"Qu'y a-t-il à désirer en terre et au Ciel davantage, que d'être assis à la table de Dieu, d'être assistant à son autel sublime et de manger sur cet autel une même viande [aliment] avec lui, d'un même pain, d'un même vin. En un mot d'être fait participant de tout le don que Jésus-Christ a fait à Dieu et qu'il a mis sur son autel sublime ? En quelle séparation du monde, en quelle élévation d'esprit au dessus de soi-même devrait-on vivre, se voyant ainsi emporté dans le sein de Dieu, dans ce louvre auguste, dans ce temple divin, pour y manger l'hostie de Dieu tout entière avec lui ?"
Jean-Jacques Olier, L'esprit des cérémonies de la messe, éd. C Barthe p. 300
Jean-Jacques Olier (1608-1657), curé de la paroisse parisienne de Saint-Sulpice, a une éloquence qui confine à la poésie. Il décrit ici la manière dont, à la messe, nous sommes, chacun, les commensaux du Christ. Le Christ-hostie est offert à Dieu son Père pour la rémission des péchés... Le Christ-hostie est offert pour les hommes qui le consomment. Il n'en faut pas plus à Olier pour conclure que "nous sommes assis à la table de Dieu".
Il y a une double offrande dans le sacrifice du Christ : l'offrande qu'il fait à son Père, par amour pour son Père ; cette première offrande se suffit parfaitement à elle-même. Elle décrit quelque chose de la Vie cachée en Dieu avant les siècles. Elle est ce que M. Olier appelle "le sacrifice du Ciel", le sacrifice éternel. L'Amour éternl du Père et du Fils. Mais ce sacrifice éternel est aussi spécialement offert à notre intention. En quelque sorte le Verbe de Dieu s'offre à son Père dans l’Éternité incandescente de son Amour ; mais il s'offre aussi à l'humanité, il souffre pour chaque homme il est ainsi lui-même devenu un homme. Son sacrifice est ainsi pour Dieu et pour les hommes.
"Être fait participant de tout le don que Jésus-Christ a fait à Dieu". Dieu et l'homme, dans ce paroxysme qu'est la Passion et la Croix du Seigneur, constituent pour le Christ une unique intention d'amour et cette intention d'amour, cet élan efficace infini se communique à l'espace et au temps, à travers la forme sacramentelle du pain et du vin. "Chaque fois que la commémoration de cette victime d'amour est offerte, c'est l’œuvre de notre rédemption qui s'accomplit" dit la secrète du 9ème dimanche après la Pentecôte.
Nous sommes portés par cette intention d'amour, transportés et transformés tout à la fois. Nous sommes "dans le sein de Dieu", "ce Louvre auguste", ce château qui se fait notre demeure. Nous y recevons la victime d'amour avec Dieu ; ce sacrifice divin nous est offert en quelque sorte comme d'abord il est offert à Dieu.
Oui, c'est la spiritualité d'Elisabeth de la Trinité qui n'aspire qu'à disparaître, se dissoudre dans le brasier d'amour.
RépondreSupprimerIl y a des fusées comme cela, il y a des désirs infinis. C'est l'aspiration du coeur. C'est l'amour. Mais comment penser que les créatures, les personnes disparaîtront ? elles ne disparaîtront pas, ni leur personnalité, ni leurs talents si divers, ni les merveilles que Dieu à créées. Lui ne le veut pas. Il n'est pas un feu dévorateur mais révélateur. Le flash de la Résurrection sur le Saint-Suaire a brulé le tissu mais révélé le Christ. Le grain de blé meurt mais la plante vit beaucoup plus sûrement que le grain, gardant ses caractéristiques, sa nature et...son code génétique.
C'est pour chanter la gloire de Dieu de toutes les façons.
A chaque Messe se renouvelle l'acte d'amour, ce don, cet abandon, "cet élan efficace infini (qui) se communique à l'espace et au temps, à travers la forme sacramentelle du pain et du vin. "Chaque fois que la commémoration de cette victime d'amour est offerte, c'est l'oeuvre de notre rédemption qui s'accomplit".
Ce n'est pas "désirer d'avantage que d'être assis à cette table" que d'envisager la Vie telle qu'elle sera car la Vie sera, mais c'est l'accompagner d'un chant et de l'offrande de tous nos dons.
Dieu a choisi une humble crêche comme "Louvre auguste", ce n'est pas pour nier notre humanité ou la faire disparaître comme ne valant rien. Au contraire, c'est pour y célébrer les Noces en son sein parmi nous.
La Jérusalem céleste nous transportera de joie car nous nous y sentirons étrangement chez nous.
Cher anonyme,
RépondreSupprimerVous employez une expression qui fait écho en moi: l'amour est un Révélateur. Vous le prouvez par l'exemple du saint suaire. Mais c'est vrai aussi sur le plan humain: quand vous aimez quelqu'un, vous ne faites pas apparaître en lui je ne sais quelle qualité qu'il aurait reçue de vous, vous les lui révélez en l'aimant. Et quand quelqu'un vous aime, quand vous recevez de l'amour de quelqu'un, il en va de même. Je crois que notre grande difficulté métaphysique est de nous laisser aimer par Dieu, et c'est bien naturel. Nous ne nous aimons pas, donc nous faisons de la résistance contre l'Amour de Dieu. Mais si nous nous laissions mieux aimer par Dieu, Il nous révélerait davantage à nous-même. Il ferait de nous, rien qu'en nous aimant, de meilleurs chrétiens.