Cela faisait longtemps que je souhaitais un cours d'hébreu au Centre Saint Paul. Et puis cette année, le frère Thierry qui a des antennes me propose un nom. Je prends contact avec Jean Marie Elie, un personnage formidable, qui littéralement vit du Christ... et qui n'oublie pas qu'il n'y a de véritable vie spirituelle que dans la mesure où l'intellect fournit la matière de notre transformation quotidienne. Le Curé d'Ars, qui a tellement bûché ses auteurs et qui était devenu spécialiste des Pères de l'Eglise en savait quelque chose. Si l'on ne forme pas la tête, on ne restaure pas le coeur, car toute vraie croissance (comme l'exprime la parabole du Grain de sénevé) vient de l'intérieur. Le coeur a ses raisons que la raison ignore dit Pascal... Mais les raisons du coeurs sont souvent plus raisonnables et en tout cas plus constructives que les raisons de la raison. Gare à celui qui les méprise. Gare à celui qui les oublie, qui veut se faire "un coeur nouveau" sans chercher les "raisons nouvelles" qu'il apporte. Dans ce monde matérialisé, il nous faut retrouver les raisons de la méditation, les raisons de l'oraison. Petit détail du vocabulaire latin : Oratio signifie à la fois "discours" et "prière" dans le latin chrétien. On emploie uniquement Prex chez les païens et jamais Oratio. C'est que la prière chrétienne n'est pas seulement une "supplication" (prex), elle est cela mais elle est plus que cela : raison transcendante, parole reçue, parole donnée, germination, transformation intérieure.
En quoi cela a-t-il rapport au Cours d'hébreu ?
Je pense que la foi chrétienne, pour affermir en chacun de nous cette oratio dont la liturgie et le Culte public de l'Eglise donnent l'exemple, nous offre plusieurs langages, tous différents, mais en quelque sorte canonisés par l'histoire.
Il y a le langage liturgique, qu'il faut apprendre, mais qui est comme la langue maternelle de l'Eglise maîtresse des sacrements. Il y a le langage spirituel, on peut même dire qu'il existe plusieurs langages spirituels différents et qui ont chacun leur cohérence : n'essayez pas de comprendre le néantisme de la Montée au Carmel de saint Jean de la Croix, en dehors de la tradition carme, vous en feriez un soufi... Il y a le langage de la théologie spéculative, issu des grands conciles christologiques et marqué par des siècles de thomisme plus ou moins strict... Il y a le langage de la théologie biblique. Attention ! Ce n'est pas le langage des exégètes sur lequel on autrait tartiné quelques abstractions théologiques, non ! Le langage de la théologie biblique est celui des apôtres, saint Paul, saint Jean, saint Pierre. C'est ce langage de la théologie biblique qui doit nous aider à lire l'Ancien Testament comme les apôtres l'ont lu, sous l'impulsion du Saint Esprit. Si ensuite, on veut s'amuser à faire un peu d'exégèse structurale, pourquoi pas ? Mais sans être dupe du résultat, sans prendre le medium pour le message. J'ai été impressionné de la puissance que prend la parole des apôtres - Paul en particulier - lorsque on la restitue à son contexte hébraïque. Loin de s'éloigner de la théologie latine, on la rejoint par d'autres voies...
Il y a un autre langage, qui ne mène au Christ que par accident : le langage philosophique. Combien de rationalistes de la foi, qui réduisent la parole de Dieu à la philosophie.
Le drame que vit l'Eglise vient de la trop grande richesse des langages sur lesquelles elle s'est construite. J'en oubliai un, d'ailleurs, dont nous parlerons mardi prochain, le langage iconographique, qui lui aussi a ses constantes à travers l'histoire, comme nous le montrera Tatiana Dupin.
