Je ne voudrais pas que Julien et quelques autres imaginent que je me débine sur le péché originel. C'est plutôt qu'il y a trop à dire et que l'actualité commande toujours.
Dans le post précédent, j'ai essayé de montrer la différence entre "natura" et "conditio". Adam et Eve sont bien de même nature que nous. Impossible qu'il en soit autrement. Mais ils ne vivent pas la même condition. Leur proximité avec Dieu, la manière dont ils se sentent immédiatement en sa présence les protège de toute pensée morbide et de toute pulsion déplacée. Comme le remarque Cajétan, loin d'exténuer la nature, comme on a pu le constater dans certains pensionnat surnaturalistes, la grâce reçue avec profusion entretient la "vigor naturae", la viridité de la nature. Pour caractériser cette viridité de la nature, on emploie l'expression "dons preter-naturels". Vivant dans une sorte d'immédiateté de la grâce, Adam et Eve ne connaissent pas la mort ; ils n'éprouvent aucune souffrance ; ils ne peuvent se laisser aller à la passion sensuelle, qu'il maîtrisent parfaitement dans la joie qui naît de la proximité de Dieu.
Mais voilà qu'ayant péché contre Dieu en écoutant l'Ange déchu, l'Antique serpent comme dit l'Apocalypse, ils cherchent à se cacher de lui. Et en même temps ils ont honte d'eux-mêmes. "Ils virent qu'ils étaient nus" dit la Bible sobrement. Tout un programme ! Dans ce besoin de se cacher, avec la perte de l'innocence, il y a la perte de la fierté d'être soi et tous les problèmes psychologiques que vous pouvez imaginer. Ils découvrent le mal, la mort, la souffrance et l'injustice de la jouissance (l'égoïsme et la volonté de domination qu'elle engendre). Les dons preternaturels disparaissent avec la grâce de Dieu.
Et le péché originel se transmet à tous leurs descendants. les premiers chapitres de la Genèse sont une histoire du péché : "Toutes les pensées des coeurs des hommes étaient tournées vers le mal" dit la Genèse à la fin du chapitre 5, alors que le Déluge va bientôt résoudre (ou dissoudre) dans l'eau la puissance du mal.
Qu'est-ce que la transmission du péché originel ? C'est Adam Eve Caïn, Abel et tous les autres... sans Dieu. Laissés à eux-mêmes et à leur nature si contradictoire : "la chair milite contre l'esprit" dit saint Paul. Et cela ne fait pas suite à je ne sais quel virus que Dieu aurait inoculé à ses créatures pour les punir, comme on pourrait le lire dans les Institutions chrétiennes du Sieur Calvin par exemple. C'est l'état naturel de l'homme sans Dieu.
"Malheur à celui qui se confie dans l'homme" dit Jérémie au chapitre 17. L'homme laissé à lui-même est un monstre... Pascal le rappelait fortement : "Qu'il se vante je l'abaisse, qu'il s'abaisse je le vante et le contredit sans cesse jusqu'à ce qu'il comprenne qu'il est un monstre incompréhensible".
Comme le dit saint Thomas à la fin de la première partie du Compendium theologiae, imaginons un suzerain et son vassal. Le vassal tient de son suzerain un certain nombre de fiefs. Il prend la grosse tête et se révolte contre son suzerain. Son suzerain vient remettre de l'ordre. Il prive son vassal de ses fiefs. Il est évident qu'il ne commet aucune injustice en ne rendant pas les fiefs à la descendance du vassal félon. L'image est intéressante. Elle constitue l'un des rares cas où il soit fait allusion dans le corpus thomasien à la situation sociale à cette époque, et en particulier à l'institution féodale.
Le péché originel, c'est un mal de peine pour tous les hommes, non pas en ce que leur humanité aurait changé : ils gardent la même nature qu'Adam et Eve. Mais ils perdent la condition privilégiée qui était celle de nos premiers parents et doivent faire face aux contradictions qui sont inhérentes à leur nature à la fois animale et rationnelle. Ils sont désormais, sans la lumière de Dieu, des monstres incompréhensibles comme dit Pascal.
