Julien m’écrit, dans un commentaire sur l’Affaire Saint Fiacre, qu’il n’est pas nostalgique de cette «ambiance mortuaire de gens mal réveillés», ni des «messes basses expédiées en seize minutes». Attention au malentendu! Je ne regrette pas des offices qui auraient (?) été bâclés – ce que je regrette c’est que le grand public n’a plus, en 2012, le bagage nécessaire pour lire leur simple description. Prenez «Les Trois Messes» d’Alphonse Daudet. La nouvelle se passe «une nuit de Noël de l’an de grâce mil six cent et tant», le Père Balaguère doit dire ses trois messes avant que d’aller ripailler. Or Balaguère est gourmand, le diable prend l’apparence de son enfant de coeur «Garrigou», pour mieux l’inciter à expédier ses messes... – La chose est détestable, mais Daudet en fait une histoire assez drôle, morale et jolie, … et très éloignée des références culturelles de nos contemporains... et je le regrette.Drelindin din!… Drelindin din!
Vous lirez le texte complet, ou juste un extrait:
C’est la seconde messe qui commence, et avec elle commence aussi le péché de dom Balaguère. «Vite, vite, dépêchons-nous,» lui crie de sa petite voix aigrelette la sonnette de Garrigou, et cette fois, le malheureux officiant, tout abandonné au démon de gourmandise, se rue sur le missel et dévore les pages avec l’avidité de son appétit surexcité. Frénétiquement il se baisse, se relève, esquisse les signes de croix, les génuflexions, raccourcit tous ses gestes pour avoir plus tôt fini. A peine s’il étend ses bras à l’Évangile, s’il frappe sa poitrine au Confiteor. Entre le clerc et lui c’est à qui bredouillera le plus vite. Versets et répons se précipitent, se bousculent. Les mots à moitié prononcés sans ouvrir la bouche, ce qui prendrait trop de temps, s’achèvent en murmures incompréhensibles.
Oremus ps… ps… ps…
Mea culpa… pa… pa…
Pareils à des vendangeurs pressés foulant le raisin de la cave, tous deux barbotent dans le latin de la messe, en envoyant des éclaboussures de tous les côtés.
Dom… scum!… dit Balaguère.
…Stutuo! … répond Garrigou; et tout le temps la damnée petite sonnette est là qui tinte à leurs oreilles, comme ces grelots qu’on met aux chevaux de poste pour les faire galoper à la grande vitesse. Pensez que de ce train-là une messe basse est vite expédiée.
«Et de deux!» dit le chapelain tout essoufflé; puis sans prendre le temps de respirer, rouge, suant, il dégringole les marches de l’autel et…
Drelindin din!… Drelindin din!…
C’est la troisième messe qui commence. Il n’y a plus que quelques pas à faire pour arriver à la salle à manger; mais, hélas! à mesure que le réveillon approche, l’infortuné Balaguère se sent pris d’une folie d’impatience et de gourmandise. Sa vision s’accentue, les carpes dorées, les dindes rôties sont là, là… il les touche; il les… Oh! Dieu! les plats fument, les vins embaument; et, secouant son grelot enragé la petite sonnette lui crie:
«Vite, vite, encore plus vite!…»
Mais comment pourrait-il aller plus vite? Ses lèvres remuent à peine. Il ne prononce plus les mots… A moins de tricher tout à fait le bon Dieu et de lui escamoter sa messe… Et c’est ce qu’il fait, le malheureux!… De tentation en tentation, il commence par sauter un verset, puis deux. Puis l’Épître est trop longue, il ne la finit pas, effleure l’Évangile, passe devant le Credo sans entrer, saute le Pater, salue de loin la préface, et par bonds et par élans se précipite ainsi dans la damnation éternelle, toujours suivi de l’infâme Garrigou (vade rétro, Satanas!) qui le seconde avec une merveilleuse entente, lui relève sa chasuble, tourne les feuillets deux par deux, bouscule les pupitres, renverse les burettes, et sans cesse secoue la petite sonnette de plus en plus fort, de plus en plus vite.
Il faut voir la figure effarée que font les assistants! Obligés de suivre à la mimique du prêtre cette messe dont ils n’entendent pas un mot, les uns se lèvent quand les autres s’agenouillent, s’asseyent quand les autres sont debout; et toutes les phases de ce singulier office se confondent sur les bancs dans une foule d’attitudes diverses. L’étoile de Noël, en route dans les chemins du ciel, vers la petite étable, pâlit d’épouvante en voyant cette confusion.
