samedi 19 décembre 2015

O Adonaï !

Voici - avec un peu de retard - la deuxième des antiennes O...
O Adonai et dux domus Israel, qui Moysi in igne flammae rubi apparuisti, et ei in Sina legem dedisti : veni ad redimendum nos in bracchio extento. 
O Adonai, Et chef de la maison d’Israël, toi qui te manifestas à Moïse dans le feu de la flamme du Roncier et qui lui a donné la Loi sur le Sinaï : Viens, Seigneur, nous racheter en étendant ton bras.
Adonai ! Le Seigneur… C’est le nom humain pour désigner la Divinité insondable dans sa réalité indicible. Chaque fois que le nom de Yahvé – ce tétragramme sacré, se trouve écrit, chaque fois l’Israélite pieux se contente de dire : Adonaï. C’est avec ce nom qu’il prie ou qu’il invoque : O Adonaï ! Et nous reprenons cette prière millénaire des juifs, célébrant en Yahvé « le chef de leur maison » : dux, celui qui conduit, celui qui guide son peuple au Désert, celui qui se fait connaître non pas en lui-même (« Si tu l’as compris ce n’est pas lui » dit saint Augustin), mais dans la conduite, dans les directives, dans la loi qu’il donne à son peuple. Non fecit taliter omni nationi : il n’agit pas ainsi avec toutes les nations, mais avec sa maison, avec ceux qu’Il appelle, qui provienne de partout, mais qui, à eux tous, forment sa maison. Avec ses domestici, avec ses familiers, quelle n’est pas la douceur du Seigneur ! Que faut-il faire pour être un membre de la maison du Seigneur ?

Il faut reconnaître son Verbe, être attentif aux deux Paroles qu’il a dites à Moïse, et d’abord celle qu’il a dite dans le Buisson ; puis celle qu’il a proférée sur la Montagne du Sinaï. 

La première parole est son Nom : « Celui qui est », un nom qui peut s’entendre de deux façons, comme désignant l’être de tous les êtres ou comme annonçant que l’on ne peut le connaître d’avantage que par ces mots : « Celui qui est », qu’on ne peut l’enfermer dans aucun qualificatif humain. C’est une parole pour dire qu’il est au dessus de toutes les Paroles, qu’il est la Parole ou le sujet de la Parole, le JE du JE SUIS. Dans le Buisson, Dieu dit JE et toutes les personnes sont à son image quand elles disent JE. « La personne est ce qu’il y a de plus parfait dans tout l’Univers » dit saint Thomas. C’est l’image la moins défaillante de ce qu’est Dieu. Ce Dieu qui est ou plutôt ce Dieu qui dit JE SUIS.

Mais Dieu n’a pas seulement donné son nom, il a donné dix Paroles, qui sont les deux tables de la loi, qui elles-mêmes se résument dans les deux commandements du Christ : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de toute ta force et ton prochain comme toi-même » (Matth. 13). Ces dix paroles sont comme le mode d’emploi de cette drôle de machine qu’est l’homme. Ne pas respecter le mode d’emploi, c’est s’exposer à détruire la machine ! Dans sa première parole Dieu s’est nommé lui-même. La deuxième fois qu’il s’adresse à nous, il nomme, par antiphrase ce qui est vraiment humain.

Si nous sommes attentifs à ces deux paroles, nous devenons des Craignant Dieu, membres de l’Israël véritable, celui de l’origine et de la fin, celui de l’Esprit. Où est l’Esprit ? Dans « le feu de la flamme du Roncier », qui n’est ni le Roncier, ni même la flamme, mais qui est le feu de la flamme, sa puissance, son rougeoiement dans le roncier, rougeoiement qu’indique l’étymologie de ce mot étrange, « rubus », un mot qui n’est pas dans le Gaffiot et qu’il faut chercher dans les vieux dictionnaires.

Le nom de Dieu nous est donné, nous pouvons avoir foi en lui. La loi de Dieu nous est donné aussi, mais elle ne suffit pas. « S'il eût été donné une loi capable de procurer la vie, la justice viendrait réellement de la loi » dit saint Paul aux Galates (3, 21). « Alors pourquoi la loi ? Elle a été ajoutée en vue des transgressions » (Gal 3, 18). Par nous-mêmes, nous n’arrivons pas à l’observer. Dieu seul est notre suffisance (II Co. 3, 5), continue saint Paul ailleurs, en jouant sur le vieux nom El Shaddaï, le Suffisant. Dieu seul est notre salut. Nous ne nous sauvons pas nous-mêmes. 

