jeudi 4 novembre 2010

Port-Royal : anges ou pestes ?

Je suis au bord de la Mer et dans Port Royal jusqu'au cou, préparant mon prochain petit ouvrage : la foi en quête d'un point fixe. et à quatre siècles de distance, on est repris par ces passions extrêmes, ces femmes héroïques, qui ont voulu faire comme si la vie n'était à vivre que dans la simplicité absolue de Dieu. Quitte à décider de laisser le monde à ses combines, à ses approximations de langage (ah ! le formulaire...), à ses vols cachés sous toutes sortes de noms techniques ou vertueux, à ses mensonges donc.

J'avais jusqu'ici un peu tendance à penser comme Hardouin de Péréfixe, l'archevêque de Paris qui a inventé ce cercle carré qu'il appelle la foi humaine que les religieuses de Port Royal étaient de saintes pestes : des hérôïnes emmerdantes, emmerdeuses, emmerderesses... Et Montherlant ne m'a pas aidé avec son Port Royal guindé et très "peplum" finalement. J'aimais l'intuition de Saint-Cyran (l'un des hommes d'Eglise les plus intelligents que je connaisse), je recherchais le génie de Pascal, j'étais parfois subjugué par une formule bien nette de Nicole sur l'amour de soi... Mais les femmes...

Eh bien ! Cela fait deux ou trois jours que j'entends l'écho des formules de la Mère Angélique, de sa nièce Angélique de Saint Jean (même si celle-là est parfois un peu trop "décisive" comme disait Nicole) et que j'entends bruisser les robes des religieuses dans leurs longs corridors : je suis conquis.

Conquis par la déclaration d'ignorance "conformément à notre profession et à notre sexe" qu'elles exigèrent de pouvoir mettre en en-tête du fameux Formulaire, réduisant ainsi à rien leur propre signature au moment même où elles signaient. Les Arnauld n'étaient pas pour rien des juristes depuis trois générations. Ca déteint toujours ces choses là ! Et la manière dont elles ont envoyé paître leur archevêque, "fort bon homme pourtant, dit Racine, dans son Histoire de Port-Royal, mais plus homme de cour qu'homme de foi". Dans leur silence, il devait y avoir ce mépris palpable, qui a exaspéré le Pontife. Il n'a pas ménagé Angélique : "Vous n'êtes qu'une pimbêche". Et sortant de chez les BS, il répétait, n'en revenant pas : "Elles sont pures comme des anges mais orgueilleuses comme des démons"...

Le pauvre ! Venant tout juste d'arriver de l'évêché de Rodez, il n'était pas préparé à affronter la fine fleur des Parigottes. Ça a dû lui faire drôle. Pas un mot plus haut que l'autre. Une fermeté inoxydable, avec un sourire, une charité toujours en éveil : voilà comment je m'imagine les soeurs de Port Royal de Paris en 1664. "Mgr, voulez-vous ceci" "Êtes vous à l'aise?" et dès que lui se met à leur parler de ce pour quoi il est venu, sa trouvaille théologique sur "la foi humaine", qui, à son avis pouvait permettre de signer en sécurité tous les Formulaires du monde, de leur côté à elles, il dut y avoir un petit ton net, décidé : "Ce n'est pas possible". Et en guise d'explication : "Vous le savez bien Monseigneur" Enfin, en guise d'au-revoir : "Nous prierons pour vous à l'Office, Mgr, et devant le Saint Sacrement exposé en permanence dans notre Couvent".

Ces âmes formées par Saint Cyran était indestructibles. Pourquoi ? parce que le Directeur d'âmes tant vanté plus tard par Sainte-Beuve, avait une méthode bien à lui : celle du coeur. On peut dire que, sous les auspices de Saint-Cyran (je ne parle pas du moralisme de Quesnel, beaucoup plus tardif et que je n'aime pas), on peut dire que tout le christianisme se réduisait au coeur, à la hardiesse, à l'ambition spirituelle, au désir de Dieu. Aujourd'hui cette vigueur paraît facultative. Les confesseurs se focalisent sur le sexe et ils oublient la lâcheté. mais la peur est l'une des grandes passions humaines, plus grande sans doute que la passion amoureuse, qui lui cède presque chaque fois. Il importe de contrôler la peur et ses mille manières de prendre le pouvoir dans nos coeurs, en légitimant toutes les saloperies. Les cathos crèvent d'avoir peur ! Jean Paul II avait bien raison de s'écrier, aussitôt au Balcon : 'N'ayez pas peur'. Ce n'est pas l'orgueil qu'a vu Mgr de Péréfixe, c'est la discipline intense d'âmes féminines qui oublient d'avoir peur parce qu'elles ont ce que leur Directeur appelle "le coeur nouveau".

N'imaginons pas un homme dur ! Saint-Cyran devait être infiniment attentif à chacune des vocations de chaque âme qui lui était confié : l'amour spécial de Dieu pour nous n'est-il pas la règle de notre amour pour lui ? Mais comme disait Mère Angélique de son Directeur : "On voulait toujours plus qu'il voulait" La direction de Saint-Cyran concentre l'amour dans chaque âme et le déchaîne. C'est cela qui a fait la résistance opiniâtre et simple des soeurs de Port Royal, sorte d'Antigones de Dieu, égarées aux Portes d'une modernité jouisseuse.

