La royauté sociale du Christ, une vieille lune... C'est ce que l'expression royauté sociale, lourde et sortie tout droit du tréfond du XXème siècle, peut nous laisser penser. Sans doute la plupart des liseurs d'aujourd'hui ne savent pas ce qu'est... la royauté sociale de Notre Seigneur Jésus Christ.
C'est l'idée à laquelle on touche pourtant lorsqu'on parle de civilisation chrétienne ou même (bien que ce ne soit pas la même chose) de culture chrétienne.
Je ne suis pas sûr de la culture chrétienne très étendue de Oskar Freysinger, professeur d'allemand dans un lycée de la bonne ville de Sion en Suisse romande et cofondateur de l'UDC, l'union, suisse pour la démocratie chrétienne. Mais manifestement, ce n'est pas la culture chrétienne qui l'intéresse d'abord. Poète et romancier bilingue, écrivant tantôt en français tantôt en allemand, s'exprimant facilement en anglais et en italien, le bonhomme a surtout une grande culture classique, qui lui a valu récemment un prix Rilke dans un festival de Sierres, toujours en Valais. Il affirme aussi (et pourquoi pas ?) qu'il est en pourparlers avec Hollywood pour tel de ses livres dont il aurait fait un scénario. Va savoir ! En tout cas, la culture du personnage est vraiment universelle et pas seulement chrétienne. Mais cela ne l'empêche pas, avec conviction et en utilisant son charisme personnel sans forcer son talent, de prendre la défense de la civilisation chrétienne en Suisse.
La civilisation ? Ce n'est pas une attitude personnelle comme la culture. Ce sont des pierres, des paysages et des mots, les mots d'une langue. Pour Freysinger - et l'establishment risque de ne pas lui pardonner de si tôt - les Minarets sont des pierres de trop dans le paysage suisse. Il a réussi à faire interdire les Minarets par 57,5% des Suisses, en obtenant la majorité des suffrages exprimés dans 23 des 26 Cantons. Il nous rappelle l'existence d'une civilisation chrétienne en Europe, que l'on a voulu oublier ou même stigmatiser, mas qui demeure et qui revient, en particulier grâce à lui, sur le devant de la scène. Il est devenu, volens nolens et quelle que soit sa culture personnelle, le chantre de la civilisation chrétienne en Europe, le chantre de l'identité chrétienne de l'Europe. Lui ne se contente pas d'évoquer "les racines chrétiennes de l'Europe". Il exige le respect de ces racines.
Pour comprendre l'action et la décontraction de ce politique hors du commun, il faut revenir à une profession de foi politique qu'il a faite un certain 1er août 2007 dans le petit village valaisan de Savièse, dont il avait été auparavant un conseiller communale. Chez lui, il défend la croix blanche sur fond rouge qui est son drapeau, "le drapeau de la patrie" et il déclare : "Celui qui refuse de porter sa croix, refuse d'assurer son destin". Moderne, Freysinger ne nous demande pas de mourir pour la patrie. Il nous explique qu'il est nécessaire que nos petits ego vivent en se reconnaissant en elle : "Sans identité pas de devenir; sans racines, pas de personnalité".
C'est dit. Simplement. Avec des mots de tous les jours ou presque C'est la vérité qu'administre Freysinger à une Europe qui a les yeux fixés sur lui et qui, souvent (Belgique, Allemagne, France) plébiscite sa votation suisse. Son succès ? On dira ce qu'on voudra, il est dérangeant, mais il naît du naturel avec lequel il a su ramener sur le devant de la scène médiatique cette vérité de l'identité personnelle et collective que l'on s'efforce d'oublier.
Ce qu'il met au jour, c'est ce qui reste de la Royauté sociale du Christ : la civilisation chrétienne, que l'on ne fera pas disparaître sous les hamburgers comme il dit joliment dans le discours que notre webmestre vous propose de regarder.
[Note du webmaster] En illustration de cet article, une vidéo du discours du 1er août 2007 du Conseiller national UDC Oskar Freysinger à Savièse (VS) - le discours commence à la 6e minute.
