Peu de temps pour vous écrire, chers amis ces derniers jours, que j'ai passés dans le sud de la France. Pour moi, la Loire reste une frontière difficile à franchir. Mais j'avais promis depuis longtemps une visite à Ludovic, curé d'une petite paroisse dans le sud de la France. Je dois dire que je suis admiratif du travail qu'il abat, de la manière dont il est de plain pied avec ses paroissiens quels qu'ils soient, importants (ça leur fait quelque chose parfois la rudesse du curé) ou sans grade (ça leur fait quelque chose aussi l'attention du prêtre). Et chacun, quelles que soient ses convictions,lui rend en affection la sollicitude dont il s'est senti l'objet. Occasion de vérifier une nouvelle fois l'universalité du christianisme et j'allais dire le fonctionnement monarchique de cette universalité. Le Christ est roi en son Royaume, et il nous délègue à tous cette royauté : nous sommes un peuple de rois. Et l'Église institue, de la part du Christ, un sacerdoce que l'on nomme ministériel, parce qu'il est un service des fidèles. Mais justement ! Ce service implique une autorité : "Celui qui veut être le premier parmi vous qu'il soit comme celui qui sert". C'est en étant au service des autres que le prêtre exerce la royauté contenue dans son sacerdoce.
Quelle fierté doit être la sienne ! Je pense à Ludovic, qui a tant travaillé en Afrique, trouvant l'argent nécessaire à la reconstruction des missions de brousse qu'on lui a confiées et qui aujourd'hui, vingt ans après, se démène de la même façon auprès de chacun, en exerçant, avec le sourire mais non sans autorité quand il faut, la royauté du Christ, bon pasteur qui appelle chacun par son nom.
La crise de l'Eglise ? C'est avant tout une crise du sacerdoce comme le montre d'ailleurs l'actualité la plus récente. Depuis que l'année du prêtre s'est écoulée, il me semble que les langues se délient et que, de cette crise du sacerdoce, on peut parler plus librement. Il est vrai que les prêtres sont publiquement déconsidérés et discrédités, traités de pédophiles ou de noyeurs d'enfants. Avec ma soutane, j'en ai fait maintes fois l'expérience. Face à la crise, on peut penser que la première réponse est de former des prêtres sous cloche, comme on met les plantes fragiles et avides du soleil, sous serre. Mais attention ! Que le prêtre ainsi préservé initialement, n'oublie jamais la royauté que comporte son sacerdoce, qu'il garde à l'esprit que cette royauté est universelle, qu'elle s'exerce, selon que l'occasion lui en est donnée et selon que la mission lui en est conférée, sur tous ceux qui l'approchent, quelles que soient leurs convictions, leurs parcours, leurs discours, leur demande. "Le Royaume de Dieu s'est approché de nous", sans exclusive, sans monopole. Le rôle du prêtre ? Non pas entretenir une chapelle. Non pas mignoter un public auprès duquel il ira chercher une légitimité de pacotille. Plutôt : aider chacun à reconnaître les modalités différentes à travers lesquelles s'effectue, en lui, qu'il en ait une conscience explicite ou non, cette approche du Royaume de Dieu, qui ne vient pas de l'homme mais de Dieu.
Quoi qu'on en pense, il est vrai que cette fonction est exigeante. Mon ami Boris me met sous les yeux un livre sur l'art contemporain et la théologie chrétienne, où l'on dit à peu près que la foi doit se penser dans les grandes réalisations, dans les aventures de la modernité et de la post modernité. Mais Ludovic, lui, il sait bien que c'est tout le contraire. Ce n'est pas la foi qui chercherait à s'objectiver dans l'aventure humaine. C'est l'aventure humaine, et plus exactement, parce que pour Ludovic il n'y a que des visages, c'est l'aventure de chaque homme et de chaque femme qui doit reconnaître sa proximité du Christ - ou souvent la distance à laquelle il le laisse.
Qu'est-ce qu'un prêtre ? Celui qui transmet les sacrements à travers lesquels s'effectue objectivement pour chacun d'entre nous, cette reconnaissance de la proximité de Dieu. Et puis aussi (et là c'est ce qu'on appelle dans le parler populaire les vrais curés), c'est celui à travers lequel chacun peut reconnaître son identité spirituelle, je veux dire le nom - ou le prénom - par lequel Dieu l'appelle. Ludovic appelle tous ses paroissiens par leur prénom parce qu'il sait qu'à travers lui, c'est Dieu qui appelle et qui a donné à chacun et à chacune une identité unique dans son Royaume.
Quelle fierté doit être la sienne ! Je pense à Ludovic, qui a tant travaillé en Afrique, trouvant l'argent nécessaire à la reconstruction des missions de brousse qu'on lui a confiées et qui aujourd'hui, vingt ans après, se démène de la même façon auprès de chacun, en exerçant, avec le sourire mais non sans autorité quand il faut, la royauté du Christ, bon pasteur qui appelle chacun par son nom.