«L’abbé va trop vite… on ne peut pas suivre», murmure la vieille douairière en agitant sa coiffe avec égarement. Maître Arnoton, ses grandes lunettes d’acier sur le nez, cherche dans son paroissien où diantre on peut bien en être. Mais au fond tous ces braves gens qui, eux aussi, pensent à réveillonner, ne sont pas fâchés que la messe aille ce train de poste; et quand dom Balaguère, la figure toute rayonnante, se tourne vers l’assistance en criant de toutes ses forces: Ite missa est, il n’y a qu’une voix dans la chapelle pour lui répondre un Deo gratias si joyeux, si entraînant, qu’on se croirait déjà à table au premier toast du réveillon.
Déjà dans les années 50 nous n'avions pas le bagage nécessaire pour comprendre le récit d'Alphonse Daudet. C'est pourquoi notre instituteur laïque, républicain, GOF et SFIO (tendance Max Lejeune, farouche partisan de l'Algérie française) avait demandé au curé de nous le faire étudier lors d'une séance de KT, ne se sentant pas capable de le commenter, et surtout craignant comme la peste de se faire taxer d'anticléricalisme. Bien entendu, le curé a accepté et nous a gratifés en prime d'une belle analyse grammaticale pour montrer qu'il était aussi fort que l'instituteur en grammaire.
RépondreSupprimerJe ne suis pas sûr que mon actuel pasteur soit capable de comprendre toutes les finesses du texte de Simenon, mais je lui conseille à tout hasard de faire projeter ce film à ses enfant(e)s de choeur (en baskets) pour leur montrer quel dur métier c'était à l'époque. J'ai connu moi aussi la messe de 7 heures le dimanche matin où il fallait répondre distinctement aux prières en latin encore à moitié endormi ; on avait droit à une tasse de chocolat et à un morceau de brioche si on avait bien fait le taf (le vin de messe était stocké dans une armoire fermée dont la clef était détenue par le sacristain, l'enfant de choeur sirotant le vin de messe c'est une belle légende !). J'ajoute que le costume solennel des grandes occasions avec la robe et la ceinture frangée écarlates, le surplis et le collet garni de lapin blanc qui nous faisait ressembler au Premier Président nous "posait" auprès des filles.
Le texte de Daudet est gentillet, mais c'est une pochade.
RépondreSupprimerLe roman de Siménon pose un vrai problème : comment la Comtesse fait-elle pour se débrouiller entre une vie privée dissolue avec ses "secrétaires" et sa foi chrétienne que l'auteur décrit comme profonde : "Elle priait ardemment... Elle avait un visage émacié, des mains trop longues, trop fines, qui étreignaient un missel... ". Quelle déchéance pour cette femme si jolie, si agréable, dont Maigret devait être plus ou moins amoureux lorsqu'il était adolescent au Château et qu'il la voyait passer de loin (n'oublions pas qu'il n'était que le fils du régisseur - une espèce de domestique supérieur - et qu'il n'approchait jamais les "maîtres").
Maigret est un homme indulgent : policier il a connu toutes les turpitudes possibles. Il e porte de jugement sur personne, ce n'est pas son boulot mais celui des juges (ce qu'il n'aurait pas aimé être*). Toutefois il ne peut pas encadrer les "salauds" : dans ce roman le petit gigolo, dernier amour de l'aristocrate déchue, qui a manigancé la mort de la Comtesse pour faire main basse sur ses derniers biens. Là, Maigret n'hésite pas à être brutal et à cogner physiquement et moralement. Dans la scène Gabin est étonnant de réalisme : il est vraiment révolté, il ne joue pas un rôle, il est lui-même.
C'est un très beau roman qui laisse un gout amer. C'est curieux mais cette Comtesse et ce curé me font toujours penser à leurs homologues du "Journal d'un curé de campagne". Pourtant il n'y a rien de commnun entre Siménon et Bernanos**. Il y a des coïcidences curieuses.
Je serais content d'avoir le sentiment des internautes sur ce point.
* moi non plus.
*"hier au soir Madame la Comtesse est morte", l'autre meurt au petit matin. Comme c'est bizarre.
En lisant les commentaires sur L'Affaire St Fiacre , j'ai si bien superposé les deux vieilles dames que je voyais madame de St Fiacre sous les traits de la comtesse de Bernanos telle que dans le film tiré du livre .
SupprimerCA
Certes, cher anonyme, la comtesse n'est pas "Madame Chantal", mais on n'en est pas très loin.
RépondreSupprimerquant à la nouvelle d'Alphonse daudet, elle est tout simplement irrésistible. Je l'avais dans l'oreille en lisant l'extrait de simenon, mais je ne me rappelais plus les noms des protagonistes. L'écrivain excelle quand il prévient les coïncidences. Ici, pas moins de trois: dom balaguère (phonétiquement comme un certain dom Jose-Maria escriva), Garrigou (comme un certain P. Garrigou-Lagrange) et le PS, PS !