Ah mon Dieu, M. l'Abbé, quelle déception de lire ce papier ! Le fonds erroné du discours traditionnel s'y retrouve intégralement (et cet adverbe n'est pas choisi au hasard !) et avec ce genre de discours, vous véhiculez une nostalgie de la Royauté de NSJC que va totalement à l'encontre du souhait prospectif "Que votre règne arrive" du Pater !
RépondreSupprimerEn 2 mots, vous pourriez donner l'impression de répéter la doxa lefebvriste qui a transformé le fameux hymne AF "les rois ont fait la France, sans roi elle se défait" qui était déjà simpliste en "les rois ont fait la chrétienté, retournons en arrière pour la refaire".
Je m'explique : si la Royauté sociale de NSJC c'est la civilisation chrétienne, alors c'est foutu ! et à plus forte raison si vous limitez la civilisation chrétienne à des pierres, des paysages (et en tant que paysan, j'espère bien que les paysages que je contribue à faire demain seront toujours des paysages civilisés) et des mots ! Vous sembler mélanger culture et civilisation, et confondre le temporel et le spirituel, non ?
Et vous déformez l'idée centrale de Freysinger qui est que : pour assumer son destin, il faut arborer la Croix ! Il faudrait relire H. Pourrat qui explique cela très bien (Pie XII aussi, d'ailleurs) : il y a 3 règnes : minéral, végétal et animal et l'homme, issu du 3° est appelé à un 4° dès cette terre : le règne du Royaume de Dieu, celui de la royauté sociale de NSJC, qui couronne les 3 autres. En d'autres termes, le royaume est au-dedans de nous si nous sommes en état de grâce et la Royauté de NSJC sur la société viendra surtout de son règne effectif sur les coeurs... C'est la seule façon de restaurer le respect de la loi naturelle dans les sociétés, loi naturelle qui est la base de la royauté sociale du Christ... Le discours sur la FSSPX sur le sujet est aussi commode que faux : on prétend qu'il appartient aux gouvernants d'appliquer d'autorité les principes de la loi naturelle, (certes, sauf qu'avec "autorité" on glisse sans complexe vers une théocratie autoritaire et de là vient une grande partie de l'incompréhension concernant Dignatitis Humanae) mais en oubliant que c'est d'abord la conversion individuelle qui compte. Du coup, on peut aisément critiquer les gouvernants d'aller contre ces principes et on se rassure en se disant que par cette simple critique on appartient au camp du bien et au total on ne fait rien, on oublie même de rejeter les structures de péché et de se convertir soi-même...
En inscrivant le royauté sociale de NSJC dans un combat de "civilisation", on commet une grave erreur qui fait perdre de vue que c'est d'abord un combat personnel, et on pèche contre l'espérance en donnant l'impression que ce combat n'est pas possible dans notre monde contemporain qui nie Dieu y compris dans son organisation sociale. Et on en arrive à des constats imbéciles comme celui d'un abbé de la FSSPX qui estimait que l'encyclique de B16 : CIV, ne traitait pas de la royauté sociale de NSJC ! Or elle ne parle que de ça, mais elle le fait en inscrivant cette royauté dans le contexte actuel, sans se perdre dans des considérations historiques liées à la culture, au passé, ou aux modes de gouvernement actuels ! Car le royaume est maintenant, pour tous et pour tous les temps !
Bref, je m'emporte, et ne m'en veuillez pas, mais nous sommes dans ce que je crois être la cristalisation de l'erreur fondamentale de la FSSPX qui a une vision "sioniste" de la royauté sociale de NSJC ! Et du coup, il vaut mieux que je laisse la parole à Jean-Paul II sur ce sujet :
"Ne tombez pas dans l'erreur de croire qu'on peut changer la société en changeant simplement les structures externes ou en cherchant avant tout la satisfaction de besoins matériels. Il faut commencer par se changer soi-même, en tendant sincèrement son coeur vers le Dieu vivant, en se rénovant moralement, en détruisant dans son propre coeur les racines du péché et de l'égoïsme. Une personne transformée collabore efficacement à la transformation de la société" (Homélie à Saragosse, octovre 1984)
C'est drôle, je ne parviens même pas à trouver un seul nom à mettre comme équivalent français: une lectrice ou un lecteur du Métablog aurait-il une idée?...B.H.L.?!...lol...
