dimanche 29 janvier 2012

Franz-Olivier Giesbert et Dieu

Bien écrit le dernier livre de FOG... Et ce n'est pas si facile aujourd'hui de faire parler les mots quand on veut évoquer le Dieu tout puissant. Giesbert y parvient. Il trouve les mots, dans un domaine où le réel trop souvent nous échappe. Il évoque sa mère avec beaucoup d'affection et il reconnaît que c'est à sa mère qu'il doit Dieu. D'où ce titre qui pourrait paraître grandiloquent, mais qui n'est que modeste : Dieu ma mère et moi (éd. Gallimard).

Giesbert a une jolie façon de nous dire sa foi, c'est de la faire dire par Tonton : "Entre chacune de nos brouilles, François Mitterrand commençait toujours par la même question l'entretien de la réconciliation - Vous croyez toujours en Dieu ? - Pourquoi n'y croirais-je pas ? - Je vous envie". Suit une petite leçon du dit FOG. A Tonton, lui disant de façon assez banale : "C'est tellement beau la Bible". FOG répond tout à trac, il se fait tranchant tout d'un coup : "Vous perdez votre temps. La Bible c'est le dernier endroit où vous pourrez trouver Dieu. Il est dehors, dans la vie, dans la nature, il suffit d'ouvrir les yeux pour tomber dessus".

L'Ecriture, dernier endroit où vous pourrez trouver Dieu ? Moi qui lit L'Institution chrétienne de Calvin en ce moment, je suis surpris par les certitudes de Giesbert. "L'Ecriture, recueillant en nos esprits la connaissance de Dieu, qui autrement serait confuse et éparse, abolit l'obscurité pour nous montrer clairement quel est le vrai Dieu" écrit le réformateur de Genève. Calvin a sans doute tort de réputer "claire" l'Ecriture. Jean Chrysostome pensait le contraire, il tenait que l'obscurité des prophéties est une nécessité. Dieu ne cherche pas à offrir à l'intelligence humaine un produit facile à digérer. Il veut en accroître le champ, Il entend nous sortir de l'ignorance "qui est le siège naturel de l'homme" comme dit Pascal quelque part. Si l'Ecriture était absolument à notre portée, elle n'engendrerait pas la foi... Mais je ne chicane pas Calvin ! J'aime la langue dans laquelle il nous dit combien l'Ecriture est précieuse. Giesbert est moins clair.

Moins clair dans ses provocations (l'Ecriture dernier endroit où l'on trouve Dieu). Moins clair dans ses supputations, sa manière "spinozienne" de croire en un Dieu panthéiste, en un Dieu qui EST la nature.

Quelle image Giesbert a-t-il de la nature pour la diviniser ainsi ? Il se dit résolument végétarien (comme François d'Assise). Mais les animaux, eux ne le sont pas : le lion mange la gazelle. C'est cela aussi la nature. Comment donc peut-elle être le dieu de Giesbert ?

Décidément à tout prendre je préfère Calvin. Peut-on dire (comme Giesbert) que Dieu est la nature ? Voici la réponse du Réformateur : "Je confesse bien sainement que Dieu est nature, moyennant qu'on le dise en révérence et d'un coeur pur ; mais parce que c'est une locution dure et impropre, vu que plutôt nature est une ordre établi de Dieu, c'est une chose mauvaise et pernicieuse, en choses si grandes et où l'on doit procéder en toute sobriété, d'envelopper la majesté de Dieu avec le cours inférieur de ses oeuvres".

Oh ! Calvin n'explique pas.

Vous chercheriez vainement chez lui une théologie, au sens contemporain de ce mot. Son oeuvre offre avant tout une rhétorique, dont le procédé le plus fréquent est l'affirmation. Le premier usage de son Institution chrétienne est social, comme son nom même l'indique. Il s'agit de continuer à affirmer tout ce que l'on peut affirmer, contre les critiques radicales qui fleurissent ici ou là (parmi lesquels celle de l'ami Michel Servet, dont on sait qu' à Genève, il finira sur le bûcher avec la bénédiction de Calvin. A quoi rime de subtiliser sur la Trinité, en jouant les modalistes ?). Un seul impératif pour Calvin : la clarté, jusque dans l'exposition du Mystère. Pour lui le panthéisme ne joue pas parce que l'on ne confond pas les torchons et les serviettes : on ne peut pas, on n'a pas le droit d'envelopper la majesté de Dieu avec le cours inférieur de ses oeuvres.