Bon, j'ai l'esprit léger. Sur le problème de fond que vous posez, cher webmestre, le premier anonyme a déjà répondu en parlant de la situation des années cinquante avec la sacro-sainte concurrence entre le curé et l'instituteur, celle que Pagnol illustre à propos de Jeanne d'arc, l'instituteur reprochant au curé d'avoir dit qu'elle "entendait des voix" alors qu'il aurait fallu dire qu'"elle crut entendre des voix", selon son catéchisme laïque, qui déjà ne racontait plus l'histoire de france comme Jules Michelet. Mais les voies de l'art me paraissent être le moyen d'un catéchisme de contemplation et d'entrée dans le Mystère par le toit, ainsi qu'on a fait tomber le paralytique aux pieds du christ. L'ignorance est une paralysie à laquelle la visite d'une cathédrale ou l'écoute commentée ou préparée d'une grand-messe de Mozart ou plus immédiatement de schubert dans un cadre liturgique peuvent remédier. L'ignorance est une paralysie; mais pardonnez à un non traditionaliste de relever cette contradiction: l'ignorance de ce qui se dit durant la messe célébrée sous sa forme extraordinaire, pour ne rien dire de la juste ignorance des Mystères, pourrait elle aussi passer pour une paralysie. Comme je manque rarement l'occasion de faire un parallèle entre les traditionalistes et les évangélistes qui devraient se rapprocher parce qu'ils pensent la même chose (aux trois blancheurs près, ce qui n'est pas un détail), ceux-là parlent une langue sacrée devenue ésotérique; ceux-ci parlent des langues inconnues intraduisibles; et entre les deux, il y a tous ceux qui voudraient parler clair en oubliant que le langage est un filtre et en faisant trop de crédit à la transparence inatteignable par nos mots introuvables, qui ne sont jamais compris comme ils sont prononcés et que celui qui les prononce ne comprend pas lui-même, se voyant à peine maître de les choisir.
Cher Julien,
RépondreSupprimervoilà qui plaira certainement à Mgr Fellay ou à l’Abbé de Cacqueray, ce rapprochement avec les Evangélistes ! Ils doivent bondir de joie ! (s’ils ne meurent pas d’un arrêt cardiaque)
Je vous conseille (humblement) d’assister à une messe tridentine en vous procurant un missel de 1962 (l’édition qui est adoptée de nos jours) et vous constaterez que d’un côté, vous avez les prières en Latin et de l’autre, leur traduction en langue vernaculaire. Si vous savez lire, vous pourrez suivre toute la messe. Ce n’est pas plus difficile que ça ! Il n’y a aucun hermétisme et nous ne prions pas « en langue » !
Mais, le plus important dans l’histoire, c’est que, ne vous en déplaise, à vous comme à tous ceux qui détiennent ce langage, le Latin, c’est la langue de l’Eglise. Ca ne se discute pas. C’est ainsi.
Si, dans un deuxième temps, vous comparez les prières du missel de 62 avec celles de la messe de Paul VI, vous verrez que les premières sont infiniment plus riches que les secondes.
La langue de l’Eglise est celle du culte catholique par excellence. Elle est au-dessus de toutes les autres. On célèbre la même messe aux Philippines, en Afrique ou en France. Le latin à lui seul ne fait pas la messe, mais il transcende les prières. Il élève le langage à plus de sacré. C’est une évidence. Il faut en faire l’expérience. Ce n’est pas de la littérature. Le Latin n’émeut pas. Il nous unit plus profondément à la prière de l’Eglise.
L’ignorance est une paralysie, dites-vous. L’ignorance du sacré de la langue latine est une paralysie de l’âme.
Si ce n’est pas de la littérature, ce n’est pas de l’art non plus. Ce n’est que de la prière, mais de la Prière.
Benoîte
,
Arrêtez avec cette histoire de latin alors que vous ne maitrisez probablement pas cette langue (à moins que vous ne soyez agrégées de lettres classiques, mais c'est rare).
SupprimerJe vou sisgnaloe que la langue de l'Eglise ce n'est pas le latin mais le Grec, langue dan slaquelle ont été écrites les Evanngiles. Jésus par lait araméen et devait baragouiiner un epu de grec comme tout le monde à l'époque (le grec était la langue véhiculaire un peu comme l'anglais de nos jours, même à Rome on parlait grec dans la bonne société, on laissait le latin au peuple, Pierre et Paul parlaient en grec : voir le beau discours devant l'Aréopage. Ce nest qu'au 3è siècle que l'Eglise d'occident a commencé à s'exprimer en latin, langue très inférieure au grec, vous en conviendrez sans peine avec moi en lisant la lettre de Paul aux Romains en latin puis en grec infiniment plus savoureux (je précise que la Lettre aux Romains tout comme celle aux Hébreux d'un auteur inconnu ont été rédigées en grec directement ; le substrat hébreu est un mythe, relisez sur ce point les textes explicatifs de l'Abbé Fillion).