Mais le péché originel ne devient un mal de faute qu'après le premier péché, c'est-à-dire, très tôt dans l'enfance, après le premier acte d'égoïsme ou d'égolâtrie. Parce que nous n'avons plus qu'une pâle intuition de Dieu, nous sommes toujours et très vite conduits à faire de nos personnes la fin ultime de notre propre vie : un bébé pleurant à toute heure, petit animal qui trop souvent il faut bien le dire n'est charmant que pour ses géniteurs émus de leur propre ouvrage, oui un bébé peut laisser voir dans son comportement le péché originel bien présent. Ce faisant, il est, quel que soit son âge, dans le mal de faute (une faute bien évidemment proportionnée à sa responsabilité, qui est infinitésimale). Il n'y a pas de châtiment du péché originel pour toute l'humanité, comme le souligne saint Thomas avec sa métaphore du Vassal et du Suzerain. "Naturalia manserunt integra". Les puissances naturelles sont intactes. Mais elles sont blessées, en ce sens que l'homme est désorienté, parce qu'il a été jeté en dehors de l'infini pour lequel il était fait, et qu'il ne saurait y prétendre à nouveau par lui-même.
Si comme Claude Tresmontant, on croit à la possibilité d'une évolution animale à l'origine de l'homme, on peut dire que Dieu a fait de deux primates nos premiers parents en leur infusant une âme immortelle de façon personnelle (voir saint Augustin : De genesi ad litteram : "le corps de l'homme se redresse lentement vers le ciel"). Il les a mis dans une situation optimale, paradisiaque, en un coin particulièrement protégé de la Planète Terre. Et eux n'ont rien compris. Forts de cette protection, ils en ont demandé encore plus (comme de banals syndiqués de Sud, fort de leurs masses manifestante, veulent ignorer le problème des retraites). Encore plus ? "Vous serez comme des dieux". Plus personne au-dessus de soi : le vertige assuré. Ayant perdu la protection particulière de Dieu, ils sont retombés dans la dure réalité terrestre, monstres incompréhensibles à leurs propres yeux, monstres dont la monstruosité est un cri vers le Ciel, un appel à la Miséricorde du Seigneur. Avant qu'ils ne sortent du Jardin, vêtus des peaux de bête que Dieu leur a donné pour remplacer les pauvres tuniques de feuilles qu'ils s'étaient confectionné dans leur angoisse de ne pas se voir en face, l'homme et la femme entendront la promesse du Seigneur. Contrairement à une idée reçue,la promesse de Dieu est extraordinairement philogyne : "Je mettrai une inimitié entre toi et la femme" dit Dieu au Serpent.
La femme ? Quelle femme ?
Le chapitre 12 de l'Apocalypse nous montre que cette Femme, c'est la mère du Messie "qui doit régir les nations avec une verge de fer" (12, 5). Mais si Marie est la femme annoncée, il y a, indiscutablement, une prédisposition annoncée de la femme en général à repousser le Serpent et son horrible propension à vouloir toujours plus pour être comme un dieu. L'homme étant incapable de dire non à sa femme, comme l'a prouvé le premier dialogue sous le pommier, habituellement c'est la femme qui dit non à l'homme, on le sait. La première femme qui a dit : non à un homme, sans le vouloir, a créé les premiers rudiments de ce que l'on appellera beaucoup plus tard la civilisation.
La civilisation ne naît pas avec le groupe humain quel qu'il soit qui s'organise. Caïn est sans doute, selon le texte sacré, "le premier constructeur de ville" (Gen. 4, 17), mais "il donne à la ville le nom de son propre fils" (ce qui marque son égoïsme). Résultat ? Quelques générations plus tard, Lamek se glorifie d'être encore plus violent que Caïn : "Caïn doit être vengé sept fois, mais Lamek soixante dix sept fois sept fois". La civilisation ne passe pas par Caïn. le groupe humain est plus engoncé dans le péché que l'homme seul (c'est la signification de la Tour de babel : l'orgueil humain est un péché collectif).