Pourquoi drame ? Parce que certains, déconcertés par tant de richesses, s'en détournent immédiatement au profit de purs ressentis. D'autres ne veulent plus voir la convergence des langues, qui est un grand argument en faveur de l'Evangile : hébreu, grec, latin, tout converge. Mais attention à ne pas tout mélanger pour autant. L'un des risques majeurs aujourd'hui chez les Pasteurs en herbe, c'est le mélange des genres, dans une teinture superficielle qui confond l'état d'âme et la réalité spirituelle.
La première manière de respecter l'Esprit saint, de ne pas éteindre son feu, c'est de respecter les différentes langues dans lesquelles il s'exprime, en travaillant chaque vecteur de signification dans le registre qu'il offre à notre méditation. Exemple ? Ne pas lire les Pères avec la grille du thomisme, mais pour eux mêmes. Ne pas confondre liturgie et catéchisme, iconographie et théologie etc. Sans un minimum de travail au sein d'un mode d'expression donné, il n'est pas possible d'accéder aux raisons du coeur, dans leur pureté native... Celui qui mélange les différentes raisons du coeurs, les différents vecteurs de la méditation me fait penser à ce jeune homme inexpérimenté (j'en ai croisé un récemment) qui parle à sa copine (en l'occurrence à sa femme) de la même façon qu'il s'exprime avec son meilleur pote. Les raisons du coeur exige des délicatesses auxquelles la Raison - parce qu'elle fonctionne comme les ordinateurs : en base 2 - ne nous a pas forcément habitué.
Ce qui m'a frappé chez Jean Marie Elie ? Il connaît parfaitement un vecteur d'expression de la parole, en l'occurrence la langue hébraïque. Il ne fait jamais de théologie spéculative, mais rejoint par et dans la langue hébraïque la théologie la plus spéculative ou la foi chrétienne la plus exigeante. Miraculeuse co-incidence des efforts méditatifs, qui ne peut manifester sa fécondité que dans une grande rigueur d'application au travail, sans jamais confondre les genres, sans utiliser les raccourcis que d'autres disciplines à travers lesquelles s'exprime aussi la Parole pourraient nous fournir.
Les raisons du coeur ? On veut oublier le travail, l'application, la rigueur qu'elles exigent...
En quoi cela a-t-il rapport au Cours d'hébreu ?
Je pense que la foi chrétienne, pour affermir en chacun de nous cette oratio dont la liturgie et le Culte public de l'Eglise donnent l'exemple, nous offre plusieurs langages, tous différents, mais en quelque sorte canonisés par l'histoire.
Il y a le langage liturgique, qu'il faut apprendre, mais qui est comme la langue maternelle de l'Eglise maîtresse des sacrements. Il y a le langage spirituel, on peut même dire qu'il existe plusieurs langages spirituels différents et qui ont chacun leur cohérence : n'essayez pas de comprendre le néantisme de la Montée au Carmel de saint Jean de la Croix, en dehors de la tradition carme, vous en feriez un soufi... Il y a le langage de la théologie spéculative, issu des grands conciles christologiques et marqué par des siècles de thomisme plus ou moins strict... Il y a le langage de la théologie biblique. Attention ! Ce n'est pas le langage des exégètes sur lequel on autrait tartiné quelques abstractions théologiques, non ! Le langage de la théologie biblique est celui des apôtres, saint Paul, saint Jean, saint Pierre. C'est ce langage de la théologie biblique qui doit nous aider à lire l'Ancien Testament comme les apôtres l'ont lu, sous l'impulsion du Saint Esprit. Si ensuite, on veut s'amuser à faire un peu d'exégèse structurale, pourquoi pas ? Mais sans être dupe du résultat, sans prendre le medium pour le message. J'ai été impressionné de la puissance que prend la parole des apôtres - Paul en particulier - lorsque on la restitue à son contexte hébraïque. Loin de s'éloigner de la théologie latine, on la rejoint par d'autres voies...
Il y a un autre langage, qui ne mène au Christ que par accident : le langage philosophique. Combien de rationalistes de la foi, qui réduisent la parole de Dieu à la philosophie.