La grande Simone Weil avait l'habitude de ne réciter le PATER qu'en grec.
Le canon de la messe tridentine et la première prière eucharistique sont exactement similaires hormis le déplacement du mysteriom fidei qui a été mis en vedette pour introduire l'anamnèse (encore un mot grec, décidément le grec ne nous lachera pas).
SupprimerPar ailleurs le chrétiens n'ont commencé à célébrer la messe en latin qu'à la chute de l'empire romain, date à laquelle le peuple avait cessé d'employer le grec.
Maintenant, je suis lassé et je renvoie la benoîte dame aux ouvrages du Père Daniélou (peu suspect de progressisme délirant) sur la primitive église (vox clamantis in deserto) ainsi qu'aux écrits de Jeremias (un des maîtres de Benoît XVI, faut-il le souligner ?).
Réponse totalement hors sujet. Ai-je parlé des Evangiles ? Non, il me semble ! (A ce propos lisez Bossuet et Tresmontant)
RépondreSupprimerIl est question de la langue liturgique catholique, de la langue de la messe et de la liturgie qui se sont fixées petit à petit au cours des siècles. En quelle langue doit-on écrire sur ce blog pour se faire comprendre ? En Araméen certainement !
Savez-vous lire ? Il n’y paraît pas. Il faut lire les autres avec attention. Dans la lecture, on écoute l’autre et on ne s'écoute pas soi-même sinon on ne fait que du monologue !
Et puis cette agression très suspecte comme toute violence d’ailleurs. Rien d’intelligent, des banalités sur le grec, mettre en avant sa culture…
Si la langue liturgique n’est pas de la littérature ni de l’art, elle est encore MOINS de l’érudition ! Si vous ne voulez ni comprendre ni même envisager le problème, vous passez à côté de l’essentiel, mais après tout cela vous regarde.
Je vous signale quand même que S.Weil n'était pas catholique d'une part, et que d'autre part, le sujet n'est pas là: Réciter le Pater en Grec ou en Chinois! Le Pater à lui seul ne fait pas une messe que je sache! En fait vous mélangez tout! Une vraie minestrone! Et ça c'est Italien!!
Benoîte
chère benoîte,
RépondreSupprimerLe précédent anonyme vous a répondu sur le grec. D'arpès ce qu'on croit savoir, les échanges commerciaux se pratiquaient en Grec; faut-il en conclure que saint-Pierre le parlait? Personnellement, cela me paraît hasardeux, car saint-Pierre était un patron pêcheur qui prenait du poisson autour du lac de tibériade, je doute fort qu'il ait eu besoin de passer un diplôme d'"import-export", le marché de capharnaum était sans doute le lieu où il écoulait le produit de sa pêche, et l'Araméen devait sufire amplement à ces échanges. Par contre, je suis tout à fait prêt à suivre l'anonyme quand il écrit qu'il n'y a certainement pas de substrat hébreu dans les lettres de Saint-Paul.
Autre argument en défaveur du latin: c'est la langue de l'Eglise, dites-vous. Or c'est une langue sacrée de substitution. L'Eglise s'est mise à parler latin parce que, dans les synagogues dont la liturgie commençait d'être normalisée par les pharisiens, on parlait Hébreu. Donc ceux qui ont imposé le latin dans l'Eglise ont fait ce qu'aujourd'hui, on pourrait appeler un "mauvais coup". Ils ont déraciné l'Eglise de ses racines grecques et hébraïques pour adopter "la langue de l'occupant". Beaucoup diraient qu'ils se sont comportés comme des collabos. Mais c'est une facilité désobligeante et un anachronisme, puisque la dispersion des juifs avait précédé cette adoption du latin. On pourrait même leur reconnaître d'avoir voulu faire acte de catholicité. Le latin était la langue universelle de l'Empire qui possédait "la moitié du monde connu", l'Eglise a voulu adopter cette langue. Sauf que... Le latin n'était pas la langue véhiculaire de cet empire. On n'y parlait pas plus latin qu'on ne parlait Allemand dans les cours des grands électeurs de l'Empire des Habsbourg au temps où "l'Europe parlait Français". La langue véhiculaire de l'Empire romain était le grec. On y parlait Grec comme on parlera français, par la suite, dans toutes les cours d'europe.