Alors ? Tout est-il perdu ? Faut-il mépriser la nature, avec Calvin ?
Le seul moment de grâce après le péché originel est le cri d'Eve, repris par toutes ses descendantes : "J'ai donné l'être à un homme grâce à Yahvé" (4, 1). La femme qui enfante (qui accepte d'enfanter) est toujours, en cela, l'ennemie de Satan : inimicitiam ponam. Elle participe à une immense analogie annoncée, dont la Princesse, princeps analogatarum, est la Vierge Mère.
L'humanité vit dans le péché certes, mais "non sans espoir pourtant" comme le note fugitivement saint Paul aux Romains (8). Cet espoir est d'abord, de façon basique, dans le cri d'Ève : "J'ai donné l'être à un homme grâce à Yahvé". Lorsque l'humanité ne veut plus se reproduire, elle montre qu'elle a renoncé à cette espérance.
Dans le post précédent, j'ai essayé de montrer la différence entre "natura" et "conditio". Adam et Eve sont bien de même nature que nous. Impossible qu'il en soit autrement. Mais ils ne vivent pas la même condition. Leur proximité avec Dieu, la manière dont ils se sentent immédiatement en sa présence les protège de toute pensée morbide et de toute pulsion déplacée. Comme le remarque Cajétan, loin d'exténuer la nature, comme on a pu le constater dans certains pensionnat surnaturalistes, la grâce reçue avec profusion entretient la "vigor naturae", la viridité de la nature. Pour caractériser cette viridité de la nature, on emploie l'expression "dons preter-naturels". Vivant dans une sorte d'immédiateté de la grâce, Adam et Eve ne connaissent pas la mort ; ils n'éprouvent aucune souffrance ; ils ne peuvent se laisser aller à la passion sensuelle, qu'il maîtrisent parfaitement dans la joie qui naît de la proximité de Dieu.
Mais voilà qu'ayant péché contre Dieu en écoutant l'Ange déchu, l'Antique serpent comme dit l'Apocalypse, ils cherchent à se cacher de lui. Et en même temps ils ont honte d'eux-mêmes. "Ils virent qu'ils étaient nus" dit la Bible sobrement. Tout un programme ! Dans ce besoin de se cacher, avec la perte de l'innocence, il y a la perte de la fierté d'être soi et tous les problèmes psychologiques que vous pouvez imaginer. Ils découvrent le mal, la mort, la souffrance et l'injustice de la jouissance (l'égoïsme et la volonté de domination qu'elle engendre). Les dons preternaturels disparaissent avec la grâce de Dieu.
Et le péché originel se transmet à tous leurs descendants. les premiers chapitres de la Genèse sont une histoire du péché : "Toutes les pensées des coeurs des hommes étaient tournées vers le mal" dit la Genèse à la fin du chapitre 5, alors que le Déluge va bientôt résoudre (ou dissoudre) dans l'eau la puissance du mal.
Qu'est-ce que la transmission du péché originel ? C'est Adam Eve Caïn, Abel et tous les autres... sans Dieu. Laissés à eux-mêmes et à leur nature si contradictoire : "la chair milite contre l'esprit" dit saint Paul. Et cela ne fait pas suite à je ne sais quel virus que Dieu aurait inoculé à ses créatures pour les punir, comme on pourrait le lire dans les Institutions chrétiennes du Sieur Calvin par exemple. C'est l'état naturel de l'homme sans Dieu.
"Malheur à celui qui se confie dans l'homme" dit Jérémie au chapitre 17. L'homme laissé à lui-même est un monstre... Pascal le rappelait fortement : "Qu'il se vante je l'abaisse, qu'il s'abaisse je le vante et le contredit sans cesse jusqu'à ce qu'il comprenne qu'il est un monstre incompréhensible".