RépondreSupprimerJe ne sais pas si c'est cela "être chantre de la civilisation chrétienne" que d'interdire les symboles d'une autre civilisation ...? Question sérieuse, ni ironique , ni critique, juste une réflexion que je me fais à la lecture de ce texte.
RépondreSupprimerEn quoi ce monsieur promeut-il notre civilisation en surfant sur les peurs des gens ? Vont-ils davantage approfondir à présent nos racines européennes (gréco-romaines, judéo-chrétiennes), maintenant qu'ils ont statué sur les minarets ? Liront-ils plus, réfléchiront-ils davantage sur notre foi, notre religion, notre culture ? En quoi le christianisme est-il mis en exergue ?
Je ne parle point de ce référendum, nous l' avons suffisamment commenté ici, mais pour une fois je ne suis pas en phase avec M.l'Abbé, notamment sur sa vision de ce parti suisse et son fondateur. Ils ont simplement joué sur les instincts négatifs des gens, qui cherchent avant tout à préserver leur petite vie quotidienne, plutôt que de défendre ou promouvoir ou défendre leur propre civilisation, en l'occurrence chrétienne. Ce rejet aurait pu avoir lieu dans n'importe quel pays athée de culture occidentale, un rejet instinctif du repli, très primaire, très peu à voir avec la mise en avant de la culture chrétienne eg construction des clochers.
Il n'y a pas de quoi se glorifier, on verra justement combien de clochers seront construits dans les années à venir.
On n'écartera pas une civilisation en l'interdisant, c'est le meilleur moyen pour la faire prospérer ! Regardez les pays communistes où la foi, quasi interdite, a fleuri comme jamais, étant devenu un refuge et un porte-drapeau de la résistance à ses détracteurs.
C'est en promouvant notre propre culture et civilisation, en cultivant nos racines européennes et occidentales du siècle de Périclès, par Rome latine et chrétienne, par les bâtisseurs des cathédrales, les splendeurs de la Renaissance, la pureté classique, l'opulence baroque ou rococco, la Raison de l'Aufklärung jusqu'aux brumes du romantisme (etc etc jusqu'à nos jours où le drapeau de la pensée est dignement repris par nos derniers Papes le philosophe et le théologien très pragmatique cf Caritas in Veritate...) que nous nous ferons chantres de notre civilisation.
Sans cela, en effaçant l'autre, nous ne trouveront que du vide et ce vide, l'autre (passé dans la résistance, donc d'autant plus attirant) saura très vite le combler.
Par ailleurs pourquoi effacer, voire vouloir éliminer (ne serait-ce qu'en théorie) les autres civilisations ou religions ?
Une seule civilisation, une seule religion ?(imaginez un instant le monde entier sous l'emprise générale d'une certaine fraternité et à l'image de ses fidèles....Frisson dans le dos!) Quel appauvrissement ce serait pour l'humanité..... Je vois difficilement Jésus désirer cela.
Bravo Antoine, bravo Anonyme, c'est exactement cela, vos pensées se rejoignent, je ne peux rien ajouter à vos textes très complémentaires.
RépondreSupprimerMerci.
Une lectrice
Je ne comprends pas ce qu'Antoine essaye d'expliquer. Qu'est-ce que la FSSPX vient faire ici? Elle n'est pas le sujet. Et tout ce qu'Antoine explique au sujet de la Royauté sociale de Jésus-Christ n'est pas en contradiction avec ce qu'a écrit l'abbé. Pourquoi va-t-il donc chercher des problèmes là où il ne me semble pas y en avoir?
RépondreSupprimerFreysinger est très courageux et pertinent et c'est cela le but de l'article de l'abbé. J'ai diffusé largement l'article de l'abbé et la video qui fait chaud au coeur.
@ Antoine, qu'il faille se convertir dans nos coeurs n'entre aucunement en contradiction avec la Royauté sociale de Notre-Seigneur Jésus-Christ...
RépondreSupprimerBravo à Mr l'Abbé pour ce billet. Freysinger est bien un héraut de la Royauté sociale du Christ, un héraut de la civilisation occidentale classique.
Vive Freysinger le sauveur de la Suisse !