Pourquoi donc l'Eglise a-t-elle adopté le latin? Parce que c'était une langue juridique. Voilà qui pointe un premier problème: pourquoi la religion du dépassement de la loi devait-elle enfermer le besoin législatif dans une orthodoxie qui devait fatalement se doubler d'un supplément canonique? Est-ce que, derrière toute orthodoxie, il n'y a pas d'orthonomie? Par où l'on voit que les institutions se corrodent: car au moment où, à prix de sang, l'Eglise forgeait son orthodoxie en excluant les hérétiques, les juifs, eux, n'envisageaient de se conserver qu'en inventant via le talmud une orthopraxie, ancêtre de l'éthique, dans sa différence avec la morale.
Autre manière de cerner la transformation progressive de l'orthodoxie en orthonomie, dont je prétends qu'elle était déjà en germe dans l'établissement d'une orthodoxie: trouvez-vous normal que l'infaillibilité pontificale porte aussi bien sur la foi que sur les moeurs? Les moeurs devraient être la conséquence de la foi. Avec cette confusion des genres, ils prennent autant d'importance que la "lex credendi". La foi n'a plus aucune supériorité sur la morale.
Cher Ami, vous avez tort dans l'exergue de votre propos.
SupprimerCertes au début de sa carrière, Pierre, qui était un pécheur du lac de Tibériade ne devait baragouiner que quelques mots de grec ne serait-ce que pour commercer avec les étrangers dont de nombreux juifs en pelerinage qui ne parlaient ni l'hébreu ni l'araméen.
Vint la Pentecôte est l'expansion de l'Eglise dans le monde romain. C'est donc en grec (langue de la bible dite des Septante) que s'est faite la propagation de l'évangile.
Pierre est allé à Rome et il a b ien fallu qu'il s'exprime aux fidèles de cette cité et il le faisait bien entendu en grec.
Enfin les lettres de Pierre sont écrites en grec, ce qi démontre qu'il parlait cette langue apprise après son abandon de son métier initial. 'entrevois d'ici votre argument à savoir qu'il n'était plus tout jeune. Et alos je connais beaucop de gens qui apprennent une langue étrangère,la quarantaine passée. Un de mes amis est parti à 35 ans au Japon et y a appris cette langue qu'il maîtrise parfaitement, or le japonais me semble une langue plus difficile à acquérir que le grec (j'ajoute qu'il y a au Japon une quantité de restaurateurs français qui se sont mis au japonais car l'anglais est peu parlé dans ce pays). Un autre de mes amis a ramené du Japon une japonaise qui s'esprime parfaitement en français.
Je vous invite à lire l'introduction aux letres de Pierre de l'Abbé Filion sur le site Jésusmarie. C'est un peu vieux mais cela tient la route.
Inutile de dire que les propos de Tresmontant et de ses émules sur le substrat hébreu et la datation des Evangiles sont une pure bouffonerie qui n'appelle de la part des biblistes de métier qu'un rire homérique.
Il faut rappeler qu'au temps de Jésus en Israël plus personne ne parlait hébreu et que dans les synagogues si onlisait les textes en hébreu le rabbin les traduisait ensuite en araméen ou dans une langue moderne (en grec dans la version des Septante dans mes pays de diaspora.)
Par ailleurs benoîte semble fendre d'oublier que la latin est la langue de la seule Eglise latine d'occident et que la langue de l'Orthodosie est le Grec. Il ne faudrait pas réduire la chrétienté à l'Occident. Et que fait-elle des Pères grecs qui valent bien leurs homologues latins ? Je n'ai pas trop aimé non plus propos sur la Grande Simone Weil qui, si elle n'était pas formellement catholique (se convertir en 1942 me semble difficile), à reçu le Baptème de désir et a mené une vie de privations héroîque, refusant à la fin de sa vie de manger pour donner sa ration à la fille de sa pauvre logeuse en Angleterre. Vous en connaissez beucoup de cathos patentés aussi fervents ?
Pour en finir beaucoup de gens même agés apprennent le grec et dans les Lycées le nombre d'élèves de Grec ancien est infiniment supérieur à celui des latinistes.
Je conseille à cette dame de lire les admirables ouvrages de Jacqueline de Romilly qui m'a révélé les beautés du grec.
Enfin on va à la messe (Cène) pour s'unir aux prières et non pas pour rester le nez planté dans un paroissien comme jadis les amateurs d'opéra qui lisaient le livret durant la représentation et ne levaient pas les yeux sur la scène (pardon pour le jeu de mots).
Extrait du commentaire de la première lettre de Pierre par l'abbé Fillion :
Supprimer"Saint Pierre, originaire des bords du lac de Tibériade, avait appris de bonne heure à parler le grec, qui était d'un usage fréquent dans
, ces parages, et il se développa dans la connaissance de cette langue durant ses
courses apostoliques, à travers des contrées habitées par des races helléniques.
