jeudi 3 décembre 2009

Ah ces intellos !

Non je ne me f.. pas du monde en écrivant résolument ce titre. Je viens de lire le post de Thierry, qui a mille fois raisons, lorsqu'il écrit, en commentaire du post sur le Père Gitton et sans du tout l'embrasser, lui, Michel Gitton, dans sa critique : "Qu'ils continuent à rendre l'Église inaccessible, par leurs exigences de qualifications morales et autres incessantes réquisitions intellectuelles: il n'y aura plus, bientôt, que les bobos, en visite culturelle et divertissement musical de haut-vol, ou quelques jusqu'aux-boûtistes conciliaires, en formation groupusculaire et en voie de désintégration, en lieu et place des murmures et pépiements charmants des enfants de France, qui ont résonné tant de siècles durant, entre les hauts-murs des édifices sacrés, élevés par la Foi de leurs aïeux".

Ce qui rend l'Eglise inaccessible aujourd'hui, ce n'est pas le latin, ça se saurait, c'est un interminable et pseudo-intellectuel bavardage, auquel personne n'accorde le moindre intérêt.

Tout à l'heure, j'ai été faire une sépulture dans un petit village derrière Arpajon. Pendant l'offertoire, pendant la consécration, dans cette petite église pleine comme un œuf : un silence impressionnant. Presque tous les habitants de ce village qui s'étaient déplacés pour rendre hommage à un notable de la commune ont fait la bénédiction, avec application devant le cercueil. En sortant, j'entends une dame, la soixantaine sonnée disant à sa voisine, avec un naturel à couper au couteau : "Eh oui ! Il faut bien se préparer". Je n'ai pas essayé d'entendre la réponse à cette parole surprise sans intention, mais une chose est sûre : tous ses gens n'avaient pas eu de messe en latin depuis des lustres. Ils sont heureux de la retrouver. On n'en fera certainement pas des enfants de Marie, ils ont passé l'âge, mais ils sont près à venir, avec une véritable espérance au coeur, si on crée par la liturgie les conditions d'une prière personnelle. Je me disais devant cette assemblée villageoise : il faudrait peu de chose pour que "ça reparte", pour que les gens s'identifient de nouveau à la religion de leur baptême...

Mais en tout cas, pour y parvenir, on n'a pas besoin des considérations sociologiques que l'on entend de façon beaucoup moins onéreuse, bien au chaud devant sa télé au journal de 20 H. Il y a une saturation de l'information. Ce qu'il faut ? Faire entendre autre chose à des gens qui ont soif, parce que le matérialisme, ça dessèche. Leur faire entendre l'essentiel, la vie, la mort, l'amour et Dieu, avec Jésus Christ, mort et ressuscité, qui a aimé du plus grand amour, jusqu'à en mourir, qui est ressuscité, remportant seul la victoire décisive, la victoire sur la mort, et qui est le fils de Dieu, nous montrant le chemin par lequel nous deviendrons nous aussi des fils de Dieu ou comme dit le catéchisme des diocèse de France, "des frères de Jésus Christ". Pas besoin de sociologie ou de psychologie ! Le spirituel n'a rien à voir avec la psychologie quoi qu'on en dise, rien à voir avec nos états d'âme. Le spirituel a à voir avec ce que nous sommes et ce que nous allons devenir. Pour parler de cela, il faut de la délicatesse, c'est vrai, mais point n'est besoin de préambule.

Le drame de nos évêques ? Ils se noient dans les préambules et quand il faut dire des choses vraiment importantes, ils ne savent qu'enfiler les citations comme on le ferait des perles.

J'ai un ami qui me fait passer ses services de presse quand ils sont trop "religieux" pour lui. Et j'ai eu ainsi entre les mains : "J'aimerais vous dire..." de Mgr Albert Rouet, évêque de Poitiers et amateur autoproclamé d'art contemporain. Il va avoir 75 ans. Il nous offre, selon l'avertissement de sa préface, son testament d'évêque en attendant son testament d'homme et de prêtre. Mais il nous avertit dès l'introduction : "J'ai été intéressé par le fait que grâce aux questions qui construisent ce livre d'entretien, la moitié de ce livre concerne des préalables".