3 commentaires:

  1. On voudrait vous voir entre une batte de base ball et un cutter!
    Malgré vos prétentions à l'universel, vous parlez toujours pour une petite frange protégée qui "aurait peur"...d'être catholique (et pas pour ceux qui ont bien raison d 'avoir la trouille, elle leur permet de vivre toujours en alerté en face aux dangers historiques multipliés, ce que le pape visiblement ne connaît pas), cette peur instillée depuis un demi siècle par tous les courtiseurs du monde ( du concialibule à nos jours, car je n'entends pas, chez le pape, de Profession radicale d e Foi, c'est toujours la "foi humaine" dans les droits de l'homme et et la dignité humaine, ces droits dont nos frères orientaux sont les victimes, et à qui l'Eglise même vole leur martyre en ne proclamant plus le Souverain EMpire de Dieu sut Tout)..
    Port Royal c'était peut-être ce que vous dites, mais pourquoi pas dire aujourd'hui sans détour ce qu'est la Foi?
    A mes amis-ennemis de Résistance Républicaine, j'écrivais
    " le Seul Qui Resiste" , c'est Dieu, car non soumis au temps, "Je SUIS CELUI QUI SUIS" est le Seul Roc, la seule Vie amoureuse,(trinitaire) la Seule Vérité condescednante(Jésus Christ révélé révélant) la Seule Voie( l'union à Dieu en l'Eglise par la vie sacramentelle intense et l'oraison "sans cesse)
    La seule "Re Publique", c 'est le Bien Commun, et le premier bien commun universel et absolu, c'est encore le Dieu Vivant,Viatique et Vrai,notre origine et notre fin " comme il était au commencement, etc etc ..." ...
    Qu'ils se cachent sous des oripeaux sanglants' la république ! la résistance !) c'est leur liberté.
    que vous alliez chercher des cautions ou des exemples au 17ème siècle, c 'est votre liberté .
    La mienne est de dire (et tenter de vivre!) "Dieu Seul suffit" "Dieu Seul Se suffit" "Dieu Seul Se suffit à Soi et en Soi, pour Soi et par Soi, selon SOi-Même " ...et pourtant il a surabondé jusqu'à nous faire "êtres" du "néant"!
    Faites de cela ce que vous voulez, faites des partis catholiques ou engagez vous chez les résistants(républicains ou non ) autoproclamés en tous les cas, qui font des moulins à vent avec des sabres émoussés (comme d'autres agitent des goupillons asséchés et des encensoirs à la merde séchée)devant le Goulag Mental de plus en plus renforcé que la Nomenklature mondialiste fait régner sur l'Afrance, il reste que le Très Haut et est le Seul Très Haut, qu'il est dans la félicité et la Gloire (avec les anges et nos déjà saints)et cela nous suffit ..presque
    Quant aux très bas, à toutes les victimes innombrables, pas seulement des avortoirs (seul secteur du goulag qui vaille manif!), mais aussi des mouroirs, des écoles, des familles décomposées, des drogues (idéologiques, médicales ou autres), de l'insécurisation programmée, des invasions, du viol, de l'inceste, du racket, de l'injustice organisée du chômage de masse, etc etc ... ces victimes crèvent toutes seules sans jamais un soutien des "chefs de la résistance" qui visiblement ne voient même pas qu'ils ont des troupes à foison... Mais ils les laissent se faire exterminer , dans le visible des blessures et morts historiques ou l'invisile des navrements et morts spirituelles...

    Y a-t-il là un "point "fixe" de la Foi et une aire immense pour l'Espérance et la Charité, je le crois ..

    Mais le Soljenitsyne de ce goulag mental n'est pas encore né ...O pourra toujours truffer l'Académie de zombies à côté de la plaque et décerner prix et récompenses litterreuses, la tâche artitique, poétique, littéraire, civilisationelle et théologale du salut de notre peuple (voir les dimensions de"l'ARCHIPEL") n'est pas assumée...

    Dieu nous pardonne et nous garde
    "Jésus Marie je vous aime, sauvez les âmes"
    A.S. Absent de la Scène

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  2. Cher AS : mélanger Dieu et la chose publique, personne n'avait osé à ce jour ! Quel galimatias dans votre tête, (et dans ce commentaire) malheureusement... Vous voudriez un Dieu qui règne sur le monde avec un casque à pointe et des anges gardes-chiourmes... Vous voyez en quoi ça n'est pas possible ou faut-il revenir aux bases de la théologie et de cette liberté de l'homme que vous semblez tant regretter ?...

    Que le pape ne comprenne pas votre terreur (auto) destructrice, ce n'est pas étonnant et il n'est pas le seul...

    Ce que dit finalement l'abbé au sujet des sœurs de Port-Royal, c'est que ces dames avaient des... attributs virils en fait... Ceux qui manquent à tant de nos contemporains qui vocifèrent contre le monde qui les entoure sans être capable de prendre leur courage à deux mains pour passer à la véritable action et changer le cours des choses... Mais surtout, qui sont incapables de se changer eux-mêmes pour commencer et ça, Port Royal l'avait fait et plutôt bien fait !

    En résumé, les religieuses de Port Royal voulaient amener leur foi au niveau divin : trop grand... et vous vous voulez ramener l'Eglise au vôtre : trop petit...

    PS : ne demandez pas la foi à l'abbé de T. c'est à Dieu qu'il faut s'adresser en la matière et je assure que je prie pour qu'Il vous écoute.

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  3. "Hardouin de Péréfixe, l'archevêque de Paris qui a inventé ce cercle carré qu'il appelle la foi humaine"

    L'archevêque Péréfixe n'a nullement inventé la foi humaine, que tous les théologiens connaissaient, mais a introduit le concept nouveau, et effectivement problématique, de "foi ecclésiastique" (sur les faits dogmatiques), comme intermédiaire entre la foi humaine et la foi divine. Vous devriez relire les Dimensions de la foi du P. Guérard.

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