Ses hébraïsmes ne sont ni fréquents, ni choquants. Les principaux sont: fils d'obéissance, 1, 14; l'acception des personnes, 1, 17; la parole du Seigneur, 1, 25; un peuple d'acquisition, Il, 9; le mot vase» pour désigner le corps humain, III, 7, etc. Le vocabulaire de l'épître renferme un nombre assez considérable de mots qui ne sont employés dans aucun autre livre du Nouveau Testament; on en a compté jusqu'à soixante-deux, dont la plupart se rencontrent dans la traduction des Septante".
Sur ce point la messe est dite. A ce propos en quelle langue croyez vous que Jésus ait parlé au légionnaire romain ? Sûrement pas en latin car ce légionnaires n'était pas italiens mais appartenaient à une légion de soldats étrangers même si citoyens romains* (un peu comme les suisses ou les écossais qui servaient dans les armées du roi de France ou les bavarois des troupes napoléonniennes ou nos braves tirailleurs sénégalais ou annamites).
* on pouvait être comme Paul citoyen romain sans avoir mis le pied dans la cité des Césars sans jacter un seul mot de latin.
L'écriteau figurant au sommet de la Croix et portant le motif de la condamnation de Jésus était écrit en latin, en grec et en hébreux. Pourquoi :
1 en latin était la langue officielle de l'occupant dans laquelle la décision judiciaire prononcée par Pilate, qui avait seul le pouvoir de prononcer la peine capitale, était rédigée.
2 en grec car c'était la langue véhiculaire comprise par tous.
3 en hébreu car c'était la langue officielle du potentat local mais plus comprise par le peuple.
Rappelez-vous durant l'occupation, les nazis rédigeaient leurs sinistres affiches (condamnation d'Honoré d'Estienne d'Orves et de ses compagnons ou martyrs de Châteaubriant par ex.) en allemand car c'était leur langue, celle de la puissance occupante, et en français pour se faire comprendre de la population locale. C'était psychologiquement très adroit : ce double affichage dans une langue inconnue et un peu barbare (Bekanntmachung) remplissait les gens de terreur (selon les dires de témoins de l'époque de ma propre famille aujourd'hui disparus).
(Réponse à benoîte, suite et finn)
RépondreSupprimerAutre manière de cerner la transformation progressive de l'orthodoxie en orthonomie, dont je prétends qu'elle était déjà en germe dans l'établissement d'une orthodoxie: trouvez-vous normal que l'infaillibilité pontificale porte aussi bien sur la foi que sur les moeurs? Les moeurs devraient être la conséquence de la foi. Avec cette confusion des genres, ils prennent autant d'importance que la "lex credendi". La foi n'a plus aucune supériorité sur la morale.
Que mon rapprochement entre les traditionalistes et les évangélistes vous ulcère, il est fait pour ça. Mais ce n'est pas pure provocation de ma part: on dit que "lex credendi, lex orandi", que votre manière de croire implique une manière de prier, et que, réciproquement, une manière de prier implique une manière de croire. C'est à voir, si l'on se rapporte simplement à ce que les traditionalistes et les évangélistes, quels que soient le port cérémonieux des uns et le débraillé des autres, pensent de la société et du sérieux avec lequel il faut prendre sa vie spirituelle. Il y a beaucoup moins de différence entre un traditionaliste et un évangéliste qu'entre un traditionaliste et un catholique lambda quant à leur refus du relativisme, là où le catholique de base est passé au relativisme comme il a digéré la modernité. Remarquez bien qu'il a digéré la modernité idéologique, là où les évangélistes ont une liturgie beaucoup plus moderne et où les traditionalistes sont beaucoup plus "connectés". La blogosphère traditionaliste est beaucoup plus vivante que son équivalent catholique classique-moderniste.
Enfin, de grâce, ne nous reservez pas cet argument usé et sans poids de la similitude de messe pour un catholique des Philipines ou pour un catholique français. Cela n'importe qu'aux VRP, les autres ont beaucoup plus besoin de participer à la prière qui accompagne les Mystères divins dont ils bénéficient.
Pour conclure ce sujet qui glisse, comme très souvent sur ce blog, vers des histoires d’occupation du XXème siècle, références très mal venues pour ne pas dire ennuyeuses à force d’être mises à toutes les sauces, je préciserais que mon propos était tout autre et ne se situait pas du tout, ni sur un plan culturel, ni sur un plan juridique, ni sur un plan politique, ni sur un plan artistique, ni sur un plan historique (aurais-je encore oublié un genre ?). Je me plaçais uniquement sur un plan spirituel à l’exclusion de tout autre interprétation. Présomption de ma part peut-être, mais il faut bien en matière de Foi, avoir le courage de ses opinions.