Cette clarté calvinienne est dangereuse, dans un domaine où l'homme a du mal à la faire apparaître. Mais, à tout prendre, je préfère l'idéal de clarté de Calvin au panthéisme mondain de FOG. Il faudra que je vous parle de la manière dont FOG envisage le rapport entre Dieu et le sexe. C'est sans doute le ressort le plus profond de sa toute nouvelle "théologie de salon"

14 commentaires:

  1. Vu Giesbert chez Ruquier, il ruisselait le relativisme complaisant et satisfait... "faites vous chacun votre religion, si vous cherchez des idées, piochez dans la mienne, elle est originale et poétique...". Ca m'a donné la nausée.

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  2. Bravo, Monsieur l'Abbé pour votre article. Vous avez bien raison de relire Calvin dans l'original français. Tout n'est pas faux dans cet auteur. Malheureusement, ses séides ont "gauchisé" son oeuvre et lui ont fait die plus que ce qu'il avait réellement dit. Bien entendu ce pauvre FOG n'a rien à voir : laissons-le dans son néant.

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  3. Monsieur l'abbé,
    en voulant tout simplement nous présenter un livre, vous abordez en fait plusieurs thèmes.
    L'un d'eux étant l'Ecriture. Récemment, lisant les livres de Mr Gherardini sur la Concile V. II, je suis tombée sur une phrase qui m'a étonnée avant que je comprenne l'ensemble du développement. Je cite:
    "L'écriture n'est pas rigoureusement parlant la Parole vivante de Dieu; elle en est le témoignage et le mémorial"
    En fait, d'après ce que j'ai compris ( car nous laïcs, nous avons certaines lacunes en théologie!!) l'Ecriture, la Tradition et le Magistère, tous trois d'origine divine sont indissociables. La Tradition transmet la Révélation...Le Magistère confirme ce qu'est ou n'est pas la Parole de Dieu... C'est donc dans ce "tout"qui caractérise notre "Sainte et bien-aimée" Eglise que l'Ecriture peut devenir pour nous "Lumière" véritable, c'est à dire "Parole de Vie". Mais si, comme les réformés l'ont fait, nous supprimons un de ces 3 éléments alors l'Ecriture, soumise au seul raisonnement humain se referme dans "l'obscurité"...
    Tout cela n'est peut-être pas un "scoop" pour vous, mais pour moi cela a été une belle révélation.

    Je dois aussi ajouter que je suis aussi, comme St François d'Assise, végétarienne. Votre argument sur les animaux qui eux ne le seraient pas ne tient pas compte du fait que notre péché fit tomber la création toute entière et qu'il est un Royaume où le lion et la gazelle paîtront ensemble...
    Il est bien rare de retrouver l'esprit du grand" poverello"pour qui toute la nature est soeur! Sur cette terre sacrificielle où l' homme est le grand prédateur, notre cécité est telle que nous ne voyons pas que les "plus petits" sont aussi ceux-là . L'anthropocentrisme n'a pas de limite bien que... je pense que chaque révolution copernicienne arrive à son heure . Ici ce serait de passer à une "vision du monde" où le centre n'est pas l'humain, mais Dieu sans qui "rien n'a été fait"et que "tout ce qui a été fait par Lui" est digne d'amour!
    Quant à ce bouquin que vous citez, ça ne donne pas envie de le lire surtout lorsque il y en a tant d'autres en attente!
    C.B

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  4. Pourquoi avoir changé le fond d'écran. Je trouve ce jaune criard. Le bleu était plus reposant pour les yeux.

    Merci de l'attention que vous voudrez bien apporter à ce détail bassement matériel.

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  5. For Christ's sake, comme on dit, remettez l'ancien fond d'écran. Vos nouveautés me donnent le tournis.

    Un internaute qui vous remercie de votre compréhension.

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  6. Comme vous Madame (de 09h09) je suis (presque) végétarien, non que je n'apprécie pas la viande mais les souffrances que l'on fait endurer aux animaux, sans parler du monstrueux abattage prétendu rituel, ont fini par me rendre insupportable, la consommation de leurs cadavres.

    Devant la gare de Tours, avant Noël, dans un petit marché dressé pour l'occasion, une dame m'a expliqué à fond comment on obtenait le foie gras, par exemple, au point de rendre ces animaux près d'exploser vivants, et le reste (broyage immédiat de tous les poussins non conformes etc.)...Je peux dire que ce fut un bonheur de ne pas en ingurgîter un seul gramme, pour les "Fêtes" (pas pour ces pauvres bêtes, au martyre).

    Quant à FOG...oh bof! C'est bien ce que je pensais, sans le connaître vraiment: un bobo, plus ou moins sympathique, selon les goûts, un garçon intelligent au demeurant.

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  7. A Thierry

    Plutôt que de s'apitoyer sur le sort des animaux, ne croyez-vous pas que l'on devrait s'occuper de nos frères humains qui souffrent de la faim, de la misère, de la guerre, de la persécution, de la solitude ou de l'esclavage et j'en passe.