Comme le dit saint Thomas à la fin de la première partie du Compendium theologiae, imaginons un suzerain et son vassal. Le vassal tient de son suzerain un certain nombre de fiefs. Il prend la grosse tête et se révolte contre son suzerain. Son suzerain vient remettre de l'ordre. Il prive son vassal de ses fiefs. Il est évident qu'il ne commet aucune injustice en ne rendant pas les fiefs à la descendance du vassal félon. L'image est intéressante. Elle constitue l'un des rares cas où il soit fait allusion dans le corpus thomasien à la situation sociale à cette époque, et en particulier à l'institution féodale.
Le péché originel, c'est un mal de peine pour tous les hommes, non pas en ce que leur humanité aurait changé : ils gardent la même nature qu'Adam et Eve. Mais ils perdent la condition privilégiée qui était celle de nos premiers parents et doivent faire face aux contradictions qui sont inhérentes à leur nature à la fois animale et rationnelle. Ils sont désormais, sans la lumière de Dieu, des monstres incompréhensibles comme dit Pascal.
Mais le péché originel ne devient un mal de faute qu'après le premier péché, c'est-à-dire, très tôt dans l'enfance, après le premier acte d'égoïsme ou d'égolâtrie. Parce que nous n'avons plus qu'une pâle intuition de Dieu, nous sommes toujours et très vite conduits à faire de nos personnes la fin ultime de notre propre vie : un bébé pleurant à toute heure, petit animal qui trop souvent il faut bien le dire n'est charmant que pour ses géniteurs émus de leur propre ouvrage, oui un bébé peut laisser voir dans son comportement le péché originel bien présent. Ce faisant, il est, quel que soit son âge, dans le mal de faute (une faute bien évidemment proportionnée à sa responsabilité, qui est infinitésimale). Il n'y a pas de châtiment du péché originel pour toute l'humanité, comme le souligne saint Thomas avec sa métaphore du Vassal et du Suzerain. "Naturalia manserunt integra". Les puissances naturelles sont intactes. Mais elles sont blessées, en ce sens que l'homme est désorienté, parce qu'il a été jeté en dehors de l'infini pour lequel il était fait, et qu'il ne saurait y prétendre à nouveau par lui-même.
Si comme Claude Tresmontant, on croit à la possibilité d'une évolution animale à l'origine de l'homme, on peut dire que Dieu a fait de deux primates nos premiers parents en leur infusant une âme immortelle de façon personnelle (voir saint Augustin : De genesi ad litteram : "le corps de l'homme se redresse lentement vers le ciel"). Il les a mis dans une situation optimale, paradisiaque, en un coin particulièrement protégé de la Planète Terre. Et eux n'ont rien compris. Forts de cette protection, ils en ont demandé encore plus (comme de banals syndiqués de Sud, fort de leurs masses manifestante, veulent ignorer le problème des retraites). Encore plus ? "Vous serez comme des dieux". Plus personne au-dessus de soi : le vertige assuré. Ayant perdu la protection particulière de Dieu, ils sont retombés dans la dure réalité terrestre, monstres incompréhensibles à leurs propres yeux, monstres dont la monstruosité est un cri vers le Ciel, un appel à la Miséricorde du Seigneur. Avant qu'ils ne sortent du Jardin, vêtus des peaux de bête que Dieu leur a donné pour remplacer les pauvres tuniques de feuilles qu'ils s'étaient confectionné dans leur angoisse de ne pas se voir en face, l'homme et la femme entendront la promesse du Seigneur. Contrairement à une idée reçue,la promesse de Dieu est extraordinairement philogyne : "Je mettrai une inimitié entre toi et la femme" dit Dieu au Serpent.
La femme ? Quelle femme ?
