jeudi 26 juin 2014

L'euthanasie ? Un révélateur du présent et de l'avenir

L'actualité nous offre un étonnant cocktail létal de médecins qui ont hâte (ils le disent eux-mêmes) d'envoyer leurs patients ad patres. L'acquittement du docteur Bonnemaison (qui est l'empoisonneur légalisé de sept patients en fin de vie, dont au moins un sans prévenir la famille), la mort décrétée en Conseil d'Etat de Vincent Lambert que plusieurs juridictions françaises avaient décidé de maintenir en vie, tout cela donne des airs de triomphe à certains petits Messieurs. M. Kouchner par exemple l'homme qui n'avait pas eu honte d'écrire un livre intitulé Charité business, est allé embrasser son confrère Bonnemaison, après être allé témoigner pour lui devant le Tribunal. Aujourd'hui il s'offusque de ce que l'on utilise le terme euthanasie, qui se termine si mal... D'une certaine façon de son point de vue je crois qu'il a raison : la seule consonance de ce mot plaide contre ce qu'il désigne... Mais sa consonance rejoint son histoire : l'euthanasie des handicapés a très vite fait partie du programme de M. Hitler.

Dans ce contexte de danse du scalp, on est assez surpris de voir que Marine Le Pen, qui, sur l'euro par exemple nous avait habitué à un non-conformisme décoiffant, se croit obligée de faire allégeance à l'Ordre républicain, à propos de Vincent Lambert. Pour elle, le Conseil d'Etat doit rester la plus haute instance juridique en France, sa décision de mettre à mort un tétraplégique en le privant d'hydratation et d'alimentation est donc en soi "irréversible" (c'est le mot qu'elle a employé). Comme si une décision politique était irréversible! Comme s'il n'y avait pas d'Instance au dessus des instances républicaines! Ne serait-ce que le monarchique droit de grâce que De Gaulle a mis dans notre constitution et qu'il faudra peut-être réactiver.

Mais ne comptons pas sur Marine Le Pen pour cela. En effet, note-t-elle, pour faire mourir Vincent, il suffit d'appliquer la Loi Léonetti. En effet, en considérant que l'hydratation et l'alimentation sont des traitements, la loi Léonetti permet que, privant Vincent Lambert de ce traitement, on le condamne à mourir de faim et de soif... de façon absolument inhumaine. C'est ce qu'a considéré le rapporteur du Conseil d'Etat, c'est aussi ce que pense la Présidente du FN.

La position de Marine Le Pen, qui prend place dans sa politique de dédiabolisation, n'en est pas moins surprenante. Jusqu'où ira la "normalisation" du FN ? J'avoue que l'exemple italien de M. Gianfranco Fini qui a réussi, venant du MSI fasciste, à être président de l'Assemblée nationale italienne est instructif: il a réussi à changer le nom de son Parti, il a fait des alliance avec Berlusconi, c'est aujourd'hui un politique comme les autres... Il n'a d'ailleurs pas plus de succès que les autres.

Aujourd'hui, il y a en France 1700 personnes qui sont pauci-relationnels comme l'est Vincent Lambert. Soit on accepte le droit de vie et de mort que s'est arrogé le législateur suprême et on leur inflige le même traitement, soit on fait appel au principe supérieur du respect de la vie. Mais alors pourquoi exclure Vincent Lambert de ce principe ?

Qui dit que la médecine progressant, on ne parvienne pas à sortir Vincent, qui déjà communique avec ses parents, de cet enfermement végétatif dans lequel il se trouve ? Mystère de la vie, qu'il faut admettre pour pouvoir le reconnaître.

Si "la vie n'est qu'un matériau qui se gère", comme le disait Pierre Simon, l'ancien Grand Maître de la Grande Loge, alors on comprend que certaines vies coûtent très cher, trop cher à la société. En période de crise il faut faire des économies, c'est le principe d'une bonne gestion. Mais si la vie est un mystère, qui connaît ses ressources ? Quel progrès ferons-nous demain dans la connaissance des lois de la vie, qui permettra aux tétraplégique de retrouver des moyens qu'ils n'ont plus ?