Le drame que vit l'Eglise vient de la trop grande richesse des langages sur lesquelles elle s'est construite. J'en oubliai un, d'ailleurs, dont nous parlerons mardi prochain, le langage iconographique, qui lui aussi a ses constantes à travers l'histoire, comme nous le montrera Tatiana Dupin.
Pourquoi drame ? Parce que certains, déconcertés par tant de richesses, s'en détournent immédiatement au profit de purs ressentis. D'autres ne veulent plus voir la convergence des langues, qui est un grand argument en faveur de l'Evangile : hébreu, grec, latin, tout converge. Mais attention à ne pas tout mélanger pour autant. L'un des risques majeurs aujourd'hui chez les Pasteurs en herbe, c'est le mélange des genres, dans une teinture superficielle qui confond l'état d'âme et la réalité spirituelle.
La première manière de respecter l'Esprit saint, de ne pas éteindre son feu, c'est de respecter les différentes langues dans lesquelles il s'exprime, en travaillant chaque vecteur de signification dans le registre qu'il offre à notre méditation. Exemple ? Ne pas lire les Pères avec la grille du thomisme, mais pour eux mêmes. Ne pas confondre liturgie et catéchisme, iconographie et théologie etc. Sans un minimum de travail au sein d'un mode d'expression donné, il n'est pas possible d'accéder aux raisons du coeur, dans leur pureté native... Celui qui mélange les différentes raisons du coeurs, les différents vecteurs de la méditation me fait penser à ce jeune homme inexpérimenté (j'en ai croisé un récemment) qui parle à sa copine (en l'occurrence à sa femme) de la même façon qu'il s'exprime avec son meilleur pote. Les raisons du coeur exige des délicatesses auxquelles la Raison - parce qu'elle fonctionne comme les ordinateurs : en base 2 - ne nous a pas forcément habitué.
Ce qui m'a frappé chez Jean Marie Elie ? Il connaît parfaitement un vecteur d'expression de la parole, en l'occurrence la langue hébraïque. Il ne fait jamais de théologie spéculative, mais rejoint par et dans la langue hébraïque la théologie la plus spéculative ou la foi chrétienne la plus exigeante. Miraculeuse co-incidence des efforts méditatifs, qui ne peut manifester sa fécondité que dans une grande rigueur d'application au travail, sans jamais confondre les genres, sans utiliser les raccourcis que d'autres disciplines à travers lesquelles s'exprime aussi la Parole pourraient nous fournir.
Les raisons du coeur ? On veut oublier le travail, l'application, la rigueur qu'elles exigent...
Vous avez vraiment le don spirituel du discernement et de la clairvoyance (la Sagesse?).
RépondreSupprimerMerci, c'est très intéressant.
Où et quand ces cours d'hébreu?
Merci aussi pour votre réponse.
Pourrait-on savoir où et quand ces leçons seront données et quel est le tarif envisagé ?
RépondreSupprimerVotre idée est trèzs bonne mais hélas ! elle ne concertne - comme toujours - que le public parisien.
RépondreSupprimerJ'ai toujours souhaité avoir une connaissance au moins sommaire de l'hébreu mais comment faire au fin fond de nos campagnes.
Je fais un rève : pourrait-on envisager des cours sur internet avec éventuellement une possibilité de poser des questions par téléphone ou via Skype ?
J'ai essayé d'apprendre l'alphabet tout seul mais c'est vraiment très difficile si l'on ne dispose pas d'aide à l'apprentissage.
En Corse il y a un haut fonctionnaire retraité des finances, de religion juive, qui donne des cours d'hébreu. Ses élèves sont, pour la plupart, des religieuses catholiques fort motivées. Un quotidien parisien du soir lui a consacré un article il y a quelques années.
RépondreSupprimerA Paris, il y a bien des cours à l'institut catholique mais le niveau est très élevé ; ce n'est pas fait pour de simples fidèles qui n'ont pas toujours un niveau BAC + 8 et qui souhaitent, tout simplement, progresser à leur rythme dans l'étude de la Bible.