dimanche 31 octobre 2010

Qu'en est-il des valeurs chrétiennes ?

On invoque souvent les "valeurs chrétiennes" sans se donner toujours la peine de préciser quelles elles sont. On les invoque pour s'en gargariser... Ou pour les rejeter...

Ceux qui les rejettent paraissent avoir des raisons fortes de le faire, raisons qu'un Nietzsche a développées avec la force qu'on lui connaît : le christianisme, religion de faibles, provient du ressentiment des faibles qui en veulent aux forts. On a parfois même l'impression que l'Eglise s'autointoxique avec ses... fausses valeurs... Oui, qu'elle est faible souvent notre Eglise ! Et quelle différence entre ce qui devrait être, ce que les voix les plus autorisées disent que c'est... et ce que c'est. Ainsi, ceux qui se gargarisent des valeurs humanitaires, en les revendiquant comme identifiant l'Eglise du Christ semblent faire le jeu de ceux qui rejettent cette Eglise.

Exemple de l'identité entre le discours de rejet et le discours d'identification ? Dans Fragile absolu, sous titré Pourquoi l'héritage chrétien vaut-il d'être défendu ?, livre tout récemment réédité en collection Champs Flammarion. Slavoj Zizek explique, comme naguère Alain Badiou dans son Saint Paul ou la naissance de l'universalisme que les valeurs du communisme sont bien les valeurs du christianisme : ce sont les mêmes... Non pas que la Révolution bolchevik soit une révolution chrétienne : Zizek n'est pas si bête ! Mais en tout cas "l'idée communiste" (comme il dit) est une idée chrétienne : "Oui le marxisme est dans le droit fil du christianisme. Oui christianisme et marxisme doivent combattre main dans la main, derrière la barricade, le déferlement des nouvelles spiritualités. L'héritage chrétien authentique est bien trop précieux pour être abandonné aux freaks intégristes".

Freaks? Que les intégristes soient des gens profondément déformés, je le pense et l'ai écrit dans mon Jonas. "L'intégriste est celui qui veut faire la volonté de Dieu, que Dieu le veuille ou non" écrivait Frossard naguère : bien vu! Et cela pose un problème mental, tout en nous ramenant très près de la logique du premier péché. Comment peut-on savoir mieux que Dieu? Il y a dans l'intégriste un gnostique qui s'ignore.

Mais que Zizek nous donne le choix entre "freaks" et cathocommuniste, sans aucun troisième terme, c'est pour lui et pour son honnêteté de chercheur que cela devient inquiétant.

Ce cathocommunisme, dès 1973, Thomas Molnar l'a identifié en évoquant "l'utopie, éternelle hérésie" (Beauchesne éd.) et en montrant comment le Père Teilhard de Chardin entrait volens nolens dans cette logique. Un peu plus tard, dans Le paysan de la Garonne, Jacques Maritain évoquait la temporalisation du royaume de Dieu. Mais combien d'autres se sont tus, parmi les augures de la vie intellectuelle en ce temps là ? Je ne parle même pas de la vie ecclésiale !

Ce cathocommunisme n'est pas mort. Il n'est même pas ringard comme nous le montre le livre de Zizek. Plus grave : le vent d'antilibéralisme consensuel qui souffle en ce moment risque de nous ramener ce monstre spéculatif (véritable freak pour le coup) dans des habits neufs. Je ne dis pas que c'est déjà fait mais le risque est là.

Comment échapper à cette confusion mentale ? Peut-être en fêtant sérieusement la fête du Christ Roi, demain dans le calendrier old fashion. Il suffirait de réentendre le dialogue entre Jésus et Pilate, fantastique page d'Evangile, où Jésus apparaît vaincu, entre les mains de Pilate, mais où il annonce à l'avance sa victoire spirituelle contre le hiérarque : "Mon Royaume n'est pas d'ici". Ou encore, selon une ambiguïté possible en grec : "Ma royauté n'est pas d'ici". Sous entendu : tu ne peux rien contre elle.