Qu’est-ce que le salut ? On dit souvent que le nom de Jésus signifie « Dieu sauve » Yehoshua… C’est une erreur. D’après Jacqueline Genot Bismuth, Yeshua signifie simplement SALUT. C’est en quelque sorte déjà un nom divin car, c’est vrai, Dieu seul sauve. C’est parce que Jésus est un nom divin, que le Coran a oublié ce nom et parle de Issa. Comment Jésus nous sauve ? En étendant son bras, c’est-à-dire en payant de sa Personne. Il nous a racheté « cher » note saint Paul – encore lui. C’est ce rachat, pur don de miséricorde, que l’on nomme salut. Veni ad redimendum nos ! Venez nous racheter !

5 commentaires:

  1. Merci de votre texte et joyeux Noel!

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  2. LE MOI EST-IL UNE PERSONNE ?


    "Dieu dit JE et toutes les personnes sont à son image quand elles disent JE", écrivez-vous.

    J'ai le rare privilège de me souvenir de ma prise de conscience. Un matin, je me suis réveillé, et je me suis demandé, non pas quel était le visage (je ne les voyais pas) de mes parents, mais quelle était leur voix. Je les ai découvertes, il y en a une que j'ai aimée plus que l'autre, n'importe. Un soir, je me suis endormi vagissant dans la conscience simultanée et un matin, je me suis réveillé conscient.

    Ce qui m'a étonné rétrospectivement est que la première question que je me suis posée était celle de ma filiation. Bien plus tard, je l'ai récusée, puis j'ai essayé d'assumer ce que je pouvais de l'héritage ou de la condition de fils. Mais dans ce premier éveil de ma conscience d'enfant qui jouait dans le couloir, autant il m'était facile d'identifier mes parents quoi que j'en pense, autant je ne parvenais pas à m'identifier à moi-même. Sitôt que j'essayais, tout devenait pesant alors que j'étais chétif et rachitique à faire pitié. Je faisais passivement l'expérience de ce que Rimbaud a formulé activement en disant : "Je est un autre".

    « La personne est ce qu’il y a de plus parfait dans tout l’Univers » dit saint Thomas." A ce compte, est-ce "je" ou "moi" qui suis une personne ? Quelle perfection y a-t-il en "je" si, ne pouvant m'identifier à moi-même, je ne puis pas répondre de mes actes ? Serais-je coupable et pas responsable ?

    Certes, si je me réfère à ce que Dieu révèle de Lui-même au buisson ardent, tout ce que j'arrive à fixer de Lui, c'est que son Verbe est "le sujet de toutes les paroles" (Il est donc aussi le sujet de tous mes RAPPORTS SUR MOI et si c'est le cas, ma question est résolue), mais parce que l'être est l'objet du "noli me tangere", Il donne ses prolégomènes à la théologie apophatique. Si donc c'est "je" et non pas "moi" qui suis une personne, je suis trop l'analogue de Dieu en ce que ce que je suis, dans mon cas m'excède, mais excède ce que je peux en dire. Ce que je suis excède ce en quoi je puis répondre de moi. Et autant le fait que je sois l'analogue de Dieu en excédant ce que je peux en dire pourrait donner prise à mon orgueil, à mon prométhéisme, voir à mon prothéisme, autant, au contraire, le fait que je ne peux pas répondre de moi, que je ne suis pas identique à moi-même, que je suis même étranger à moi-même constitue une humiliation. Plus j'avance et moins je me ressemble.Une distance semble avoir été mise entre moi et moi-même pour que je ne puisse pas me ressembler, m'admirer ou me regarder. Je suis interdit de narcissisme puisque je ne fais pas ce que je veux. Plus je vais, plus mes actes s'éloignent de moi. Je n'ai pas donné, en matière de résultat, ce que je promettais en fait d'espérances. Je ne suis pas devenu ce qui se dégageait de moi, l'addition promet d'être salée. Plus mes actes s'éloignent de moi, plus je m'aperçois que je ne peux plus être sauvé que par un transfert de justification, qui, s'il n'est pas miraculeusement opéré par le Dieudont le Nom est Salut, doit m'entraîner inexorablement et logiquement dans la seconde mort, moi dont la vie est pavée de bonnes intentions, mais dont les œuvres ne correspondent pas.