Aujourd'hui, le courant médical et philosophique dit transhumaniste, celui des organes artificiels, se fait fort de prolonger la vie, à force de greffe et d'organe en plastique. Mais cela va coûter cher, très cher. Ce ne sera pas pour tout le monde... La Planète ne le supporterait pas. Pas trop d'enfants ! Pas trop de vieux ! Il faut gérer le destin du vulgum pecus à l'économie pour permettre à quelques uns de trouver la voie vers ce que Michel Houellebecq n'hésite pas  appeler "la vie éternelle" et qu'on appellera plus justement "la vie sempiternelle".

jeudi 19 juin 2014

Mgr di Falco n'est pas propriétaire de la vérité

Mgr di Falco, l'abbé de La Morandais, Mons. Herouard, recteur du Séminaire français de Rome, viennent de cosigner un appel de Jacques Attali dans l'Express dans lequel on peut lire : "Nulle doctrine, nulle religion, nulle idéologie, nulle science, nulle culture ne peut revendiquer pour elle seule la propriété de la vérité. Nul peuple, nulle religion, nulle doctrine, nulle science, nulle culture ne peut survivre sans respecter, écouter, partager, échanger, apprendre des autres". Cet appel, relayé par Riposte catholique qui s'en indigne, est sans doute destiné à s'opposer aux intégristes musulmans, enleveurs de filles et tueurs de chrétiens. J'avoue que je ne vois pas très bien le rapport et je ne crois pas que les allumés de Boko Haram (les livres interdits) cherchent la vérité d'une quelconque façon, sinon sans doute au bout de leur kalachnikov. Cet appel, qui exprime la pensée commune, est signé par ailleurs par Christophe Barbier, qui joue à domicile, par Emmanuelle Mignon l'ex-conseilleuse de Nicolas Sarkozy en matière religieuse, par Malek Chebel, musulman ouvert. D'autres encore.

Ce texte est intéressant. Je le crois vrai par ce qu'il dit et faux par ce qu'il veut dire.

Ce qu'il dit ? Que nul homme n'est propriétaire de la vérité. La vérité pour nous autres hommes est objet de désir, un désir qui, même lorsqu'il parvient au stade de la possession, ne s'éteint pas mais se renforce au contraire, car, simples créatures, nous ne nous identifierons jamais à la vérité. 

Qu'est-ce que la vérité ? C'est la question de Pilate, jugeant Jésus, la question qu'opposent tous les lâches aux entrepreneurs de vie, aux vrais chercheurs de sens, aux aventuriers de la métaphysique, à tous ceux qui savent d'instinct que, comme dit Simone Weil dans Attente de Dieu, le désir de vérité est le seul désir qui porte en lui-même son accomplissement. Pourquoi ? Parce qu'il est lui-même vrai. Parce que ce désir (Socrate l'a assez montré) est notre vérité à nous autres hommes - ce désir est la réalisation supérieur de l'humanité dans l'homme - et que le mensonge, le premier mensonge est de ne pas l'éprouver. Notre premier mensonge est de vouloir ne pas éprouver ce désir naturel aux hommes. Voilà sans doute ce que pensent les éminences catholiques signataires de l'appel d'Attali. Voilà en tout cas ce qu'elles pourraient penser en fonction de la formation qu'elles ont reçue. Mais est-ce ce que pense Christophe Barbier ? L'histoire ne le dit pas. Jacques Attali ? On ne le saura jamais.

Ce que la Correctness ambiante pense pour nous, en revanche, on le sait très bien : il n'y a pas de vérité. La question de la vérité est superfétatoire de naissance puisque seul le néant est vrai et que la vérité du néant rend vraie (c'est-à-dire fausse) toute proposition affirmative. Aujourd'hui c'est l'Evangile du néant qui rend tout vrai et en même temps tout faux. Personne ne peut s'identifier à cette bonne nouvelle-là, qui tient tout et tous à distance. C'est au nom de l'Evangile du néant que la plupart des gens signeraient l'appel d'Attali aujourd'hui. Pourquoi les hommes d'Eglise prêtent-ils la main à la sinistre ambiguïté où se confondent la vérité comme désir (la nôtre) et la vérité comme alibi interchangeable avec le mensonge (celle que nous enseigne le nihilisme ambiant). Pourquoi les hommes d'Eglise ont-ils besoin de donner leur signature à des déclarations qui, parce que non-précises, volontairement non-précises, seront forcément comprise dans le sens de la pensée dominante ?