Le chapitre 12 de l'Apocalypse nous montre que cette Femme, c'est la mère du Messie "qui doit régir les nations avec une verge de fer" (12, 5). Mais si Marie est la femme annoncée, il y a, indiscutablement, une prédisposition annoncée de la femme en général à repousser le Serpent et son horrible propension à vouloir toujours plus pour être comme un dieu. L'homme étant incapable de dire non à sa femme, comme l'a prouvé le premier dialogue sous le pommier, habituellement c'est la femme qui dit non à l'homme, on le sait. La première femme qui a dit : non à un homme, sans le vouloir, a créé les premiers rudiments de ce que l'on appellera beaucoup plus tard la civilisation.
La civilisation ne naît pas avec le groupe humain quel qu'il soit qui s'organise. Caïn est sans doute, selon le texte sacré, "le premier constructeur de ville" (Gen. 4, 17), mais "il donne à la ville le nom de son propre fils" (ce qui marque son égoïsme). Résultat ? Quelques générations plus tard, Lamek se glorifie d'être encore plus violent que Caïn : "Caïn doit être vengé sept fois, mais Lamek soixante dix sept fois sept fois". La civilisation ne passe pas par Caïn. le groupe humain est plus engoncé dans le péché que l'homme seul (c'est la signification de la Tour de babel : l'orgueil humain est un péché collectif).
Alors ? Tout est-il perdu ? Faut-il mépriser la nature, avec Calvin ?
Le seul moment de grâce après le péché originel est le cri d'Eve, repris par toutes ses descendantes : "J'ai donné l'être à un homme grâce à Yahvé" (4, 1). La femme qui enfante (qui accepte d'enfanter) est toujours, en cela, l'ennemie de Satan : inimicitiam ponam. Elle participe à une immense analogie annoncée, dont la Princesse, princeps analogatarum, est la Vierge Mère.
L'humanité vit dans le péché certes, mais "non sans espoir pourtant" comme le note fugitivement saint Paul aux Romains (8). Cet espoir est d'abord, de façon basique, dans le cri d'Ève : "J'ai donné l'être à un homme grâce à Yahvé". Lorsque l'humanité ne veut plus se reproduire, elle montre qu'elle a renoncé à cette espérance.
Cher Monsieur l'abbé,
RépondreSupprimerVotre article semble davantage exposer le péché originel en son état actuel plutôt que dans son redressement/dépassement surnaturel par le rédempteur.
Dieu serait-Il un suzerain fieffé qui agirait par des privations parcimonieuses plutôt que par une indulgence magnanime envers ceux qui lui désobéissent?
Ainsi peut s'entendre le "mal de peine" dont vous nous restituez l'analogie selon Saint-thomas d'aquin, analogie qui est très évangélique au demeurant:
le christ y parle souvent de la récompense dont sera honoré l'intendant fidèle et de la déchéance de sa charge dont sera payé l'intendant qui se met à
abuser de son pouvoir.
Quant au "mal de faute", comment expliquer qu'on ne sente pas les effets de sa destruction/destitution chez l'enfant égolâtre et pourtant régénéré par
RépondreSupprimerle baptême, Sacrement qui est pourtant censé le prémunir du péché originel? Que penser d'une doctrine aux effets si peu manifestes?
Vous dites une vérité tout en cédant à un effet de mode en disant que l'iniquité établie par Dieu entre la descendance de la femme et celle du serpent est
philogyne. Henri Tisot aime beaucoup à y insister comme vous, qui êtes un galant homme de prêtre, dans son insatiable défense d'eve. De ce que la femme
se réjouit d'avoir "acquis, par le Seigneur", un nouvel être vivant né de ses flans, de ce qu'elle bénit la vie qui en naît, elle porte bien son nom, "la
vivante", et prépare sa restauration dans la "nouvelle Eve" qu'est la Vierge Marie.
L'état d'une civilisation se mesure-t-il à sa défense de la vie? Cela est certes l'effet d'un long effort humain où "le sacré" a commencé par se fonder
dans "la violence". Aujourd'hui, adouberions-nous le péché originel jusque dans ses conséquences en refusant d'être féconds? Nous ne mesurons pas que,
depuis la psychanalyse et le report de notre mal-être sur les fautes présumées de nos descendants, sans plus croire au péché originel, nous entérinons
son processus de transmission causale et accusatoire, l'accusatif étant le complément de la cause.