    "Je suis un autre", j'ai besoin d'un Sauveur ! Si j'étais moi, je me suffirais. Je ne suis pas fait pour moi, mais pour Lui.

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  3. LA LOI DU NOM

    Il y a quelque chose de changé au royaume des hommes depuis qu'Il est venu. Non pas certes visiblement. Visiblement, tout continue de dysfonctionner. Certains adventistes pensent même qu'il y a une loi de l'entropie par laquelle la régression historique ira à l'encontre du progrès technique et que tout ira de mal en pis jusqu'au dernier dévoilement. Ce qui est changé, c'est que l'homme n'est plus sauvé par la loi, il est entraîné dans le NOM du Salut ! Ce qui a changé, c'est que la religion de la loi est devenue la Loi du Nom. "Par quelle autorité fais-tu cela ?" demandent les scribes. "Par l'autorité de Mon Nom : On vous a dit, Moi je vous dis, et Je vous le dis sans abroger un iota de la loi."

    Dès lors, la question de savoir qui, de "je" ou de "moi", est une personne, voir si le fait pour moi de devenir personne suppose l'abdication de ma personnalité, la question se transforme. A la Ressemblance de Dieu, "je" deviens identique au message que porte mon Nom. Je ne deviens pas mon mental, mais un peu ma musique intérieure. Je ne deviens pas la différence de ce que j'ai consommé et de ce que j'ai assimilé, ou la somme de ce que j'ai produit en espérant que j'aie produit au-dessus de mes moyens, je ne deviens pas ce que je pense de moi ou la réputation qui me précède, je deviens ce que je suis sous le regard de Dieu et dans l'oreille de ceux qui entendent ma musique. Malraux l'a dit, moi, je m'entends dans ma poitrine, les autres m'entendent de leurs oreilles.

    A la différence de Dieu Qui est mieux cru de moi qu'Il n'est compris, fût-ce de Lui-même, j'En suis mieux compris que je ne suis crédible à mes propres yeux.

    J'En suis compris, donc pardonné si je l'accepte, et si j'accepte que ce n'est pas à moi de m'accepter, mais à Lui de me pardonner.

    De même que ce n'est pas à moi de me réaliser, c'est à Lui de me justifier.

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  4. (commentaire posté il y a longtemps, mais non publié, donc reposté à présent pour le cas où ce serait un oubli...)

    LE MOI EST-IL UNE PERSONNE ?


    "Dieu dit JE et toutes les personnes sont à son image quand elles disent JE", écrivez-vous.

    J'ai le rare privilège de me souvenir de ma prise de conscience. Un matin, je me suis réveillé, et je me suis demandé, non pas quel était le visage (je ne les voyais pas) de mes parents, mais quelle était leur voix. Je les ai découvertes, il y en a une que j'ai aimée plus que l'autre, n'importe. Un soir, je me suis endormi vagissant dans la conscience simultanée et un matin, je me suis réveillé conscient.

    Ce qui m'a étonné rétrospectivement est que la première question que je me suis posée était celle de ma filiation. Bien plus tard, je l'ai récusée, puis j'ai essayé d'assumer ce que je pouvais de l'héritage ou de la condition de fils. Mais dans ce premier éveil de ma conscience d'enfant qui jouait dans le couloir, autant il m'était facile d'identifier mes parents quoi que j'en pense, autant je ne parvenais pas à m'identifier à moi-même. Sitôt que j'essayais, tout devenait pesant alors que j'étais chétif et rachitique à faire pitié. Je faisais passivement l'expérience de ce que Rimbaud a formulé activement en disant : "Je est un autre".

    « La personne est ce qu’il y a de plus parfait dans tout l’Univers » dit saint Thomas." A ce compte, est-ce "je" ou "moi" qui suis une personne ? Quelle perfection y a-t-il en "je" si, ne pouvant m'identifier à moi-même, je ne puis pas répondre de mes actes ? Serais-je coupable et pas responsable ?