D'autant plus qu'un chrétien qui s'exprime doit le faire non seulement d'une manière conforme à la philosophie chrétienne, comme nous venons de l'indiquer. Mais il doit le faire aussi d'une manière conforme à l'Evangile de Jésus-Christ et à la théologie essentielle qu'il comporte, je dirais : à la perspective dans laquelle il nous situe. Qu'est-ce que l'Evangile, sinon la Parole de Dieu. Nous sommes dans un ordre de vérité que la philosophie (même la philosophie chrétienne) ne considère pas. Dieu, en Jésus-Christ son Fils, nous donne sa Parole : "Celui qui croit dans le Fils de Dieu possède en lui le témoignage de Dieu" dit l'apôtre Jean dans sa Première épître (5, 16). Ce témoignage de Dieu est véridique. Mais pour que nous puissions le recevoir, il faut que nous soyons "de la vérité". "Celui qui est de la vérité entend ma voix" dit Jésus à Pilate (Jean 18). Dans cette perspective nous ne sommes évidemment pas propriétaires de la vérité, mais c'est la vérité qui nous possède. Elle nous a tous possédés au commencement, puisque nous venons d'elle. "Elle est la vraie lumière qui éclaire tout homme venant dans le monde" (Jean 1), lisons-nous dans le Prologue. 

La distance entre nous et la vérité ne vient pas de la vérité qui se serait retirée, inaccessible, comme l'imaginent tous les agnostiques de la terre. Elle vient de nous et du fait que nous n'agissons pas vers elle. Humblement. "Quiconque fait la vérité vient à la lumière" (Jean 3, 21).

mardi 17 juin 2014

mercredi 11 juin 2014

Réponse à Alain de Benoist sur le monothéisme et la tolérance

Cher Alain, vous avez donné à Boulevard Voltaire un entretien portant sur l'intolérance des monothéismes. Vieux thème autrefois développé par Ernest Renan, qui en avait eu l'idée en lisant Spinoza et que le GRECE, en ce temps là a souvent repris. Pour mesurer la naïveté renanienne il suffit de consulter son article Paganisme dans les Nouvelles études d'histoire religieuse, par exemple p. 15 : "De là cette merveilleuse liberté qui permit à l'esprit grec de se mouvoir spontanément dans toutes les directions, sans jamais rencontrer autour de lui la limite d'un texte révélé". Merveilleuse liberté au nom de laquelle on tua Socrate comme... athée, parce qu'il ne croyait pas aux dieux de la Cité.

Vous mettez sans doute toutes sortes de bémols aux vieilles exclusives. Ainsi dites-vous avec profondeur et le véritable respect de l'autre qui vous caractérise : "Personnellement, j’irai jusqu’à contester l’usage indistinct du mot «religion» pour qualifier toutes sortes de formes différentes d’engagement spirituels, de croyances ou de fois". Je suis tout à fait d'accord et je comprends tout ce que vous, vous voulez dire par là. Quant à moi, j'ajouterais, sur un registre légèrement différent : la religion n'est pas toujours une vertu. Comme le dit le Père Laberthonière quelque part, il existe aussi un vice de religion.

Cela étant posé, en toutes lettres, c'est au monothéisme que vous imputez un nouveau type d'intolérance: l'intolérance religieuse. Mais l'intolérance religieuse est vieille comme la religion, c'est le vice de religion que je viens d'évoquer, ce que doit signifier d'ailleurs la vieille histoire de Caïn et Abel, qui, parce qu'ils ne priaient pas Dieu de la même façon, se sont trouvés opposés, jusqu'à la mort. Je cite Caïn et Abel. Mais l'intolérance religieuse, ce sont les sacrifices humains sur les Hauts lieux de Canaan ou dans les Pays Aztèques. C'est le tribut humain livré chaque année au Minotaure, car la religion grecque comme l'a montré ER Dodds n'est pas exempte de cette violence. Voyez Ajax, la tragédie de Sophocle: Athéna, jalouse, rend fou ce pauvre Ajax (c'est l'até, la folie divine) et le pousse à se suicider. La theia moira n'est pas forcément clémente. Les dieux ne sont pas toujours bons.  et ils se jouent des hommes, tout en légitimant les violences humaine par la violence divine (c'est l'histoire de la  Guerre de Troie, où l'on crie Gott mit uns des deux côtés et où la théomachie surplombe et légitime les conflits humains). La violence a souvent été complice du sacré, comme l'a montré René Girard. Et ce n'est pas le monothéisme qui a inventé cela. Le problème du polythéisme, c'est que, à travers cette théomachie, cette guerre des dieux, on est bien obligé de constater qu'il ne parvient pas à poser la valeur universelle de l'être humain : si vous n'avez pas les mêmes dieux, vous n'avez pas la même valeur, vous n'êtes rien.