La crise de l'Eglise ? C'est avant tout une crise du sacerdoce comme le montre d'ailleurs l'actualité la plus récente. Depuis que l'année du prêtre s'est écoulée, il me semble que les langues se délient et que, de cette crise du sacerdoce, on peut parler plus librement. Il est vrai que les prêtres sont publiquement déconsidérés et discrédités, traités de pédophiles ou de noyeurs d'enfants. Avec ma soutane, j'en ai fait maintes fois l'expérience. Face à la crise, on peut penser que la première réponse est de former des prêtres sous cloche, comme on met les plantes fragiles et avides du soleil, sous serre. Mais attention ! Que le prêtre ainsi préservé initialement, n'oublie jamais la royauté que comporte son sacerdoce, qu'il garde à l'esprit que cette royauté est universelle, qu'elle s'exerce, selon que l'occasion lui en est donnée et selon que la mission lui en est conférée, sur tous ceux qui l'approchent, quelles que soient leurs convictions, leurs parcours, leurs discours, leur demande. "Le Royaume de Dieu s'est approché de nous", sans exclusive, sans monopole. Le rôle du prêtre ? Non pas entretenir une chapelle. Non pas mignoter un public auprès duquel il ira chercher une légitimité de pacotille. Plutôt : aider chacun à reconnaître les modalités différentes à travers lesquelles s'effectue, en lui, qu'il en ait une conscience explicite ou non, cette approche du Royaume de Dieu, qui ne vient pas de l'homme mais de Dieu.
Quoi qu'on en pense, il est vrai que cette fonction est exigeante. Mon ami Boris me met sous les yeux un livre sur l'art contemporain et la théologie chrétienne, où l'on dit à peu près que la foi doit se penser dans les grandes réalisations, dans les aventures de la modernité et de la post modernité. Mais Ludovic, lui, il sait bien que c'est tout le contraire. Ce n'est pas la foi qui chercherait à s'objectiver dans l'aventure humaine. C'est l'aventure humaine, et plus exactement, parce que pour Ludovic il n'y a que des visages, c'est l'aventure de chaque homme et de chaque femme qui doit reconnaître sa proximité du Christ - ou souvent la distance à laquelle il le laisse.
Qu'est-ce qu'un prêtre ? Celui qui transmet les sacrements à travers lesquels s'effectue objectivement pour chacun d'entre nous, cette reconnaissance de la proximité de Dieu. Et puis aussi (et là c'est ce qu'on appelle dans le parler populaire les vrais curés), c'est celui à travers lequel chacun peut reconnaître son identité spirituelle, je veux dire le nom - ou le prénom - par lequel Dieu l'appelle. Ludovic appelle tous ses paroissiens par leur prénom parce qu'il sait qu'à travers lui, c'est Dieu qui appelle et qui a donné à chacun et à chacune une identité unique dans son Royaume.
Merci pour ce très beau texte cher M. l'abbé. La qualité première d'un curé étant d'identifier les voies (souvent peu conformistes) du Seigneur au sein des âmes qui l'approchent
RépondreSupprimerAmitiés in Christo
Bruno P
"Il est vrai que les prêtres sont publiquement déconsidérés et discrédités, traités de pédophiles ou de noyeurs d'enfants".
RépondreSupprimerPour cruel qu'il soit, le diagnostic est, hélas, parfaitement exact. A tort ou à raison, nos compatriotes ne font plus confiance aux prêtres à qui ils ne confieraient plus leurs enfants.
Pour en sortir il faut faire comme dans le commerce : changer l'image de marque d'un produit qui ne plait plus.
Il faut des prêtres mariés, hommes ou femmes, plus proches des "vrais gens" et de leurs difficultés, menant le même genre de vie, bref des personnes auxquelles on puisse s'identifier. Pourquoi ne pas les choisir parmi des personnes ayant déja une bonne expérience de la vie, par exemple entre 40 et 50 ans. N'oublions pas que Jésus (qui a exercé le métier de charpentier ou menuisier) a recruté ses apôtres et disciples parmi des gens d'origines variées ayant une expérience professionnelle (patron pécheur, medecin, percepteur, juriste, banquier, matelot etc...) et qui n'étaient pas spécialement des jeunes gens.
C'est le prix à payer pour remonter la pente ; je sais, il est lourd mais c'est la seule voie. Rien de grand ne se fait sans sacrifices, tant pis s'il faut abandonner des principes qui ont pu avoir leur intéret dans le passé mais qui sont sans signification à notre époque et encore moins pour les jeunes de demain.
Je trouve miraculeux que, dans le contexte actuel, l'Eglise de France arrive encore à ordonner 90 personnes tous les ans (celà fait un peu moins d'1 par diocèse). Par comparaison, l'évêque de Londres ordonne au presbytérat 50 hommes ou femmes chaque année.
comme d'habitude, il n'y a que des visages...Donc que les corps soient souillés, les familles ruinées, les régions noyées, les nations bradées , rackettées, privées de leurs vocations(1) ...Le Christ règnera par les prêtres et par les coeurs, mais PAS SOCIALEMENT...
