mercredi 11 février 2015

Claude Bartolone et ma tolérance

C'est un aveu que je fais aux lecteurs de ce blog : je suis tolérant d'une manière qui parfois m'effraie un peu moi-même. Je le suis naturellement, sans me forcer, sans vivre cette tolérance comme un impératif catégorique... Je me suis d'abord rassuré sur mon cas en invooquant l'Evangile : "Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés". "Laissez pousser ensemble le bon grain et l'ivraie". "Votre Père des Cieux fait briller son soleil sur les bons et sur les méchants" etc. Il y aurait une lecture attentive à faire d'un enseignement du Christ sur la tolérance.

Mais ma lecture présente de Louis de Bonald m'a fait découvrir deux textes, que je voudrais dresser ici l'un en face de l'autre, qui permettent bien, me semble-t-il, de prendre la mesure de cette tolérance : dans un article intitulé De l'unité religieuse en Europe, qui explore la possibilité d'une union des chrétiens au début du XIXème siècle, Bonald a ce mot extraordinaire sur la tolérance :
"Sans doute celui qui approfondit sérieusement les grandes questions de religion ou de politique cesse bientôt de croire aux opinions indifférentes. Mais en même temps il apprend des efforts mêmes qu'il a fait pour s'instruire combien peu de chose sépare dans nos pauvres esprits une opinion de l'opinion opposée. Et il n'en est que plus disposé à tolérer dans les autres des sentiments qui ne s'accorderaient pas avec ceux qu'il a embrassés. La vérité est une mais les esprits sont différents. Et le fruit de toute instruction solide doit être autant cette bienveillance qui comprend tous les hommes que la lumière qui fait discerner la vérité".(Texte de juillet 1806, intitulé De l'unité religieuse en Europe. Tome 10 de l'éd. Adrien Le Clère p.232).
 Etonnant ! Nous avons sous les yeux la prose d'un des penseurs réputés des plus dogmatiques et le voilà qui fait l'éloge de la tolérance et de "cette bienveillance qui comprend tous les hommes". Quelle douceur ! Il est plus tranchant ailleurs et bien moins... tolérant :
"A mesure qu'il y a plus de lumière dans la société, il doit y avoir moins de tolérance absolue ou d'indifférence dans les opinions. L'homme le plus éclairé serait donc l'homme, sur les opinions, le moins tolérant. Et l'être souverainement intelligent doit être, par une nécessité de sa nature, souverainement intolérant des opinions, parce qu'à ses yeux aucune opinion ne peut être indifférente et qu'il connaît en tout le vrai et le faux des pensées des hommes. Cette  conséquence s'aperçoit même dans le détail de la vie des humaine, car combien de choses ou d'actions, qui paraissent à l'homme borné indifférentes et sans conséquences et qu'un homme éclairé juge dignes d'éloge ou de censure" (Texte de juin 1806 Réflexion philosophique sur la tolérance des opinions, éd. cit. p. 209).
Comment concilier les deux textes ? Par la vieille distinction chrétienne entre les personnes et les idées ou opinions (qui sont de moins en moins relatives ou confuses au fur et à mesure qu'on y réfléchit). On doit être tolérant avec les personnes qui, sans le savoir, ont toutes quelque chose du visage du Christ. On ne peut pas être tolérant avec les idées, puisque chacune dessine l'épure de son jugement ultime. Une idée n'est pas seulement vraie ou fausse. Sa vérité ou sa fausseté implique que se dessine une limite (une ligne de démarcation) entre le bien et le mal. En effet, selon la belle formule de Bonald "A mesure que les hommes s'éclairent, les questions s'éclaircissent". Les vérités apparaissent là où, auparavant, elles demeuraient cachées. Il est même possible nous dit le Christ que l'on voit "des choses cachées depuis la fondation du monde", à travers la lumière crue que le Christ jette sur notre Planète.

Ainsi aujourd'hui ceux qui soutiennent que l'interdiction du redoublement et la suppression des notes à l'Ecole participent d'une panoplie de mesures en faveur de l'intégration des immigrés et donc de la prévention des attentats (je pense nommément à Claude Bartolone dans une mémorable émission du Grand Jury RTL) profèrent des idées qui détruisent la transmission et qui font du mal aux enfants. Quelle tolérance peut-on avoir envers ce grand dessein de nivellement par le bas ? Aucune, parce qu'il a des conséquences dramatiques à court et à long termes. Mais quelle tolérance doit-on avoir envers celui qui profère de telles stupidités (et qui n'a certainement jamais été prof, confronté à des enfants dans une classe) ? Une tolérance infinie : Claude Bartolone a senti la République en danger. Il sent confusément qu'il faut prendre des mesures radicales, structurelles. Il n'en connaît pas d'autres (au vrai il n'en supporte certainement pas d'autres, cet intégriste laïc, que celles qui mitonnent depuis longtemps dans les IUFM et dans tous les pensoirs des pédagogistes. Alors il s'y accroche, sans examen. Encore un qui "adore les causes dont il déteste les conséquences". Il vérifie Bossuet malgré lui.