Mais quelle est-elle cette Royauté ? Quel est le titre du Christ à régner ? La vérité. "Celui qui est de la vérité entend ma voix".

Le tout est de savoir de quelle vérité il s'agit ? Est-ce le christianisme tel que les hommes affectent de le comprendre, le christianisme réduit à un texte et à une histoire, le christianisme transformé en culture ? Alors oui, du point de vue de la culture chrétienne, Zizek a raison : il y a d'invincibles analogies formelles entre christianisme et communisme.

Mais telle n'est pas la vérité de l'Evangile. ce n'est pas une vérité uniquement formelle, spéculative, susceptible de s'analoguer à d'autres vérités qu'elle annoncerait ou qu'elle accomplirait. La vérité de l'Evangile est indissolublement une vie. Elle représente une transformation de soi, une vérité qui nous fabrique de nouveau, qui nous offre rien moins qu'une deuxième naissance comme l'explique le Christ à Nicodème.

Faire des valeurs chrétiennes autant de valeurs purement humanitaire, en "temporalisant le Royaume des cieux" comme disait Maritain, en réduisant la foi à une culture forcément homologue à d'autres cultures comme on le voit aujourd'hui, c'est oublier les données primitives de ce que j'appellerai une épistémologie de la foi. La foi est une réalité sacramentelle. Soit elle nous transforme, en créant en nous un esprit nouveau, soit elle n'existe pas comme foi, mais simplement comme culture. "La sagesse de Dieu est venue dans la Puissance" comme disait saint Paul aux Corinthiens.

Voilà tout ce qu'oublie le cathocommunisme assez répandu sous diverses formes depuis cinquante ans. Il confond l'action spirituelle et surnaturelle du christianisme avec des ressemblances purement formelles, dont personne ne comprend que les remarqer et les célébrer c'est détruire la puissance du Christ en la ravalant à une simple idée. Humaine trop humaine aurait dit Nietzsche pour le coup.

Il ne faut pas confondre le christianisme spirituel et le christianisme culturel, sous peine de mériter ce qu'annonce le Christ dans un des textes les plus pessimistes de l'Evangile, cette parabole de l'homme qui chasse de chez lui le démon, mais qui, comme le reproche Nietzsche à beaucoup de chrétiens, n'est pas assez fort pour le chasser tout à fait. Voilà une conversion purement humaine, qui s'est effectué sans la puissance de Dieu. Le démon revient, avec sept autres, plus méchants que lui : "et le sort de cet homme là est pire qu'avant" n'hésite pas à souligner le Christ, comme si nous ne l'avions pas assez compris en comptant les démons que comporte cette histoire (huit en tout finalement).

Ne devenons pas chrétiens à moitié ! C'est sans doute la pire des choses qui puisse nous arriver. Voilà la part de vérité paradoxale d'un Nietzsche. La demi-foi est pire que la non-foi. Elle est une trahison, la non-foi n'est qu'un silence (qui peut cesser à tout moment). Il ne s'agit pas de devenir des vibrions pour autant, des fanatiques, non. Le fanatisme, c'est le freak dont nous parlions plus haut. Mais il suffit de réfléchir à ce que signifie pour nous la vérité du Christ : non pas une idée, mais un fait nouveau dans l'histoire, qui nous transforme et qui (Girard l'explique très bien à Nietzsche dans Quand ces choses commenceront) a déjà transformé l'humanité tout entière.

15 commentaires:

  1. vraiment là, je trip, M. l'abbé, par rapport à votre "alter ego" en dessous (quelle expression pleine de sens d'ailleurs !...) que je n'ai pas compris !