RépondreSupprimerL’Eglise guidée par le Christ a encré ses Mystères dans la matière, dans du tangible, dans l’histoire. Votre réfutation sur le sacré de la langue latine utilise les mêmes procédés que celle qui consiste à ne voir dans le sacrement de l’Eucharistie qu’un acte symbolique ayant ses racines dans un culte bien antérieur au Christianisme. Effectivement, si on y soustrait la Présence Réelle, il ne reste qu’un fait historique et culturel, banal somme toute et sans aucune innovation.
Affirmer que la langue de l’Eglise est le latin sous-entend qu’au-delà de l’aspect historique, il y a un aspect sacramentel. Non que la langue latine soit un sacrement en elle-même mais elle y participe en étant le véhicule des Sacrements. Cela dépasse même l’aspect : « lex orandi, lex credendi ». C’est au-delà ! C’est comme si, dans la tour de Babel, l’Eglise du Christ y avait extirpé une langue somme toute bien humaine qui a eu son histoire, mais qui, étant destinée à mourir, allait être transfigurée par un usage nouveau et sacré. Se battre pour savoir qui parlait latin à l’époque du Christ ne rentre pas en ligne de compte puisque de cette contingence l’Eglise en a fait une langue qui « parle » ses Sacrements. C’est pourquoi enlever le latin dans la messe n’est pas du tout anodin et participe de la désacralisation du Mystère Pascal.
Mes propos ci-dessus sont un acte de Foi. Nul n’est obligé d’y adhérer.
Par contre je continue à m’insurger contre cette comparaison établie entre les tradis et les évangélistes ! Ces deux formes de pratiquer le culte en effet refusent la banalité, « sauf que » même cet argument n’est valable que de l’extérieur. En ce qui concerne le fond, ils sont opposés. Les évangélistes exacerbent le côté humain d’un culte soi-disant Chrétien. C’est de l’émotionnel porté à son paroxysme. Il y a confusion totale entre « religieux » et « émotion ». Si on fait référence aux guérisons ou autre phénomènes paranormaux, il ne faut pas oublier que cela a existé dans toutes les religions et toutes les cultures.
Chacun fait ses choix selon la conception de Dieu qu’il a en lui…
Benoîte
,
A notre anonyme helléniste,
RépondreSupprimerQue Saint-Pierre ait ou non parlé le Grec, n'oublions pas qu'il avait un secrétaire, un certain Jean-Marc, non? Mais là encore, que de controverses au simple énoncé de ce nom!
A Benoîte:
Vous écrivez vous-même exprimer un acte de foi en la sacralité du latin. Je ne vous dispute pas cet acte de foi, mais c'est la preuve qu'on peut assez difficilement discuter sur la base d'une parole croyante. Faudrait-il en conclure que la foi ne se discute pas? Ma question ne se veut pas drôle.
Mais venons-en au point qui vous révulse : ma comparaison entre les traditionalistes et les évangélistes. Je crois que vous ne la saisissez pas. Il ne s'agit pas du tout pour moi de comparer terme à terme des cultes en effet aussi diférents que possible, mais d'énoncer que deux leges orandi aussi opposées en apparence peuvent entraîner une lex cogitandi commune; pour les non latinistes, même de cuisine comme votre serviteur, que deux cultes, l'un émotionnel et l'autre ultranormatif, l'un de louange et l'autre sacramentel, l'un miraculeux et l'autre propitiatoire, bref, que deux cultes obéissant à des intentions aussi différentes, peuvent néanmoins aboutir à une même pensée concernant:
1. l'état de la société (les évangélistes ont le même discours sur le respect de la vie et contre le mariage homosexuel que les catholiques traditionalistes) ; et
2. l'accès au salut par Jésus Seul, sans que cela débouche, évidemment, sur la reconnaissance par les évangélistes, dont les eglises sont souvent autocéphales, mais qui croient aussi en l'Eglise, que celle-ci "subsistit in" l'Eglise catholique, sans quoi ils se feraient catholiques;
3. là où les catholiques classiquement modernistes (ou néoclassiques, donc modernistes) pensent que bon, le salut, on ne sait pas bien ce que c'est ; et que Jésus, oui, c'est une relation, ah Jésus, c'est Quelqu'un!
Toutes mes excuses auprès de celui que j'ai appelé notre anonyme helléniste, dont je n'avais pas vu le premier commentaire, contenant l'explication qui précédait son extrait de "L'introduction aux lettres de Pierre" de l'abbé fillon, explication qui rend ma réponse que Saint-Pierre n'eût-il pas parlé grec, il avait un secrétaire, un peu légère.
RépondreSupprimerMerci de votre mea culpa (en latin dans le texte !).
