mardi 11 novembre 2008

[Monde&Vie] L'abbé René-Sébastien Fournié relance les convicts

L'abbé René-Sébastien Fournié, ordonné prêtre le 22 septembre 2007 par le cardinal Castrillon Hoyos dans l'église Saint-Eloi à Bordeaux, est aujourd'hui responsable du deuxième cycle de la formation sacerdotale pour l'Institut du Bon Pasteur à Rome.

Interview parue dans Monde&Vie n°802 du 3 novembre

M. l'abbé, vous êtes aujourd'hui responsable de six séminaristes de l'Institut du Bon Pasteur qui font leurs études de théologie à Rome. Pourquoi avoir pris cette initiative?
Dès sa création, l'Institut du Bon Pasteur a installé une maison à Rome, car l'abbé Laguérie s'y étant rendu régulièrement avant la naissance de l'IBP, a eu cette lumineuse intuition qu'il fallait être présent dans la Ville Eternelle. Il est en effet important de bénéficier du grand mouvement de réforme touchant les universités pontificales. Comme le disait Benoît XVI, l'urgence se trouve tant dans l'apostolat paroissial que dans la crise intellectuelle et culturelle qui secoue notre société. Former des séminaristes de second cycle à Rome est donc une réponse à ce défi. Il s'agit de donner des prêtres de la Tradition sans complexe et conscients de la vie réelle de l'Eglise et des problèmes qu'il faut résoudre.
Mais, n'y a-t-il pas une contradiction à vouloir former des séminaristes en théologie dans les Universités romaines quand on est une communauté dite traditionaliste?
Vous vous inquiétez du caractère spécifique de la formation que nous donnons à nos séminaristes. Je voudrais souligner que nos séminaristes prendront leurs grades à Rome et qu'ils pourront faire état d'une formation normale. En même temps, un solide programme de formation, propre à notre Institut, a été planifié. Chaque jour, nos apprentis théologiens poursuivent, l'après-midi, des travaux dirigés, en dogmatique, en morale; ces matières sont travaillées conformément aux directives du pape Saint Pie X: Etude de Somme théologique, où les séminaristes se plongent question par question et article par article dans la pensée de saint Thomas d'Aquin. En outre, un cours de théologie pastorale nous permet de mettre en œuvre la critique constructive de Vatican II, à laquelle nos fondateurs se sont engagés. Quand il est dit que Vatican II doit être compris « à la lumière de la Tradition » ou selon « une herméneutique de la continuité », cela signifie qu'il faut non seulement connaître cette Tradition, mais aussi le concile en question. Or bien souvent, on s'aperçoit que dans ce grand débat sur Vatican II, qu'il s'agisse de le défendre coûte que coûte ou de le mettre en accusation de façon systématique, beaucoup ne le connaissent pas.
Cette maison de formation romaine est-elle un séminaire?
Permettez-moi à nouveau de citer nos statuts sur ce point: « La forme usuelle du séminaire telle que conçue depuis deux siècles, pourra être modifiée, avec beaucoup de prudence, au profit d'unités plus petites «dites convicts», plus proches de la vie paroissiale et somme toute plus traditionnelles. Ces convicts formeront un tout organique, conformément au can. 235, § 1 » (Statuts de l'Institut du Bon Pasteur, III, 1). C'est précisément ce que vivent ces séminaristes. Dans un cadre plus restreint - par rapport aux grands séminaires traditionnels - les candidats au sacerdoce sont invités à prendre des responsabilités au quotidien et à entrer ainsi dans un mode de vie plus proche de celui qu'ils connaîtront comme prêtres. La sagesse de la responsabilité ne s'enseigne pas, elle se vit!
Vous aviez organisé des ordinations à Saint- Jean-du-Latran en février dernier, ce qui était une première dans cette basilique. Vous réservez-nous d'autres ordinations du même genre cette année?
Et bien d'autres surprises... Mais permettez- moi de ne pas éventer des projets en cours de finalisation. Certains de nos séminaristes à Rome seront certainement appelés à être ordonnés sous-diacres à partir du mois de mars et si Dieu le veut, cela devrait se faire dans une église prestigieuse de la Ville Eternelle avec des personnalités du Saint-Siège dont la présence sera un signe fort pour l'Institut du Bon Pasteur.
Vous avez ouvert récemment un site internet (www.ibproma.com). Pouvez. vous nous en parler?
Cela faisait longtemps qu'on nous demandait d'ouvrir un site. Après plusieurs mois de réflexion, nous nous sommes donc lancés, et à l'image de ce qui se passe dans notre maison, tout le monde y participe. Nous y proposons diverses rubriques: Théologie, philosophie, visites de Rome, actualités religieuses, faits de société, etc. Mais sous peu, nous allons aussi donner des nouvelles plus fréquentes de nos activités et de notre vie romaine. Le site est bien suivi mais beaucoup demandent plus d'informations sur notre communauté. Ce sera fait!
Dernière question: comment êtes-vous reçus à Rome?
Pour encourager la générosité de donateurs potentiels, le cardinal Castrillon Hoyos a écrit lui-même à propos de notre convict romain que « l'aide à la formation des séminaristes de cet Institut sera certainement un don fait au Seigneur ». Peu de temps auparavant, Mgr Gaenswein, le secrétaire personnel du pape a fait savoir que Benoît XVI soutenait personnellement notre maison de l'IBP-Roma et qu'il la jugeait « très intéressante ». Avec de si hauts patronages, notre installation à Rome n'a pas suscité de réticences ! Mais c'est de votre aide que nous avons besoin! Tout don (à l'ordre de l'ADCC) ou demandes de renseignements peuvent être adressés à l'IBP-Roma au 19, rue Brochant - 75017 Paris; ou au Via Giogio Bolognetti, 1 - 00151 Roma (tel. 00 39 327 55 17 830). Chaque personne qui acceptera de nous tendre une main secourable se verra attribué le parrainage d'un séminariste qui priera pour ce bienfaiteur et sa famille quotidiennement, ainsi que bien d'autres services quand ils viendront à Rome: organisation de leur voyage, visites au cœur du Vatican, messes à la Basilique Saint-Pierre, réservation d'audience au plus près du pape, etc.