    Votre papier me rappelle ce poignant livre de Maria Winowska : "les voleurs de Dieu" qui rassemble des anecdotes dans l'enfer des persécutions religieuses marxistes... Le mot anecdote est mal choisi tant ces histoires authentiques sont bouleversantes, une en particulier : un vieux pope alcoolique et inculte qui retrouve sa dignité du Christ au prétoire devant ses tortionnaires ; ceux-ci veulent simplement lui faire dire que le communisme et le christianisme, au fond, c'est la même chose, les mêmes valeurs, des objectifs identiques... Et le pope anéanti par la torture ne sait que leur répéter avec une vraie grandeur : non, ce n'est pas la même chose, le communisme c'est le christianisme sans le Christ car le christianisme dit "donne" et le communisme dit "prend"...

    Cette idée d'un communisme qui ne serait qu'un christianisme sans le Christ, c'est ce que je retrouve dans votre développement... Mais du coup, en vous lisant, je comprends mieux l'importance de la définition inversée : "le christianisme sans le Christ, c'est le communisme" en quelque sorte... Ou plutôt, se vouloir catholique sans se laisser "inhabiter" par le Christ, c'est tomber dans les pires extrémités, sans doute celle des 8 démons (moi aussi je m'étais arrêté à 7...) et c'est effectivement faire peu de cas de son catholicisme qui reste alors une façade, une culture, qui cache mal une triste réalité de l'âme...

    Mon Dieu, comme vous avez bien analysé en définitive la réalité de nombreux tradis qui, parce qu'ils pensent détenir la vérité dans des termes figés par l'étroitesse de leur esprit, ne se préoccupent absolument plus de laisser le Christ prendre possession et réellement régner sur leur cœur et leur esprit...

    Finalement, en quelques mots vous rejoignez Pourrat qui indique que le règne du Christ c'est un quatrième règne après le règne minéral, le règne végétal et le règne animal, qui transcende les trois autres, et surtout le troisième, pour leur donner leur plénitude... C'est avant tout cela, le Christ-roi, car c'est d'un règne sur les cœurs, tous les cœurs, que l'on peut passer à un règne sur le monde et non l'inverse... c'est sans doute aussi cela qu'Il dit à Pilate : mon royaume n'est pas sur ce monde, il est sur l'humanité...

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  2. Si le Christianisme et le communisme peuvent paraître se ressembler, c’est sans doute parce que le second singe vilainement le premier sans même le savoir. Le Christianisme parfait n’existe pas ici bas, mais certainement aux Cieux, là où est la plus belle part de la vraie Eglise. Je suis persuadé que toutes les valeurs nées de l’occident, aussi dévoyées soient-elles, sont nécessairement filles, aussi vilaines soient-elles, du Christianisme. Il y a également une confusion possible, comme vous le soulignez, mon père, entre un christianisme spirituel et un culturel. L’homme est tout à la fois spirituel, mais aussi corporel donc culturel. Il doit en aller de même pour le Christianisme, la Chrétienté et l’Eglise.
    Cordialement
    Clément d’Aubier (pseudo de rêverie)

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  3. On ne peut qu'être d'accord avec la totalité de la teneur de votre article, Monsieur l'abbé, à une exception près, me semble-t-il: c'est qu'en parlant de "valeurs chrétiennes", vous faites entrer le christianisme dans le jeu du culturalisme, dont les vertus transformantes ne sont pas celles de la foi. Le langage des valeurs est d'ordre idéologique et culturel; la vie chrétienne est d'ordre cultuel, sacramentel et avant tout relationnel. Le christianisme n'est pas une idéoologie comme les autres avec son suffixe en "isme"; c'est une relation au christ, Lui qui nous apprend, quand nous devenons Ses disciples, par-delà nous-mêmes et nos incapacités à prier, à "prier sans cesse" le Père et à L'adorer "en esprit et en vérité". C'est par quoi commence d'opérer la Grâce transformante quand nous acceptons, ne serait-ce que du bout des pieds, de mettre notre vie à la suite du christ.

    J. WEINZAEPFLEN

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  4. "Clément d'Aubier" nous dit que "le christianisme parfait n'existe pas ici bas" !
    Cette absolue stupidité éclaire bien le propos de l'abbé !