SupprimerA l'époque tout le bassin méditerranéen parlait grec, n'oubliez pas que les échanges économiques étaient importants (Paul est parti à Rome sur ce que nous appellerions de nos jours un "cargo mixte" qui emportait du frêt et des passagers. Hélas ! il a fait naufrage et la cargaison a été perdue).
NB je ne suis pas un fana du grec mais ce que j'aime c'est la vérité historique.
Plus exactement, c'est arrivé devant Malte. Il y avait en tout 276 passagers (dont beaucoup de prisonniers et de soldats) et hommes d'équipage et dans les soutes une cargaison de blé qui fut jetée par dessus bord pour alléger l'embarcation (actes 27, 37) et abaisser son tirant d'eau. Le blé était exporté vers l'Italie en quantités énormes, principalement d'Egypte qui était le grenier de l'époque (pensons au rôle du Nil). Bien entendu, il y avait déjà des assurances, d'aillleurs assez onéreuses tant les dangers étaient grands.
SupprimerPour en finir avec la langue de Cicéron et le latin d'église est loin d'ête cicéronesque) je pense qu nous apportons trop d'importance à cette langue car le fançais en est issu et que le vocabulaire n'est pas trop difficile même si sa grammaire nous la rend icompréhensible. Un Danois ou un Sri-Lankais n'ont aucune raison de s'attacher à cette langue. En tous les cas les exégètes travaillent à partir du texte grec. Un mot sur la LXX qu'il était courant de dénigrer il y a un demi-siècle mais dont on redécouvre toute l'importance et dont le vocabulaire est souvent repris dans le NT.
SupprimerJe lis ceci dans l'introduction aux épitres catholiques dans la Bible de Jérusalem à propos des lettres de Pierre :
Supprimer"C'est pourquoi comme Jacques, et à plus forte raison, il (Pierre) leur écrit en grec ; et si ce grec, simple mais correct et harmonieux, parait de trop bonne qualité pour le pêcheur galiléen, nous connaissons cete fois le nom du disciple-secréaire qui a pu l'assister dans sa rédaction : Silvain (5,12), que l'on identifie avec l'ancien compagnon de saint Paul (Ac 15, 22 et ss)".
Sans vouloir faire d'anachronisme on se trouve un peu dans la situation d'un chef d'entreprise contemporain familier de l'anglais des affaires qui envoie à des correspondants anglais ou américains des textes techniques aidé d'un collaborateur ayant une plus grande maîtrise de cette langue.
Les lettres de Pierre, de bonne facture, ne sont pas de la grande littérature. Pierre ne se considérait pas comme un homme de lettres, tout ce qu'il désirait c'était de se faire comprendre d'un public cosmopolite ; il s'exprime clairement avec des mots simples et sans esbrouffe. Après tout est-ce que le fond n'est pas plus important que la forme ?
Le Grec (ancien) est une langue admirable qui permet de s'exprimer en toute clarté, avec subtilité mais aussi avec une grande simplicité, ce qui a permis l'éclosion de tant de grands philosophes (pensez au dialogues socratiques qu'un élève du secondaire peut commencer à déchiffrer après quelque mois d'études).
Je ne nie pas les qualités du latin (notamment en matière juridique) mais il me paraît bien ordinaire à côté du grec.
Monsieur l’Abbé, voilà quelque chose d’édifiant !
RépondreSupprimerArticle paru dans « L’Avenir » à propos du jubilé sacerdotal de l’abbé Gravet, prêtre belge âgé de 85 ans. Celui-ci explique lui-même:
« Dans un souci d’unité entre chrétiens, la Cène du seigneur [sans majuscule dans l'article…] sera célébrée par Annette Ruby, qui est pasteur protestant en Alsace. Les prêtres qui le souhaitent pourront concélébrer. Voilà une démarche qui ne manquera pas de susciter des réactions que j’espère nombreuses. J’espère après coup, obtenir de nombreuses réponses à des questions du genre : comment avez-vous ressenti la célébration de la Cène par une femme mariée et mère de plusieurs enfants ? Qu’attendez-vous d’un prêtre ou d’un pasteur ? Quelles interpellations souhaitez-vous adresser aux plus hautes autorités de l’Église ? En rassemblant tous ces témoignages, nous espérons instaurer une réflexion profonde sur ces sujets et constituer un document à diffuser d’ici un an ou deux sous la forme la plus opportune. »
... «… l’évêque est au courant (en tout cas, avec cet article, il pourra difficilement plaider l’ignorance!)… et le doyen de Rochefort a même invité dans son journal paroissial les fidèles à participer à ce simulacre de messe! »
No comment!
Benoîte
Vous avez gagné ! J'ai acheté "l'affaire Saint-fiacre". Voilà, livré gratis le surlendemain de ma commande sur internet.
RépondreSupprimerComment avez vous pu trouver ce livre gratuitement ?
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