Mais Mgr, des préalables pour quoi ? Pour vous situer dans un débat intellectuel, dans lequel le but est de montrer, comme vous dite qu'on "ne peut pas engager la vie d'une Eglise dans tous les durcissements". Thierry a raison, les gens n'ont pas le temps. Ce qu'ils veulent ? L'essentiel, la beauté simple et immédiate de l'essentiel : entendre parler de notre destinée à tous, qui est surnaturelle... ou qui n'est pas.

5 commentaires:

  1. Le discours intellectuel n'est pas mauvais en soi mais il tend à nous faire oublier que la religion est avant tout une pratique et même une accumulation de pratiques (prier, communier, prêcher, etc.). Et comme toutes les pratiques, celles-ci nécessitent un investissement de longue durée, un exercice répété, les effets bénéfiques se faisant ressentir après coup (ce qui rend déjà le discours d'introduction superflu). Or comment attirer les gens vers l'Église si ce n'est en leur montrant ces effets de manière concrète ?

    Nos intellectuels ne font que de la publicité, laquelle est inutile car elle n'apprend rien : achetez-vous du Nespresso parce que George Clooney prétend que c'est bon ou parce qu'un ami vous l'a conseillé? Seuls les exemples concrets peuvent prétendre à quelque valeur (preuve supplémentaire que les gens ne sont pas aussi crédules qu'on le pense), d'où l'importance de l'art chrétien (musique, peinture, mais surtout architecture). Seule l'imitation des Saints et du Christ sera à même d'initier un regain de foi.

    En un mot, c'est dans le Verbe Incarné et non dans le verbiage intellectuel que réside notre foi.

    RépondreSupprimer
  2. Être cité par le Père -Merci infiniment, mon Père- est un très grand honneur pour moi, qui le mérite bien moins que nombre d'amis de longue date du Métablog, et d'intervenants autrement mieux qualifiés. Je suis très touché, mes excuses à tous d'avoir été un peu disert, ces derniers temps, je vais essayer de freiner quoique cet espace internétique d'amitié, de confiance et d'échanges, m'accroche de plus en plus: je vous dis ça comme ça, venant de l'extérieur de votre petite tribue de "Tradis." qui sont toujours décrits comme repliés sur eux-mêmes, et bien j'ai rarement constaté ailleurs, autant de liberté intellectuelle que dans vos échanges et confrontations d'idées et vos merveilleux développements à tous, à propos de "La religieuse portuguaise" sont dignes d'une excellente revue de cinéphiles (et que ma chère Elis, se retrouve en vidéo, ici, sur ce blog de Réflexions Chrétiennes, au sens le plus noble du terme, ça m'en à bouché un coin, voilà, c'est dit).

    RépondreSupprimer
  3. [Voici] quelques questions relatives à l'intervention du Père Michel Gitton dont je ne connais pas les propos exacts. En effet, il souligne deux points sur lesquels les traditionalistes selon lui doivent transiger, à savoir l'usage de l'histoire et l'absence de rupture entre le naturel et le surnaturel, selon ce que je lis de l'article du Père de Tanouarn. Gageons somme toute, pour faire bonne mesure, que le Père Gitton a sans doute expliquer aussi les points sur lesquels la partie de l' Église non-traditionaliste doit elle aussi non pas transiger, mais s'expliquer! Qu'entend-il par " l'usage de l'histoire "? L'absence de rupture entre naturel et surnaturel ? Il y a continuité-discontinuité entre les deux ordres sous peine de basculer soit dans le panthéisme soit dans un surnaturalisme parfaitement inintelligible. OU alors évoquait-il le fameux problème du "desiderium naturale" sur lequel un certain néo-thomisme bute depuis un peu trop longtemps. Merci de me renseigner le cas échéant sur l'intervention du Père Gitton ou, pour éviter de vous solliciter, m'indiquer le moyen de le faire sur le web.