Et c'est malgré lui, aussi, que ce fils de la Veuve quitte l'esprit des Lumières sans tambours ni trompette. Il ne le sait pas encore, il se récrierait certainement. Mais son plaidoyer en faveur de la non sanction et de la non motivation des enfants mène droit à un univers déculturé où la grande devise que Kant donne aux Lumières, Sapere aude (Ose savoir) risque bien d'être un souvenir muséologique plutôt qu'un impératif toujours actif. Dans cette société sans hiérarchie des savoirs, la priorité sera fatalement donnée à l'autoreproduction des élites et l'on ne disposera plus d'aucun moyen véritable d'affirmer, dans l'égalité de tous, le mérite des plus doués.

Je crois décidément comme Bonald que "la bienveillance qui embrasse tous les hommes" [divine charité !] n'est en rien contradictoire avec "la lumière qui fait discerner la vérité".

5 commentaires:

  1. DSK est un grand consommateur de viande. Il ignore ce qu’est une prostituée. Quand il était au FMI il a sauvé le monde. Maintenant des prêtresses demi-nues se pressent sur son char.

    Monsieur le Président de la République a reperdu la moitié des dents qu’il avait récupérées dans l’euphorie de l’unité nationale.

    Pendant que le FN rallie un gentil gay de l’UMP ce dernier parti vire son responsable jeunesse, un malheureux clandestin qui nous arrivait du Cameroun.

    On sait enfin pourquoi le candidat UMP dans le Doubs a été éliminé au premier tour : il n’aimait pas les petits blonds. Des gens, un peu ridicules, ne cessent d’affirmer que c’est à cause de l’abstention.

    Sarko était considéré comme proricain. Présentement il soutient Poutine mordicus. Son revirement constituera sans doute le sujet de sa prochaine conférence dans le Golfe.

    En islam les femmes sont voilées ; le lycée musulman Averroès de Lille avance masqué.

    Le grand acteur Roger Hanin est mort. On se rappellera son extraordinaire prestation dans « Rocco et ses frères » où il incarnait un proxénète nord-africain.

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  2. Souvent je me suis demandé aux récits de la Révolution française comment les parisiens des faubourgs dont celui de Saint Antoine avaient pu en peu d'années se muer en massacreurs et spectateurs assidus d'une guillotine qui ne chômait pas. Haines de classe ?
    Or les statistique réalisées à la fin du XXème siècle sur les victimes guillotinées enterrées au cimetière de Picpus à Paris montrent qu'elles étaient en majorité d'origines modestes pour ne pas dire pauvres.Longtemps j'ai pensé que les débordements de cette révolution étaient un accident de l'Histoire, une crise de folie furieuse .
    Hélas l'arrivée au pouvoir d'une nouvelle gauche en 2012 dictatoriale, anti-catholique, sectaire , nous éclaire sur à quoi ressemblaient les enragés de 1793.
    Vous avez dit tolérance ? Mais ces gens de 1793 ou de maintenant n'ont aucunement l'intention d'être tolérants envers qui est sur leur " droite" .

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  3. La tolérance est nécessaire, dans la politique ou la religion. On peut défendre nos points de vue, mais on doit nous avertir de ne pas être trop radicaux. La politique devrait éviter de nuire à la majorité de la population :faire attention à l ´éducation, à l ´écologie, (la nature), à la santé, donner possibilités de travail a tous les gens, etc.
    La religion aussi doit être prudent e n´être pas trop extremiste : chaque personne respecter la religion des autres, sans perdre ses propres croyances.
    Le problème aujourd´hui me semble que l´homme veut toujours « DOMINER » l ´autre, il veut « IMPOSER « ses raisons et vérités à l ´autre.
    Et cela ne va jamais fonctionner bien, car les gens sont différents les uns des autres, nous ne sommes pas des robots fabriqués en série !...
    Par conséquent, éviter la violence, à la mesure du possible ; mais nous battre contre toutes les formes d´extrémisme, en politique ou en religion.

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  4. La première lecture bonaldienne était résolument orientée vers la charité. Charity first : on ne tire pas, même sur l’infâme. On ne peut en vouloir à personne, surtout pas à notre abbé.

    La seconde est dans une autre tonalité. Avec les capacités qui nous ont été allouées par le Créateur il s’agit de démêler le bon grain de l’ivraie, de séparer le vrai du faux – qui est le mal. L’analyse scientifique, rigoureuse, contrôlée, nous rapproche de Dieu. Le maître mot n’est plus charité mais lucidité. Tirer sur tout ce qui bouge devient davantage obligation que permission. Nous sommes d’accord.

    Dans la passion qui l’anime notre abbé s’est laissé entrainer sur des chemins qui ne sont pas à sa mesure.
    Pourquoi s’interroger à nouveau sur l’école alors qu’il n’y a plus en France d’enseignement secondaire depuis la réforme Haby, tous les spécialistes vous l’affirmeront.
    D’ailleurs, sérieusement, les gens de pouvoir ont-ils besoin que le peuple soit éduqué, enseigné, cultivé ?

    Pourquoi citer un personnage transparent et minuscule, lequel du haut de son perchoir essaye de se faire aussi chatoyant que le paon.
    Quand on disait devant Groucho Marx « Ceci est évident, un enfant de 5 ans le comprendrait » il avait l’habitude de répondre « Allez me chercher un enfant de 5 ans ». La raison en était qu’il ne connaissait pas Bartolone.

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    1. N'injuriez pas les enfants en les comparant à ce triste personnage ,"ébloui" par sa "réussite"

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