différence notable de Mgr Rouet qui dans un livre qui avait fait scandale approuvait le Piss Christ, certains s'en souviendront.
Le clivage entre catholiques et entre évêques sur l'approbation d'office de "l'art contemporain" sous prétexte de "dialogue" avec le monde de la culture n'est pas anodin. Il fait ressortir l'extrême ambiguïté du mot "dialogue", utilisé par les catholiques néo-libéraux comme un ralliement sans condition à la Modernité et à son anomie. C'est tout l'enjeu de la "Nouvelle évangélisation" : sera-t-elle encore une évangélisation ou se bornera-t-elle à saluer tout ce qui est "nouveau" ? Accepte-t-on les soins palliatifs (ex. les prêtres libéraux autrichiens et rouennais) ou préfère-t-on combattre le mal ? Tel est l'enjeu et il dépasse largement les 2 pièces incriminées. Chacun le pressent d'ailleurs très bien.
Je reprends mon idée exprimée dans mon message de 20:55.
RépondreSupprimerMa position est confortée par l'article de Golias selon lequel 98% des membre de la FSSPX seraient d'accord pour rejeter l'accord avec le Saint-Siège (chiffre exagéré, je dirais aux alentours de 60%).
L'argument des ultras de la FSSPX me semble celui-ci : comment voulez-vous que nous puissions dialoguer avec des gens favorables aux blasphémateurs alors que nous sommes les seuls défenseurs du catholicisme.
Le piège diabolique est armé et, bien entendu, tout le monde va tomber dans le panneau.
C'est le même système que les intégristes musulmans qui dénigrent Charlie-Hebdo et consorts pour mieux refuser tout expèce de dialogue et rejeter les musulmans modérés qui sont l'immense majorité des musulmans. J'ajoute que les musulmans ont aussi leurs "anticléricaux" qui rejettent toute expèce de religion et se proclament violemment athées.
Bref chez les chrétiens comme chez les musulmans les extrèmes nourissent les extrèmes.
Sinon à quoi rime tout ce tintouin pour des navets de dernière zone que la plus minable des tournées théatrales de basse-bretagne refuserait d'interpréter, ne serait-ce que par crainte de manquer de spectateurs. Je vous le demande : qui serait assez idiot pour mettre 30 ou 40 € dans des représentations pareilles.
Enfin, est-ce respecter les acteurs que de leur faire interpréter des rôles pareils ?
Il est vrai qu'en ce moment nous avons un bon vaudeville (certains diraient une pantalonnade) avec "Eva et François en pédalo".
Anisvert, Anisvert! La drôle de Nathalie que
RépondreSupprimervous faites! Que je veuille me damner, moi? Je crois que la Rédemption est attractive, mais qu'elle est conditionnée par la liberté de celui que Dieu candidate.
Ma réaction est partie d'un fait, que je vous narrerai aussi discrètement qu'il est possible.
Mon frère, qui est documentariste, comme je l'ai signalé ailleurs, a tourné un documentaire sur "la poésie contemporaine". Dans ce cadre, il a interrogé une des éminences grises performeuses et vocifératrices du centre International de Poésie de Marseille (ça va comme ça, ça vous met sur la voie?)
Il avait voulu faire de cet athée de profession un chrétien malgré lui. Pour ce faire, il avait coupé au montage. Il n'avait retenu de son interview que ce qui était favorable au monothéisme. Or toute sa pensée allait dans le sens contraire. Quand le poète visionne le film, fureur du poète et timidité de mon frère, qui me téléphon en urgence qu'il n'aimait pas ce genre de conflits, mais que sûrement, moi, je saurais lui indiquer les mots pour en sortir.
Je réfléchis quelques secondes et lui dis qu'il fallait prendre le poète par la rigolade, en reconnaissant que les chrétiens avaient toujours une tendance temptationnelle à sauver les gens malgré eux.
L'éminence performeuse (eure, heu..) marseillaise m'a fait remercier par mon frère.
Je ne pourrai cesser d'être intrigué par votre féminisme énigmatique à double face, ma chère anisvert/Nathalie, , familialiste et conservatrice demoiselle un peu seule, mais pourquoi si conservatrice et pourquoi si seule? Du moins en apparence, peut-être me trompé-je du tout au tout!