L'hostilité entre la femme et le serpent est philogyne, dites-vous. Cela vaut toujours mieux que de prétendre que le péché originel s'est transmis de façon
matrilinéaire. Mais surtout, cela bat en brèche l'idée que la femme est insinuante comme le serpent: je ne sais pas si l'homme ne sait pas dire non à sa
femme; mais celle-ci ne déguise pas la vérité à Dieu, tandis qu'adam fait porter à sa femme devant Dieu la responsabilité d'avoir succombé à la tentation
en cédant aux avances de sa femme, comme la femme ne dit pas qu'elle a succombé à celles du serpent. La différence entre l'homme et la femme tient à mon
avis à ce que la femme nous est présentée comme un être créé "de côté", littéralement latérale à l'homme. Ce n'est pas que toutes ses raisons doivent lui
venir du coeur, mais c'est qu'elle n'a pas adopté la même façon de raisonner. Le "bilatéralisme psychique" qui a réuni Freud et Fliess avant de tant les
diviser se pose à mon avis dans ce raisonnement latéral que la femme oppose à l'homme temporal et temporel, chef de clan, transmetteur de fiefs, transmetteur
de la civilisation sous son aspect capitalistique accumulatif. L'homme est un capteur de biens tandis que la femme veut garder les enfants... Sauf si elle
ne veut plus... Mais alors quel délitement! ! Notre civilisation a atteint l'un de ses paroxismes d'inversion apocalyptique en entérinant si intérieurement
les conséquences du péché originel que la femme croit que l'enfant est une ateinte à son corps, sur lequel elle se croit un droit de propriété. Comme si
nous étions propriétaires de quoi que ce soit, autrement que par abus de langage que l'Eglise a peu dénoncé pour entretenir ses "bénéfices". N'est-ce pas
le même saint-thomas qui nous apprenait le sens de "la destination universelle des biens"? Nous ne sommes que des intendants et en aucun cas des propriétaires.
Julien WEINZAEPFLEN
Un texte qui nous élève, une fois encore. Je retiens en particulier cette phrase, qui nous fait frémir: "l'homme laissé à lui-même, est un monstre"...
RépondreSupprimerPresque tout est dit!
Mon père, votre pensée sur nos ancêtres est lumineuse. Je suis persuadé que l'église n'est pas mysogine comme on le prétend pour expliquer de façon simpliste et négative le célibat des prêtres. Au contraire, l'on voit parfaitement, que si l'église suit logiquement la pensée de la Genèse et des textes suivants, elle ne peut l'être. La femme, même pécheresse est présentie comme rachetée en la très Sainte Vierge Marie. De même, la nature féminine est moins violente, moins carriériste par exemple que la masculine. On n'imagine guère un monde féminin qui soit guerrier. Toutefois, la femme est souvent plus ressentie comme plus égoiste, parce qu'elle est plus centrée sur son petit monde, sa petite famille. Je crois qu'elle doit se défendre parce qu'elle est infiniment précieuse. La femme est souvent plus pieuse que l'homme. Le serait-elle avant tant de coeur, si l'église ou pire la religion étaient contre les femmes ?
RépondreSupprimerMerci, mon père, pour toute la brillante communication que vous faites, tant ici qu'à la radio ou dans vos livres.
Rectificatif maniaque de quelques lapsus orthographiques et linguae de mon poste précédent:
RépondreSupprimerles flancs de la femme qui va donner le jour,
"depuis la psychanalyse et le report de notre mal-être sur les présumées fautes de nos ascendants...
