vendredi 5 août 2011

Réponse à Beauceron le théologien

Il s'agit encore de la légitimité de la messe nouvelle. Beauceron, dans un post récent sur le Forum Catholique, nous apprend que le terme se trouve dans l'Indult de 1984 en faveur de la Messe traditionnelle. J'en suis vraiment très heureux. cela signifie que, lorsque j'ai produit ce terme, dans les discussions houleuses du Forum Catholique il y a trois ans, j'étais sans le vouloir ni le savoir dans la droite ligne de la Pensée romaine. Merci à Beauceron de souligner ce point !

Mais pourquoi diable (je vois les cornes !) aller dire que "la légitimité du NOM n'est que canonique" ? Comme si le mot "légitime" renvoyait simplement à une légalité de papier... Certes l'abbé Laguérie parle lui-même , en obiter dictum, de légitimité canonique. Mais il ne se donne pas le ridicule d'écrire, comme Beauceron le théologien, que "la légitimité du NOM n'est que canonique". Je tiens à le dire en son nom, car nous en avons souvent parlé ensemble. Dans une problématique théologique, l'abbé Laguérie n'exclut pas ce que Pascal appelait la vérité contraire qui est, ici, en l'occurrence, non celle de la légalité seulement mais celle des principes du droit. Parler de "légitimité" c'est remonter non pas seulement au droit positif (toujours changeant, même dans cette société de droit divin qu'est l'Eglise), mais aux principes du droit, et en l'espèce au principe imprescriptible de l'indéfectibilité de l’Église promulguant des lois liturgiques. Ce point n'est en rien changeant, il ne relève d'aucun droit "positif", fût-ce le droit canon, puisqu'il est l'une des sources ou, si vous voulez, l'une des raisons de la force de ce droit canon.

Quelle est la différence entre légitimité et légalité ? Ou bien quelle est la différence entre légitimité tout court et légitimité uniquement canonique (c'est-à-dire légalité encore une fois) ? La légalité est toujours discutable, puisqu'elle n'est après tout qu'une application dans le temps et dans l'espace de principes intemporels. Quant à la légitimité, en tant que telle, elle n'est pas discutable, puisque ce sont ces principes eux-mêmes qui s'y expriment.

Mais qu'est-ce qui est indiscutable ? Veut-on dire qu'il est impossible de critiquer la nouvelle liturgie parce qu'elle est légitime ? C'est tout le contraire. C'est dans la mesure où on reconnaît le Nouvel Ordo comme légitime, c'est-à-dire comme une loi de l’Église catholique, que l'on peut le critiquer en tant que fils de l'Eglise, d'une critique valide et qui atteint son but. Tant que nous ne l'avons pas reconnu comme légitime, notre critique tombe à faux. Et nous sommes à côté du sujet. Je signale par exemple que le cardinal Ottaviani, qui a signé le fameux Bref examen critique du NOM, a célébré ce Nouvel Ordo qu'il avait critiqué. Aujourd'hui, Rome accorde le fait objectif qu'il n'est pas nécessaire de célébrer ce rite pour en reconnaître la légitimité. C'est toute la force des statuts de notre Institut du Bon Pasteur que de nous accorder "l'usage exclusif" de la forme extraordinaire. Mais c'est bien parce que nous reconnaissons la légitimité du NOM qu'une telle clause a pu être signée.

Que critiquons nous en effet ? Un simple rite religieux ? Un ensemble de signes et de gestes sacrés ? Un groupe de textes spirituels ? Non,bien sûr. Ce que nous critiquons, c'est la manifestation du dogme catholique de l'eucharistie dans une cérémonie catholique, qui est aujourd'hui la forme la plus courante de la liturgie catholique. Rien moins. Et il faut que nos critiques prennent en compte cette circonstance... qui d'une certaine façon est une circonstance aggravante, et qui, d'un autre point de vue, parce que nous sommes des fils, et dans la mesure où nous sommes des fils nous oblige à couvrir la nudité liturgique de notre mère du Manteau patriarcal.

Le respect du Nouvel Ordo (qui inclut sa célébration correcte par ceux qui la pratiquent) n'est jamais quelque chose de facultatif : voilà ce que nous enseigne d'abord la légitimité de ce rite, qui, en tant que légitime, n'est pas et ne peut pas être un rite "intrinsèquement pervers" comme je l'entendais à Ecône naguère.

Et en même temps, parce qu'il s'agit d'un rite catholique, nous devons marquer avec d'autant plus de force trois points inquiétants : d'abord les multiples formes qu'autorise le nouveau Missel, en particulier à cause de la célébration de l'ensemble de la messe versus Populum et en langue vernaculaire ; ensuite la relativisation ou l'omission encouragée ou permise par les rubriques rénovées de rites et de signes sacrés manifestant le respect de la Présence substantielle du Christ ; et enfin la légèreté doctrinale de certains textes, même des textes dits à chaque messe comme le nouvel Offertoire. Tout cela constitue autant de dangers mortels pour la continuité de l’Église. La pratique "en rupture" de la liturgie nouvelle est toujours condamnable et elle l'est avec la dernière énergie. Benoît XVI insiste pour que la pratique de la liturgie nouvelle se fasse dans la continuité de la forme traditionnelle. Avez-vous remarqué que dans les centres spirituels les plus dynamiques, où la pratique religieuse est la plus élevée, c'est déjà largement le cas ? Le mouvement en ce sens s'accélère d'ailleurs chaque année.

Le Bref Examen critique (qui fut rédigé rappelons le par Mgr Guérard des Lauriers avant d'être soutenu par Mgr Lefebvre) avait pénétré les faiblesses du rite nouveau d'une manière quasi-prophétique. Il nous appartient de porter sereinement cette vieille critique qui n'a pas pris une ride in facie Ecclesiae, en nous souvenant de ce mot de Pascal : "Jamais les saints ne se sont tus".

1 commentaire:

  1. Ce qui ressort surtout du poste de Bosseron, me semble-t-il, c'est que les statuts de l'IBP comme aussi l'instruction "universa eclesia" témoignent d'une belle fidélité romaine à une ligne qui est restée la même depuis vingt-cinq ans. Pas si mal dans un monde qui bouge si vite!
    L'instruction "universa eclesia" en son article 19 tant disputé demande à ceux qui souhaitent adresser des demandes de célébration de messes dans la forme extraordinaire qu'ils se comportent en fils de l'eglise et reconnaissent la légitimité d'un rite promulgué par elle.
    Quant aux statuts de l'IBP, Bosseron nous montre qu'ils sont en tous points conformes à ce que Rome proposait dans le protocole d'accord qu'elle avait adressé à mgr Lefèbvre, lequel ne l'a pas directement rejeté, mais l'a, par sa précipitation à sacrer des évêques avant que le pape ne lui en accorde le droit ou ne lui envoie un prélat pour sa Fraternité, rendu pratiquement inapplicable.

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