    Si l'on considère le christianisme comme une relation au Christ, comme le dit assez joliment Julien, force est de constater que si cette relation ne peut être parfaite "ici-bas" ce serait alors la faute du Christ lui-même qui serait dans l'incapacité de se relier parfaitement aux hommes vivant sur la terre... Donc le sacrifice de la Croix n'atteindrait sa perfection que dans "l'au-delà", la grâce ne serait accordé par le Christ en plénitude qu'après la mort et les sacrements seraient imparfaits lorsqu'ils sont distribués par l'Eglise militante !

    Oui, on est en plein catharisme individualiste et c'est inquiétant car on assiste à une totale inversion du sens du catholicisme considéré par de nombreux tradis en fonction d'eux, en partant des hommes et de leurs préoccupations personnelles (ce qu'on l'on reproche d'ailleurs vigoureusement à Vatican II dans le même temps) et en faisant l'impasse sur le Christocentrisme de notre foi...

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  5. Cher Antoine,
    J’espère que vous me permettrez cette approche en sympathie, malgré votre critique un peu dure de mes propos. Peut-être me suis-je mal exprimé, mais je n’ai pas le sentiment d’être un cathare !
    Au contraire, je n’ai pas du tout un esprit manichéen et sais très bien que les individus ne sont jamais ni tout à fait mauvais ni tout à fait bons. Ce que je voulais dire, c’est que l’Eglise sur Terre, c'est-à-dire les hommes, ne peut être parfaite, car l’homme ne l’est point. Cela ne retire rien à la beauté des meilleures volontés. Je n’ai jamais parlé des sacrements et encore moins de la sainte eucharistie qui, pour le coup, me semblent directement en liaison avec les cieux. Et là, bien entendu, on est dans la perfection. Mais celle-ci vient d’en haut.
    Je n’ai jamais sous-entendu que le Christ serait responsable de quelque imperfection que ce soit. Force est de constatée que le monde n’est pas parfait et que fatalement l’Eglise humaine ne le peut pas non plus, malgré tout le respect et même l’affection que j’ai pour elle.
    Pour moi, l’Eglise parfaite est sans doute celle de la communion des Saints.
    Cordialement
    Clément d’Aubier (pseudo de rêverie)

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  6. Cher Clément : ma critique est dure mais vous persistez dans votre erreur en faisant de l'Eglise une institution d'hommes or il s'agit du corps mystique de NSJC et de SA propre institution... Je doute qu'Il puisse avoir un corps imparfait et agir sans perfection !

    Pour sortir de votre confusion, il faudrait lire ce que Journet a écrit sur l'Eglise et qui a été repris par Vatican II dans Lumen gentium... L'Eglise étant le sacrement de l'union intime avec Dieu, elle est absolument parfaite puisqu'elle mène à la perfection divine.
    Les hommes qui appartiennent à l'Eglise ne sont pas parfaits, et de loin, mais cela n'enlève rien à la perfection de l'Eglise.

    Si vous persistez à vouloir comprendre ce mystère et à le traduire aussi faussement que vous l'avez fait, je resterais ébahi par tant d'audace confuse qui est bien la marque d'un manque de connaissances catéchétiques et d'une rêverie (effectivement) propres au monde tradi qui prend toujours ses désirs pour des réalités et sa volonté pour celle de Dieu !

    Sinon, ne vous inquiétez pas, je n'ai rien contre vous personnellement, en revanche, vos propos ne me semblent pas catholiques et il me paraissait nécessaire de ne pas les laisser sans réaction !

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  7. L'Eglise est parfaite dans des membres imparfaits. C'est ce que me semble dire M. clément d'Aubier. Pourquoi nous tomber dessus avec si peu de charité fraternelle? Ce n'est pas votre habitude, antoine, et le propos de notre ami ne mérite pas d'être repris avec une agressivité qui ne vous ressemble guère et au-dessus de laquelle vous vous situez généralement. Attention: l'agressivité ne fait pas une bonne polémique. M. Clément d'aubier (pseudo de rêverie, d'abord que c'est beau, cette signature!) n'a fait qu'énoncer une évidence. Je n'aimerais pas que vous prissiez mon parti sans prendre le sien, dans sa juste cause.