    RépondreSupprimer
  4. Je viens de tomber sur votre blog et votre article. Je suis totalement d'accord avec vous. Je viens d'un petit village de l'Est de la France, où la messe est dite une fois par trimestre (paroisse de 16 villages) et où, quand elle a lieu, n'a plus grand chose de catholique. Les prêtres, que je connais tous, sont fort sympathiques mais ne parlent plus des vérités éternelles, et leur manière quasi-négligente de dire la messe instille le doute.. Ils font des messes spéciales jeunes avec concert et guitare, des messes spéciales famille, des "messes de Noël pour les familles" cinq jours avant l'échéance et des messes de minuit à ce qui contribue à ghettoiser encore plus la messe normale. Je ne suis pas né dans une famille très catholique, mais cela fait deux ans que je cherche Dieu. J'aime tant entrer dans nos églises de village, différentes à chaque messe, y prier, m'emplir de l'Esprit Saint qui les habiter. Mais j'ai du mal à comprendre que tous les saints aient été retirés de la plupart de nos églises (sauf dans certains, où certains paroissiens m'ont confié qu'il y avait eu des "résistants" dans les années 70). Sur internet, je me suis rendu des querelles de clochers entre catholiques. J'ai découvert que la messe tridentine était dite dans la ville principale de la région. J'ai été stupéfait, émerveillé par la première messe à laquelle j'ai assisté, par le sermon qu'a donné le curé à la chaire. J'y vais désormais régulièrement, même si j'ai du mal à "abandonner" ma paroisse où je connais tout le monde. Le côté peu "local" de la plupart des paroissiens traditionalistes me gêne. Je m'explique. Ils ont tendance à s'enfermer dans leur petit monde, "leur" école, "leurs" bonnes soeurs. Ils ne parlent jamais de nos grands saints locaux, qui attirent beaucoup de monde aux messes dans les villages le jour de leur fête, ce que certains prêtres "modernistes" savent faire. Ils n'osent pas trop se faire connaître. Ils ne restent pas très longtemps, pas plus de quelques années, ce qui les empêche de "faire leur trou" et d'engager un travail de profondeur dans une région donnée.
    Mais je les comprends, l'Eglise et l'évêque locaux leur mènent la vie dure, et dès qu'ils font parler d'eux dans les journaux locaux, la hiérarchie sévit.
    Je ne sais pas quelle est la solution pour attirer de nouveau le peuple français à l'église. Mais il faudrait faire l'expérience d'une liturgie tridentine enracinée localement.
    Je ne sais pas si ce que je dis est très clair.
    Dans le cas contraire, excusez-moi de vous avoir importuné, je suis tombé sur votre article et ai pensé que mes impressions rentraient dans son cadre.

    RépondreSupprimer
  5. Bonjour cher anonyme, qui avez écrit de si bon matin, hier et bienvenue: je crois que vous n'importunez personne ici, au contraire et personnellement je trouve vos impressions et initiative, particulièrement instructives.

    Figurez-vous qu'en découvrant votre post, j'ai relu le texte introductif du Père de Tanoüarn et "bon sang mais c'est bien sûr"...à propos de "la passion pour l'Art Contemporain" de Monseigneur Rouet, je me suis rappelé tout à coup, ma stupéfaction, à l'intérieur d'une sublime chapelle romane, de tomber sur un alignement de vieilles godasses, disposées devant une rangée de sceaux en plastic, dans lesquels trempaient quelques balais à poils longs, genre ceux des lévriers afghans si élégants...lol...

    "Tiens, la femme de ménage a oublié de ranger son matériel" me suis-je dit, sur le coup, avant de découvrir l'explication, inscrite sur un bout de carton, scotché sur une chaise prie-dieu (dont on se demande ce qu'elle faisait encore là!): il s'agissait en fait "d'une Oeuvre d'Art Contemporain, offerte au regard des visiteurs"...mais pardi! c'est que je me trouvais dans la bonne ville de Poitiers...ah!ah!ah! ça devait être une des solutions (testée) pour "attirer de nouveau le peuple français à l'église" comme vous dîtes si bien, cher anonyme...

    RépondreSupprimer