Quant à la tolérance des païens, les chrétiens l'ont expérimentée à leurs dépens, en trois siècles de martyrs. Il y a eu des martyrs dès le début et partout dans l'Empire, je pense, au-delà des apôtres à propos desquels on peut invoquer un dessein divin spécial, à saint Polycarpe à Smyrne ou à saint Justin à Rome. Les gens de Smyrne et les gens de Rome ne se sont pas donnés le mot entre 155 et 165 : ils ont spontanément manifesté leur vraie nature : intolérante. Il y en a un qui l'a éprouvé bien avant Jésus-Christ, il était monothéiste, mais à sa manière : il croyait à une loi unique pour tous les hommes : Socrate, condamné pour athéisme, parce que les dieux de la Cité ne lui suffisaient pas pour penser l'unité de l'humanité. Je pense aussi à Celse, ce grand ennemi des chrétiens que vous faisiez naguère profession d'admirer : quel vieux con! Quel intolérant! Il déteste les cultes orientaux et ajoute foi à l'anthropophagie des chrétiens, interprétant ainsi l'eucharistie d'une manière bien téméraire. Mais surtout, pour lui, les hommes au loin sont des sous-hommes. Ils peuvent être immolés à la gloire de Rome...

Non seulement l'intolérance religieuse ne remonte pas au monothéisme, mais c'est un monothéisme, le christianisme, qui invente la tolérance. Pourquoi ? Parce que contrairement au polythéisme, le christianisme est un universalisme. Les hommes sont tous concernés, qu'ils le sachent ou non, par la passion du Christ. On ne peut donc les traiter comme des sous-hommes, même si on en aurait bien envie, même s'il est arrivé que des chrétiens conservent quelque chose du vieil exclusivisme païen. Il faut penser une attitude intermédiaire, qui est d'ailleurs celle de Dieu d'après l'Evangile : "Il fait briller son soleil sur les bons et sur les méchants". La parabole du bon grain et de l'ivraie représente comme une thématisation explicite de la tolérance évangélique. Attention ! Cette tolérance n'a rien à voir avec l'indifférence. Il est vrai que les chrétiens essaieront toujours de convertir ceux qui ne le sont pas (sous peine de ne plus être chrétiens que de nom). Je ne dis pas que tous les chrétiens ont les défauts du prédicant baptiste, mais je dis que le salut de leurs frères leur importe et que d'une manière ou d'une autre, ils se considèrent comme des témoins de la foi véritable.

Mais n'est-ce pas de l'intolérance cela ?

Le mot tolérance a changé de sens Lorsque Cajétan ou Suarez le théorisaient aux deux bouts du XVIème siècle, il signifiait ce que porte son étymologie : un devoir de supporter l'erreur au nom de la dignité de celui qui est dans l'erreur. Mais aujourd'hui la tolérance, c'est l'agnosticisme obligatoire et la non-pensée comme apothéose de l'esprit. Quiconque affirme quelque chose dans l'ordre de la destinée humaine, devient pour cela, un intolérant. Il est bien évident cher Alain, que ni vous ni moi ne pouvons admettre cette tolérance-là qui mène droit à ce que vous vous avez appelé la pensée unique. Qu'est-ce que la pensée unique sinon l'impossibilité de penser, érigée en loi ? Fausse tolérance puisqu'elle engendre la plus terrible intolérance, celle de la non-pensée.

mercredi 4 juin 2014

Le séisme politique

A l'instigation d'une amie qui me veut du bien, je viens de voir la dernière ZEN (Zemmour et Naulleau), une émission passionnante avec Alain Finkielkraut et Michel Onfray [cf: vidéo insérée après cet article]. Le sujet ? Tout, enfin je veux dire tout ce dont je ne vous ai pas parlé depuis 15 jours, le "séisme" des 25 %, la machine européenne qui s'emballe et dont plus personne ne veut sauf une Upper class très intéressée, qui devrait encore arriver à ses fins tant est grande la force de l'inertie, les explications de ce séisme: Traité transatlantique pour les uns, immigration et grand remplacement pour les autres. Nous vivons un moment historique où la pratique (libérale et multiculturelle) est en train de se séparer de la pensée (identitaire et nationale).