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Mise à jour - 14 novembre 2008
Suite aux échanges (voir ci-dessus) qui ont suivi sur le sens du mot convict (forçat, en anglais et chez Jules Verne), un lecteur nous envoie un extrait du Supplément au Glossaire de la langue Romane, par Jean Baptiste Bonaventure de Roquefort (1808):

4 commentaires:

  1. Or bien souvent, on s'aperçoit que dans ce grand débat sur Vatican II, qu'il s'agisse de le défendre coûte que coûte ou de le mettre en accusation de façon systématique, beaucoup ne le connaissent pas.

    C'est vrai que plusieurs fois j'ai surpris de farouches défenseurs de Vatican II en flarant délit d'ignorance.

    Et une fois j'ai même été jusqu'à citer ledit Concile pour infirmer les propos de mon interlocuteur !
    Il niait l'existence de la suprématie du Pape (et même son infaillibilité) sur les Evêques, je lui ai cité le passage de Vatican II relatif à la forme ex-cathedra...
    Il n'a pas beacoup apprécié !!!

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  2. L'anecdote est très révélatrice. Merci.
    GT

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  3. Quelle bonne nouvelle que la création de cette maison !
    Me permettez-vus une petite question d'ordre sémantique ? Je n'ai trouvé le mot convict ni dans le dictionnaire de trévous de 1731 ni dans le dictionnaire de l'acamdémie de 1776. Par contre dans les dictionnaires plus récents (Littré, Grand Robert, Trésor de la Langue française (en ligne), il n'en est fait mention de que dans l'acception moderne (à savoir "forçat"). Pourriez-vous préciser le sens de ce terme ?

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  4. Cher anonyme,
    Vous avez raison de souligner qu'un convict, au sens anglais du terme (et dans Jules Verne par exemple d'après mes souvenirs de jeunesse) c'est un forçat. Mais, dans la langue ecclésiastique, qui n'est guère académique, mais néanmoins assez riche, on parle assez couramment un sabir latino-français dont convict fait partie. Le terme vient de con-vivere, vivre ensemble. il est piquant de constater que la vie commune ait été assimilée à la vie au bagne et à ceux qui la mène. Je pense pouvoir témoigner que sous la houlette de René Sébastien Fournié, la vie à Rome dans notre convict n'a rien à voir avec un bagne et que cette allusion n'est pertiente que par antiphrase.

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