    SVP gardez votre sensiblerie boboïsante pour vous et intéressez vous aux vrais problèmes.

    En ce qui concerne l'abattage rituel (mais l'on voit à qui vous faites allusion), Jésus n'a jamais mangé que de la viande casher toute sa vie.

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  8. Ce qui est bien c 'est qu'!l y a toujours des gens très "biens" très sérieux" et qui eux connaissent les "vrais problèmes" mais qui par contre peuvent malheureusement aussi avoir des hallucinations et voir de la viande casher dans les évangiles! En technicolor et en 3D!
    Le principal c'est de faire la morale aux autres. C'est bien, très évangélique. Bravo!
    Je savais que ce sujet est tabou. Mais je ne regrette pas car que les mêmes "lapalissades "reviennent toujours égales à elles-mêmes, ennuyeuses et pas très intelligentes!
    Excusez-moi si j'ai blessé votre appétit de carnivore!
    C.B

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  9. Merci de tout coeur, C.B., de votre amical soutien, et d'avoir répondu avec tact, à ma place...ce genre de réactions (à 01h23) me fatigue d'ailleurs, et cette manière de moralisation bête comme chou, me fait bailler d'ennui.

    Vous comprenez pourquoi on en est là, dans notre beau pays de France!
    Pitoyable!

    Cette personne n'a jamais du mettre les pieds de sa vie, dans un abattoir, et réaliser ce qu'est le meurtre de masse des animaux, qui sont des êtres vivants et sensîbles, d'autant plus les mammifères.

    Tout cela est rendu littéralement insupportable, par son industrialisation. Que l'on ne vienne pas nous raconter des fadaîses,
    alors qu'il s'agit de massacre répugnant.

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  10. Réponse définitive aux deux précédents messages

    Je ne suis peutêtre pas très intelligent mais je n'ai pas eu d'hallucinations ni vu l'Evangile en technicolor et en D.

    Par contre tout ce que je sais c'est que Jésus était un Juif vivant en Israël durant l'Antiquité et qu'il eut été invraisemblable qu'un Juif ne suivit pas les préceptes alimentaires figurant dans la loi de Moise dans le Deutéronome et le Lévitique et qui décrivent les rites à employer pour abattre les animaux (Jésus à dit : je ne suis pas venu abolir la loi mais l'accomplir). De même Jésus n'a jamais mangé d'animaux impurs.
    Jepense que Monsieur l'Abbé de Tanouarn qui connait la Bible bien mieux que vous ou moi ne pourra que confirmer ce point de vue.
    Je vous renvoie au Lévitique Chap. 11 et Dt 14,3 ; 12,20-21.
    Loin de moi l'idée de faire de la morale. Tout smplement, je préfère m'intéresser au sort des humains qui souffrent de la faim et de mille autres atrocités. Effectivement cela me parait plus évangélique. Vous tenez les mêmes propos que des sectes pseudo catholiques qui bénissent les animaux dans les églises. Jésus n'est pas mort pour les animaux mais pour sauver ses frères les hommes créés à l'image de Dieu.
    Amen.

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  11. @ Anonyme de 01h23 (et de 03h05)

    Je ne me permettrai ancune remarque sur vos capacités intellectuelles, vu qu'elles sont peut-être bien supérieures aux miennes.

    Par contre, je ferai appel à votre sensibilité (et non pas "sensîblerie" comme vous avez dit si mal-à-propos)

    Voulez-vous que je vous dise, cher ami, ce que Jésus a mangé, je m'en balance complètement, autant que Lui-même, j'imagine. Il s'agissait juste d'habitudes alimentaires, adaptées à une époque, à une société,
    pour un nombre infiniment moins considérable d'individus, qui vivent à la nôtre et entendraient pouvoir faire souffrir éternellement des milliards d'êtres vivants, tout ça en vertu de règles indîgnes d'une société dans laquelle les comportements des animaux sont étudiés et nous apprennent chaque jour un peu plus, combien ils sont doués de sensations et d'émotions, comme le stress, la dépression, l'angoisse.

    En quoi un animal est-il "impur", parce qu'on ne l'a pas torturé à mort, en l'égorgeant, sans atténuer sa souffrance par un étourdissement quelconque? Réfléchissez-y, mon cher, avant de me traîter de bobo, moi qui ne m'entend guère avec eux.