La pratique libérale assumée largement par la Gauche n'ose plus se penser elle-même. Elle va jusqu'au bout de sa logique, on sent qu'elle y va de plus en plus vite parce qu'elle se sent menacée (ce Traité transatlantique quand même, qui, entre autres, va forcer les agriculteurs français à vendre leur blé aux EU, au prix indiqué par les acheteurs, dans une sorte de gigantesque et de très antiécologique nouvelle Politique Agricole Commune etc, c'est de la provocation). L'Europe continue, l'Europe décide, elle force le passage vers l'avenir radieux imaginé naguère par Jean Monnet, cette alliance commerciale et politique avec les EU, à parité euro-dollars. Voilà le but, on le sent, on le sait. Mais l'Europe n'en parle pas, elle n'aime pas qu'on parle d'elle (quelle discrétion nouvelle cette campagne des Européennes). L'Europe ne fait plus de promesse, elle ne défend plus un idéal d'avenir, parce que le calcul est trop visible et qu'il est trop laid. Elle garde pour elle la rationalité commerciale et financière, oui. On sait que les rationalisations européistes ne sont pas perdues pour tout le monde. Mais l'Europe a perdu la pensée. Elle ne se pense plus.

La pensée est désormais massivement anti-européenne, alors que la Upper class reste massivement européenne. Voilà le divorce auquel on assiste. Il risque d'y avoir de la vaisselle cassée.

L'émission montrait bien cette immense fracture entre la classe intellectuelle, un peu en avance, et la classe politique, toujours en retard. Il y en a un (et un seul pour l'instant) parmi les politiques qui l'a compris et analysé, ce divorce, c'est Laurent Wauquiez, oui le maire du Puy, un catho revendiqué, ça fait toujours plaisir, un européiste convaincu et repenti. Il faut lire son Europe il faut tout changer (éd. Odile Jacob). Il souhaite lui aller non dans la logique du renoncement, de l'abstention et de l'autodestruction, non! Il est travaillé par une aspiration à retrouver le gouvernement de soi : "Debout la France"... (il n'y est pas à Debout la France, mais il pousse ce cri).

La prise de conscience de ce qui se passe est retardée par les dernières vagues de ce que Pierre-André Taguieff appelle l'antilepénisme ordinaire, dans un bouquin absolument fulgurant que vous devez lire : Du diable en politique (éd. CNRS 22 euros)... Taguieff montre que le FN est le seul à pouvoir faire de la politique, car dès qu'il touche une question, la Pensée unique déclare que c'est sale et qu'il ne faut pas en parler. Résultat ? Des thèmes de gauche tombent sans coups férir dans l'escarcelle du FN : la laïcité, le peuple et bientôt l'antisémitisme (on ne peut plus en parler sans risquer l'islamophobie : les événements de Bruxelles renforcent ce point. Alors ? Qui en parlera ? Qui mettra en garde contre la banalisation de l'antisémitisme dans certains milieux ? Le FN). Le drame c'est que la Correctness interdit de penser et que la pensée n'est plus du tout correcte. Elle se retient pour l'instant, mais pour combien de temps ?

Mais c'est un véritable consensus anticorrectness qui émerge en ce moment et l'émission ZEN en était le signe irrécusable. Les deux invités étaient l'un de droite (Finkielkraut) et l'autre de gauche (Onfray), mais ils avaient le même discours, que Finkielkraut a résumé en sortant une citation de sa poche. La philosophe Elisabeth de Fontenay, qui n'est pas de droite, écrit ceci, qui aujourd'hui fait un consensus intellectuel à droite et à gauche, contre la Pensée unique : "C'est une erreur politique que de neutraliser l'un des éléments les plus vivaces de l'expérience humaine, le sentiment d'appartenance à une nation ou à un peuple, car cela engage les hommes à se précipiter dans l'abstraction marchandes, qui les rend équivalents mais pas égaux".

J'ajoute que c'est quand il y a désaccord entre la politique et la pensée commune qu'ont lieu les révolutions...