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  8. Désolé, cher Julien, mais Clément se limite effectivement à une Eglise terrestre "peuple de Dieu" qui pèche par omission ! L'Eglise sur la terre ne peut être décrite d'un simple "c'est à dire les hommes".

    D'ailleurs, ce que je comprends des propos Clément c'est que l'Eglise est imparfaite sur la terre et parfaite au ciel ce qui est loin de votre synthèse parfaitement juste et claire : une société parfaite de membres imparfaits...

    C'est l'inconvénient de faire de la théologie dans des commentaires de blogs : on risque de tomber dans une imprécision qui confine à l'hérésie et je n'ai pas voulu laisser passer ces raccourcis sans montrer que le champ de vision doit être élargi pour échapper à l'erreur.

    Il n'y a aucune agressivité contre Clément, peut-être un peu contre les tradis ! Mais j'aime bien dire les choses en quelques mots (contrairement à vous hein ;-))) et c'est sans doute cela qui donne un ton abrupt à mes propos.

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  9. Si seulement je pouvais être aussi bon que je suis long! Finissons donc notre synthèse: l'Eglise militante est une société de membres imparfaits, ainsi l'a souffert Notre Seigneur Jésus-christ, dont on peut supposer que c'est une des raisons pour lesquelles Il nous a demandé de tendre à la perfection. J'aime bien traduire son précepte:
    "Soyez parfaits comme votre père céleste Est Parfait" par:
    "soyez Parfait dans la mesure où votre Père céleste est Parfait et où Moi et le Père, nous ne faisons qu'un."
    J'ai entendu hier sur "radio courtoisie" l'abbé de Tanoüarn énoncer que Jean-Paul II avait répondu par la négative à la demande qui lui avait été faite de faire repentance pour les péchés de l'eglise présente. C'est assurément regrettable. D'autant que les tradis lui reprochent de s'être battu la coulpe sur la poitrine de ses ancêtres: ce reproche, fondé a priori, est inconséquent quand on y regarde de plus près. Il est inconséquent, car il émane de gens qui n'ont pas (et je leur en sais gré) perdu la foi dans le dogme du péché originel, même revu et réexprimé comme nous avons eu coopérativement l'occasion de le faire sur ce blog merveilleusement interactif où j'interviens trop, pour la lassitude de ses lecteurs auprès de qui je présente mes excuses pour être aussi réactif à temps et contre-temps. Au point d'avoir pu supposer qu'il pût y avoir en antoine de l'agressivité à l'endroit des personnes! Je vous avais assurément mal lu.

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  10. Chers Antoine et Julien,
    Tout d'abord, merci à Julien de me défendre et merci à vous, Antoine, de retrouver à mon égard un ton plus courtois.
    Il s'agit sans doute d'un problème de vocabulaire, car nous sommes d'accord sur le fond.
    Evidement que l'Eglise avec un grand E, celle des cieux, celle du cœur des saints d’ici-bas, le corps du Christ est parfaite. Ne pas le croire, serait sans doute ne pas être réellement chrétien.
    En revanche, on ne peut pas faire abstraction de l'imperfection de toute institution humaine. Si l'homme était parfait, il n'aurait pas besoin du salut qu'apporte Jésus. Nous ne devons pas non plus confondre, chrétienté, christianisme et église. C'est peut-être là aussi une raison de votre courroux à mon égard. Vous voudrez bien m'excuser d'avoir pu confondre dans mes propos ces trois mots.
    Cordialement
    Clément d’Aubier (pseudo de rêverie)

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  11. Chers amis et en particulier cher clément,