RépondreSupprimerEst ainsi éludée l'unique tâche urgente( sauver les âmes dans des corps -individuels et sociaux - salvateurs au lieu de les laisser migrer et errer et se perdre dans des corps malades et "heureux" -puisque le bonheur est devenu l'unique impératif catégorique de la non eglise et du non état -)
l'âne onyme de plus en plus têtu et récalcitrant...
(1) tout cela par l'unique "révolution", celle qui sais se parer des prestiges d'une grand e multiplicité au moins autant qu'inversement la "non pensée multiple" se laisse appréhender comme autant, de "pensées uniques" par qui ne veut pas voir l'Ennemi à l'oeuvre...et d'autant plus acharné qu'il se sait ultimement vaincu ..Victoire qui ne devrait pas nous dispenser de la lutte..
Si un prêtre m'appelait par pon prénom , je crois que même s'il est âgé et le sachant homme de Dieu , j'aurais moins de respect pour lui ; enfin c'est un point de vue personnel .
RépondreSupprimerMme Hélène .
Combien je suis d'accord avec l'anonyme qui a parlé de la diversité sociologique qui devrait présider au recrutement des prêtres, cela soit dit sans me prononcer sur l'ordination des femmes. Comme Madame Hélène, j'apprécierais assez modérément qu'un prêtre m'appelât a priori par mon prénom. Quant au discrédit dont souffrent les prêtres, d'où vient-il ? Comme bien des jeunes gens, j'ai ressenti un appel du Seigneur. J'ai manqué à l'appel, je ne m'en vante pas, je n'en suis pas fier. Mais quand j'envisageais sérieusement de signifier à l'Église que j'aimerais qu'elle m'appelle au Sacrement de l'Ordre, je me souviens encore avec étonnement de cette réaction d'un de mes oncles, qui me déclara sans ambage :
RépondreSupprimer"C'est un bien bel avenir que tu te prépares là. Au moins, tu auras la sécurité de l'emploi, tu ne manqueras jamais de rien et tu seras un notable."
C'était il y a seulement vingt ans. Mon oncle n'avait peut-être pas senti passer sur cette époque ce qu'il est de bon ton d'appeler dans les milieux tradis "la crise de l'Église". Il ne se trompait certes pas quant à l'employabilité de ce ministre surchargé. Le prêtre ne manque pas de travail, mais comment exercer son beau métier de prêtre ? C'est ici qu'il est déboussolé. Il croit sauver l'Église en s'habillant en civil et faisant de la pastoral, ce qui revient à prêcher l'Évangile à l'intérieur du temple. Il croit se protéger de l'épidémie de la rencontre avec des brebis perdues en ayant la réunionnite au sein du presbytère et non par "l'apostolat sur le zinc" (expression du P. Jean Derobert) ou par la visite aux malades. Par ailleurs, on ne sait quelle mouche a piqué son autorité hiérarchique de chanter en écho aux sirènes médiatiques en battant la coulpe de l'Église pour le comportement dévoyé de quelques rares prêtres perdus de mœurs, et cela en plein discrédit de l'institution. Qu'elle les marie et nous fiche la paix avec l'obsession sexuelle inversée d'un prétendu "célibat pour le Royaume" qui n'est qu'un goût immodéré pour la virginité, qui, non seulement ne convient pas, mais émascule un individu de sexe masculin normalement constitué et qui vit dans le siècle.
Julien WEINZAEPFLEN
Pour être torrentiel, c'est torrentiel !!!
RépondreSupprimerJulien T :"l'obsession sexuelle inversée d'un prétendu "célibat pour le Royaume" qui n'est qu'un goût immodéré pour la virginité"
RépondreSupprimerDifficile de statuer sur le célibat/non célibat des prêtres en tant qu'un simple laïc sans formation théologique (risque effectivement de ne donner qu'une opinion personnelle), à l'Eglise de statuer.
Par contre d'accord sur cet incompréhensible "goût immodéré pour la virginité" ou la chasteté en général. Qu'apporte-t-elle au juste ?
Les vierges et les chastes (célibataires) sont-ils meilleurs que les autres ? Plus charitables ? Plus humains ? Plus généreux ? Moins orgueilleux ? Moins égoïstes ? Plus humbles ? Plus fraternels ? Plus chaleureux ? Plus accueillants ? Plus amicaux ? Plus considérés ? Plus disponibles ? Plus altruistes ? Plus à l'écoute ? ....
Franchement, qui pourrait encore y croire ?
A mon sens, la virginité et la chasteté (brr, passé un certain âge, ce mot glace le sang!) des célibataires seraient plutôt des choix de vie personnels n'ayant strictement rien à voir avec la vertu chrétienne (amour de Dieu et du prochain), moralement neutres, ni bien ni mal.
La sexualité étant une réalité de la vie humaine, l'occulter (surtout en état laïc) équivaudrait à ne pas développer pleinement notre essence de l'être humain.