Rectificatif non exhaustif. Pardon de commenter plus vite que mon ombre et de ne pas toujours me relire avec suffisamment de soin. J'aimerais parler un Français aux mots justes et choisis, un Français sculptural qui, sans paraître hiératique ou marmoréen, énonce ma pensée dans la plus grande fidélité à un choix non apprêté de l'expression qui vise au but, un choix dicté par une attention soutenue à parler beau et vrai. La langue française est notre plus grand trésor et la patrie verbale de notre être-au-monde. Il faut garder une tension vers le bien-dire en évitant le snobisme de ceux qui n'ont rien à dire comme la désinvolture de parler avec relâchement. Le relâchement de l'expression est le début de la lâcheté alors que l'abandon à dieu de son courage est le commencement de l'héroïsme.
J. WEINZAEPFLEN, saltimbanque insomniaque et torrentiel pas fier de "bourdoyer" comme Ségolène. Bientôt, je vous parlerai de "bravitude"...
A l'anonyme du 11 septembre à 20h23:
RépondreSupprimerL'eglise n'est pas mysogyne comme les médias en entretiennent la croyance pour expliquer entre autres le célibat des prêtres, dites-vous en substance.
Ce problème est vaste et a des soubassements historiques, où l'on voit généralement le refus par l'Eglise de permettre aux fils de prêtres qui auraient dû être selon le droit commun, même coutumier, leurs héritiers légitimes, de prétendre à une succession sur les "bénéfices éclésiastiques" que l'Eglise voulait garder pour elle.
Cette remarque notariale et foncière étant faite sur l'avarice éventuelle de l'Eglise, "quel est le vrai problème soulevé par le célibat des prêtres?
C'est d'abord, banalement, que les prêtres séculiers sont des hommes qui sont exposés à avoir des pulsions, des tentations ou des passions, voire mieux à tomber amoureux. Car peuvent-ils contenir toute leur vie une énergie sexuelle qui ne cesse de produire par millions des spermatosoïdes?
Mais le célibat des prêtres, tellement cause de "scandale pour le monde" que les rares dépravations des moeurs presbytérales sont traitées par ses agents de manière disproportionnée, est mal jugé par lui pour deux raisons qui ne sont pas sans être frappées au coin du bon sens:
-d'une part, le monde comprend mal qu'une eglise, qui dit le dieu dont elle se prétend être le Corps Mystique, Se définir exclusivement par l'amour, interdise à ses clercs de "faire l'amour". .
-d'autre part, le monde discerne dans le célibat des prêtres aux transgressions spectaculaires un trouble de l'identité sexuelle de ces hommes qui, En tant que configurés à l'eglise, épouse du christ, sont des femmes; mais en tant qu'agissant "in persona christi", sont des hommmes. Mais pour peu qu'ils aient un minimum de vie spirituelle sinon mystique, ils redeviennent des fiancées, ils redeviennent des femmes, ils sont émasculés. Et malgré cela, l'Eglise ne veut pas ordonner des femmes prêtres.
Comment devant toutes ces contradictions continuer de justifier la pratique disciplinaire de ces "époux vierges" qui ne sont pas moines et ne mènent, par conséquent, pas une vie régulière?
"Les prêtres cérébraux sont les pires dans le sacerdoce", me confiait un jour un prêtre, qui estimait qu'au moins 40 % de ses confrères avaient pris maîtresse... Pourquoi continuer d'imposer le respect d'une décision qui fait scandale et tache dans le monde, obstacle à l'évangélisation et se révèle souvent invivable par ceux qui doivent s'y conformer? Si encore on était sûr que la chasteté soit toujours vécue comme privation et non comme refuge dans la castration physique...
Julien WEINZAEPFLEN
C'est un très joli texte qui éclaire bien des choses. Merci monsieur l'abbé.
RépondreSupprimerIngrid
En tant que militant de Sud je ne saurai approuver ce texte qui met en cause l'intelligence et la légitimité de notre combat.
RépondreSupprimerAllez, je retourne faire grève, tiens .
Texte et echange passionnant
RépondreSupprimerLaissez moi vous inviter à lire mon ouvrage Adam ou l'innocence en personne L Harmattan, 2009.
Jean Marc Rouvière