    Tout d'abord, ne me remerciez pas de vous avoir défendu, ce n'était que justice. Mais il me vient que notre polémique qui a essayé de trouver un point de concorde a oublié un aspect très important de ce Mystère auquel on ne pense pas souvent. En effet, que révèle cette imperfection des membres de l'Eglise militante au sein de la perfection de l'eglise triomphante comme Sainte-thérèse d'avila semble être prise à la fois d'émerveillement et d'effroi à la pensée que "nous péchons en dieu"? Nous, pécheurs qui, sur la terre, ne reflétons pas bien la Lumière de Dieu que nous sommes chargés d'incarner, assumons dans notre imperfection la nature humaine du christ. La perfection in fine de ce corps mystique éclésial est un reflet de la nature divine de notre seigneur. "Le Seigneur a pris la condition hummaine en tout excepté le péché", affirmons-nous; oui, mais saint-Paul de compléter: il a pris notre nature humaine pour nous prendre avec Lui, nous attirer à Lui. de ce fait, Il S'Est Incorporé des pécheurs; pire, "Il S'est Fait Péché à notre place". Voilà pourquoi il est permis qu'en tant que membres de l'Eglise militante reflétant, tant que nous sommes de ce monde, la nature humaine de notre seigneur Jésus-christ, nous soyons pécheurs. Mais notre âme, si malade soit-elle vue d'en bas, connaît déjà, vue d'en haut ou regardant elle-même à vol d'oiseau, un avant-goût de la gloire du ciel où le Christ l'a enlevée dans Son ascension. Mieux, si nous faisons le chemin qu'elisabeth de la Trinité a tenté de nous enseigner, notre âme peut être le ciel de lit de Dieu.

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  12. Une citation d'elisabeth de la trinité pour illustrer mon propos précédent:
    "Je crois bien que j'ai trouvé mon ciel sur la terre, car mon ciel, c'est dieu et Dieu est dans mon âme."

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  13. Non, non, non et non !

    Cher Clément, vous dites : "on ne peut pas faire abstraction de l'imperfection de toute institution humaine" or l'Eglise est une institution divine et non une institution humaine...

    Cher Julien, vous dites : "cette imperfection des membres de l'Eglise militante au sein de la perfection de l'eglise triomphante" et cela ne veut rien dire ! l'imperfection des membres est au sein de l'Eglise militante parfaite ou au sein de l'Eglise tout entière, ou plutôt, c'est plus compliqué que ça !...

    En réalité, oui, tout est mélangé dans nos propos dans la notion même d'Eglise, entre peuple de Dieu, structure et hiérarchie, sacrement, corps mystique du Christ, institution, etc. Bref, il faut cesser ce débat stérile et en venir aux bons auteurs comme Journet qui a excellemment traité de cette question, y compris sur l'aspect de la repentance. Et ses propos, que l'on peut trouver résumés en une centaine de pages, ne peuvent faire l'objet d'un simple commentaire sur un blog ! Limiter la description de l'Eglise à cette dimension serait d'ailleurs absurde : il faut donc préférer en rester là, je pense. In Xto.

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  14. Monsieur l'Abbé : l'excellent (d'après mes souvenirs lors de sa parution car je ne l'ai pas relu depuis) livre de Maritain "Le Paysan de la Garonne" est sorti en 1966 ; il est donc bien antérieur au livre de Molnar que je ne connais pas. Il a probablement été réédité depuis, mais je pense qu'il est actuellement indisponible sur le marché (à vérifier toutefois).

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  15. Je trouve dommage qu'un homme apparemment cultivé tel que vous ne s'autorise pas à lire correctement le texte de Slavoj Žižek. Peut-être pourriez-vous vous attaquer désormais à La marionnette et le nain?

    (Slavoj Žižek n'est en aucun cas "fielleux" — comme le décrit l'infâmant "chapeau" de votre billet sur l'autre blog — c'est un penseur authentique.)

    Cordialement,

    Christian

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