    Certes, si je me réfère à ce que Dieu révèle de Lui-même au buisson ardent, tout ce que j'arrive à fixer de Lui, c'est que son Verbe est "le sujet de toutes les paroles" (Il est donc aussi le sujet de tous mes RAPPORTS SUR MOI et si c'est le cas, ma question est résolue), mais parce que l'être est l'objet du "noli me tangere", Il donne ses prolégomènes à la théologie apophatique. Si donc c'est "je" et non pas "moi" qui suis une personne, je suis trop l'analogue de Dieu en ce que ce que je suis, dans mon cas m'excède, mais excède ce que je peux en dire. Ce que je suis excède ce en quoi je puis répondre de moi. Et autant le fait que je sois l'analogue de Dieu en excédant ce que je peux en dire pourrait donner prise à mon orgueil, à mon prométhéisme, voir à mon prothéisme, autant, au contraire, le fait que je ne peux pas répondre de moi, que je ne suis pas identique à moi-même, que je suis même étranger à moi-même constitue une humiliation. Plus j'avance et moins je me ressemble.Une distance semble avoir été mise entre moi et moi-même pour que je ne puisse pas me ressembler, m'admirer ou me regarder. Je suis interdit de narcissisme puisque je ne fais pas ce que je veux. Plus je vais, plus mes actes s'éloignent de moi. Je n'ai pas donné, en matière de résultat, ce que je promettais en fait d'espérances. Je ne suis pas devenu ce qui se dégageait de moi, l'addition promet d'être salée. Plus mes actes s'éloignent de moi, plus je m'aperçois que je ne peux plus être sauvé que par un transfert de justification, qui, s'il n'est pas miraculeusement opéré par le Dieudont le Nom est Salut, doit m'entraîner inexorablement et logiquement dans la seconde mort, moi dont la vie est pavée de bonnes intentions, mais dont les œuvres ne correspondent pas.

    "Je suis un autre", j'ai besoin d'un Sauveur ! Si j'étais moi, je me suffirais. Je ne suis pas fait pour moi, mais pour Lui.

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  5. (suite)

    LA LOI DU NOM

    Il y a quelque chose de changé au royaume des hommes depuis qu'Il est venu. Non pas certes visiblement. Visiblement, tout continue de dysfonctionner. Certains adventistes pensent même qu'il y a une loi de l'entropie par laquelle la régression historique ira à l'encontre du progrès technique et que tout ira de mal en pis jusqu'au dernier dévoilement. Ce qui est changé, c'est que l'homme n'est plus sauvé par la loi, il est entraîné dans le NOM du Salut ! Ce qui a changé, c'est que la religion de la loi est devenue la Loi du Nom. "Par quelle autorité fais-tu cela ?" demandent les scribes. "Par l'autorité de Mon Nom : On vous a dit, Moi je vous dis, et Je vous le dis sans abroger un iota de la loi."

    Dès lors, la question de savoir qui, de "je" ou de "moi", est une personne, voir si le fait pour moi de devenir personne suppose l'abdication de ma personnalité, la question se transforme. A la Ressemblance de Dieu, "je" deviens identique au message que porte mon Nom. Je ne deviens pas mon mental, mais un peu ma musique intérieure. Je ne deviens pas la différence de ce que j'ai consommé et de ce que j'ai assimilé, ou la somme de ce que j'ai produit en espérant que j'aie produit au-dessus de mes moyens, je ne deviens pas ce que je pense de moi ou la réputation qui me précède, je deviens ce que je suis sous le regard de Dieu et dans l'oreille de ceux qui entendent ma musique. Malraux l'a dit, moi, je m'entends dans ma poitrine, les autres m'entendent de leurs oreilles.

    A la différence de Dieu Qui est mieux cru de moi qu'Il n'est compris, fût-ce de Lui-même, j'En suis mieux compris que je ne suis crédible à mes propres yeux.

    J'En suis compris, donc pardonné si je l'accepte, et si j'accepte que ce n'est pas à moi de m'accepter, mais à Lui de me pardonner.

    De même que ce n'est pas à moi de me réaliser, c'est à Lui de me justifier.

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