    D'autre part, je vous prierai de ne pas préjûger de ce que je peux ressentir également, des souffrances des êtres humains, mes frères et mes soeurs. Et si vous voulez le fond de ma pensée, j'imagine une corrélation mystérieuse entre les horreurs que nous faisons sûbir pour rien à nos amis les animaux (sinon pour des lubies pseudo-religieuses dérisoires) et l'état de violence insensée dans lequel l'Humanité est plongée. Autrement dit, traîter les bêtes, avec un minimum de respect et de compassion, ne peut qu'améliorer notre situation à nous.

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  12. C'est sûr Thierry, vous avez raison sur le dernier point et sur les autres aussi mais n'oubliez pas que la viande contient des alcaloïdes et que cela crée forcément de la dépendance. C'est pourquoi on ne veut ni ne peut s'en passer si facilement.
    Pour en finir, moi aussi là-dessus, je voudrais changer la perspective et parler, en conclusion de la vie de Chrétien. En effet si le but c'est la CHARITE, il ne me semble pas très réaliste de l'atteindre sans une règle de vie sobre et chaste, comme nous l'exhorte St Paul.(ex:EPh.5)
    Dans notre société basée sur le désir et qui est tout à fait contraire à tout cela, le chrétien devrait pouvoir faire de la "CONTRE-CULTURE" et vivre sa vie en s'inspirant de la vie monacale (non qu'il faille la vivre totalement, ce qui est impossible dans le monde- mais y TENDRE-)
    Quel est le rapport avec la nourriture? Simplement parce que la loi du plaisir à une règle, simple mais diabolique. UN PLAISIR EN ATTIRE UN AUTRE! et toute la publicité joue avec ça et ça marche!
    Quel est le rapport avec le végétarianisme? Celui-ci doit être inséré dans cette sobriété de vie chrétienne. On est dans une autre perspective. On fait abstinence tous les jours, en quelque sorte. (il y a des communautés de moines végétariens)
    Cela n'est pas un absolu, car rien dans les écritures ne nous y oblige. C'est seulement une règle de vie qui trouve sa justification et sa logique dans une autre, plus large: La sobriété et le respect de tout et tous sur cette terre. Quand j'écris "respect", je pense "CARITAS" bien évidement!
    C.B (dorénavant Benoîte!)

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  13. Les moines (c'est à dire les bénédictins et les Chartreux, fils des Saints Benoit et Bruno) ne doivent rien manger de gras et donc doivent s'abstenir totalement de viande.

    A l'époque de la création des ordres,les moines vivaient la vie des paysans de base dont ils avaient adopté le costume. Bien entendu les paysans n'avaient pas les moyens de se payer de la viande qui était réservée à la table des seigneurs. Jusquéu XIX siècle la viande était une nourriture de riches et lepeuple n'enconsommait que rarement (le "bon" Sully et sa poule au pôt tous les dimanches sont un mythe de l'école républicaine.)
    Monsieur l'abbé de Tanouarn, qui est breton, sait bien que la base de la nourriture des paysans, il n'y a pas si longtemps encore, consistait en galettes de sarrazin et en crèpes (ou galettes)de froment les jours fastes ; le tout arrosé d'eau et de cidre la dmanche. Je sais bien que les bobos raffolent de ces plats dans les crèperies à la mode mais je persiste à penser que la bonne viande est bien meilleure. Déjà que la vie n'est pas drôle s'il faut se passer des bonnes choses où va-t-on. Relisez l'Evangile : lorsque Jésus s'invitait à la table de Zachée, je pense qu'ils devaient faire un sacré geuleton et que lors des Noces de Cana les invités n'ont pas bu de la piquette mais quelque chose qui devait ressembler à un Pommard de derrière les fagots.
    J'en ai plus qu'assez de ces gens qui ne savent que précher l'austérité. Les "tradis" que je connais sont plutôt de bons vivants qui aiment bien faire ripaille à l'occasion. Je laisse les
    macérations aux cathos de gauche. Halleluja Hosannah !

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  14. Bonsoir Benoite, vos arguments sont incomparablement plus subtils que les miens. Non seulement j'ai grand plaisir à vous lire, ainsi que toutes et tous, ici, j'en suis sûr mais surtout cela me rend heureux, à la pensée de nos chers animaux domestiques et familiers, car vous êtes leur merveilleuse avocate, en replaçant l'affection qu'on leur porte, dans une perspective si purement chrétienne (et je pense à Saint-François-d'Assise, que je n'osais évoquer jusqu'à maintenant).

    Voilà un vrai argument qui peut toucher le coeur de notre ami anonyme, que je crois tout à fait sincère et pas moins sensîble que nous mais seulement inconscient des réalités, comme la plupart de nos contemporains d'ailleurs, la question étant si délicate -tabou effectivement, vous avez raison- car elle touche aux identîtés, cultures, piété etc.

    Merci Benoîte, de vos interventions si intelligentes, et qui viennent aussi du coeur.

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